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FAIRE1, verbe trans.

FAIRE1, verbe trans.
I.− [Le suj. désigne un animé] Donner l'être, l'existence à, être l'auteur de.
A.− [Le suj. désigne Dieu; l'obj. désigne un animé ou un inanimé] Créer, donner l'être et la vie à. Dieu fit le ciel et la terre; Dieu a fait l'homme à son image. Ce n'est pas nous qui avons fait le ciel et la terre (Claudel, Père humil.,1920, II, 1, p. 516).« Me voilà, tel que Dieu m'a fait! » (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 129).
Faire + subst. + attribut de l'obj.Dieu (...) a fait toute créature périssable (H. Bazin, Vipère,1948, p. 275).
Loc. fam. Tous les jours que Dieu fait. Chaque jour (Ac.).
B.− [Le suj. et l'obj. désignent un animé] Donner naissance à.
1. Fam. [Le suj. désigne des pers.] Donner la vie à. Faire des enfants. Synon. procréer.La bourgeoisie, grosse famille de gens actifs, faisant des affaires, des enfants (Goncourt, Journal,1859, p. 603).Ils avaient bien besoin d'avoir un enfant! (...) ils n'en avaient sans doute nul besoin. Mais la nature voulait qu'ils en fissent un (France, Bonnard,1881, p. 273).
Loc. fam. Je le/la connais comme si je l'avais fait(e). Je le/la connais très bien. Madame Laure! je la connais comme si je l'avais faite. C'est une cliente (France, Crainquebille,1905, 3etabl., 1, p. 298).
a) [Le suj. désigne une femme] Faire un enfant. Synon. de enfanter.Cf. infra ex. 1.
b) [Le suj. désigne un homme] Pop. Faire un enfant à une femme. La rendre enceinte. Si je ne prenais pas mes précautions, il me ferait un gosse à tous coups (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 350).Ma jeune femme me portait l'affection la plus tendre, je lui faisais de beaux enfants bien sains, deux fils et une fille (Sartre, Mots,1964, p. 153).
2. Usuel [Le suj. désigne la femelle d'un animal] Mettre bas. Faire ses petits :
1. « Ça n'est pas possible (...) que des roses produisent des petits enfants. Non, les roses produisent des roses; ce sont les chattes qui font les petits chats; les mamans qui font les petites filles et les papas qui font les petits garçons. » Gide, Journal,1943, p. 230.
Au fig., fam. Faire des petits. Proliférer, se multiplier.
3. P. anal. [Le suj. désigne une plante] Faire des bourgeons, des feuilles. En France, les pommiers feront toujours des fleurs (Audiberti, Quoat,1ertabl., 1946, p. 30).
C.− [L'obj. désigne un inanimé concr.]
1. [Le suj. désigne un animé] Produire (par une fonction naturelle de l'organisme).
a) [Le suj. désigne une pers.]
α) Faire ses dents. Avoir les dents qui poussent. Faire une dent de sagesse. Aux pieds de l'aïeule, dans son moïse, le dernier né des Poitrine, Jeannot, faisait ses dents (France, Dieux ont soif,1912, p. 482).
β) Fam. Faire pipi, caca (lang. enf.), ses besoins. Uriner ou évacuer des matières fécales. Synon. vulg. pisser, chier.Plus jeune, il lui arrivait souvent de « faire son gros », comme elle dit, dans ses culottes, par paresse ou par incurie (Gide, Journal,1943, p. 214).Les plus malades (...) faisaient leurs besoins ou vomissaient sous eux (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 167).Tout à coup, je fis pipi sur ses genoux (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 123):
2. − Nous autres, les filles, nous devons nous arrêter pour faire les deux commissions. Les chevaux, les vaches font la grosse tout en courant mais sont obligés de s'arrêter pour faire pipi. Au contraire, les garçons s'arrêtent pour faire la grosse, mais font pipi tout en courant. Crois-tu qu'il existe des êtres au monde capables de faire les deux sans être obligés de s'arrêter, en marchant ou en courant? C'est impossible! Même les oiseaux se posent pour lâcher leur crotte, les chéris, qui ne font jamais pipi. Mais la tante sait faire pipi debout, tout comme un homme, sans s'accroupir. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 130.
[P. ell. du compl. d'obj.] Faire dans sa culotte, dans son lit.
b) [Le suj. désigne un animal] Faire ses crottes, du crottin. Évacuer des excréments.
[P. ell. du compl. d'obj.] Déjà la cour était interdite au petit chien; il pouvait bien faire dehors (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 253).
2. [Le suj. désigne un animé ou un inanimé concr.] Produire, émettre. Tomates qui font du jus, de l'eau (à la cuisson); savon qui fait de la mousse. Synon. donner, sécréter.Elle ferait maintenant du poison avec n'importe quoi, comme les diabétiques font du sucre... (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1492)
3. Rien ne justifie l'excès qu'on impute à la matière blanche ou grise, accessoirement au rôle sensitif et moteur, de « secréter » ainsi que bruit une apparence de paroles, l'intelligence et la volonté, comme le foie fait de la bile. Claudel, Connaissance Est,1907, p. 105.
D.− Réaliser (à l'aide d'éléments).
1. [L'obj. désigne un inanimé concr.] Produire, fabriquer. Faire un bouquet, faire du feu. Le cafetier (...) s'en alla à reculons en faisant des nœuds à sa serviette (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 125).
Loc. fig., vx. Faire feu qui dure. Mon cher enfant, il faut faire vie ou feu qui dure, je ne sais lequel on dit. Mais cela veut dire qu'il faut vous conserver longtemps (Chateaubr., Corresp.,t. 1, 1789-1824, p. 90).
Loc. à valeur adj. Comme on n'en fait plus. Comme on n'en rencontre plus. D'un caractère comme on n'en fait plus, tout d'une pièce, bourru, pas accueillant, peu aimable (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 331).
a) Domaine des réalisations artis. ou industr.Faire une maison. Synon. bâtir, construire.Tout en faisant de petits trousseaux et de petites layettes, tout en cousant de petites robes, de petits corsages et de petites brassières (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 488).Je fais des ponts, des routes (Camus, Exil et Roy.,1957, p. 1668).
P. anal. [Le suj. désigne un animal] Faire sa toile. Une cigogne a fait son nid autour de la cheminée (Quinet, Ahasvérus,1833, 3ejournée, p. 179):
4. J'ai vu un oiseau faire son nid. (...). À vrai dire, le gros oiseau bleu vif et bleu pâle a déjà construit son nid, mais il le façonne, il le piétine, il l'arrondit... Green, Journal,1948, p. 172.
b) Domaine des préparations (alimentaires, médicinales).Faire des confitures, un flan, une omelette, du pain, une tarte (cf. infra III A 4).Son histoire d'arsenic qu'elle avait pris pour du sucre, en faisant une crème à la vanille (Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 184).Éberlé (...) avait dit qu'en faisant une infusion avec le tissu du pancréas, il avait obtenu un liquide qui émulsionnait la graisse (Bernard, Principes méd. exp.,1878, p. 257).
