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OPPOSER, verbe trans.

OPPOSER, verbe trans.
I.
A. − [Correspond à opposition A] Rare. Placer deux choses face à face, mettre vis-à-vis. Opposer une porte feinte à la porte d'entrée (Ac.). Mais sur la tranche que ces plateaux de molasse opposent aux vallées, se succèdent des bourgs ou villages (Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum., 1921, p.176).Ça vous plaît qu'il ait cinq doigts à chaque main et qu'il puisse opposer le pouce aux autres doigts (Sartre dsLar. Lang. fr.).
B. −
1. [Correspond à opposition B 1] Mettre en contraste. Opposer deux couleurs. Courbet et Manet avaient échoué à rendre l'éclat et les délicatesses de la lumière, parce qu'ils ne savaient guère qu'opposer le clair et le sombre, le noir et le blanc (Hourticq,Hist. art, Fr., 1914, p.428).C'est merveille de voir la liberté avec laquelle (...) [Mozart] serre et desserre les formes, varie les timbres et oppose les voix (Ghéon,Prom. Mozart, 1932, p.208).
2. Mettre en balance deux choses, deux personnes différentes.
a) Mettre en parallèle de manière à faire valoir les différences ou ressemblances. On osa la juger [la doctrine d'Aristote] et la combattre; on lui opposa Platon (Condorcet,Esq. tabl. hist., 1794, p.121):
1. Crédules et abstraits, ils opposent le fond à la forme; opposition qui n'a de sens que dans le monde pratique, celui dans lequel il y a échange immédiat de paroles contre actes et d'actes contre paroles. Valéry,Variété III, 1936, p.26.
En partic. Mettre en concurrence. Si la duchesse eût daigné avoir recours à la moindre coquetterie, elle eût conquis ce coeur, par exemple, en lui opposant un rival (Stendhal,Chartreuse, 1839, p.145).
b) Présenter comme totalement différent. Cette femme a été conduite machinalement à faire cette phrase par l'antithèse banale des deux mots bon et bête que l'on oppose fort souvent l'un à l'autre dans notre langue (Delécluze,Journal, 1826, p.357):
2. Je crois qu'il n'y a pas là deux mondes séparés, le spirituel et le matériel, et qu'il est vain de les opposer. Ce sont deux aspects d'un même et unique univers; comme il est vain d'opposer l'âme et le corps. Gide,Journal, 1949, p.338.
C. − Opposer à
1. Placer quelque chose de manière à faire obstacle à quelque chose. Ce sont les maladies qui, parfois, déciment les écrevisses sans que l'on puisse rien opposer au fléau (Coupin,Animaux de nos pays, 1909, p.407).
[Dans un cont. métaph.] C'est par centaines de mille que les paysans russes de la terre noire se précipitaient en Sibérie, si le gouvernement russe n'eût opposé une digue à l'irruption trop brusque du flot (Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum., 1921, p.46).
En partic.
Répondre par. M. de Vaudreuil crut donc devoir opposer la ruse à la ruse (Baudry des Loz.,Voy. Louisiane, 1802, p.90).Elle ne lui a pas fait un seul reproche; elle ne lui a opposé que le refus le plus obstiné et la plus terrassante douceur (Barb. d'Aurev.,Mémor. pour l'A... B..., 1864, p.438).Ayant ouvert, il crut reconnaître de ces gens dont Monsieur de Meillan lui disait qu'il fallait leur opposer la plus grande inertie (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p.242).
Alléguer, objecter. Aimer d'un même amour des êtres dissemblables à des époques différentes, est peut-être le plus sûr des arguments à opposer aux négateurs de l'immortalité (Milosz,Amour. initiation, 1910, p.127):
3. Quelle objection juridique pourrait opposer la société bourgeoise après les précédents légaux qu'elle-même a créés? Jaurès,Ét. soc., 1901, p.235.
2. [L'obj. désigne des pers.] Mettre en face de quelqu'un, face à face pour un combat, une compétition. Comment oseraient-ils me combattre seuls (...) N'eussent-ils que mille hommes à t'opposer, ils te les opposeraient (A. France,Voie glor., 1915, p.64).Abusant de la servitude militaire, ils vont jusqu'à nous opposer les poitrines de certaines troupes professionnelles (De Gaulle,Mém. guerre, 1954, p.422).
JEUX, SPORTS. Un débat entre l'Est et l'Ouest incarné par une partie d'échecs qui oppose deux champions qui sont aussi, de plus ou moins bon gré, champions de leurs systèmes politiques respectifs (Télérama,10 avr. 1985, p.29).
Faire s'affronter. C'est là tout le sens du conflit qui oppose Ingres à Delacroix (Huyghe,Dialog. avec visible, 1955, p.206).
II. − Empl. pronom.
A. − Rare. ,,Être en face, vis-à-vis`` (Rob., Lar. Lang. fr.).
B. −
1. Contraster (avec). La basse harmonique se dégage de la mélodie, s'oppose à elle et en souligne l'articulation (Schaeffner,Orig. instrum. mus., 1936, p.61):
4. Il y a aussi les autres coiffures (...) surmontées d'aigrettes de fleurs raides, dont les couleurs s'opposent deux par deux et se marient étrangement. Artaud,Théâtre et son double, 1938, p.71.
