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SOMBRER1, verbe trans.

SOMBRER1, verbe trans.
[Notamment en parlant de la voix, d'un timbre, d'une note de mus.] Rendre sourd, grave ou voilé. Synon. assourdir, voiler1.Les sons (...) des basses tailles et les sons (...) des ténors présentent un phénomène digne d'attention. Si l'on n'y prend garde, il devient très difficile de les faire sortir en timbre clair: le larynx tend toujours à les sombrer (Garcia,Art chant, 1840, p. 12).
Empl. abs. Dans la déclamation à la Comédie Française, nos grands artistes se gardent bien de sombrer sur cette nasale [on de long] (Arger,Init. art chant, 1924, p. 115).
REM. 1.
Sombrer, subst. masc.Fait de rendre un son sourd, grave ou voilé. Les conditions d'où résulte le changement des timbres s'accomplissent dans le sombrer avec plus de force (La Madelaine,Chant, 1852, p. 270).
2.
Sombré, subst. masc.[À propos d'une voix rendue sourde, grave ou voilée] Qualité de l'émission d'une pareille voix. L'a clair et bien rond sert de base pour aller de la pleine clarté de l'a de « jatte » au sombré que réclame l'â de « pâte » (Wicart,Orateur, t. 2, 1936, p. 311).
Prononc. et Orth.: [sɔ ̃bʀe], (il) sombre [sɔ ̃:bʀ ̥]. Homon. et homogr. sombrer2 et 3. Étymol. et Hist. 1840 sombrer, sombré (Garcia, loc. cit.). Dér. de sombre*; suff. *, dés. -er. Cf. en 1611 sombrer « rendre sombre » Cotgr. et en 1660 Oudin Fr.-Esp.

SOMBRER2, verbe intrans.

