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SOURIRE1, verbe

SOURIRE1, verbe
A. − [Le suj. désigne une pers.] Prendre une expression légèrement rieuse, en esquissant un mouvement particulier des lèvres et des yeux. La belle et fraîche méridionale (...) montrait ses dents en souriant (Maupass., Contes et nouv., t. 1, MmeParisse, 1886, p. 731).Manuel le regarda, et sourit. Quand il riait, c'était comme un enfant; mais il souriait d'un sourire qui abaissait les coins de sa bouche, et donnait un style amer à son menton lourd (Malraux, Espoir, 1937, p. 573).La fossette qui apparaissait quand elle souriait rendait son merci plus précieux (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 25).
SYNT. Sourire continuellement, discrètement, doucement, faiblement, largement; sourire à demi, à moitié, à peine, avec effort; sourire avec les yeux, des yeux, de toutes ses dents; ne jamais sourire; sourire pour un rien; sourire d'un sourire jeune, enfantin, d'un sourire d'enfant; parler, répondre en souriant.
[P. méton.;] [le suj. désigne les yeux, la bouche] Tes yeux me souriaient... et je marchais heureux sous le ciel constellé (Samain, Chariot, 1900, p. 108).Le châtain aux yeux pers, dix-sept ans, une bouche empourprée qui ne souriait qu'à nous et à quelques jolies filles (Colette, Sido, 1929, p. 129).
En partic. [Le suj. désigne une représentation artist.] Le vent de l'autre nuit a jeté bas l'Amour Qui (...) Souriait en bandant malignement son arc (Verlaine, Œuvres compl., t. 1, Fêtes gal., 1869, p. 95).
1. − [Dans un cont. positif ou mélioratif]
a) Empl. intrans.
α) [Le sourire, spontané, indique un sentiment réel de joie, de satisfaction, de sympathie, de reconnaissance]
[Suivi d'un adv.] Sourire affectueusement, agréablement, gentiment, malicieusement. Puis il lui sourit aimablement: − Voulez-vous entrer, Monsieur des Lourdines (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p. 103).
Sourire avec.Sourire avec bonté, complaisance, finesse, grâce, malice, modestie, pitié, tendresse; sourire avec un air de satisfaction. Il souriait avec douceur et d'un air content (Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p. 193).[Les enfants] sourient avec confiance, ils n'ont pas peur (Frapié, Maternelle, 1904, p. 121).
Sourire de
Sourire d'aise, de bonheur, d'espoir. Il a été très sensible à tes félicitations. Il en souriait de plaisir (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p. 246).
Sourire d'un air (d'une façon, d'une manière) amical(e), complice, engageant(e), entendu(e), exquis(e), gai(e), indulgent(e), rusé(e). La belle charcutière se pencha, sourit d'une façon amicale aux deux poissons rouges qui nageaient dans l'aquarium (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 667).La négresse sourit d'un air entendu (Benoit, Atlant., 1919, p. 230).
Sourire de l'air de qqn qui... Je souris de l'air de quelqu'un qui en sait plus long qu'il ne le dit (Proust, Prisonn., 1922, p. 335).
Expr. Sourire et pleurer, sourire en pleurant, au milieu des larmes, à travers ses larmes. Je tremble, je souris et je pleure à la fois. Dieu! que je suis heureuse! (Delavigne, Louis XI, iii, 8, p. 134):
1. La tante poussa un cri en se retournant: « Ô mes enfants! » dit-elle, et elle se mit à pleurer, puis sourit à travers ses larmes. − C'était l'image de sa jeunesse, − cruelle et charmante apparition! Nous nous assîmes auprès d'elle, attendris et presque graves, puis la gaieté nous revint bientôt... Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p. 607.
β) [Le sourire exprime un sentiment d'incrédulité ou de raillerie légère] Sourire d'un air amusé, incrédule. Oh! Il vous aimait... Là, permettez-moi de sourire!... Il faut être naïve pour croire à l'amour de M. Pinto! (Bourdet, Sexe faible, 1931, i, p. 309).