2. Être le contraire de. Le beau s'oppose au laid. Les yeux saillants, à fleur de tête, s'opposent aux yeux profondément enfoncés (Richer,Nouv. anat. artist., t.2, 1920, p.123).Pour la logique de l'inconscient le terme composé amour-haine s'oppose à l'indifférence (Choisy,Psychanal., 1950, p.41).
C. − S'opposer à.Faire obstacle à quelque chose/quelqu'un.
1. Résister (à), combattre. Deux champions qui s'opposent. Les forces allemandes qui s'opposaient à l'avance de l'armée (Joffre,Mém., t.1, 1931, p.437).
2. [Le suj. désigne une ou des pers.]
a) Interdire. Toute une famille s'oppose à un mariage (Balzac,Cous. Bette, 1846, p.363).Je m'oppose à la vente! (R. Bazin,Blé, 1907, p.261):
5. Je n'ai pas besoin de vous dire que je m'oppose formellement à un pareil émiettement. Nos généraux et nos états-majors ne le cèdent en rien aux leurs. Nous refusons absolument de laisser employer nos moyens en détail par nos alliés. De Gaulle,Mém. guerre, 1954, p.636.
S'opposer à ce que + subj.Et moi je m'oppose à ce qu'on le prenne [ce monsieur] (Becque,Corbeaux, 1882, iii, 3, p.165).
b) Agir contre quelqu'un, braver quelqu'un. Mon grand mobile en m'opposant à Bock n'avait pas été de sauver un principe, mais de me trouver sur place quand les fouilleurs arriveraient à la trappe (Ambrière,Gdes vac., 1946, p.348).
3. Empêcher, faire obstacle à. Ici, rien ne restait du monde, qu'une nuit à laquelle Tchen s'accordait d'instinct comme à une amitié soudaine: ce monde nocturne, inquiet, ne s'opposait pas au meurtre (Malraux,Cond. hum., 1933, p.187).L'abstraction pour Rambert était tout ce qui s'opposait à son bonheur (Camus,Peste, 1947, p.1291).
Prononc. et Orth.: [ɔpoze], [o-], (il) oppose [ɔpo:z], [o-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1176 oposer «objecter» (Chrétien de Troyes, Cligés, éd. A. Micha, 4364); 2. a) ca 1224 «résister, se mettre en opposition» (Compl. de Jerus., ap. Bartsch, Lang. et litt. fr., 376, 10 ds Gdf. Compl.); b) 1431 part. prés. subst. «qui s'oppose à» (Enq., ap. Varin, Arch. admin. de Reims, 1, 48, ibid.); 1751 «hostile au pouvoir établi» (Voltaire, Louis XIV, 37 ds Littré); c) 1580 «placer de façon à faire obstacle» (Montaigne, Essais, éd. P. Villey, L. II, XII, p.598); d) 1671 «opposer une personne à une autre» (Molière, Psyché, Prol.); 3. a) 1321 «placer (une chose) vis-à-vis d'une autre» (Donat. Font.-les-Blanches ds Gdf. Compl.); b) 1681 part. passé subst. «chose ou personne d'une nature directement contraire» (Menestrier, Abrégé méthod. des principes héraldiques, p.155); c) 1873 «côté opposé, revers d'une monnaie» (Journ. Off., 18 févr., p.1186, 3ecol. ds Littré Suppl. 1877). B. Mil. xiies. verbe pronom. «se rebeller, désobéir» (Jeu d'Adam, éd. W. Noomen, 595); 1480 s'opposer à «refuser son accord à» (Mystere V. Testament, éd. J. de Rothschild, II, 334); 2. 1845-46 à l'opposé «au contraire» (Besch.); 1857 à l'opposé de «du côté opposé à» (Fromentin, Été Sahara, p.99). Empr. au lat. opponere «placer devant», «se dresser contre quelqu'un», «opposer comme obstacle, comme objection», francisé d'apr. poser*. Fréq. abs. littér.: 4213. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 7071, b) 2897; xxes.: a) 3993, b) 7930.

OPPOSÉ, -ÉE, part. passé, adj. et subst.

OPPOSÉ, -ÉE, part. passé, adj. et subst.
I. − Part. passé de opposer*.
II. − Emploi adj.
A. − [Correspond à opposer I A]
1. Placé vis-à-vis, situé en face de. Je fermai les yeux, et le courant me jeta sur le rivage opposé (Ménard,Rêv. païen,1876, p.94).Les deux tiers de la scène, du côté opposé, restent vides (Montherl.,Malatesta,1946, iii, 3, p.486):
1. Il n'a que quatre doigts aux pattes de devant, l'index restant atrophié; les pattes de derrière sont prenantes, les pouces nettement opposés au reste des doigts. Gide,Voy. Congo,1927, p.770.