SOMBRER2, verbe intrans.
A. −
1. [En parlant d'un bateau] Être englouti dans l'eau. Synon. s'abîmer, couler.Sombrer corps et biens. La chance de Robinson Crusoë le servirait-elle, du moins échouerait-il sur une côte hospitalière, et le navire sombrerait-il assez près du rivage pour qu'il pût s'approvisionner avant la dispersion de l'épave? (Adam,Enf. Aust., 1902, p. 200).À divers signes, les marins comprenaient que l'Étoile-des-mers n'allait pas tarder à sombrer; le navire était plus lourd, il avait perdu sa rigidité (Peisson,Parti Liverpool, 1932, p. 241).
Rare, empl. trans. à valeur factitive. Le capitaine répondit, en jurant, que la mer refuserait de sombrer une si jolie goëlette (Sand,Indiana, 1832, p. 261).
En partic. [En parlant d'un voilier] La mort est d'une petitesse comique. On ne devrait finir que par explosion! ou couler à pic en plein fond sur un cinq-mâts qui sombrerait d'aplomb avec toutes ses voiles! (Valéry,Corresp.[avec Gide], 1891, p. 119).Un coup de vent accompagné d'une averse de neige survint avec la force d'un ouragan. Il ne dura que quelques minutes. Le beau temps revenait, mais la frégate avait disparu. Elle avait sombré sous voiles avec tout l'équipage (Maurain,Météor., 1950, p. 101).
2. P. anal.
a) [En parlant d'un corps, d'une chose qui s'enfonce dans l'eau] :
1. Je les ai laissés arriver [des types] jusqu'au milieu du bouillon, et puis, quand j'ai eu leur avant sur ma ligne de mire: Ah! dis donc!... T'aurais dit des grosses loutres qui se débattaient en saignant dans les remous... Pour l'interrompre, pour échapper à la vision de ces corps noirs sombrant dans cette eau rouge, je demandai: − Et chez nous, y en a-t-il eu beaucoup d'esquintés?... Ben, la compagnie de de Scève a trinqué: huit tués, une trentaine de blessés... Vercel,Cap. Conan, 1934, p. 245.
b) [En parlant d'un corps, d'une chose qui semble disparaître, s'anéantir] Sombrer dans la nuit, les ténèbres. La diligence sombre dans un amoncellement de neige (Maupass.,Contes et nouv., t. 2, Boule de suif, 1880, p. 124).La salle sombrait dans le noir, éclairée seulement par ce débordement, ce ruissellement de milliers d'étoiles (Vialar,Tournez, 1956, p. 294).
B. − Au fig.
1. [Le suj. désigne une pers. ou groupe hum.] Plonger; s'enfoncer (dans), se laisser envahir (par).
a) Sombrer dans + subst. désignant un état.Sombrer dans le sommeil; sombrer dans l'alcoolisme, la démence, la drogue, l'ennui, la folie, la maladie, la neurasthénie, la névrose, l'opium, le vice; sombrer dans le chaos, la misère, la pauvreté, la ruine. La bourgeoisie a remplacé la noblesse sombrée dans le gâtisme ou dans l'ordure; c'est à elle que nous devons l'immonde éclosion des sociétés de gymnastique et de ribote, les cercles de paris mutuels et de courses (Huysmans,Là-bas, t. 1, 1891, p. 190).Puis elle (...) sortit de cet engourdissement (...) dans lequel sombrent quelque temps les êtres qui ont reçu un grand choc physique et qui savent qu'ils en émergent car ils recommencent à souffrir (Vialar,Brisées hautes, 1952, p. 135).
En partic. [Dans le suicide, la mort] Mourir, disparaître. Le goût de la tranquillité engourdit le sens vital de l'aventure risquée. La béatitude de l'obéissance passive (...) est beaucoup plus recherchée que les joies de l'entreprise. Si l'humanité cédait à ce mouvement, elle sombrerait dans une mort lente (Mounier,Traité caract., 1946, p. 464):
2. Si « le silence éternel des espaces infinis effraie », c'est que l'homme sent (...) s'amincir l'épaisseur de dogmes et de conventions sociales qui le protègent (...). Dostoievski a été hanté par ce sujet d'un homme sombrant dans le suicide, la folie, ou la bestialité, après la perte de toutes les croyances vitales, de toute « religion », de tout Dieu... Ruyer,Esq. philos. struct., 1930, p. 354.
P. méton. [Le suj. désigne les yeux révulsés d'un mourant] Ses beaux yeux gris, ses yeux pailletés d'or, je les vis tout à coup s'éteindre et sombrer (L. Daudet,Morticoles, 1894, p. 91).
Empl. abs. Plaignons-les, ces jeunes hommes (...) qui, à leur lit de mort, au moment de sombrer (...) n'ont eu personne à leur côté pour apaiser leur regret aux portes du néant (Vallès,Réfract., 1865, p. 105).
Rare. [P. réf. à l'acte sexuel] Aussi Mélanie, ce beau corps de femme, le prit-elle [Burle] en entier, avec une puissance irrésistible. Il sombra, il s'abîma en elle (Zola,Cap. Burle, 1883, p. 20).En empl. abs. Et près des femmes que je caresse, quand la nuit se referme sur nous et que je crois, éloigné de ma chair enfin contentée, saisir un peu de moi entre la vie et la mort, ma solitude entière s'emplit de l'aigre odeur du plaisir aux aisselles de la femme qui sombre encore à mes côtés (Camus,Caligula, 1944, ii, 14, p. 60).
b) P. anal. [Le suj. désigne chez l'individu une faculté, une activité mentale] S'écrouler; s'effondrer. Voir son rêve sombrer (dans l'absurde, le néant); voir un projet, sa foi, sa gloire, sa raison, sa réputation sombrer (dans le désastre, l'oubli). De la tempête dans laquelle l'autre jour, l'être moral de Stéphane avait cru sombrer, aucune trace n'était restée (Estaunié,Simple, 1891, p. 117).Agathe, dont la foi protestante avait achevé de sombrer à Genève, devant les pratiques étroites et imbéciles, ne gardait en elle que le levain des anciennes révoltes (Zola,Paris, t. 1, 1897, p. 147).
2. [En parlant de biens] Disparaître, péricliter. Voir sombrer son argent, son patrimoine, son outil de travail, son entreprise, le fruit de son travail, toute sa fortune; un régime politique, un pays, un continent, une civilisation (entière) sombre. L'usine était brûlée, le capital avait sombré sous les décombres, où trouverait-il de quoi vivre demain? (Zola,Travail, t. 2, 1901, p. 100).Jamais il ne lui avait demandé un de ces services d'amitié, comme Herr lui en avait rendu quand la librairie sombrait (Tharaud,Péguy, 1926, p. 231).
Sombrer dans.Se perdre dans, s'enliser dans. [Watteau] a créé le XVIIIesiècle, et (...) il a fait cela au moment où la pompe décorative et allégorique du XVIIe, après un bel éclat, (...) sombrait dans l'imitation de l'italianisme (Mauclair,De Watteau à Whistler, 1905, p. 15).Peu leur importait [aux Italiens] l'état d'anarchie tragique où sombraient les affaires de l'Église (Druon,Loi mâles, 1957, p. 62).
Prononc. et Orth.: [sɔ ̃bʀe], (il) sombre [sɔ ̃:bʀ ̥]. Homon. et homogr. sombrer1 et 3. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1654 « se renverser » (Du Tertre, S. Christophe, p. 111 ds Arv., p. 460: Si on n'est bien diligent à baisser les huniers et larguer les écoutes, on est au risque de perdre des masts, ou de sombrer sous les voiles). Prob. altér. sous l'infl. de sombre* de soussoubrer « id. » 1614 (Claude d'Abbeville, Histoire de la mission, f o29 r oet v o, ibid.), cf. une forme soussombrer « id. » donnée par Jal1et Littré: sous-sombrer, avec chute de la 1resyll. qui a pu être sentie comme un préf., d'où au xviies. la loc. sombrer sous les voiles (v. ex. ds Arv.); soussoubrer a dû être empr. dans la lang. des navigateurs soit au port. sossobrar « id. » déb. du xvies. d'apr. Cor.-Pasc., çoçobar 1508 ibid., v. aussi Buarque, soit à l'esp. zozobrar « id. » xves. ds Al., empr. au cat. sotsobre « dessus dessous » dans la loc. fer sotsobre « id. » 1265-1336 ds Alc.-Moll., comp. de sots « dessous » 1284, ibid., du lat. subtus « en dessous » et de sobre « au-dessus » fin xiie-déb. xiiies., ibid., du lat. super « id. ».
STAT. Sombrer1 et 2. Fréq. abs. littér.: 785. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 426, b) 1 125; xxes.: a) 1 335, b) 1 565.