Sourire dans sa barbe. Sourire discrètement, sous cape, aux actes ou aux propos d'autrui. Mon grand-père souriait dans sa barbe quand je traînais ma maussaderie dans son bureau (Sartre, Mots, 1964, p. 138).
b) Empl. trans. indir. Sourire à
α) [Le compl. désigne une pers.] Témoigner de la sympathie, de l'affection, de l'intérêt à quelqu'un en lui montrant un visage souriant. La jeune femme reprit son chant triste et doux, puis baisa le petit enfant qui lui souriait en lui tendant ses bras (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 17).Voici la mercière qui, sur le pas de sa porte, nous sourit et nous salue... (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 61).Le (...) chef d'orchestre (...) agitait ses bras pris dans une chemise bouffante en souriant aux dames avec langueur (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 274).
Loc. fig. Sourire aux anges. Sourire distraitement et sans raison apparente. M. Chasle (...) piqué sur sa chaise (...) souriait aux anges et semblait attendre le coup de grâce (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1273).
β) Au fig. [Le compl. désigne une entité abstr.] Porter un regard favorable et bienveillant (sur). Pense, chaque matin, à la page du soir: Vieillard, tu souriras au livre de ta vie (Brizeux, Marie, 1840, p. 9).Je fais mon possible pour sourire à toute chose en me parlant à moi-même, pour me consoler de ce que j'entends [à Paris] (Sand, Corresp., t. 3, 1847, p. 367).
c) Empl. pronom.
α) réfl. Albert (...) debout devant la glace, se souriait avec un air de satisfaction qui n'avait rien d'équivoque (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 520).
β) réciproque. Tous deux restèrent sans pouvoir parler, se souriant l'un à l'autre (Flaub.,Éduc. sent., t. 2,1869,p. 277).Le ministre et l'académicien se rencontrent assez souvent dans des solennités dont la solennité ne les empêche pas de se sourire, − et dans ce sourire, chers camarades, croyez bien que le souvenir du vieux collège entre pour quelque chose (Valéry, Variété IV, 1938, p. 201).
2. [Dans un cont. nég. ou dépréc.]
a) [Le sourire indique une insatisfaction] Sourire amèrement, douloureusement; sourire avec angoisse, gravité, mélancolie; sourire d'un sourire triste. Il ne s'agit pas de moi, reprit-elle en souriant avec amertume (Balzac, Lys, 1836, p. 150).Ma mère sourit tristement: − Mon enfant, les hommes sont souvent sans courage et sans foi (France, Vie fleur, 1922, p. 381).
b) [Le sourire indique des sentiments d'inimitié ou d'antipathie] Sourire avec (d')un air de reproche, d'un air (d'un sourire) narquois; sourire avec méchanceté, mépris. Elle s'endormit en souriant de ce sourire que doit avoir le génie du mal lorsqu'il a résolu la perte d'une âme (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p. 259).On apprend même à sourire jaune à l'odieuse MlleRinquet (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p. 19).
c) [Le sourire est affecté ou contraint, cache une autre réalité] Sourire d'un air contraint, embarrassé, avec embarras; sourire poliment. Lui, souriait d'un air gêné, comme s'il avait fait là une proposition blessante (Zola, Assommoir, 1877, p. 491).Je me mis à sourire, un peu piqué, d'un sourire de commande (Gracq, Syrtes, 1951, p. 112).
3. Manifester, par un sourire moqueur, qu'on ne prend guère au sérieux les actes ou les propos de quelqu'un. Synon. s'amuser, se moquer (de).Mais je ne souriais pas pour me moquer! Je compatis à ta peine, Henriette... (Bernstein, Secret, 1913, ii, 3, p. 18).
a) Sourire de (d'une pers. ou de l'une de ses particularités).Il faut donc sourire de la prétention de certains savants (Gourmont, Esthét. lang. fr., 1899, p. 28).− Ne souris pas de moi, mon enfant. − Ô mère! Je reviens à vous très humble (Gide, Retour enfant prod., 1907, p. 483).
