A.− En règle générale, chacun n'est pas précédé d'un déterminant : 29. À cela se joignait alors la pitié qu'inspirait leur malheur, chacun de son mieux les secourut.
Courier, Pamphlets pol.,Pétition aux deux Chambres, 1816, p. 6.
30. Les malheureuses touchaient comme chacun leur part de ravitaillement.
Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 38.
31. Philosophie transcendantale et philosophie réflexive s'opposent l'une à l'autre en invoquant les nécessités de cette analyse psychologique dont personne ne veut, mais dont chacun veut expliquer les apparences.
J. Vuillemin, L'Être et le travail,1949, p. 2.
−
Fréq., chacun est suivi du réfléchi soi ou d'un poss. sing. chacun pour soi! à chacun son dû! 32. Alors chacun demeurera chez soi et dirigera la force et l'éclair vers l'extérieur; mais Sparte trônera sur vous, siège de la reine pour de longues années.
Nerval, Le Second Faust,1840, p. 253.
33. − Non, dis-je en riant, aujourd'hui j'ai trouvé une vérité de remplacement. Ou plutôt, je crois être sur le point de la trouver.
− Laquelle?
Je fais un geste vague.
− Chacun la sienne, dis-je en évitant de répondre.
Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 362.
B.− Chacun est précédé de un, tout un. Ces tours sont vivants. 1. Un chacun. Puiser dans la bourse d'autrui et d'un chacun (Las Cases, Le Mémorial de Sainte Hélène,t. 2, 1823, p. 622).Ce que vous connaissez utile, bon à savoir pour un chacun (Courier, Pamphlets pol., Pamphlets des Pamphlets,1824, p. 214).Il est loisible à un chacun de souligner ... (Sainte-Beuve, Tabl. hist. et crit. de la poésie fr. et du théâtre fr. au XVIes.,1828, p. 157).En dépit d'un chacun (Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 485).La providence vient au secours d'un chacun (E. de Guérin, Journal,1838, p. 244).À modérément gouverner un chacun selon son état (Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 3, 1848, p. 267).Fouillement d'un chacun (Flaubert, Par les champs et par les grèves,1848, p. 319).La conviction intime d'un chacun (E. et J. de Goncourt, Journal,1860, p. 724).À la satisfaction d'un chacun (Zola, L'Assommoir,1877, p. 636).Ses belles confréries d'ouvriers et d'artistes si bien organisées contre les humeurs d'un chacun (Maurras, Le Chemin du Paradis,1894, p. XXVI).C'est bien un chacun seul qui l'invente (Gide, Réflexions sur quelques points de litt. et de mor.,1897, p. 421).À la portée d'un chacun (Bloy, Journal,1899, p. 302).Éloignez un chacun (E. Rostand, Cyrano de Bergerac,1898, III, 10, p. 138).C'est-à-dire la partie c... d'un chacun (Valéry, Correspondance[avec Gide], 1914, p. 436).Salut un chacun, fit-il en ôtant son casque de laine (Hémon, Maria Chapdelaine,1916, p. 35).Mais qu'un chacun / Ayant vidé sa tire-lire (Ponchon, La Muse au cabaret,La Fête du terme, 1920, p. 243).Ce qu'il y a à savoir d'un chacun (Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Château des sept-portes, 1922, p. 145).Vous lui ressemblez si bien qu'un chacun s'y tromperait, père Leleu... sans mentir, un chacun s'y tromperait... (R. Martin du Gard, Le Testament du Père Leleu,1920, p. 1157).Un chacun s'en doutait (Genevoix, Raboliot,1925, p. 24).La risée d'un chacun (Bernanos, Sous le soleil de Satan,1926, p. 73).Le repos d'un chacun (Giono, Le Grand troupeau,1931, p. 35).« Je ne saurai jamais ce que je vaux, si je ne m'essayais contre un chacun » (Green, Journal,1933, p. 122).Et où le premier mouvement d'un chacun, au premier événement, est de ne tenir pas sa place (Montherlant, Les Célibataires,1934, p. 872).Car de Marie voilà ce qu'un chacun pouvait dire (Jouve, La Scène capitale,1935, p. 10).Qu'un chacun fasse un écart icitte et là (G. Guèvremont, Le Survenant,1945, p. 164).Et l'homme avançait à petits pas, se heurtait à un chacun (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 147).Puisque la liberté d'un chacun contraint celle d'autrui (J. Vuillemin, L'Être et le travail,1949, p. 95).La vocation d'un chacun (Teilhard de Chardin, Le Milieu divin,1955, p. 57).
2. Tout un chacun. Rafraîchir la mémoire à tout un chacun (L. Cladel, Ompdrailles,1879, p. 268).Révélé à tout un chacun (Courteline, L'Article 330,1900, p. 267).Et il aurait voulu que tout un chacun (...) goûtât autant de bonheur (Miomandre, Écrit sur de l'eau,1908, p. 68).Elle avait appris depuis longtemps, comme tout un chacun, la vérité sur tout (Alain-Fournier, Correspondance[avec J. Rivière], 1908, p. 55).Ainsi tout un chacun pouvait vous approcher (Péguy, Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc,1910, p. 46).Il faut que tout un chacun te croie (Claudel, Protée,1reversion, 1914, II, 4, p. 347).I' s'faisait vomir par tout un chacun (Barbusse, Le Feu,1916, p. 126).C'était quasiment tout un chacun qui partait pour les États (Hémon, Maria Chapdelaine,1916, p. 78).Tout un chacun voyant son appétit renaître (Ponchon, La Muse au cabaret,Le Gigot, 1920, p. 149).Mais donnez quittance à tout un chacun (R. Martin du Gard, La Gonfle,1928, I, 5, p. 1189).Il connaît tout un chacun, il salue tout le monde (Arland, L'Ordre,1929, p. 47).Tout un chacun cherche son intérêt (Malraux, L'Espoir,1937, p. 583).(Il) faisait des réflexions sur tout un chacun (Drieu La Rochelle, Rêveuse bourgeoisie,1939, p. 112).À l'entendre de tout un chacun (Queneau, Pierrot mon ami,1942, p. 129).Mais il aimait surtout parler avec tout un chacun à la porte de l'église (G. Guèvremont, Le Survenant,1945, p. 92).Qui périt à la guerre comme tout un chacun (Prévert, Paroles,1946, p. 18).Accusons-en les circonstances et la nature humaine, de quoi les prisonniers dépendent au même titre que tout un chacun (Ambrière, Les Grandes vacances,1946, p. 215).Rem. Tout chacun, beaucoup plus rare, est peut-être l'indice d'une nominalisation de chacun. Cette dépêche que tout chacun affirme avoir lue de ses propres yeux (E. et J. de Goncourt, Journal, 1870, p. 579). Cet édit le plus maudit par lequel est permis la liberté de conscience à tout chacun (Clemenceau, L'Iniquité, 1899, p. 398). Ce que je souhaite à tout chacun, c'est la petite blessure coquette... (Dorgelès, Les Croix de bois, 1919, p. 84). Il faut que tout chacun te croie... (Claudel, Protée, 2eversion, 1927, II, 7, p. 401). « Assis-toi là, mon ami », qu'i' disait à tout chacun » (R. Martin du Gard, La Gonfle, 1928, I, 5, p. 1187).