a) Aveu, confidence faite à une autre personne. Secret à deux. Je voudrais une tendresse qui fût un secret entre deux êtres seulement, éternellement inconnu, caché comme le trésor de l'avare (Balzac, Corresp., 1836, p. 55):2. S'il y a secret, il y a confidence, c'est-à-dire confiance: quelqu'un sait, quelqu'un a en dépôt une vérité sur laquelle il veille jalousement, mais qu'il partage néanmoins avec un autre... Ce qu'il y a de plus puissant dans le secret, ce n'est donc pas le mutisme qu'il impose, c'est la complicité qu'il crée entre ceux qui en sont porteurs: il est à la fois tacite et explicite, exclusif et confiant.
Jankél., L'Ironie, 1964, p. 51.
♦ Secret de l'oreiller. Confidence d'un couple dans l'intimité d'une chambre. V. oreiller ex. de Cendrars.
♦ Petit secret. Confier un petit secret. Je vais vous dire un petit secret... Leur système est excellent, vous avez bien raison, mais il y a une malfaçon dans leur machine (Camus, État de siège, 1948, 2epart., p. 272).
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En partic., vieilli. Discrétion. Les Jansénistes ont le don du secret. De ces querelles de famille et de ces troubles du désert rien ne transpirait au dehors (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 4, 1859, p. 315):3. Tous ces dieux, foyer, lares, mânes, on les appelait les dieux cachés (...). Pour tous les actes de cette religion il fallait le secret (...); qu'une cérémonie fût aperçue par un étranger, elle était troublée, souillée, funestée par ce seul regard.
Fustel de Coul., Cité antique, 1864, p. 38.
♦ Être le tombeau des secrets. Le secret est une tombe et ce n'est pas pour rien que l'homme discret se vante d'être le tombeau des secrets (Bachelard, Poét. espace, 1957, p. 91).
c) Expressions ♦ C'est mon/son secret. Quel soin dans la dissimulation! Cette copie, c'est son secret, un secret qui le brûle, qu'il gardera toute sa vie. Car jamais de son vivant il n'a avoué et même, interrogé, il a menti (Guéhenno, Jean-Jacques, 1952, p. 13).
♦ Avoir un secret. Je suis contente d'avoir un secret que la grande Anaïs, Marie Belhomme, Luce Lanthenay et les autres ne soupçonnent pas (Colette, Cl. école, 1900, p. 171).
♦ Ne pas avoir de secret(s) pour qqn. [Le suj. désigne une pers.] Paul n'a pas de secrets pour moi. Il me montre la moindre lettre qu'il écrit (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 1505).Ne pas avoir de secret(s) pour qqn. [Le suj. désigne une chose] La perfection technique des meubles Restauration a souvent été vantée (...) Placage, marqueterie, incrustation n'ont plus de secret pour les artisans d'alors (Viaux, Meuble Fr., 1962, p. 1144).
♦ Être dans le secret de qqc. Germain était le domestique de confiance d'Armand, le seul qui fût dans le secret de la mystérieuse existence d'Andrea (Ponson du Terr., Rocambole, t. 2, 1859, p. 24).Vieilli. Être du secret. Ce que je te dis ne serait compris de personne, hormis de Mimi qui est du secret (E. de Guérin, Journal, 1835, p. 83).
♦ Faire un secret à qqn. Je lui demanderai pardon à genoux de m'être mis en colère parce qu'elle m'a fait un secret (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 203).
♦ Au plus secret. Au cœur de. Et voici que cette créature indifférente pénétrait tout à coup au plus secret de notre destin (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 135).
♦ En secret. Secrètement. S'aimer, s'écrire, se voir en secret. Elle me quitta brusquement, en me laissant persuadé qu'elle avoit en secret pour moi le sentiment le plus tendre et le plus vif (Genlis, Chev. Cygne, t. 1, 1795, p. 68).Dans l'intimité. Mais tout ce qui parlait en secret à l'âme le langage de l'âme, le contrefacteur ne l'a pas entendu, car la sienne est sourde (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 344).
♦ Sous le secret, sous le sceau du secret. M. Francis avait été instruit par une voie sûre, mais sous le secret, que l'Espagne ne se déclarerait dans la guerre d'Amérique que pendant l'année 1780 (Chamfort, Caract. et anecd., 1794, p. 139).Mais, silence, n'est-ce pas? Je vous dis ça sous le sceau du secret. Elles jurèrent leurs grands dieux qu'elles seraient muettes (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 831).Vieilli. Sous secret. Le capitaine Maitland lut cette lettre de Napoléon, qu'il admira beaucoup, en laissa prendre copie à deux autres capitaines, sous secret, jusqu'à ce qu'elle devînt publique (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 26).
♦ Être, mettre dans le secret des dieux. Posséder, faire partager un savoir important réservé à un petit nombre. Je puis très bien vous mettre dans le secret des dieux. Je sais que vous êtes discret, monsieur le colonel (Farrère, Homme qui assass., 1907, p. 329).Je vais aller (...) lui demander si son mari croit que nous allons avoir la guerre, et si on peut compter sur le roi Théodose. Il doit savoir cela, n'est-ce pas, lui qui est dans le secret des dieux? (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 513).
♦ Le secret de Polichinelle (fam.). Faux secret, parce qu'il est connu de tous. Synon. secret de la comédie (Ac.).Sa liaison est publique (...). C'est le secret de Polichinelle (Augier, Effrontés, 1861, p. 279).