Sourire sur.Aujourd'hui les voilà qui sourient sur eux-mêmes, car la vérité leur est venue comme l'effacement d'une question (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 620).
b) Faire sourire, prêter à sourire. Provoquer, par une attitude, par un propos particulier une situation prêtant à la moquerie, à la raillerie légère. Un accent qui fait sourire. Un homme de lettres ne devrait jamais faire le héros parmi ses livres s'il ne veut donner, non pas à rire, mais à sourire, ce qui est encore plus fâcheux (Green, Journal, 1954, p. 258):
2. Je vais peut-être vous faire sourire, mais mon ignorance était telle que je me suis longtemps représenté le sexe féminin, non pas dans le sens vertical, mais dans le sens horizontal, comme la bouche. H. Bazin, Vipère, 1948, p. 243.
B. − P. métaph. ou au fig.
1. Empl. intrans.
a) Poét. ou littér.
α) [Le suj. désigne des phénomènes climatiques ou météor. (liés au temps ou aux saisons) particulièrement agréables] La lune, le soleil sourit; avril, un matin d'hiver, un dimanche d'été, la nouvelle année sourit; l'aube sourit; les soirs de juin sourient. Et la nouvelle année, à la suite brumeuse, Laissant traîner les plis de sa robe neigeuse, Sourit avec des pleurs, et chante en grelottant... (Rimbaud, Poés., 1871, p. 35).La terre était en fleurs; le ciel bleu souriait sur sa tête; la vie chantait dans son jeune sein (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p. 279).
β) [Le suj. désigne la nature, ou un élément naturel, notamment les premiers bourgeons et les premières fleurs] Les plantes, les roses sourient. La verdure commence à courir sur les rameaux, les abricotiers sourient sous leurs petites fleurs roses (Taine, Voy. Ital., t. 1, 1866, p. 51).Les arbres dont les bourgeons sourient déjà, et, demain, éclateront de rire (Renard, Journal, 1906, p. 1038).
γ) [Le suj. désigne un élément construit du paysage et dont l'aspect est agréable à la vue] Le vieux bourg (...) sourit sous ses pierrailles À ses monts familiers qui rêvent dans l'azur (Samain, Chariot, 1900, p. 25).Le palais (...) souriait au centre d'un jardin à la française (Toulet, Comme une fantaisie, 1918, p. 193).
Sourire à qqn.Il faisait enfin grand jour. Paris me souriait par tous ses magasins ouverts; l'Odéon lui-même prenait pour me saluer un air affable, et les blanches reines de marbre du jardin du Luxembourg (...) semblaient me faire gracieusement signe de la tête (A. Daudet, Trente ans Paris, 1888, p. 7).
b) P. plaisant. [Le suj. désigne un vêtement, des chaussures] Bâiller, être fendu à certains endroits comme l'est la bouche quand elle sourit. Les souliers crèvent, le pantalon sourit, le linge manque (Vallès, Réfract., 1865, p. 17).
2. Empl. trans. indir. [Le sujet désigne un abstr.] Sourire à
a) Convenir, être agréable, plaire à. Vous me demandez si cela me sourirait, de vous fournir de quoi faire votre édition à bon marché (Sand, Corresp., t. 3, 1850, p. 203).On leur mettra la camisole de force pour aller à l'institut les jours de séance. Cette idée me sourit (Murger, Scènes vie boh., 1851, p. 182).
b) Être favorable à. Vous êtes riche, titré, de noblesse ancienne; vous avez des talents, de l'avenir, tout vous sourit (Balzac, Adieu, 1830, p. 55).De ce côté du moins la chance lui souriait. Tant de jeunes gens du quartier étaient chaque semaine emmenés pour les Ardennes, ou même le front! (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 248).
