1. Offense, injure grave de fait ou de parole. Synon. affront, insulte.Outrage cruel, odieux; endurer, essuyer, laver, recevoir, subir, venger un outrage; abreuver, accabler qqn d'outrages, des pires, de tous les outrages; obtenir, réclamer satisfaction des outrages subis. Quand un outrage est public, une femme aime à l'oublier, elle a des chances pour se grandir, elle est femme dans sa clémence; mais les femmes n'absolvent jamais de secrètes offenses (Balzac,Langeais,1834, p.233).Pourquoi dis-tu sans cesse que j'aime le clinquant, le chatoyant, le pailleté! Poète de la forme! C'est là le grand mot à outrages que les utilitaires jettent aux vrais artistes (Flaub.,Corresp.,1846, p.321):1. L'outrage est essentiellement une opération où il n'y en a qu'un qui sait au juste qui outrage, qui est outragé et s'il y a outrage: c'est celui qui outrage. L'outrage est une opération essentiellement volontaire, intentionnée (...). Je n'ai jamais outragé de gaieté de coeur. Je sens, je sais trop bien tout ce qu'il y a d'impie dans tout outrage, même juste, même inévitable, même commandé, même dû.
Péguy,V.-M., comte Hugo,1910, p.662.
− Faire outrage à qqn.Il ne la prostituait pas (...). Il ne l'a pas vendue. En l'accusant de ce crime grossier, vulgaire, on lui fait outrage. C'était un puriste au contraire, un délicat, un gourmet, si vous voulez. Non, il ne la vendait pas. Il la donnait à son domestique (Camus,Requiem,1956, 2epart., 4etabl., p.873).
− Outrage à + subst. (désignant une qualité, un sentiment, etc.) + de qqn.Outrage à la dignité, à l'honneur de qqn. Sur ses paupières qui se fermèrent soudain, je mis des baisers... des baisers... des baisers... tant et plus. (...) je passai des yeux à la bouche (...) elle ne résista pas trop, et quand nous nous regardâmes de nouveau, après cet outrage à la mémoire du capitaine tué au Tonkin, elle avait un air alangui, attendri, résigné, qui dissipa mes inquiétudes (Maupass.,Contes et nouv.,t.1, Tombales, 1881, p.1212).
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Le/les dernier(s) outrage(s). L'offense la plus grave qui puisse être faite. Ne s'en prenait-on pas aussi à la Chambre des Pairs? On était furieux de son audace. L'audace de la Chambre des Pairs! Certes, c'était là le dernier outrage et la dernière injustice qu'elle eût dû s'attendre à éprouver de l'opinion (Chateaubr.,Mém.,t.3, 1848, p.630).L'homme est investi de bien d'autres droits. Il peut déshonorer sa femme, la faire mettre en prison, et la condamner ensuite à rentrer sous sa dépendance, à subir son pardon et ses caresses! S'il lui épargne ce dernier outrage, le pire de tous, il peut lui faire une vie de fiel et d'amertume (Sand,Hist. vie,t.4, 1855, p.393).♦ En partic. Faire subir les derniers outrages (à une femme). Imposer à une femme, et contre son gré, des relations sexuelles. Les femmes, après avoir essuyé les derniers outrages, furent égorgées (Chateaubr.,Mél. hist.,1827, pp.362, 363).Nous avons à peine douze rêves d'adultère et, chose incroyable, peut-être jamais vue dans les annales de Dulcène, aucun homme n'a rêvé qu'il faisait subir les derniers outrages à sa belle-mère (Aymé,Puits,1932, p.136).
− Au fig. et p.métaph. Tort, dommage causé par manque de respect. Regarde comme une chose horrible de changer, d'omettre quelque chose dans la musique des bons compositeurs, ou d'y introduire des ornements nouveaux et à la mode. C'est le plus grand outrage que tu puisses faire à l'art (Taine,Notes Paris,1867, p.93).On a fait d'horribles outrages à des mélodies dignes de tous les respects (Berlioz,Souv. voy.,1869, p.175).Aucun outrage ne lui a été épargné [à la Cène de Vinci], et cependant son ombre seule suffit pour éclipser tous les chefs-d'oeuvre (Gautier,Guide Louvre,1872, p.207).