Proverbe. On ne fait pas d'omelette* sans casser des œufs.
Emploi pronom. à sens passif. Le chocolat, dans ce temps-là, se faisait avec du cacao, du sucre et de la vanille (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 101).
c) Domaine littér. et artistique.Donner sa forme définitive à, élaborer. Faire un livre, des vers; faire un portrait, un tableau. M. Cadet de Gassicourt, poète-pharmacien, faisant des petits vers (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 70).Dumas fils dessinant, faisant des petits anges du Pérugin avec des ailes (Goncourt, Journal,1855, p. 190).
d) Domaine scol.Faire un devoir, ses devoirs. Le(s) rédiger. J'appris à faire mes devoirs, à étudier mes leçons dans le brouhaha des voix (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 99).
2. [L'obj. désigne une collectivité hum.] Donner l'existence à. Cavour a fait l'Italie. Synon. créer, établir, organiser :
5. Il préparait d'autre part une idéologie du terrorisme. Pour lui, le communisme était seulement le vrai moyen de faire revivre la Chine. − Je ne veux pas faire la Chine, dit Souen, je veux faire les miens avec ou sans elle. Les pauvres. C'est pour eux que j'accepte de mourir, de tuer. Pour eux seulement... Malraux, Cond. hum.,1933, p. 314.
Emploi pronom. En sorte que l'Église de Dieu aille se faisant et s'édifiant dans l'éternel et l'infini (Michelet, Journal,1842, p. 387).
E.− Obtenir, se procurer.
1. [Le suj. désigne une pers.; l'obj. désigne gén. un inanimé concr.] Amasser, obtenir (en assemblant).
a) Se fournir en, prendre. Faire du bois, de l'eau*, de l'essence. Le journal ne faisant pas d'abonnements, il était sans cesse en projets, en innovations (Goncourt, Journal,1853, p. 87).Gros ivrogne toujours satisfait pourvu qu'il fît son plein d'alcool (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 325).
b) Domaine agric.
Faire de l'herbe. Ramasser de l'herbe. Vous seriez bien gentil d'aller jusqu'à la route me faire un peu d'herbe pour mes lapins (A. Daudet, Jack,t. 1, 1876, p. 229).
Faire la/une récolte (de). Récolter, ramasser. Bêchant la terre, sciant les blés, faisant les foins par la chaleur de midi (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 1, p. 397).Au mois d'août, en pleine bataille, on avait trouvé moyen de faire et de rentrer les récoltes (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 19).
c) Gagner, obtenir. Faire de l'argent, de l'or (vx), des bénéfices. Une vingtaine d'objets dont il a fait plus de 100 000 francs... (Goncourt, Journal,1890, p. 1109).Ce spectacle continuait de connaître la faveur du public et faisait toujours de grosses recettes (Camus, Peste,1947, p. 1379).J'ai lu votre pièce, elle est magnifique (...), et je suis sûre qu'elle peut faire beaucoup d'argent (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 269).
Emploi pronom. réfl. indir. Les loyers augmentent tous les jours (...) Monsieur Vabre doit se faire dans les vingt-deux mille francs avec son immeuble (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 9).
Loc. verb. Faire fortune*, recette*; faire de la monnaie*.
2. [Le suj. et l'obj. désignent une pers.]
a) Domaine milit.Faire des troupes (vx), des recrues. Lever des troupes, des recrues. P. ext. [Dans une organisation] Faire une (nouvelle) recrue*.
b) Faire un prisonnier. Constituer quelqu'un prisonnier, le capturer. Le 28 et le 29, nos détachements (...) détruisent encore une quinzaine d'engins et font 200 prisonniers (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 255).
c) Lang. de la prostitution. Faire un client. L'entraîner. Synon. Lever.On se baigne. Celles des femmes dont les rondeurs sont suffisantes viennent là montrer à nu leur étalage et faire le client (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Femme de Paul, 1881, p. 1218).
F.− Constituer (un ensemble).
1. Composer. Couleurs qui font un ensemble harmonieux. Synon. aboutir à, former, produire.Un homme seul ne fait pas une paroisse (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1489).Ah! vous allez faire un trio d'amis (Sartre, Mains sales,1948, 3etabl., 2, p. 84):
6. ... comment que ça se fait que tant de bons chrétiens ne fassent pas une bonne chrétienté. Il faut qu'il y ait quelque chose qui ne marche pas. Péguy, Myst. charité,1910, p. 10.
Ça fait deux [Après 2 termes reliés par et] Ce sont deux choses, deux idées très différentes, à ne pas confondre. Être patient et être poire, ça fait deux (Prévert, Paroles,1946, p. 46).J'ai dit que je l'avais prévue. La prévoir et l'espérer, ça fait deux, non? (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 71).
Loc. verb. Faire bande* à part, corps*, équipe*; faire la paire*; faire cercle*; ne faire qu'un*.
2. Spéc., ARITHM. [En parlant du résultat d'une opération] Constituer ensemble (quant à la quantité). Deux et deux font quatre; cent centimètres font un mètre. Synon. égaler, équivaloir à.Le grand saint Nicolas (...) leur posait des questions faciles, comme, par exemple : « Combien font cinq fois cinq? » (France, Mir. Gd St Nic.,1909, p. 76).Moûlu compte les cigarettes : « Quatre-vingts. Ça fait onze par tête de pipe et il en reste trois à tirer au sort » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 229).De toute façon, ces opérations sont fausses. Un homme et un homme, ça ne fait pas deux hommes, ça fait à jamais un et un (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 336).
P. plaisant. :
7. Quatre et quatre huit Huit et huit font seize Et seize et seize qu'est-ce qu'ils font? Ils ne font rien seize et seize Et surtout pas trente-deux... Prévert, Paroles,1946, p. 174.
Loc. C'est clair comme deux et deux font quatre. C'est très clair, très simple. Ça ne fait pas assez. Le compte n'y est pas. Ça fait juste. Ça commence à bien faire (fam., au fig.). Ça suffit, en voilà assez, c'en est trop (avec une idée d'impatience).
G.− Loc. proverbiales. L'habit* ne fait pas le moine; l'occasion* fait le larron; une hirondelle* ne fait pas le printemps; les bons comptes font les bons amis*; l'argent ne fait pas le bonheur*; le malheur des uns fait le bonheur* des autres; l'union* fait la force.
II.− Donner une manière d'être à; être le sujet d'(une activité), la cause d'(un effet). [Faire et son compl. sont l'équivalent d'un verbe d'action ou d'état; l'idée dominante est celle d'une manière d'agir ou d'une manière d'être]
A.− Entreprendre et accomplir.