BOT. [En parlant des feuilles] Situé deux par deux, de part et d'autre de la tige. Les feuilles [du cornouiller] sont opposées sur les espèces que nous possédons (Baudrillart,Nouv. manuel forest.,t.1, 1808, p.282).
GÉOM. Angles opposés (par le sommet). Angles dont les côtés de l'un sont formés par les prolongements des côtés de l'autre. (Dict. xxes.).
2. Qui est orienté en sens inverse. Le vent opposé du couchant est humide, parce qu'il passe sur l'océan Atlantique, dont il nous apporte les vapeurs (Bern.de St-P.,Harm. nat.,1814, p.375).Son regard suivait les taureaux qui, une fois tentés, s'en allaient dans la direction opposée au troupeau (Montherl.,Bestiaires,1926, p.419).
HÉRALD. Pièces, pointes opposées. Pièces, pointes semblables, mais posées en sens contraire. Lorsque sur une pièce coupée il y a deux pointes qui regardent l'une le haut et le chef de l'écu, l'autre la pointe et le bas, on dit que les pointes sont opposées, posées au contraire l'une de l'autre, ce qui évite de dire: chapé et chaussé (Adeline,Lex. termes art, 1884).
MATH. Nombres opposés. Nombres algébriques de la même valeur absolue, mais affectés d'un signe différent. + 5 et 5 sont des nombres opposés (Lar. Lang. fr.).
B. −
1. [Correspond à opposer B 1] Qui fait contraste. Chaque paire de couleurs complémentaires (...) il préfère les appeler couleurs opposées (Ovio,Vision coul.,1932, p.299).
2. [Correspond à opposition B 2 a]
a) [En parlant d'inanimés] Totalement différent. Synon. contraire, inverse; anton. analogue, similaire.Les femmes appellent cela s'habiller; le mot opposé serait plus juste (Reybaud,J. Paturot,1842, p.265).Je devrais, semble-t-il, choisir entre deux façons de voir opposées (G. Bataille, Exp. int.,1943, p.110).Fixé affectivement au géniteur de sexe opposé (Mounier,Traité caract.,1946, p.145):
2. ... les natures vraiment belles et riches ne sont pas celles où des éléments opposés se neutralisent et s'anéantissent, ce sont celles où les extrêmes se réunissent... Massis,Jugements,1923, p.103.
SYNT. Avis, goûts, méthodes, opinions, principes, solutions opposé(e)s.
LOG. Termes opposés. ,,Termes corrélatifs, contraires ou contradictoires l'un à l'autre`` (Lal. 1968).
b) [Correspond à opposition B 2 b; en parlant d'une pers.] Qui s'oppose, qui fait obstacle à quelqu'un. Synon. adversaire, hostile, ennemi.Plus tard le général Eisenhower semble avoir indiqué qu'il ne serait pas opposé à l'emploi de la bombe sur des objectifs purement militaires (Combat,19-20 janv. 1952, p.4, col.7).
POL. [Correspond à opposition C 3 c] Le parti opposé s'était retiré; nous restâmes les maîtres de l'élection (Reybaud,J. Paturot,1842p.165).
III. − Emploi subst.
A. − Le vis-à-vis, l'inverse. L'opposé du Nord est le Sud (Pt Rob.1980).
Loc. adv. À l'opposé. Du côté opposé. Trochut habitait vers le sud, près de la route qui va vers Sainte-Montaine; Raboliot juste à l'opposé (Genevoix,Raboliot,1925, p.54).
Loc. prép. À l'opposé de. Du côté opposé à. La fusillade qui s'était promptement interrompue reprend soudain, mais cette fois en amont, à l'opposé d'Etiamble (Vailland,Drôle de jeu,1945, p.165).
B. − Le contraire. La préoccupation est l'opposé de la liberté d'esprit (Maine de Biran,Journal,1816, p.195):
3. Il est étonnant combien les anciens avaient eu d'idées ingénieuses, combien même ils avaient découvert de vérités, en supposant, par exemple, qu'une chose avait toujours son contraire ou son opposé... Joubert,Pensées,t.1, 1824, p.401.
Fam. Cet enfant est tout l'opposé de son frère. (Ds Rob., Lar. Lang. fr.).
Loc. adv. À l'opposé. Au contraire, à l'inverse. Mais à l'opposé, si je me laissais prendre Verdun, pour n'avoir pas cru assez vite que c'était sérieux, les mêmes diraient que je suis décidément bouché à l'émeri (Romains,Hommes bonne vol.,1938, p.50).
Loc. prép. À l'opposé de. À l'inverse de. J'étais exactement à l'opposé de ce qu'elle aimait (Simenon,Vac. Maigret,1948, p.55).
REM.
Opposément, adv.,rare. D'une manière opposée. Ces deux esprits ne vivent pas dans le même monde et regardent opposément (Gide dsLar. Lang. fr.).
Prononc. et Orth.: [ɔpoze], [o-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Fréq. abs. littér.: 3381. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 7589, b) 3103; xxes.: a) 2862, b) 4518.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·