b) Syntagmes −
Ancienne noblesse, vieille noblesse. Noblesse existant avant la Révolution de 1789. Vous trouverez des manières dans l'ancienne noblesse, et dans la nouvelle des formes. Les seigneurs vous accueilleront avec cette grâce vraiment française et cette politesse chevaleresque, apanage de la haute naissance (Courier,Pamphlets, Au réd. «Censeur», 1820, p.45).M. de Viargue, était un des derniers représentants de la vieille noblesse du pays (Zola,M. Férat,1868, p.43):2. Tous les nouveaux nobles, quelle que soit leur origine, se sont hâtés de répéter dans le même esprit: il faut que le Tiers puisse députer des gentilshommes. La vieille noblesse, qui se dit la bonne, n'a pas le même intérêt à conserver cet abus; mais elle sait calculer. Elle a dit: nous mettrons nos enfants dans la chambre des communes, et, en tout, c'est une excellente idée que de nous charger de représenter le Tiers.
Sieyès,Tiers état,1789, p.39.
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Haute noblesse. Noblesse qui est à la fois la plus ancienne et la plus illustre. M. de Brossard (...) se prétend de la plus haute noblesse, descendant de Louis le Gros, je crois (Stendhal,H.Brulard, t.1, 1836, p.398):3. ... leur orgueil se nourrit de l'espérance de n'être plus confondues dans la foule des gentilshommes. Ainsi la haute noblesse consentirait de bon coeur à rejeter dans la chambre des communes le reste des nobles avec la généralité des citoyens.
Sieyès,Tiers état,1789p.59.
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Lettres de noblesse ou d'anoblissement. Lettres patentes du roi par laquelle il conférait la noblesse pour services rendus ou moyennant finance. En septembre 1664 un édit avait révoqué toutes les lettres de noblesse accordées depuis 1634 (Brasillach,Corneille,1938, p.413).V.
anoblir ex. 3:
4. Les lettres de noblesse datent en France de Philippe le Hardi: elles avaient pour but principal l'exemption des impôts que le Tiers État payait seul. Mais les anciens nobles de France ne regardaient jamais comme leurs égaux ceux qui n'étaient point nobles d'origine...
Staël,Consid. Révol. fr., t.2, 1817, p.208.
♦ P. métaph. L'idée de spéculation n'est certes pas sortie des esprits avec la chute de Law, mais le haut commerce ne paraît pas avoir conquis encore ses lettres de noblesse (E. Schneider, Charbon,1945, p.118).Le yachting acquiert ses lettres de noblesse aux quatre expositions universelles (1867, 1878, 1889, 1900) (Jeux et sports,1967, p.1543).
− Noblesse de cloche. Noblesse qui avait été acquise par l'exercice de fonctions de maire ou d'échevin. Quelque bourgeois y a gravé [sur la porte] les insignes de sa noblesse de cloches, la gloire de son échevinage oublié (Balzac,E. Grandet,1834, p.6).
− Noblesse dormante. Noblesse qui était suspendue, mise en sommeil, pour une cause de dérogeance temporaire: pendant la durée du mariage d'une femme noble avec un non-noble ou, dans certaines provinces, durant l'exercice d'une profession dérogeante. (Ds Littré, Guérin 1892, DG).
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Noblesse d'Empire, noblesse de l'Empire, noblesse impériale. Noblesse conférée par Napoléon à ses guerriers les plus glorieux ou à ceux qui avaient rendu d'éminents services civils. Vous avez plaidé pour Mademoiselle de Miremont, qui tient à la nouvelle noblesse, la noblesse de l'Empire (Scribe,Camaraderie,1837, i, 6, p.254).Robert (...) unissait, sans s'en rendre compte, à l'amour de la démocratie le dédain de la noblesse d'Empire (Proust,Guermantes 1,1920, p.79):5. La noblesse n'est rien si elle n'est une chose ancienne de plusieurs générations. Tant qu'il existe un témoin de sa naissance, elle n'est pas (...). De là vient le soin des familles patriciennes de faire oublier la date et de cacher le parchemin du titre primordial (...). Aussi belle, assurément, sera dans cent ans l'origine de la noblesse impériale et la légende n'en sera pas obscure.
Vigny,Mém. inéd.,1863, p.62.
− Noblesse d'épée. Noblesse très ancienne, parfois considérée comme originaire et dont les hommes se consacrent traditionnellement au métier des armes. Synon. noblesse de race.Les membres des parlements français eux-mêmes (...) n'ont jamais pu se faire considérer comme les égaux de la noblesse d'épée (Staël,Consid. Révol. fr., t.2, 1817, p.311).Un beau gaillard en uniforme, avec un tricorne sous le bras et une carte dépliée devant lui. −«Noblesse d'épée?» −«Presque...» (Martin du G.,Thib., Belle sais., 1923, p.894).
