1. Se déplacer, généralement sur une longue distance, aller d'un lieu à un autre, effectuer un trajet, un parcours. a) [Gén. mentionné par le compl.] Accomplir un déplacement vers une destination précise en empruntant un moyen de transport. Avez-vous jamais voyagé sur la mer? Couché dans votre cabine, suiviez-vous, la nuit, le mouvement du bateau s'inclinant à droite, à gauche, et si fort qu'il semblait parfois hésiter à se relever? (Barrès, Cahiers, t. 9, 1912, p. 281).Les invités qui ne voyageaient pas par la route descendaient comme autrefois en gare de Blangy-sur-Bresle du train de neuf heures trente-six (Nizan, Conspir., 1938, p. 134).SYNT. Voyager à cheval, à pied, en avion, en autocar, en berline, en chemin de fer, en diligence, en voiture, en wagon-lit; voyager en mer, par les airs, sur un paquebot; voyager debout, assis, en première, en seconde classe; voyager de jour, de nuit; voyager sans argent, sans passeport, à ses frais, à tarif réduit; voyager de (...) à (...), entre (...) et (...); voyager incognito.
− MAR. Effectuer un déplacement en mer en étant seul maître du parcours et du déroulement de la traversée. Le capitaine est d'abord un marin. Il doit conduire à destination son navire en voyageant « en droiture », c'est-à-dire sans « relâcher », sauf cas de force majeure, en dehors des escales prévues (M. Benoist, Pettier, Transp. mar., 1961, p. 137).
b) Se déplacer; parcourir une certaine distance. J'ai voyagé soixante lieues à travers les fleurs (Michelet, Journal, 1837, p. 772).Les départs étaient laborieux chez moi; mon père, qui ne voyageait que pour les enterrements, m'avait légué sa peur des salles d'attente (Giraudoux, Simon, 1926, p. 36).
c) Voyager dans.Se déplacer dans un lieu. Voyager dans la lune, dans le Midi. Avant de voyager dans l'espace interplanétaire, (...) [l'homme] doit progresser encore dans l'« espace » des possibles techniques (Ruyer, Cybern., 1954, p. 224).
2. Faire un/des voyage(s); se déplacer hors de son domicile dans un but d'étude, de découverte, de loisirs. a) [Le suj. désigne un savant, un explorateur] Aller à la découverte d'un pays, d'une civilisation pour les étudier ou les conquérir. Après un séjour de deux ans, arriva un Espagnol, se disant venir du nouveau Mexique, et voyageant pour faire des découvertes (Crèvecœur, Voyage, t. 3, 1801, p. 213).En Asie Mineure, l'Anglais Fellows voyage à partir de 1832, particulièrement en Lycie où il commence des fouilles en 1842 (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 259).
b) Faire un voyage d'agrément, seul ou en groupe, dans un but de détente, de dépaysement, de loisirs. J'ai un cousin qui a voyagé en Suisse l'année dernière, et qui me disait qu'on ne peut se figurer la poésie des lacs, le charme des cascades, l'effet gigantesque des glaciers (Flaub., MmeBovary, t. 1, 1857, p. 93).Si l'homme d'affaires sait que les aléas du voyage rentrent dans le cadre de ses ennuis de travail, le touriste voyage pour son plaisir et ne les accepte pas (Defert, Pol. tour. en Fr., 1960, p. 68).SYNT. Voyager seul, en groupe, en isolé, individuellement; voyager au loin, à l'étranger, à travers le monde (synon. bourlinguer), en Europe, en Afrique, au Sahara, en Angleterre; voyager en famille; voyager beaucoup, partout; avoir l'intention, être content de voyager; voyager pour se distraire, pour s'instruire, pour passer le temps, pour chercher la sagesse; voyager pour voyager.
− Proverbe. Qui veut voyager loin ménage sa monture*.
c) Empl. fréq.
α) Faire des voyages; avoir une expérience approfondie des déplacements lointains, des pays et des peuples visités. Aimer voyager; besoin, bonheur, charme, désir, envie, faculté, habitude, plaisir de voyager. J'ai voyagé. J'ai été dans l'Inde, j'ai parcouru les Gaules. J'ai traversé le désert où l'on a soif (Flaub., Tentation, 1856, p. 630).Je veux sortir, voyager, connaître des gens, je veux la gloire et l'amour; je veux vivre (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 494).
β) [Le suj. désigne une pers. en activité, en mission] Accomplir des déplacements en France ou à l'étranger (pour son propre compte ou pour le compte d'un employeur). Voyager pour ses affaires, son commerce, pour un armateur, pour une maison de vin, de pâtes. J'échappe à M. Thomas, ex-lieutenant, voyageant pour une compagnie d'assurance (Michelet, Journal,1830, p. 77).Il y avait à bord six passagers: un guernesiais, deux malouins (...), un « touriste » (...), un parisien (...) et un américain voyageant pour distribuer des bibles (Hugo, Travaill. mer, 1866, p. 190).
γ) Se déplacer sous l'effet de certaines contraintes, politiques, militaires, etc. Les guerres de la Révolution et de l'Empire ont fait terriblement voyager notre peuple, par nature casanier comme il est économe (Bourget, Essais psychol., 1883, p. 102).
3. [Le suj. désigne un animal] a) Se déplacer dans son élément, son milieu naturel. Les hirondelles, les frégates, les marsouins et les thons voyagent avec plus de vitesse (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 373).Nous avons (...) rencontré un narval qui voyageait à la surface de la glace, avec sa grande pique de corne, et qui tâchait de retrouver un trou d'eau (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 113).
b) Accomplir une migration. Les milliers et les milliers de lamproies accouplées émigrent vers les fleuves. Elles voyagent par bancs, entre deux eaux, en colonne profonde (Pesquidoux, Chez nous, 1921, p. 151).
4. P. anal. a) Se déplacer sur de courtes distances en assimilant ce parcours à un véritable voyage. Synon. circuler, déambuler.Jusqu'au déjeuner, elle voyageait d'une pièce dans l'autre, causait avec la femme de ménage, les mains inertes (Zola, Bête hum., 1890, p. 122).Sa mère, ici, commençait de souffrir, et sa sœur voyageait d'un malade à l'autre au milieu de la nuit (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 281).
b) Se déplacer en tous sens, sans but précis. Synon. errer, vagabonder.Cette fois, elle [la noce] voyageait au milieu du musée de la marine, parmi des modèles d'instruments et de canons, des plans en relief, des vaisseaux grands comme des joujoux (Zola, Assommoir, 1877, p. 447).
c) CHORÉGR. ,,Dévier de sa place en faisant une pirouette`` (Nouv. Lar. ill. et Rigaud, Dict. arg. mod., 1881, p. 388).