1. [L'obj. est un subst. ou un pron. neutre] Faire l'aumône, la charité, un crime, une erreur. Synon. effectuer, exécuter, opérer.D'ailleurs, vous avez du travail à faire, cela occupera vos après-midi (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 73):
8. Elle tournait toute la matinée, balayant, époussetant, nettoyant les chambres, lavant la vaisselle, faisant des besognes qui l'auraient écœurée autrefois. Jusqu'à midi, ces soins de ménage la tenaient sur les jambes, active et muette, sans lui laisser le temps de songer à autre chose qu'aux toiles d'araignée... Zola, T. Raquin,1867, p. 160.
Loc. à valeur adj. À tout faire. Apte à toutes sortes de besognes. Bonne* à tout faire. C'était Jeanne (...) qui avait indiqué Cadet comme un bon sujet, un garçon à tout faire, comme on dit (Sand, Jeanne,1844, p. 210).Il arrive que le même mot, (comme liberté), s'emploie à des besognes d'expressions fort différentes. C'est un mot à tout faire (Valéry, Regards sur monde act.,1931, p. 246).
Fam. (Il) faut le faire! [Pour marquer l'admiration ou, p. iron., le dénigrement]
Loc. Faire l'amour, la guerre, la paix; faire du charme, du plat (à qqn); faire des caprices, des embarras, des histoires, des manières; faire une crise, un drame, un malheur, une scène; faire le nécessaire, son possible; faire la loi; faire grâce; faire grève; faire erreur; faire des progrès; faire ça; faire qqc. pour qqn; en faire de belles; faire des siennes*; littér. ce faisant, pour ce faire (cf. ce1). Faire face*, front*, obstacle*, pendant*.
Rem. 1. Dans une lang. plus soutenue, et notamment dans la lang. écrite, on emploie un verbe plus précis. Perpétrer (un crime), commettre (une erreur), pratiquer (l'aumône) ou un verbe équivalent à faire + subst. Faire la cuisine/cuisiner; faire les vendanges/vendanger, etc. Mais dans le lang. fam. ou enfant., on rencontre de nombreuses loc. équivalant à un verbe d'action. Faire la bise, coucou, dodo, joujou, risette, trempette, etc. 2. Dans qq. cas le compl. d'obj. a valeur d'obj. interne. Faire une bonne mort. Tu vas te mettre au lit et tu vas faire un bon gros sommeil (Audiberti, Quoat, 1946, 2etabl., p. 74). 3. Le verbe faire est aussi compatible avec l'idée de repos. « Je n'ai pas dormi de la nuit, j'aimerais faire une sieste, prendre un bain » (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 312).
2. [L'obj. est un mot interr. ou un pron. antécédent d'une sub.]
a) [L'obj. est un pron. antécédent d'une sub.] Faire ce qu'il faut, ce qu'on peut. Onze heures seulement. Une fois de plus, il s'interrogea sur ce qu'il allait faire (Green, Moïra,1950, p. 236).« Ce que je fais, bonnes gens? Hé, je m'occupe à vieillir... Ça n'a l'air de rien, eh bien ça me prend tout mon temps! » (Martin du G., Souv. autobiogr.,1955, p. C).Proverbe. En mai*, fais ce qu'il te plaît.
[En corrélation et en oppos. avec dire] C'est plus facile à dire qu'à faire. « Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais » devient parfois, à peine avoué, un : « Faites ce que je fais, ne faites pas ce que je dis » (Mounier, Traité caract.,1946, p. 413).
Ne plus savoir ce que l'on fait. Avoir l'esprit ailleurs, s'affoler; déraisonner. « Je suis anéantie. Je ne sais plus ce que je fais. Je ne sais plus ce que je dis. Je pars travailler comme une automate » (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 188).
b) [L'obj. est un mot interr. ou concessif] Quoi qu'il fasse. Mais que faisons-nous pour mériter un tel honneur? (H. Bazin, Vipère,1948, p. 61).
[Pour marquer l'impatience, lorsqu'on attend qqn] (Mais) qu'est-ce qu'il fait? Synon. fabriquer, ficher (fam.), foutre (pop.).Personne encore! s'écria-t-il. Que font donc nos amis? (Musset, Mimi Pinson,1845, p. 223).
[Pour remédier à qqc.] Que faire? Quelle attitude prendre? Quelle ligne de conduite adopter? Je crus qu'on cherchait à me voler mon sac (...). Je ne sus que dire ni que faire : je ne bronchai pas (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 161):
9. Vous me regardez? Vous vous demandez tous « Que faire? » Et c'est pour ça que vous êtes venus ici, ce soir... Eh bien, je vais vous le dire! Car il y a quelque chose à faire! Il y a encore une possibilité de salut! Une seule! L'union dans la résistance! Le refus! ... Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 494.
Pour quoi faire? À quoi cela sert-il? Quel est le but de l'opération? Le typo cligne des yeux et dit : « Pour quoi faire? Puisqu'on va à Châlons » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 279).
[P. allus. littér.] Que diable allait-il faire dans cette galère*?
c) Familier
Le/la faire à + subst. déterminé. Agir d'une certaine façon, prendre telle attitude pour éblouir ou tromper quelqu'un. Le faire au bluff, à l'épate, au chiqué, au sentiment. Les comiques, au contraire, « la faisaient » à la simplicité. Ils s'abordaient d'un air piteux et bonhomme, s'appelant entre eux « ma pauv'vieille » (A. Daudet, Fromont jeune,1874, p. 272):
10. Deux jours plus tard Nadine m'a dit d'un air mi-furieux, mi-flatté : « Il est inouï, ce mec-là! il me la fait au chantage. Il dit qu'être correspondant de paix, c'est un métier qui l'emmerde et que si je ne vais pas avec lui, il laissera tomber. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 203.
Il ne faut pas me la faire, on ne me la fait pas à moi. Il ne faut pas essayer de me tromper, de me leurrer. La faire à qqn. Faire une mauvaise plaisanterie :
11. l'homme (...). − Madame, je viens pour le gaz. madame (...). − On passera payer. l'homme (...). − On passera payer! V'là huit fois que vous me la faites, celle-là, je commence à la connaître. Courteline, Vie mén.,Invite Monsieur, 1891, p. 74.
3. [L'obj. est un pron. indéf.]
Faire quelque chose (cf. chose2C).
(Il n'y a) rien à faire. On ne peut empêcher cela; il n'y a pas de remède à cette situation. Il est trop tard à présent pour s'en retirer. Rien à faire : ils devront boire l'amer calice et le vider jusqu'à la lie (Gide, Journal,1943, p. 189):
12. − J'ai eu beau chercher, je n'ai pas trouvé de solution, dit Elsa. − Il n'y en a pas, dit Cyril. C'est un engouement, une influence, il n'y a rien à faire. − Si, dis-je. Il y a un moyen. Vous n'avez aucune imagination. Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 107.
Il n'y a (plus) rien à faire (en parlant notamment de la santé de quelqu'un). On ne peut plus rien tenter pour sa santé.
Rien à faire! Je m'y refuse absolument, je ne céderai pas.
Littér. N'en rien faire. Ne pas exécuter l'ordre donné ou la tâche imposée. Frontin − Allez devant, je reviens tout de suite. Séverin. − Je n'en ferai rien, je veux attendre (Camus, Esprits,1953, I, 5, p. 469).