Prononc. et Orth.: [suʀi:ʀ], (il) sourit [-ʀi]. Ac. 1694, 1718: sous-; 1740: soû-; dep. 1762: sou-. Étymol. et Hist. 1. Ca 1140 surrire (Voyage de Charlemagne, éd. G. Favati, 373: l'uns a l'altre surrist); 1742 verbe réciproque (Crébillon fils, Le Sopha, 185: ils se sourioient d'une façon froide et contrainte); 1748 verbe réfl. (Diderot, Les Bijoux indiscrets, 161: Ariadné, placée devant son miroir, se sourit à elle-même); 2. 1174-77 sourire à qqc. (Renard, éd. M. Roques, br. III, 3983, p. 23: En sorïent as bacons dit); 3. 1636 « exprimer discrètement de l'ironie; se moquer » (J. Mairet, Les Galanteries du duc d'Osonne, p. 155); 4. 1675 en parlant d'une partie du visage (Mmede Villedière, Les Désordres de l'Amour, p. 156: sa bouche semble toujours sourire); 5. a) 1745 fig. avec comme suj. un nom de chose « présenter un aspect agréable » (F. d'Arnaud, Les Époux malheureux, p. 52: Il ne voit aucun obstacle; l'avenir lui sourit toujours); b) 1779 id. « resplendir » (J. Roucher, Les Mois, poème en 12 chants, t. 2, p. 77: côteaux escarpés où l'automne sourit). Du lat. pop. *subrι ̄dĕre, altér. du lat. subrι ̄dēre « sourire », dér. de ridēre « rire »; préf. sub-* marquant l'atténuation. Bbg. Quem. DDL t. 10.

SOURIRE2, subst. masc.

SOURIRE2, subst. masc.
A. − Expression discrètement rieuse du visage qui se traduit par un léger mouvement des lèvres (relèvement des commissures) et des yeux, laissant apparaître des sentiments divers, notamment de joie, de satisfaction, de sympathie:
1. Elle augmentait son sourire. Sourire d'une aisance extraordinaire qui prenait le tranchant d'un petit couteau. Sourire d'une tendresse presque criminelle. Sourire complice − jusque dans la nuit des temps de l'homme qui rebaissait la tête. Sourire à n'en plus finir. Sourire de métier? ah non! Déjà l'homme avait passé le but, et l'amour, l'amour était né. Jouve,Scène capit., 1935, p. 39.
1. Action de sourire; résultat de cette action.
a) [Avec art. déf.] Expression de quelqu'un qui sourit. (Avoir) le sourire à la bouche, aux lèvres, sur les lèvres, sur le visage; aimer le sourire de (qqn). Le sourire, ce doux épanouissement qui rend la jeunesse semblable aux fleurs (Musset,Lorenzaccio, 1834, i, 6, p. 119).Le sourire est le signe le plus délicat et le plus sensible de la distinction et de la qualité de l'esprit (Sainte-Beuve,Poisons, 1869, p. 25).
Loc. verb.
Avoir le sourire. Manifester sa joie, sa satisfaction dans une circonstance particulière. Il porte un costume de velours, un grand chapeau, de longs cheveux, et il a le sourire (Guitry,Veilleur, 1911, i, p. 5).
Garder le sourire. Rester aimable et souriant même dans l'adversité. Dans un monde où l'on vocifère (...) où l'on se tape de plus en plus sur le cœur, nous avons su garder le sourire tous les deux (Anouilh,Répét., 1950, v, p. 116).
Loc. prép. Avec le sourire. Avec joie, gentillesse, en gardant le sourire. Ajouter, parler, répondre, saluer, s'exécuter avec le sourire. Pour que j'accepte avec le sourire que mon fils soit entretenu par l'amant d'une vieille femme à cheveux jaunes (Cocteau,Parents, 1938, i, 4, p. 208).Xénia arriva dans un fiacre avec le sourire et tous ses bagages (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p. 70).
P. méton. Le sourire de l'œil (des yeux), du visage, de la bouche. Rien n'existe: tout est rêve. N'oublie pas l'alcool, qui l'aide... Gisors sourit. Le sourire de ses lèvres aux coins abaissés, amincies déjà, l'exprimait avec plus de complexité que ses paroles (Malraux,Cond. hum., 1933, p. 209).
b) [Gén. sous la forme un sourire suivi (ou précédé) d'un adj. ou d'un compl. de spécificité] Expression d'un visage qui sourit.
