2. Panneau plus ou moins épais de fibres d'origine animale, végétale ou synthétique, nouées ou tissées selon divers procédés, que l'on pose sur le sol pour le confort et la décoration. On peut classer les tapis à points noués de la façon suivante: 1 Les tapis ras ou à poils courts et serrés, généralement en soie; 2 Les tapis à poils longs ou haute laine; 3 Les tapis à fond plat apparent en matières diverses (Thiébaut, Fabric. tissus, 1961, p. 119):1. ... elles nous reçurent dans un vaste salon voûté, éclairé par une coupole, et rafraîchi par un bassin d'eau courante; elles étaient assises sur un divan semi-circulaire qui régnait au fond de la salle; tout était couvert de riches tapis, et les tapis couverts eux-mêmes de narguilés, de pipes, de vases de fleurs et de sorbets.
Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 269.
SYNT. Tapis ancien, bariolé, bon marché, éclatant, épais, moelleux, précieux, ras, velouté, velu; tapis chinois, persan, russe; tapis d'Iran; tapis de soie, de laine, de coton; tapis exécuté à la main, tissé à la machine, tapis cloué; assis, couché sur le tapis; étendre, rouler, dérouler un tapis; battre, brosser, secouer un tapis.
♦ Tapis d'Orient. Tapis le plus souvent noué (nœud persan ou nœud turc), provenant principalement de Turquie, d'URSS, d'Iran, d'Afghanistan, d'Inde ou de Chine. Les tapis d'Orient, plus anciens et plus nombreux. L'orient semble bien être le berceau de la fabrication de ce genre de tapis (Thiébaut, Fabric. tissus, 1961, p. 118).
♦ Tapis de prière. Petit tapis utilisé par les musulmans pour la prière. Mahomet, dit-on, avait un tapis de prière sur lequel il s'agenouillait (Barrès, Cahiers, t. 13, 1921, p. 223).
♦ [Dans les contes orientaux] Tapis magique, volant. Tapis capable de transporter des personnes dans les airs. Les distances sont peu de chose; l'homme les franchit comme en un rêve, sur le tapis magique, ou bien emporté par des dragons volants (Alain, Propos, 1921, p. 291).[Dans un cont. métaph.] Jean a un tapis volant. Quand autrefois s'élevait entre nous l'amour trop grand, puis l'indifférence trop grande, Jean montait sur un tapis, et s'envolait (Giraudoux, Sodome, 1943, i, 1, p. 39).
♦ Marchand de tapis. Personne qui vend des tapis. Le sieur Duplan, marchand de tapis, m'a écrit hier une lettre pathétique où il me supplie de lui envoyer de l'argent avant la fin de ce mois (Flaub., Corresp., 1870, p. 238).Au fig., péj. V. marchand I B 1 d γ.
− Au fig. Dérouler le tapis rouge. Accueillir quelqu'un avec beaucoup d'honneur. Conscient de l'intérêt économique du projet, le gouvernement espagnol n'a pas hésité à dérouler le tapis rouge sous les pieds des représentants de la firme américaine (Le Monde aujourd'hui, 17-18 févr. 1985, p. xiii, col. 2).
3. Pièce de tissu (laine, soie, coton,...) que l'on pose sur un meuble, un objet. Cette salle à manger où je travaille et qui est, à elle seule, toute la France que je reconnais, avec son tapis de table, ses gros cadres dorés, et dans une vitrine, le service auquel on ne touche jamais (Green, Journal, 1945, p. 236).La majorité de la population devait se contenter comme au XVIesiècle, d'une table recouverte d'un tapis de bure ou de toute autre étoffe plus légère (Viaux, Meuble Fr., 1962, p. 66).♦ Châle-tapis. V. châle ex. de Menon, Lecotté.
♦ Tapis de selle. Couverture placée sous la selle du cheval pour éviter les échauffements. Ils lui mettent son premier harnachement pour aller travailler: la bride, le torchon − nom vulgaire du tapis de selle (Zitrone, Courses, 1962, p. 226).
a) Tapis vert. Pièce de drap vert qui recouvre une table de travail, une table de conférence; p. méton., table autour de laquelle se tient une réunion de personnes qui délibèrent, qui traitent une affaire. Obtenir la protection d'un des ministres influents, d'une des douze ou quinze cartes qu'une main puissante mêle depuis seize ans sur le tapis vert de la table du conseil (Balzac, Cous. Pons, 1847, p. 165).Si par hasard certains désaccords disparaissent autour des tapis verts dans la sérénité du plan régional ou du plan national, ils subsisteront à l'intérieur de chaque entreprise (Wilbois, Comment fonct. entr., 1941, p. 58).−
Loc. verb. fig. ♦ Être (revenir) sur le tapis. Être (à nouveau) l'objet d'une discussion. Après quelques phrases banales échangées, l'événement du jour fut sur le tapis (Balzac, Employés, 1837, p. 272).Au mois de mars, le complot revint sur le tapis (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 218).