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Noblesse d'extraction, noblesse de race. Noblesse de naissance transmise par la ligne paternelle dont l'origine remonte aux grands feudataires ou même au-delà, se perdant dans la nuit des temps. Synon. noblesse de sang, de parage, de nom et d'armes, d'épée.Ce n'est point une noblesse de race, mais une magistrature héréditaire, à laquelle sont attachés les honneurs, à cause de l'utilité dont les pairs sont à la chose publique, et non en conséquence de l'héritage de la conquête, héritage qui constitue la noblesse féodale (Staël,Consid. Révol. fr., t.2, 1817p.208).Ces nobles de campagne étaient des paysans comme les autres, mais chefs des autres. Anciennement il n'y en avait qu'un dans chaque paroisse: ils étaient les têtes de colonne de la population; personne ne leur contestait ce droit, et on leur rendait de grands honneurs. Mais déjà, vers le temps de la Révolution, ils étaient devenus rares. Les paysans les tenaient pour les chefs laïques de la paroisse, comme le curé était le chef ecclésiastique (...). Cette petite noblesse de race avait disparu en grande partie (Renan,Souv. enf.,1883, p.27):6. ... vers le milieu du dix-septième siècle, une grande confusion s'était répandue dans l'ordre de la noblesse; des titres et des noms avaient été usurpés. Louis XIV prescrivit une enquête, afin de remettre chacun dans son droit. Christophe fut maintenu, sur preuve de sa noblesse d'ancienne extraction, dans son titre et dans la possession de ses armes.
Chateaubr.,Mém., t.1, 1848, p.18.
− Noblesse de finance. Noblesse acquise par l'achat de titres, de lettres de noblesse. (Ds Littré, Guérin 1892, DG, Lar. Lang. fr., Lexis 1975).
− Noblesse par lettres. Noblesse conférée par le souverain pour services rendus. (Ds DG, Lexis 1975).
− Noblesse militaire. Noblesse conférée, à la fin de l'Ancien Régime, pour service à l'armée pendant une certaine durée ou pour l'appartenance à certains grades. (Ds Littré, Guérin 1892, Lar. Lang. fr., Lexis 1975).
− Noblesse personnelle. Noblesse qui n'était pas transmissible. (Ds Guérin 1892, Lar. Lang. fr., Lexis 1975).
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Noblesse de robe. Noblesse acquise par l'exercice présent ou passé de certaines charges, p. oppos. à noblesse d'épée. Synon. plus rare noblesse d'office.M. Myriel était fils d'un conseiller au parlement d'Aix; noblesse de robe (Hugo,Misér., t.1, 1862, p.7).La noblesse s'en prenait à la vénalité et à l'hérédité des charges qui constituaient une autre aristocratie: car le Tiers État était en réalité la noblesse de robe (Bainville,Hist. Fr., t.1, 1924, p.202):7. Jean-Jacques Olier est né à Paris (...). Sa famille appartenait, depuis quelque cinquante ans, à la noblesse de robe: le bisaïeul marchand drapier à Chartres; le grand-père, conseiller-secrétaire du roi en 1556, et allié aux Molé; le père, grand audiencier de France.
Bremond,Hist. sent. relig., t.3, 1921, p.428.
− Nouvelle noblesse. V. noblesse d'Empire.
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Petite noblesse. Noblesse qui est moins ancienne et surtout moins illustre. Le but de ces randonnées (...) était quelque goûter, ou garden-party, chez un hobereau ou un bourgeois fort indignes de la marquise. Mais celle-ci, quoique dominant de très haut, par sa naissance et sa fortune, la petite noblesse des environs, avait, (...) tellement peur de décevoir quelqu'un qui l'avait invitée, qu'elle se rendait aux plus insignifiantes réunions mondaines du voisinage (Proust,Sodome,1922, p.765):8. Le gentilhomme avait cédé morceau par morceau sa terre aux paysans, ne se réservant que les rentes seigneuriales, qui lui conservaient l'apparence plutôt que la réalité de son ancien état. Plusieurs provinces de France, comme celle du Limousin, dont parle Turgot, n'étaient remplies que par une petite noblesse pauvre, qui ne possédait presque plus de terres et ne vivait guère que de droits seigneuriaux et de rentes foncières.
Tocqueville,Anc. Rég. et Révol.,1856, p.156.
c) Proverbes et loc. ♦
Noblesse oblige. Il faut vivre conformément à son rang et, p. anal., se conduire en faisant honneur au nom que l'on porte, à la famille à laquelle on appartient, à la position que l'on occupe. Tout ce que je viens de vous dire peut se résumer par un vieux mot: noblesse oblige! (Balzac,Lys,1836, p.164).Le caractère de cette noble fille était un exemple bien frappant de la maxime: noblesse oblige. Je ne connais rien de généreux, de noble, de difficile qui fût au-dessus de sa générosité et de son désintéressement (Stendhal,H. Brulard, t.1, 1836, p.310):9. Ces jeunes Anglais pensaient sérieusement à ressusciter la Chevalerie, son code de l'honneur, son respect religieux de la femme. La féodalité pouvait être périmée mais l'attitude féodale, qui considérait les hommes comme liés entre eux par des devoirs réciproques, restait la plus souhaitable. Ils regrettaient le temps où la règle de vie avait été «noblesse oblige».
Maurois,Disraëli,1927, p.151.
♦ Noblesse vient de vertu. La véritable grandeur, la seule supériorité proviennent de la valeur personnelle, du mérite, de la vertu. (Ds Ac. 1798, 1878, Littré, Guérin 1892).
♦ Soutenir noblesse (vieilli). Vivre, mener un train conforme à la noblesse de sa naissance. (Ds Ac. 1798, 1878, Littré, Guérin 1892, DG).