[Dans une formule de politesse] Je n'en ferai rien (pour laisser passer quelqu'un en s'effaçant devant lui). Après vous, je vous en prie. − Je n'en ferai rien, à vous l'honneur. Cf. infra 5 faites donc.
N'avoir rien à faire, n'avoir que faire (quelque part). Ne pas être à sa place, être importun ou inutile (dans un endroit, une situation). De peur que ton amour de la justice, là où elle n'a que faire, répande un jour le sang inutile (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 976).
Ne rien faire. Être oisif, paresseux, inactif, sans travail. Ne rien faire de ses dix doigts*. J'étais notée par toutes les maîtresses et tous les professeurs comme ne faisant absolument rien (Sand, Hist. vie,t. 3, 1855, p. 115).À quatre heures du matin, on ne fait rien en général et l'on dort (Camus, Peste,1947, p. 1307).C'est l'heure où ceux qui ne font rien se risquent sur les boulevards (Camus, Peste,1947p. 1315).
Ne rien faire
Ne rien faire pour qqn.Se désintéresser de quelqu'un.
Ne rien faire pour + inf.Ne pas intervenir pour. De multiples attentats furent commis contre des Français dans des localités syriennes sans que la gendarmerie fît rien pour les empêcher (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 189).
Ne rien avoir à faire
Ne rien avoir à faire avec qqn.N'avoir aucun rapport avec lui.
Ne rien avoir à faire avec qqc.Ne pas en avoir besoin, n'y avoir aucun intérêt.
Tout faire/faire tout
Tout faire/faire tout pour qqn/qqc.Être très dévoué à, se dépenser au service de.
Tout faire/faire tout pour + inf.Tout mettre en œuvre pour. Je ferai tout pour lui faire plaisir (Anouilh, Répét.,1950, II, p. 39).
N'avoir que faire de
N'avoir nul besoin de. Le valet n'a que faire de certaines vertus du maître : elles ne lui conviennent pas plus que le thym et la marjolaine à nos lapins de choux (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 2, p. 1615).Le chauffeur n'a que faire de cultiver en lui ces capacités individuelles. Pour ne point faillir à sa fonction de vitesse, il a besoin surtout de réflexes sûrs (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 41).
Ne faire nul cas de. Et qu'ai-je à faire d'eux, tous ces êtres qui ne sont pas l'aimée? (Vogüé, Morts,1899, p. 62).J'exigerai ton audience en retour. Je n'ai que faire de l'ami qui ne me connaît pas et réclame des explications (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 971).
Avoir de quoi faire. Avoir des moyens. Dès qu'ils [ces braves ouvriers] avaient de quoi faire le dimanche et le lundi, et vivre au courant tant bien que mal, ils étaient contents (Sue, Myst. Paris,t. 4, 1842, p. 97).
4. Loc. verb.
a) Domaine des loisirs.
Faire la bombe*, la bringue*, la fête*, la noce*, la nouba*; faire bombance*, etc.
Faire la grasse* matinée.
Vieilli. Faire + subst. désignant une fête. Célébrer. Je vais tous les ans faire les Rois chez mon vieil ami Chantal (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, MllePerle, 1886, p. 626).La pâque avait été depuis longtemps négligée. La dix-huitième année de son règne, le roi [Josias] fit une pâque solennelle, qui fit une profonde impression (Renan, Hist. peuple Isr.,t. 3, 1891, p. 196).
b) Domaine du jeu
Faire (une partie de). Jouer à. Faire une belote. Une partie d'échecs que nous devions faire, après dîner (Gide, Journal,1941, p. 95).Son beau-père était allé comme d'habitude faire sa partie de bridge à la « Brasserie du Remblai » (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 35).
Faire les cartes. Battre et distribuer les cartes.
Emploi abs. À qui est-ce de faire? C'est à vous de faire; je viens de faire (Ac.1932).
Faites vos jeux*, les jeux* sont faits.
c) Domaine milit.
Faire la garde, le guet, le quart, la ronde, etc. Exercer une activité de surveillance, de veille.
Faire la revue. Passer la revue. Au fig. Prêt à terminer mes recueils, faisant la revue autour de moi, j'aperçois des femmes que j'ai involontairement oubliées (Chateaubr., Mém.,t. 4, 1848, p. 543).
5. Emploi abs. Agir, se comporter. Comment faire? faites pour le mieux; faites comme vous voulez; croire bien faire de/en; regarder faire qqn; faire de son mieux; façon de faire. Je tuerais volontiers. Ne serait-ce que pour faire comme tout le monde (Montherl., Malatesta,1946, I, 7, p. 451).Arrivez donc! Faites vite! (Audiberti, Mal court,1947, I, p. 142).Jean-Jacques abandonna son projet et fit bien (Guéhenno, Jean-Jacques,1948, p. 123):
13. À Votre inspiration profonde, d'abord, qui me commande d'être, je répondrai par le soin à ne jamais étouffer, ni dévier, ni gaspiller ma puissance d'aimer et de faire. Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 79.
Proverbe. Bien faire et laisser dire. Ne pas s'occuper du qu'en dira-t-on.
Locutions
Faire comme chez soi. Agir en toute liberté, en toute simplicité. Péj. Agir avec trop de liberté, de familiarité.
(N')en faire (qu')à sa tête. Agir sans tenir compte de l'aide d'autrui. Vous êtes le seul élève de votre division à être externe libre. « Libre » : se lier le moins possible, faire à sa tête... (Montherl., Ville dont prince,1951, I, 3, p. 864).
Ça fait bien (de + inf.). C'est à la mode, bien porté, bien considéré (de). La Belle Angerie est si grande que nous en avions une [Chambre] pour chacun, dès l'âge le plus tendre... Ça fait bien (H. Bazin, Vipère,1948, p. 23).
Avoir beau* dire et beau faire; avoir beau* faire.
Faites donc, je vous en prie. [Formule de politesse, pour inviter quelqu'un à passer devant soi, à agir librement] .
B.− En partic.
1. Loc. [Sans compl. d'obj. subst.; désignant une action spécifique]
Avoir à faire. Avoir du travail, de l'occupation. Je m'en vais : j'ai à faire (Montherl., Ville dont prince,1951, III, 1, p. 907).
Avoir à faire à/avec. (Confusion avec avoir affaire*). Aujourd'hui, on a à faire à une expression de la nature humaine (Sartre, Existent.,1946, p. 111).Il reste que c'est avec la plus grande prudence qu'il faut user de la psychanalyse lorsqu'elle n'a pas à faire à des productions déréglées, mais aux créations supérieures de la conscience (Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 380).
Avoir mieux à faire que de + inf. Avoir quelque chose de plus important, de plus intéressant que de. De quoi faire rigoler Hitler s'il n'avait pas mieux à faire que d'écouter nos speakers (Gide, Journal,1940, p. 21).Il ne lui vient pas à l'esprit qu'on puisse jamais avoir mieux ou plus urgent à faire que de graviter autour de lui (Martin du G., Souv. autobiogr.,1955, p. lxvi).