♦ Jeter, mettre, remettre, tenir,... qqc. sur le tapis. Soumettre (à nouveau) quelque chose à un examen collectif, à une discussion. Arrivé chez Arnauld au faubourg Saint-Jacques, et y trouvant assez nombreuse compagnie de théologiens, il mit la question sur le tapis (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 484).J'attendais le moment propice pour jeter le nom de Breton sur le tapis (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1920, p. 482).
♦ Amuser le tapis. Parler pour amuser, ou distraire l'attention de l'assemblée. Le chambellan exprime à Méphistophélès l'impatience du souverain. Réduit à un rôle secondaire, le Diable semble ici chargé d'amuser le tapis en attendant le retour de l'illustre magicien (Nerval, Sec. Faust, Examen analytique, 1840, p. 208).La vie littéraire et même la vie de l'esprit est parfaitement nulle − ici et partout. La naïveté gagne du terrain. Voltaire se meurt. Les centenaires amusent le tapis (Valéry, Lettres à qq.-uns, 1945, p. 188).
b) JEUX. Tapis vert ou, absol., tapis. Pièce de drap (généralement vert) qui recouvre une table de jeux; p. méton., table de jeux. Déposer sa mise sur le tapis; le tapis de la roulette, du baccara. Un joueur n'est pas nécessairement stupide, mais dès qu'il approche du tapis vert il semble perdre tout bon sens (Jeux et sports, 1967, p. 477):2. − Mais que pouvons-nous avec vingt louis? − Aller au jeu. Je frissonnai. − Ah! reprit-il en s'apercevant de ma pruderie (...) tu as peur d'un tapis vert! − Écoute, lui répondis-je, j'ai promis à mon père de ne jamais mettre le pied dans une maison de jeu. Non seulement cette promesse est sacrée, mais encore j'éprouve une horreur invincible en passant devant un tripot...
Balzac, Peau chagr., 1831, p. 173.
♦ Le tapis brûle. Quelqu'un a oublié de déposer sa mise. (Dict. xixeet xxes.).
♦ Faire tapis. Au pocker, étaler ses cartes sur la table, montrer son jeu. Après plusieurs passes, mon voisin relance de dix mille (...) je ne les avais plus (...) je fais tapis en toute tranquillité (...) il étale un full aux as par les dames (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 31).
♦ Tapis! [Au pocker, exclamation de celui qui engage un coup dans le restant de la masse]. (Ds Lar. Lang. fr., Rob. 1985).
− Loc. verb. fig. Jouer tapis. Mettre toutes ses chances en jeu (Ds Lar. Lang. fr., Rob. 1985). Être tapis. Être sans ressource, démuni d'argent (d'apr. Le Breton 1960).
− P. métaph. Cet incomparable Goethe dont nous observons le retour, au bout d'un siècle, au plus haut du ciel de l'esprit. En vérité, sur le tapis du monde, ce grand homme est un des coups les plus heureux que le destin du genre humain ait amenés (Valéry, Variété IV, 1938, p. 100).
−
En partic. ♦ BILLARD. Drap vert tendu sur la surface et les bandes du billard. Crever le tapis. Gripothe, maître en l'art délicat de faire se heurter trois billes sur le vert tapis du billard, parla d'aller jouer la poule dans un café (Courteline, Ronds-de-cuir, 1893, p. 227).
♦ CARTES. Petite pièce de drap sur laquelle on pose les cartes quand on joue. On fait une manille, comme tu vois. Il abattait ses cartes sur le tapis, cognant du poing, à chaque coup, entre les verres pleins de vin rouge (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 150).M. Brun: Ça commence bien. Il jette une carte sur le tapis. César: Je prends avec la dame (Pagnol, Marius, 1931, iii, 1ertabl., 6, p. 171).
− P. méton., arg. Établissement de jeu clandestin; p. ext., bar, café louche. Descente [de police] sur descente dans les hôtels, les tapis et les bars (Simonin, Touchez pas au grisbi, 1953, p. 143).