a) Emploi subst., gén. au plur. ou au sing. collectif, le plus souvent en emploi abs. (Membre d'une) nation qui est objet et/ou agent d'hostilité, d'attaque armée, d'asservissement matériel et moral vis-à-vis (d'un membre) d'une autre nation (généralement pour des motifs de domination impérialiste et de profit). Ennemi héréditaire; haïr, rejeter, l'ennemi. Les Européens tuent leurs ennemis et les enterrent. Les sauvages tuent leurs ennemis et les mangent (Verne, Enf. cap. Grant,t. 3, 1868, p. 59).Le mieux encore est de frapper sur l'ennemi. Celui qu'on tue ne vous tuera pas (Renan, Drames philos., Prêtre Némi, 1885, III, 3, p. 580).C'est la victoire de la France! L'ennemi allemand vient de capituler devant les armées alliées (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 497):11. Je t'écris un mot, mon amie, afin que tu ne sois pas inquiète. L'ennemi a perdu la bataille, 40 pièces de canon, 10 drapeaux, 12 000 prisonniers; il a horriblement souffert. J'ai perdu du monde, 1 600 tués, 3 à 4 000 blessés.
Napoléon, Ier, Lettres à Joséphine,1807, p. 131.
SYNT. a) Ennemi(s) + adj. : ennemi(s) extérieurs, vaincu(s). b) Subst. + prép. + ennemi(s) : défense, lutte, résistance contre l'ennemi, les ennemis; approche, entreprises, marche, nombre, offensive, poursuite, pression, résistance, retraite de l'ennemi, des ennemis. c) Ennemi + verbe : l'ennemi approche, occupe (un pays, une ville); être entouré d'ennemis. d) Verbe + ennemi(s) : arrêter, attaquer, battre, charger, combattre, contenir, empêcher (de), fuir, poursuivre, rejeter l'ennemi, les ennemis. e) Verbe ou loc. verbale + prép. + ennemi : être face à l'ennemi, être tué à l'ennemi; se livrer/marcher/passer à l'ennemi (au fig. « trahir une cause quelconque »); demeurer/être/livrer/rester/tomber aux mains de l'ennemi; être aux prises/en intelligence avec l'ennemi; se défendre/lutter contre l'ennemi; être en présence de/sous le feu de l'ennemi; travailler pour l'ennemi.
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Expr. C'est toujours autant/cela de pris sur l'ennemi. [À propos d'une chose que l'on soustrait à la mainmise de l'ennemi, ou au fig., d'une pers., d'une entité quelconque, considérée comme adversaire] :
12. L'étranger envahit la France,
Et je maudis tous ses succès.
Mais, bien que la douleur honore,
Que servira d'avoir gémi?
Puisqu'ici nous rions encore,
Autant de pris sur l'ennemi
! (...)
Buvons gaîment, buvons encore :
Autant de pris sur l'ennemi!
Béranger, Chansons,t. 1, Ma dernière chanson peut-être, 1829, pp. 100-101.
Au fig. (avec une var. adj.). Si les enfants ont l'âme bien faite, la tendresse qu'on leur montre ne leur nuira jamais. Elle les soutiendra plus tard, dans les heures mauvaises. C'est toujours cela de pris sur l'existence ennemie (L. Daudet, A. Daudet,1898, p. 191). b) Emploi adj. Qui est constitué de membres d'une nation objet ou agent d'hostilité pour une autre nation, qui appartient ou se rapporte à ceux-ci. L'artillerie ennemie, les lignes ennemies. Une violente attaque ennemie dans la région de Vaux qui échoua sous nos feux (Bordeaux, Fort de Vaux,1916, p. 287).Que seulement, sur un seul point des lignes, les troupes ennemies fraternisent, et la contagion gagnera aussitôt comme une traînée de poudre! (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 682).Dans les métros et les tramways on lisait : « Taisez-vous, méfiez-vous, les oreilles ennemies vous écoutent » (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 31).SYNT. Armée, avance, bataillons, batteries, canon, cavalerie, détachements, front, mitrailleuses, nations, offensive, pays, peuples, positions, races, rangs, terre, territoire ennemi(e) (s).
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P. métaph. Sous chaque mot qu'il [Gide] a écrit se poursuit un travail de sape contre la cité ennemie : celle où la nature est combattue, où l'assouvissement des passions s'appelle le mal (Mauriac, Mém. int.,1959, p. 184):13. L'île, comme une place forte, lance une sortie à chaque marée basse : elle récupère ses douves, elle pille le camp ennemi...
Queffélec, Un Recteur de l'île de Sein,1944, p. 113.