Faire bien, mieux de + inf. Avoir avantage à. Nous ferions mieux de descendre du trottoir un instant (Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 218).On m'a parlé de lui l'autre jour. Tu feras bien de décourager ses visites (Green, Moïra,1950, p. 109).
Savoir y faire (fam.). Savoir s'y prendre (avec habileté, ruse, débrouillardise). Tu es un drôle de numéro toi. D'ailleurs, vous êtes des rigolos (...). Vous ne savez pas y faire. Il faut que je te donne des conseils (Cendrars, Main coupée,1946, p. 249).Enfin, on peut dire que tu as su y faire avec Lulu. Qu'est-ce que tu lui bouffes comme fric! (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 69).
2. Dire, exprimer, formuler.
a) Faire + subst. déterminé.[Le syntagme verbal est l'équivalent d'un verbe d'action] Faire des compliments, des injures, des reproches; faire des adieux, des remontrances. Les veux-tu? Mais j'aimerais mieux te les redonner en te faisant de vive voix des observations (Flaub., Corresp.,1853, p. 198).Ils causaient avec elle, faisant les demandes et les réponses, riant pour elle et pour eux (Zola, T. Raquin,1867, p. 176):
14. Tout en faisant des généralités, la vieille fille parlait de telle sorte que la femme de l'avoué en prit une bonne part. Ce moyen de conversation épuisé, la vieille fille ne parlait que de prêtres et d'affaires de sacristie. Champfl., Bourgeois Molinch.,1855, p. 27.
b) [En incise (souvent accompagné d'un adv.)] Dire, répondre. Fit-il, fit-elle. − Lâchez ma main, fit brutalement Steeny, et il regretta aussitôt cette inconvenance (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1546).
Pop. C'est pourtant vrai, que je lui fais, tu vas voir qu'ils vont nous cerner entre les deux étangs (Aymé, Jument,1933, p. 57).Hé dis donc! qu'elle me fait comme ça, viens voir par ici, Ferdinand! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 209).
c) [L'obj. est un subst. ou une onomat.] Pousser, émettre. Faire des oh! et des ah! faire les hauts cris; faire chut, ouf. J'entends le petit oiseau Qui fait pi i i i! (Claudel, Annonce,1948, IV, 2, p. 212).L'infirmière fit simplement : « Ts... ts... » et s'en alla (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 17).
C.− Effectuer (un geste, un mouvement, un déplacement).
1. [L'obj. désigne un subst. d'action] Faire un pas, un geste, une grimace, la révérence.
Au fig. :
15. Et à votre Providence enveloppante, ensuite, qui m'indique à chaque instant, par les événements du jour, le pas suivant à faire, l'échelon à gravir, je m'attacherai par le souci de ne manquer aucune occasion de monter « vers l'esprit ». Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 79.
2. [L'obj. désigne une distance, un parcours] Franchir, parcourir. Chemin* faisant; faire un voyage, un cent mètres. À la manière du philosophe Platon faisant sa randonnée autour de son idée (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 539).En faisant le tour du jardin après déjeuner, avec le vieux fermier qui m'a vu naître (Lamart., Tailleur pierre,1851, p. 398).
Mon sang* n'a fait qu'un tour; faire son chemin*.
a) [Avec un compl. de distance] Faire x kilomètres à pied. Quatre hommes me portèrent de Paris à Chalon, en faisant six lieues par jour (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 112).
[Pour exprimer la vitesse] Faire du 100 (km) à l'heure. Il y sera dit certainement : « Moi je fais du soixante à l'heure » (France, Pierre bl.,1905, p. 24).Il plongea dans l'auto, claqua la portière et démarra brutalement. Odette le regarda du coin de l'œil : le mieux était de se taire; il fait au moins du quatre-vingts (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 157).
b) Parcourir successivement ou visiter. Faire la Grèce, les châteaux de la Loire; faire les grands magasins. Le soir, faisant trois, quatre théâtres, courant les foyers, les corridors (Goncourt, Journal,1861, p. 976).Bien sûr, ils ne comptaient pas faire toute la foire, seulement quelques pas devant les premières baraques (A. Daudet, Rois en exil,1879, p. 2).Les fiancés allaient danser. Nous fîmes tous les dancings d'Anvers (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 83).
Pop. ou arg. Effectuer l'inspection de, examiner pour fouiller, voler. Faire le portefeuille de qqn; faire les poubelles :
16. Il [Michel] les épaterait bien, les copains! (...) il pourrait « leur payer un verre » (...) sans pour cela avoir besoin de faire les poches de Flavien... Vialar, Éperon arg.,1952, p. 226.
Dévaliser, cambrioler. Faire une banque, un joaillier. J'ai moi-même été fait d'une somme de 60 frs par un individu (Lucas, Dangers prost.,1841, p. 65):
17. À un moment donné, les naïves étrangères, notamment les riches Américaines, qui fréquentent les dancings, étaient « faites » de la façon suivante : un indicateur et danseur mondain leur volait adroitement leurs bijoux... L. Daudet, Police pol.,1934, p. 154.
c) En partic.
Effectuer l'ascension de. Chamonix est à quelques heures de Genève, je ferai le Mont-Blanc avant lui [Costecalde]! En êtes-vous, mes enfants? (A. Daudet, Tartarin Alpes,1885, p. 218).
Faire le trottoir*. Faire le mur*. Faire la queue*.
3. [L'obj. désigne une partie du corps]
a) Prendre, montrer, offrir (un air, une expression). Faire bon visage*, grise* mine, les yeux doux*; faire le gros dos*; faire la tête* (fam.), la gueule* (pop.).
Loc. verb. Faire contre mauvaise fortune bon cœur*; faire bonne mine* en mauvais jeu.
b) Faire de l'/du + subst. (à qqn). Faire signe de (pour exprimer un signe de connivence avec quelqu'un et entrer en contact avec lui). Faire du coude, du genou, de l'œil, du pied à qqn.
4. [L'obj. précédé de l'art. déf. désigne un exercice phys.] Faire la planche*, le pont*, le poirier*, la roue*, le grand écart*.
D.− Exercer (une activité suivie de façon régulière), employer son temps à. Ils feront des heures supplémentaires qui leur seront comptées plus tard dans le royaume de mon père (Prévert, Paroles,1946, p. 35).Le pharmacien qui herborise et qui fait de la radiesthésie (Abellio, Pacifiques,1946, p. 101):
18. − Que faites-vous l'hiver dans l'île? − Nous tressons des filets, nous pêchons les étangs, en faisant des trous dans la glace; le dimanche nous allons à la messe et aux vêpres, où nous chantons des cantiques; et puis nous jouons sur la neige et nous voyons les garçons chasser les ours blancs. Chateaubr., Mém.,t. 1, 1848, p. 269.