α) Sourire + adj. ou adj. + sourire.Un bref, faible, fin, grand, large, mince, pâle, petit, rapide, vague sourire; un beau, charmant, doux, gracieux sourire; un continuel, éternel sourire; un sourire céleste, contenu, délicieux, discret, divin, enchanteur, énigmatique, étrange, exquis, figé, indéfinissable, insaisissable, irrésistible, maternel, mystérieux, timide, tranquille. De belles filles pâles, avec des yeux noirs, des cheveux noirs et un ineffable sourire sur leurs lèvres roses (Sue,Atar-Gull, 1831, p. 19).Je revois l'habituel sourire qui me plaît tant, − le sourire enfantin qui n'efface pas tout à fait le pli triste de la bouche (Farrère,Homme qui assass., 1907, p. 211).
PSYCHOL. (Le) premier sourire (de l'enfant). Moment du développement de l'enfant, se situant aux environs du deuxième mois, où celui-ci manifeste sa satisfaction, sa joie en réagissant par un sourire (sourire social), période succédant à celle du pré-sourire (sourire mécanique), ,,sourire du simple plaisir physique`` (Foulq. 1971). Et cette bouche, qui s'ouvre avec le geste de la parole; et ce premier sourire, qui est la première émission et le premier témoignage moral (Goncourt,Journal, 1861, p. 880).C'est dès les premiers sourires (fin du deuxième mois), et dès les formes élémentaires d'imitation qu'on peut parler d'échanges actifs avec l'entourage (Traité sociol., 1968, p. 229).
β) (Le, un) sourire de + élém. de compar.Un sourire d'enfant; un sourire de sphinx. Relevant la tête et rayonnant d'un sourire d'ange: Vous me trouvez bien frileuse, n'est-ce pas? (Michelet,Journal, 1858, p. 403).Cette légère tension de l'orbiculaire qui suspend à ses lèvres le sourire de la Joconde (Mounier,Traité caract., 1946, p. 204).
γ) Loc. fam. [À propos d'un sourire empreint d'une certaine froideur, réfrigérant, glacial] Un sourire à fendre du bois (Vallès,Réfract., 1865, p. 73).Sourire à donner des engelures (Bloy,Femme pauvre, 1897, p. 275).
δ) Subst. + de sourire.Une espèce, une ombre de sourire. Une émotion fraternelle crispa (...) leurs bouches, dans une sorte de sourire amical (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 591).
ε) Verbe + sourire.Décocher des sourires; échanger, esquisser un sourire; faire un (des) sourire(s); jeter un sourire; avoir un sourire (pour). Il m'adressait à la dérobée de petits sourires où semblait se déclarer une sympathie toute personnelle (Proust,Guermantes 1, 1920, p. 408).Il s'approcha, serra des mains, distribua des sourires, et s'aperçut qu'il ne connaissait pas plus le marié que la mariée, s'étant tout simplement trompé de jour (Fargue,Piéton Paris, 1939, p. 71).
ζ) Prép. + sourire.Avec (de, par, sans) un (des) sourire(s); dire, répondre, saluer avec un sourire; s'exprimer par un sourire; s'achever par un sourire; acquiescer, remercier, saluer, s'excuser d'un sourire, par un sourire, sans un sourire, sans le moindre sourire. La vieille qui n'a plus de larynx (...) s'exprime surtout par hochements de tête, par sourires, par signes (Frapié,Maternelle, 1904, p. 287).Elle le remercia d'un sourire et posa la tête au creux, de l'oreiller (Martin du G.,Thib., Mort père, 1929, p. 1316).
Loc. Être tout sourire(s). Sourire largement, sans retenue. « Vous faites votre marché, Monsieur Slavsky? » L'épicière était tout sourire: c'était bien la première fois qu'on voyait M. Slavsky avec un sac à provisions. « Qu'est-ce que je vais vous donner? », continua-t-elle (Triolet,Prem. accroc, 1945, p. 258).Nous étions tout sourires quand nous sommes entrés dans le vaste salon (Beauvoir,Mandarins, 1954, p. 207).
BEAUX-ARTS. Expression peinte ou sculptée du sourire. Immortaliser un sourire sur une toile. Je ne pense pas pouvoir donner un plus amusant exemple des dispositions générales à l'égard de la peinture que la célébrité de ce « sourire de la Joconde », auquel l'épithète de mystérieux semble irrévocablement fixée (Valéry,Variété [I], 1924, p. 262).
