A. − Vx ou littér. 1. Qqn/qqc s'insinue dans qqc.Pénétrer doucement et progressivement dans quelque chose. Synon. s'infiltrer.Les couches de tissu cellulaire, qui s'insinuent dans les divisions du cerveau, qui se glissent entre les stries médullaires (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 215).Un flot neuf d'arrivants s'insinue dans les moindres interstices du public massé; des étudiants à bérets, des avocats en robe (...) se juchent en grappes, sur la crête des portants (Martin du G., J. Barois,1913, p. 380).
2. Qqn s'insinue entre.Se glisser entre. Le mécanicien a mis la voiture en marche. Il s'insinue entre les leviers et le volant pour regagner son siège frémissant (T. Bernard, Sur les grands chemins, Paris, Ollendorff, 1911, p. 134).
3. [Sans compl. prép.] Les plantes (...) profitant des moindres ouvertures (...) s'insinuent, puis, une fois entrées, elles grimpent, s'enroulent aux fenêtres, courent le long des balcons (Michelet, Chemins Europe,1874, p. 170).
B. − Au fig., littér. 1. Qqc. s'insinue dans qqc.S'introduire dans (l'esprit, les pensées de quelqu'un). Synon. envahir, se glisser, pénétrer.Si quelque pensée orgueilleuse s'insinue dans notre imagination, nous la rejetons aussitôt avec la salive du dédain (Lautréam., Chants Maldoror,1869, p. 149).Des préoccupations d'une précision trop humaine se mêlèrent à la ferveur de ses prières, (...) même des doutes terribles et lancinants s'insinuèrent en son âme (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 225).Un danger se dissimule dans ces phrases douceâtres, des impulsions meurtrières s'insinuent dans l'inquiétude affectueuse, une expression de tendresse distille tout à coup un subtil venin (Sarraute, Ère soupçon,1956, p. 122).−
[Sans compl. prép.] :
3. ... la pauvreté cessait d'être seulement privative, comme la croient trop souvent les riches; on la sentait réelle, agressive, attentionnée, elle régnait affreusement sur les esprits et sur les cœurs, s'insinuait partout, touchait aux endroits les plus secrets et les plus tendres, et faussait les ressorts délicats de la vie.
Gide, Si le grain,1924, p. 473.
2. Péj. Qqn s'insinue dans qqc., auprès de qqn.a) S'introduire avec habileté ou ruse dans, auprès de. Ambitieux, intrigant qui s'insinue; s'insinuer par la brigue, la flatterie : 4. Elle [l'Église] avait beaucoup d'influence, elle n'avait pas le pouvoir. Elle s'était insinuée dans les magistratures municipales; elle agissait puissamment sur les empereurs, sur tous leurs agens; mais l'administration positive des affaires publiques, le gouvernement proprement dit, l'Église ne l'avait pas.
Guizot, Hist. civilisation, Leçon no10, 1828, p. 10.
b) Gagner adroitement (les bonnes grâces, la confiance, l'esprit de qqn). Les princes, n'ayant jamais affaire qu'à des serviteurs de bon goût, qui s'insinuent plus facilement dans leur faveur que nos gens dans la nôtre, vivent et meurent sans avoir jamais l'idée des choses telles qu'elles sont (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 428).Sir Williams s'insinuait dans l'esprit et la confiance de la vieille baronne (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 450).