1. Domaine scol. et universitaire.Faire des études*, faire l'école buissonnière*; faire un doctorat, une licence.
En partic.
Faire + art. partitif + subst.Étudier, pratiquer (une matière, une discipline). Faire des maths :
19. − Personne ne t'oblige à faire de la chimie. C'est pour nous offenser que Nadine avait choisi la chimie, elle n'en était que trop punie. − Ce n'est pas la chimie qui m'emmerde, dit-elle, c'est d'être étudiante. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 59.
Faire + adj. poss. + subst.Suivre le cycle de. Il [Jean] avait fait ses classes avec soin, pour n'être pas puni, et terminé ses études de droit avec régularité (Maupass., Pierre et Jean,1888, p. 403).J'ai fait mes trois premières années de médecine. La mort de mon père a interrompu mes études (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 54).Antonho Prado (...) frais émoulu de la Sorbonne, où il était venu faire son droit (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 344).
Faire + subst. désignant une école.Suivre les cours de. Faire les Beaux-Arts, Navale, Polytechnique. Passé leurs bachots (...) elles feraient l'École du Louvre ou la Croix-Rouge (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 152).
2. Domaine prof.
a) Fam. ou région. Faire dans. Travailler dans, pratiquer le commerce de. Faire dans les cuirs.
b) Pratiquer (un métier, une discipline). Que faites-vous dans la vie? Faire du journalisme. Parce qu'il gagne à peu près sa vie en faisant du commerce (Champfl., Avent. MlleMariette,1853, p. 230).Aurez-vous jamais fini de faire la classe? − Je ... suis... professeur, Madame Marchal (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1545).Brunet se demande ce qu'il peut faire dans le civil. Petit commerçant? Employé? (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 202).
c) Vendre. Faire le gros, le demi-gros, le détail. Je ne me connais pas en toile; mais pour les draps j'en réponds. Seulement, si je fais les draps, il me faut un voyageur; car c'est de Sedan et d'Elbeuf que viennent les meilleures sortes (A. Daudet, Fromont jeune,1874, p. 153):
20. La marchande s'anime à son tour. Elle sait très bien ce que veut la cliente, elle a possédé l'article mais, depuis trois ans, on ne le fait plus; ce modèle-ci est plus récent, plus avantageux... Sartre, Mots,1964, p. 202.
3. Domaine du sp., des loisirs.[L'obj. est un subst. précédé de l'art. partitif] Pratiquer, s'adonner à.
a) [L'obj. désigne un sp., une discipline] Faire de la musique, du tennis. J'ai connu plusieurs femmes distinguées qui disaient ne pouvoir bien penser, ni bien causer, qu'en faisant de la tapisserie (Michelet, Peuple,1846, p. 24).
[L'obj. désigne l'instr.] Faire du ski, du vélo, de la voile. Il y a un petit prêtre qui fait de la bicyclette (Claudel, Poés. div.,1952, p. 877).
b) [L'obj. désigne une activité] Faire du camping, du tourisme, du sport.
Faire de l'exercice. Se dépenser, marcher. Travaillant toujours, sortant peu, ne faisant presque pas d'exercice, moi qui marchais tant autrefois (Hugo, Corresp.,1852, p. 73).Qu'il bouge, qu'il se promène, qu'il fasse de l'exercice (Mounier, Traité caract.,1946, p. 335).
4. Domaine pol. et soc.Faire de la politique, de l'opposition, du social.
E.− Exécuter (une prescription, une obligation); accomplir le temps prescrit pour. Faire son devoir; faire ses Pâques; faire pénitence; faire la volonté de Dieu; faire un régime; faire de la prison; faire son service militaire. Elle a des principes, elle fait maigre (Balzac, Autre ét. femme,1842, p. 383).Karlsbad, où j'avais été faire une cure, pour soigner je ne sais plus trop quoi (Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1197).
21. − Tu vois, me dit-elle d'une voix triomphante. Tu compliques toujours tout. D'abord, Lambert est toujours content de faire ce que je lui demande, c'est un bon petit garçon... Beauvoir, Mandarins,1954, p. 333.
P. ext. Faire les caprices, les fantaisies, les quatre volontés de qqn. Céder à (la volonté, aux désirs de quelqu'un). Vous n'ordonnez jamais que le cœur n'obéisse (...). On fait toujours le bien, en faisant son caprice (Lamart., T. Louverture,1850, III, 7, p. 1335).
F.− Être la cause (directe ou indirecte) de, l'agent de.
1. [Le suj. désigne une pers.] Causer, provoquer, susciter.
a) [L'obj. désigne un inanimé concr.] Faire du bruit, faire une blessure à qqn. Il fallait, dès le seuil de la porte, les lancer [les casquettes] sous le banc, de façon à frapper contre la muraille, en faisant beaucoup de poussière (Flaub., MmeBovary,t. 1, 1857, p. 2).Ils chantaient tous en chœur et faisaient un boucan de tous les diables (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 326).Un de nos critiques nous fustigeait du proverbe chinois : « Ce qui fait du bruit ne fait pas de bien, ce qui fait du bien ne fait pas de bruit » (Schaeffer, Rech. mus. concr.,1952, p. 73).
b) [L'obj. désigne un inanimé abstr.] Faire du bien, du mal; faire mal à. Je ne suis plus seulement capable de faire mal à une mouche (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1453).Et cela avait suffi pour lui faire une petite réputation dans le monde restreint du théâtre et lui susciter déjà des jalousies (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 69).
Loc. verb.
Faire envie, mal, peur, pitié, sensation :
22. Clark (...) me fait très bonne impression. Non seulement parce qu'il dit avec netteté ce qu'il a à dire, mais aussi parce qu'il demeure simple et droit dans l'exercice du commandement. De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 269.
Faire les délices, les beaux jours de. Néron tuant sa mère et Titus faisant les délices du genre humain (Lacord., Conf. N.-D.,1848, p. 182).
Faire qqc. à qqn. Lui faire du mal, mal agir envers lui, lui causer du tort. Qu'est-ce qu'ils pourraient bien lui faire? Qu'est-ce que je t'ai fait? Qu'est-ce que j'ai fait à Dieu pour avoir mis au jour un fils si coupable! (France, Révolte anges,1914, p. 3).« Qu'est-ce qu'ils t'ont fait, mon pauvre vieux? Tu n'as pas l'air de les avoir à la bonne. » « Ils ne m'ont rien fait, dit Brunet sèchement. Mais je les entends » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 212):
23. Ils étaient trop, il ne pouvait rien contre eux; ils étaient tous d'accord − eux qui étaient divisés sur tant de choses − pour l'outrager et l'écraser. C'était plus que de l'incompréhension : il y avait de la haine. Que leur avait-il donc fait à tous? Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 506.
Proverbe. Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fît.
