a) [Des loc. ou des syntagmes prép.] −
[Avec une valeur intensive, il est déterminé par un adj. ou par un subst. désignant un archétype de la patience] Patience d'ange, d'archange, de bénédictin, de fourmi, d'insecte; patience angélique, évangélique. Le coeur le plus froid, doublé de la tête la plus méthodique et d'une patience allemande, réussira cent fois mieux au piano que l'âme de Pergolèse (Stendhal, Rossini, 1823, pp.102-103).La plupart sont porteurs de bouquets craonnais, de ces bouquets serrés, fleur à fleur, ces mosaïques qui sont des chefs-d'oeuvre de la patience paysanne (H. Bazin, Vipère, 1948, p.237):2. Avec une patience de chat, il pouvait demeurer des heures couché à la gueule d'un terrier, le corps inerte ainsi qu'une souche, mais la main suspendue, le bras bandé pour la détente.
Genevoix, Raboliot, 1925, p.289.
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De patience, loc. adj. Qui est relatif à, qui requiert de la patience. Affaire, école, esprit, exercice, leçon, question de patience. Lorsque onze heures sonnaient, l'Anglais (...) ramassait prestement les bouts de crin (...), les outils délicats, avec lesquels il façonnait ses oeuvres de patience (E. de Goncourt, Faustin, 1882, p.306).♦ Ouvrage de patience. Un fauteuil de tapisserie au petit point, ouvrage de patience et de loisir mené à fin par quelque aïeule (Gautier, Fracasse, 1863, p.8).
♦ Jeu(x) de patience. Puzzle, boulier, jeux orientaux. Le dimanche matin, l'arrangement des assistances à la messe s'emboîtait comme un jeu de patience (Malègue, Augustin, t.1, 1933, p.65).Au fig. C'est un jeu de patience. C'est un travail minutieux.
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En patience, loc. adv. En paix, patiemment. ♦
Prendre qqn, qqc. en patience. Je prends mon mal en patience, je me livre avec courage à des travaux qui finiront par me rendre indépendant (Hugo, Lettres fiancée, 1820, p.15).Ils s'extasiaient ensemble sur les oeuvres des jeunes poètes, elle de bonne foi, lui s'ennuyant, mais prenant en patience les poètes romantiques, qu'en homme de l'école impériale il comprenait peu (Balzac, Illus. perdues, 1837, p.53):3. Est-elle immobile, cette terre? Dans les prairies, je la vois onduler, le noir mineur, la taupe, continue son travail. Plus haut, dans les lieux secs, s'étendent des greniers où le rat philosophe, sur un bon tas de blé, prend la saison en patience.
Michelet, Oiseau, 1856, p.172.
♦ Attendre, supporter qqc. en patience (vieilli, littér.). Attendre en patience et en paix ce que Dieu décidera du monde (Lamennais, Religion, 1826, p.260).Elle tient ma main, attend en patience et parfois se penche un peu (Colette, Cl. ménage, 1902, p.235).
− Patience à, de + inf.Ils sont remarquables par leur patience à supporter la faim (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p.83).Personne, hors les intéressés, n'eut la patience de l'écouter (Courier, Pamphlets pol., Procès, 1821, p.103).
− Patience à + subst.Le goût de la perfection implique alors une puissance et une ampleur de l'esprit, une patience au travail, une capacité d'abstraction et en même temps un sens frémissant de la matière, qui ne sont pas des manies vétilleuses (Mounier, Traité caract., 1946, p.449).
b) [Des loc. verb.] ♦ [Souvent à la forme impér.] Avoir patience. Ayez patience avec moi! (Rolland, Beethoven, t.1, 1937, p.87).
♦ (Ne pas) avoir la patience de + inf.(Ne pas) faire preuve de calme, de maîtrise de soi. J'admire, en vérité, que vous ayez la patience de courir chez ce bottier et de vous occuper comme vous faites de toutes mes affaires (Courier, Lettres Fr. et Ital., 1809, p.794).
♦ Donner patience à qqn. Faire patienter quelqu'un. Tout leur rôle consiste, autant que j'ai compris, À donner patience à nos futurs maris (Augier, P. Forestier, 1868, p.71).
♦ Se donner patience (vx). Prendre patience. (Ac. 1798-1878).
♦ Demander patience à qqn. Demander un atermoiement à quelqu'un. Demander patience aux créanciers (Proust, Guermantes 2, 1921, p.404).
♦ Être à bout de patience. Avoir épuisé toute sa patience. Je n'en puis plus; suis à bout de patience, et de force, et d'attente (Gide, Journal, 1917, p.639).
♦ Prendre patience. Se résigner à attendre, être patient. Synon. patienter.Quand ils voudront entrer au paradis, je serai à la porte et je les accuserai au tribunal de Dieu. Ainsi, hélas! ils prenaient patience (Musset, Confess. enf. s., 1836, p.23).Henri et Nadine avaient regardé avec colère les bourgeoises aux fourrures épaisses qui répondaient majestueusement aux mendiants: «Prenez patience!» (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.95).
♦ Perdre patience. S'impatienter. Il perdit patience, devint enragé, la menaça de son révolver (A. France, Île ping., 1908, p.380).Un créancier de Noémie qui perdait patience (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p.787).
♦ User de patience. Être patient. Mais il est vain De parler. Agissons. Usons de patience. D'abord. Il le faut bien. Puisque l'âpre science Et l'âpre maladie, en leurs mornes combats, Me piétinent, champ de bataille aux mille pas (Verlaine, Poèmes div., À ma femme, 1896, p.185).