2. [Le sourire traduit des états d'âme divers] Paul se retournait vers les Orgel et François, et leur souriait. Ce sourire pouvait s'interpréter de façons diverses. C'était soit: « Mais non, je vous assure, je suis très bien, il ne fait pas froid du tout », soit le sourire qui pardonne (Radiguet,Bal, 1923, p. 41).
a) Expression d'un sentiment favorable. De la place où j'étais, j'admirais ce don du sourire que Dieu a accordé aux monarques, cette élasticité des muscles qui tient à la fois à une supériorité de race et à un titre de vocation (Reybaud,J. Paturot, 1842, p. 227).Ils répondaient par d'égrillards sourires au sourire amusé des filles plantées debout au seuil des maisons − ce sourire qui grâcie et dit: − Mauvaises têtes! (Courteline,Train 8 h. 47, 1888, p. 211).
α) Adj. + sourire ou sourire + adj.Un sourire affectueux, aimable, amical, attendri, avenant, béat, bienveillant, bon, câlin, complaisant, complice, épanoui, fier, gai, gentil, heureux, indulgent, ingénu, malicieux, malin, poli, spirituel, tendre. Je l'ai revue, toujours avec son sourire. Pas un sourire forcé, pas un sourire qui paye, non, un vrai sourire, qui venait d'elle, et qu'elle donnait (Barbusse,Feu, 1916, p. 173).Il s'approche de notre table avec un sourire satisfait de patron dont les affaires prospèrent (Dorgelès,Croix de bois, 1919, p. 110).
β) Sourire de + subst.Un (des) sourire(s) d'accueil, d'attendrissement, de bienvenue, de bonté, de contentement, de joie, de remerciement. Sa mauvaise humeur fit place à un sourire de satisfaction qui rida ses lèvres (Sue,Atar-Gull, 1831, p. 15).Aucun sourire de reconnaissance ne vint adoucir sa poignée de main (Triolet,Prem. accroc, 1945, p. 80).
b) Expression d'une ironie, d'un doute. C'est justement ce sourire dont tu parles, ce sourire, cette ironie imperceptible (...) dont je te disais qu'il faisait le fond de mon être (Rivière,Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p. 40).L'hilarité était irrésistible au point que M. Nadaud lui-même y cédait; du moins souriait-il, et les rires alors, s'autorisant de ce sourire, ne se retinrent plus. Le sourire du professeur était ma condamnation assurée (Gide,Si le grain, 1924, p. 422).
α) Sourire + adj.Un sourire amusé, demi-moqueur, étonné, incrédule, (mi-)railleur. En cessant nos relations, nous y gagnons tous les deux (...) ajoutai-je avec un sourire tant soit peu ironique (Reybaud,J. Paturot, 1842, p. 410).Mouron, loin d'admirer et de s'émouvoir, garda durant mon récit un sourire moqueur (France,Vie fleur, 1922, p. 388).
β) Sourire de + subst.Un sourire d'incrédulité, de moquerie. L'on pouvait déjà prévoir, à son mauvais sourire d'ironie, qu'il ne ferait jamais rien de bon dans la vie (Aymé,Jument, 1933, p. 37).
γ) Verbe + sourire.Réprimer un sourire; laisser échapper un sourire; ne pas pouvoir retenir un sourire. Regarde-moi celui-là, avec sa mine de capitaine d'habillement tombé dans la graisse et dans le malheur! Jacques ne put retenir un sourire à la vue du vieil officier qui passait (Vogüé,Morts, 1899, p. 266).
c) Expression d'une politesse. Un sourire diplomatique, engageant, forcé, obligatoire, stéréotypé; un sourire de bureau, de commande, de métier; commerce à sourires. Il avait sur les lèvres le sourire de bienveillance que prennent les marchands quand vous entrez chez eux; mais ce sourire commercial était l'image de son contentement intérieur (Balzac,C. Birotteau, 1837, p. 66).Le maître d'hôtel (...) produisait son sourire numéro 1, le grand sourire d'un louis de pourboire (Hamp,Marée, 1908, p. 73).