2. [Le suj. désigne une chose]
a) Produire un effet, entraîner des conséquences. Rien n'y fait, cela ne fait rien à la chose. Ça me fera du bien. Cela me sera bénéfique. Le changement d'air lui fera du bien à cette petite (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 133).Attends, petit, j'ai son nom sur les lèvres..., Terra..., Terra..., marquis de Terranova..., de Terrasecca, ... rossa, ... puzzosa, non, ce n'est pas cela, cela ne me revient pas, ça n'a aucune importance, le nom ne fait rien à l'affaire (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 150).Et quand nous serions dans la rue, quand même tu me prendrais dans la rue, qu'est-ce que cela peut faire? Que veux-tu que cela fasse? (Gracq, Syrtes,1951, p. 182).
Familier
Faire un coup à qqn. L'impressionner, le bouleverser. Elle pensa : « Le pauvre vieux, ça va lui faire un coup, tout de même » (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 192).
Ça me (te, lui, etc.) fait une belle jambe*.
Ça lui fera les pieds*.
Ça fait des histoires. Cela entraîne des complications ou des réactions hostiles. Il regrettait le temps où elle râlait en silence (...) ça faisait moins d'histoires (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 59).
Grand bien lui fasse! (souvent p. iron). Que cela lui soit profitable. Je marie Fortuné. Séverin. − J'en suis heureux et que grand bien lui fasse (Camus, Esprits,1953, III, 9, p. 519).
b) Être important :
24. ... on ne peut dire que de tels travaux soient inutiles. Car ils font pour la connaissance des langues anciennes, et la connaissance des langues anciennes fait pour la philosophie de l'esprit humain. Renan, Avenir sc.,1890, p. 244.
Cela ne fait rien
C'est sans importance, je n'y attache pas d'importance. Croyez-vous que ce soit bien une conversation à tenir devant cette enfant? dit la baronne Schoudler (...). L'accouchée tourna légèrement la tête et lui sourit. − Ça ne fait rien, ma mère, ça ne fait rien, murmura-t-elle (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 13).
Synon. de peu importe.Il t'nait pas à les voir! Est-ce que j'y tenais, moi? Seulement, ça fait rien, je m'figurais pas la guerre comme ça (Benjamin, Gaspard,1915, p. 74).
Qu'est-ce que cela peut (bien) me/te faire? En quoi cela me/te concerne-t-il? T'as pas l'air de tenir à savoir si je l'ai tué ou non, le petit gars? − Qu'est-ce que ça peut bien me faire, mon amour? (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1480).Son égoïsme lui crée une sorte d'invulnérabilité. Il oppose à tout l'avenant un : « Qu'est-ce que cela peut bien me faire? » (Gide, Journal,1943, p. 167):
25. louise. − Mais la foi, comment vous est-elle venue? clérambard. − Que voulez-vous que ça me fasse? J'ai la foi. Je ne veux rien savoir d'autre. Peu importe d'où elle me vient. Je crois en Dieu, je crois en Notre Seigneur, je crois à saint François d'Assise. Aymé, Cléramb.,1950, IV, 5, p. 216.
Si cela ne te/vous fait rien (formule de politesse). Si cela ne te/vous dérange pas. Si cela ne te fait rien, je vais continuer mon travail. J'ai à finir la lecture de Roméo et Juliette (Green, Moïra,1950, p. 82).
Ça ne vous fait rien que...? Ça ne vous dérange pas que...? Mais dites donc, Madame Codomat, ça ne vous fait rien que votre mari soit tout le temps avec cette jeune femme? (T. Bernard, M. Codomat,1907, II, 3, p. 161).
Cela ne me/lui etc. fait ni chaud* ni froid.
3. Faire que + complétive.
a) À l'ind. Avoir pour résultat que. Sa négligence a fait que... Salammbô n'en racontait pas davantage (...) par un excès de candeur faisant qu'elle n'attachait guère d'importances (sic) aux baisers du soldat (Flaub., Salammbô,t. 2, 1863, p. 87).« Lois de la représentation », qui font que nous ne pouvons penser l'être qu'en l'objectivant (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 71):
26. ... tous obligés à protéger leur secret, mais ayant leur part d'un secret des autres que le reste de l'humanité ne soupçonne pas et qui fait qu'à eux les romans d'aventure les plus invraisemblables semblent vrais... Proust, Sodome,1922, p. 617.
[Reprenant une question incluant le verbe faire] Qu'est-ce que j'ai fait? − Tu as fait que tu nous as laissés.
Fam. Ça fait que; ce qui fait que. C'est pour cela que, c'est la raison pour laquelle. Synon. voilà pourquoi.Une pièce toute noire, on n'y voyait pas... Ça fait que je ne sais pas si elle pleurait ou si elle se taisait pour ne pas parler... (Goncourt, Journal,1879, p. 35).Je ne songe plus qu'à ce que je veux enfanter; peut-être est-ce là ce qui fait que tout le reste m'insupporte (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1892, p. 156).
b) Au subj. Les circonstances peuvent faire un jour que vous soyez commis à la garde de ce pacte (Gracq, Syrtes,1951, p. 149).
[Pour exprimer un souhait] Dieu fasse que, fasse le ciel que... Fasse le ciel que la jeunesse d'aujourd'hui (...) se montre aussi sage qu'elle sera ardente (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 2, 1823, p. 52).Enfin, Dieu fasse que cela tourne bien! (Camus, Chev. Olmedo,1957, 2ejournée, 1, p. 754).
4. Faire en sorte* de + inf.; faire en sorte* que + compl.
5. Laisser* faire.
G.− [Le suj. désigne une pers. ou une chose; l'obj. est un subst.] Présenter (un aspect physique, extérieur).
1. Former naturellement. Faire un angle, une bosse, des plis. Synon. constituer.Moustaches tristes, yeux faisant la virgule à l'angle extérieur (Chateaubr., Mém.,t. 1, 1848, p. 408).Dorothée (...) s'avance dans la rue déserte (...), faisant sur la lumière une tache éclatante et noire (Baudel., Poèmes prose,1867, p. 117):
27. La vallée se prolongeait, tantôt faisant des coudes, tantôt s'étranglant en défilés, selon que les blocs et les mamelons de la chaîne bifurquée faisaient saillie ou retraite. Gautier, Rom. momie,1858, p. 159.
[Dans des loc. verb., faire + subst. non déterminé] Jouer le rôle de, rappeler par sa forme, tenir lieu de. De jolies maisons de campagne, quelques-unes faisant châteaux, s'étalaient sur les collines (Michelet, Journal1839, p. 301).Mal abritée sous un petit acacia faisant dôme, elle regardait tristement la pluie qui commençait à mouiller sa robe (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 145).Rodolphe s'assit brusquement à son bureau, sous la tête de cerf faisant trophée contre la muraille (Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 41).
Faire tapisserie*.
Au fig., fam. Ça ne fait pas un pli*.
2. GRAMM. Avoir pour variante morphologique ou syntaxique. « Cheval » fait au pluriel « chevaux »; « faire » fait à la 3epersonne de l'indicatif présent « font ».
