2. a) Action, fait d'abîmer, de détruire avec brutalité, avec violence. Synon. destruction, détérioration, déprédation, saccage.Je vais les étonner bien plus en leur demandant en justice des dommages et intérêts pour l'exécrable massacre de mon pauvre bois (Courier,Lettres Fr. et Ital., 1816, p.872).Elle se donna le régal d'un massacre, tapant les objets, prouvant qu'il n'y en avait pas un de solide en les détruisant tous (Zola,Nana, 1880, p.1436).
b) Action, fait de gâter de façon irréparable. Synon. destruction.Je ne vois aucun moyen pour ce malheureux, acharné au massacre de sa volonté d'échapper à l'abrutissement (Bloy,Journal, 1899, p.358).Alain dénonce la pensée en tant qu'elle est un «massacre d'impressions» (Benda,Fr. byz., 1945, p.18).
c) En partic. Attaque verbale, critique particulièrement violente. J'ai lu soigneusement tout ce que la critique a écrit sur Les Héritiers Rabourdin (...). J'avoue que, d'abord, cet accueil m'a émotionné. Ce n'était plus de la discussion, c'était du massacre (Zola,Hérit. Rabourdin, 1874, i, préf., p.1).[Il] lut une conférence-préambule, véritable massacre des poètes de l'époque, me laissant seul debout (Cocteau,Portr.-souv., 1935, p.163).
d) En partic. Action, fait de gâter involontairement par un travail maladroit ou brutal, par une interprétation ou une exécution très mauvaise. Le massacre d'une robe (Lar. 20e). Jamais (...) on ne vit pareil massacre des grands hommes grecs et romains [dans des dessins] (Champfl.,Bourgeois Molinch., 1855, p.106).Bien que Berlioz eût eu pendant quelques heures l'illusion d'une réussite, le massacre de la partition s'acheva (Bruneau,Mus. hier et demain, 1906, p.270).−
P. méton. ♦ Ce qui a été gâté par un travail maladroit ou brutal, une exécution ou une interprétation très mauvaise. Ce concert fut un massacre. Quant au jardin, n'en parlons pas, dit Mmede Cambremer. C'est un massacre. Ces allées qui s'en vont tout de guingois! (Proust,Sodome, 1922, p.945).Le petit lobe de son oreille portait une perle pour cacher le massacre véritable qu'avait fait un maladroit le perçant (Aragon,Beaux quart., 1936, p.309).
♦ Vieilli. Artisan, artiste particulièrement maladroit. Notre profession [la coiffure] est gâtée par des massacres qui ne comprennent ni leur époque ni leur art (Balzac,Comédiens, 1846, p.339).Les médecins, c'est tous des massacres. Pour que celui-là ne sache quoi dire, ça doit être qu'il n'y a pas grand'chose (Zola,Joie de vivre, 1884, p.960).
− Par antiphrase. [En parlant d'une oeuvre, d'un spectacle, d'un artiste] (Faire un) massacre. (Avoir un) très grand succès. Synon. faire un malheur.Son bouquin va faire un massacre (Hachette1980).
3. Jeu de massacre, p. ell. massacre (rare). Jeu forain qui consiste à renverser avec des balles des poupées grotesques placées à distance. Il avait une grande tête de jeu de massacre, les dents plantées de travers, quelques traces de petite vérole dans le visage (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p.73).−
P. méton. ♦ Baraque de foire où l'on joue à ce jeu. Il souriait devant les loteries, devant les chevaux de bois, et surtout devant le jeu de massacre. Il y demeura longtemps, ravi quand un amateur abattait le gendarme ou le curé (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Père Amable, 1886, p.231).
♦ Jouet d'enfant imitant ce jeu. Massacre en bois laqué décoré personnages excentriques (Catal. jouets [Bon Marché], 1936).
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Au fig. Et lisez le pamphlet de Maistre sur le Jansénisme (...). Quel jeu de massacre allant et gaillard! (Thibaudet,Hist. litt. fr., 1936, p.80).Le temps s'amuse à jouer au massacre avec nous, pensait-il; il nous bombarde à coups de secondes (Morand,Homme pressé, 1941, p.194):3. Sur le journal, je contemple, un instant, photographié à la sortie de l'Élysée, le jeu de massacre du ministère. Qui dira si c'est celui qui arrive ou celui qui s'en va?
Mauriac,Journal 1, 1934, p.16.