d) Expression d'un malaise. Un sourire amer, déçu, désabusé, désespéré, douloureux, embarrassé, grave, mélancolique, résigné; un pauvre sourire; un sourire d'angoisse, de tristesse. Il hâte le pas sans y songer, avec un sourire si doux et si triste qu'un roulier qui passe lui tire son chapeau sans savoir pourquoi (Bernanos,Soleil Satan, 1926, p. 156).Son pauvre sourire n'en peut plus, et de grosses larmes roulent au bord de ses cils (Bernanos,M. Ouine, 1943, p. 1477).
e) Expression d'une agressivité. Un sourire acéré, aigu, aigre-doux, ambigu, blême, contraint, cruel, dédaigneux, effrayant, faux, hautain, hideux, horrible, hypocrite, insolent, insultant, méprisant, satisfait, triomphant; un affreux sourire; un sourire de dédain, de fatuité, de mépris, d'orgueil, de reproche. Je crus voir grimacer devant moi, avec son sourire glacial, la figure sèche de Desgenais (Musset,Confess. enf. s., 1836, p. 224).Un mauvais sourire point sur son visage, se développe comme une glaciale aurore de décembre (H. Bazin,Vipère, 1948, p. 259).
B. − P. métaph. ou au fig.
1. − [À propos de choses]
a) Littér. ou poét. [À propos de la nature ou d'un élément de la nature] Aspect agréable et souriant (de). Le sourire des arbres, des fleurs, d'une vallée. Il faisait un temps magnifique. (...) On eût dit le premier sourire du printemps. Tout avait un air de fête autour de moi (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p. 284).Des bocages creux, des chemins sombres, çà et là le bleu sourire d'une colline (Châteaubriant,Lourdines, 1911, p. 14):
2. ... Grazia lui apportait en dot le trésor le plus rare, que j'amais Olivier n'avait possédé: la joie. La joie de l'âme et des yeux. La lumière. Le sourire de ce ciel latin, qui baigne la laideur des plus humbles choses, qui fleurit les pierres des vieux murs, et communique à la tristesse même son calme rayonnement. Rolland,J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1461.
b) [À propos de choses en gén., ou d'un objet précis dont l'aspect est aimable, agréable] Le sourire d'une maison, d'une rue. Le résigné sourire d'un parloir Qui fit vœu de blancheur chez les Visitandines (Rodenbach,Règne sil., 1891, p. 3).Tout dans cette vieille rue, qui s'éveillait au soleil, m'était sourire et divertissement (France,Vie fleur, 1922, p. 321).
c) P. plaisant. [À propos d'un vêtement, d'un accessoire usagé] Déchirure, ouverture béante. Le géographe [jeta] un regard de détresse sur ses tristes, tristes vêtements, et le sourire de ses chaussures (Toulet,Comme une fantaisie, 1918, p. 100).
2. [À propos d'un inanimé abstr.]
a) Joie intérieure, bonheur intime. Le sourire de l'âme. [L'âme que votre âme a regardée] est si sûre d'on ne sait quoi que rien ne pourra désormais effacer ou pâlir son sourire intérieur (Maeterl.,Trésor humbles, 1896, p. 222).
b) Faveur, coup heureux du sort (v. sourire1II B 2). [Marchenoir] allait risquer cette somme qui lui tombait du ciel dans une entreprise des plus hasardeuses, mais capable, après tout, − en supposant un sourire de la Fortune, − de rémunérer le téméraire (Bloy,Désesp., 1886, p. 314).
Prononc. et Orth.: [suʀi:ʀ]. Ac. 1694, 1718: sous-; 1740: soû-; dep. 1762 sou- Étymol. et Hist. 1. 1454 sourir « action de sourire » (Le Livre de Alixandre et de Cligès son fils ds Cligès, éd. W. Foerster, p. 323); 2. 1763 fig. (Marmontel, Poétique Française, p. 153: au premier sourire du printemps). Empl. subst. de sourire1*.
STAT. Sourire1 et 2. Fréq. abs. littér.: 17 834. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 15 108, b) 27 490; xxes.: a) 29 705, b) 30 362. Bbg. Quem. DDL t. 28.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·