SOMBRER3, verbe trans.

SOMBRER3, verbe trans.
AGRIC., vx. Donner le premier labour à une terre. (Dict. xixeet xxes.). Sombrer les jachères (Besch. 1845).
Prononc. et Orth.: [sɔ ̃bʀe], (il) sombre [sɔ ̃:bʀ ̥]. Homon. et homogr. sombrer1 et 2. Étymol. et Hist. 1316 inf. subst. sombrer « saison du premier labour » (Arch. JJ 53, f o44 r ods Gdf.) − 1354 ds Ordonnances des rois de France, t. 4, p. 297; 1328 « donner le premier labour à une terre » (Cart. de Montier-Ramey, Richel. l. 5432, f o13 r ods Gdf.). Terme d'orig. germ., dont les représentants (att. dans le sud de la Champagne, dans presque toute la Bourgogne et isolément dans le Berry, l'Orléanais, le Poitou et l'extrême nord du Lyonnais, cf. FEW t. 11, p. 139a, et exprimant une méthode de culture du sol consistant en un premier labour que l'on donne aux terres au printemps ou au début de l'été même si on ne les ensemence pas ensuite) se rattachent au mot désignant l'été, comme les termes d'orig. gaul. plus anc. du rad. gaul. *samo- « été » de même sens et de même évol. sém., v. savart2avec lesquels ils sont en contact; d'un frq. *sumarare ou *sumerare, forme parallèle à *sumoráre, dér. du burg. *sumor « été », a. b. frq. *sumar (cf. a. fris. sumur, a. nord. sumar, a. h. all. sumar, v. aussi Falk-Torp, s.v. sommer). Voir FEW t. 11, pp. 140-142. De sombrer, le déverbal sombre (corresp. à l'all. Brache « jachère » de brechen « labourer, casser en morceaux ») qui paraît plus anc. att.: xiiies. [date ms.] « jachère » (Chrétien de Troyes, Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 5609: li sonbre; v. aussi éd. W. Foerster, 5629, var.: li essombre, les essombres, li ombre), « saison du premier labour » 1260 ds Gdf.: sonbre, cf. lat. médiév. sombrum « labour » 1296 et 1336 ds Du Cange; et les dér. sombrement, sombrure « première façon donnée à la terre » 1636, Monet − 1671, Pomey; sombrage « premier labour donné à la vigne » 1842 (Ac. Compl.) − Littré.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·