3. [Pour exprimer une mesure de l'espace ou du temps]
a) [Dimensions, poids, prix, volume, etc.] Équivaloir à, égaler. Le bassin fait 10 m de long. Songez qu'à nous deux (...) nous ne faisions pas trente-quatre ans (A. Daudet, Pt Chose,1868, p. 226).Tous comptes faits, l'emprunt de la Libération produit 165 milliards qui en feraient 1 200 d'aujourd'hui (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 37).
b) Domaine de l'habillement.Mesurer. Vous faites du combien? Quelle pointure, quel tour de taille faites-vous?
c) Avoir une durée de, être en usage pendant + compl. de temps. Ce manteau m'a fait trois ans, il fera bien encore la saison. Qui pourrait supputer ou peser ce qu'il entre D'aliments, de boissons, au gouffre de son ventre? Un cachalot lui fait six jours, quelquefois sept (Pommier, Colifichets,1860, p. 177).
d) [Pour exprimer la durée écoulée, à partir d'une date fixe] Ça fait x temps que... Synon. de il y a, depuis.Il n'avait jamais voulu prendre la montagne et c'est après lui que je l'ai prise. Ça fait donc quinze ans maintenant (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 196):
28. Et depuis combien de temps dure cette... liaison? (...). − Trois mois, répondit-elle. − Et il y a trois mois que tu es dans cet état? − Non. Ça doit faire six semaines. Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 126.
e) [Pour exprimer une fréquence] Cela fait. C'est. S'il n'est pas arrivé, me dis-je, c'est que le métro est encore en panne; d'ailleurs, cela fait la troisième aujourd'hui. On dirait que c'est un fait exprès (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 125).
4. Domaine phys. et psychique.[L'obj. désigne une maladie, un trouble phys. ou psychique] Faire une bronchite; faire de la température; faire une dépression, de la neurasthénie; faire de la tension. Mon premier malade fut un cancéreux d'une maigreur effroyable qui « faisait » − comme on disait − des troubles cérébraux (L. Daudet, Dev. douleur,1931, p. 60):
29. Et la réaction individuelle, ici encore, est capitale : on peut gaver certains types maigres, ils ne grossiront guère, d'autres feront de l'embonpoint avec le régime le plus strict... Mounier, Traité caract.,1946, p. 126.
Faire des complexes*; faire un rêve, un cauchemar.
Loc. fig. En faire une maladie*. Cf. infra III D 2 a.
III.− Déterminer (quelqu'un/quelque chose) dans un état, une qualité, une manière d'être ou d'agir. [L'existence de ce qui est désigné par l'obj. est présupposée]
A.− [Le suj. désigne une pers.; l'obj. désigne un inanimé concr.] Mettre, remettre en état, en ordre.
1. Loc. verb.
a) Domaine des tâches domestiques.Faire les cuivres*, faire un lit*, faire sa valise*. (Quasi-)synon. nettoyer, arranger.
Faire une chambre, une pièce. La nettoyer, la remettre en ordre. Faire sa chambre à fond. Le domestique, en faisant les chambres, redescendait les bougeoirs (Duranty, Malh. H. Gérard,1860, p. 319).
Faire ses chaussures. Les nettoyer, les cirer.
Faire la vaisselle. La laver, l'essuyer. Un après-midi, j'aidais maman à faire la vaisselle; elle lavait des assiettes, je les essuyais (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 105).
b) Domaine des soins de beauté.Synon. entretenir, embellir, soigner.
Faire la barbe (à qqn). Tailler, raser la barbe. En me faisant faire la barbe, devant moi un bocal (Goncourt, Journal,1858, p. 442).
Faire les mains, les ongles à qqn. Synon. manucurer (fam.).Elle s'assied et fait ses ongles (Laforgue, Moral. légend.,1887, p. 232).Il a demandé un bain aux Allemands, il s'est rasé, s'est fait faire les mains (Anouilh, Répét.,1950, I, p. 21).
Emploi pronom. réfl. indir. Se faire les yeux. Se maquiller (les yeux). Elle [l'enfant prodige] était en train de se faire les yeux; elle ne s'est même pas retournée (Colette, Music-hall,1913, p. 189).Je m'étais lavé les mains et fait les ongles, j'avais mis un col propre (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 58).
c) Domaines divers.[Faire remplace, notamment ds la lang. fam., un verbe d'action plus précis] Alors, elle si discrète [Martine], parla de ses travaux de jardinage, dit qu'elle trouvait le temps de faire les légumes, afin d'éviter quelques journées d'homme (Zola, Dr Pascal,1893, p. 150).Être là un peu avant deux heures pour m'aider, comme elle aurait dit à des maîtres d'hôtel extras d'arriver d'avance pour faire les compotiers (Proust, Guermantes 1,1920, p. 216).Un fantassin, au retour des cuisines allemandes où il avait été « faire les peluches » (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 43).
SYNT. Faire le col (d'une chemise). Le repasser. Faire son jardin. Le cultiver, l'entretenir. Faire la vigne. La tailler, lui donner les soins nécessaires. Faire les rosiers. Les tailler.
2. Domaine culinaire.Apprêter, préparer, faire cuire ou chauffer (un plat, un repas). Faire un bœuf bourguignon, un œuf sur le plat, du veau. Ce fut la concierge qui vint lui faire son petit déjeuner et ouvrir les fenêtres (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 172):
30. ... elle se met déjà à vous parler de sa vieille maman qui est si seule et avec qui il faudra être bien gentil, des petits plats qu'elle sait si bien faire, du prénom qu'aura son bébé. Anouilh, Répét.,1950, IV, p. 108.
Faire la salade. La laver, l'assaisonner.
B.− [L'obj. désigne une pers.] Former. Faire des soldats, des hommes, de bons élèves. Synon. éduquer, instruire :
31. Les Lanson croient nous avoir répondu quand ils disent : c'est entendu, nous ne vous fournissons pas des élèves qui aient du génie, mais connaissez-vous une méthode pour faire des hommes de génie? Barrès, Cahiers,t. 8, 1910, p. 143.
C.− Donner une qualité, un caractère, un état à.
1. Faire qqn + subst. (attribut de l'obj.) non déterminé.Élever au rang de, donner le titre, la dignité de. Faire qqn héritier, chevalier de la Légion d'honneur. Synon. nommer, instituer, constituer.En le faisant roi, on l'avait condamné à mourir sur le sol où s'est mêlée la poussière de saint Louis et de Henri IV (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 650).Le jeune marquis avait cru s'acquitter envers sa femme en la faisant marquise (Sandeau, Sacs,1851, p. 46).
P. ext. Rendre, faire devenir. Cette aventure me fait homme (Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 179).
Faire qqn juge de. Laisser à quelqu'un le soin de juger, d'apprécier.
2. Faire qqn + adj. (attribut de l'obj.)
a) Rendre, faire devenir. Faire qqn riche. « Merci, mon bon Monsieur, merci (...). Vous êtes très bon. Je prierai la Sainte Vierge de vous faire très heureux » (Ségur, Auberge ange gard.,1863, p. 10).C'est dimanche, à l'heure du déjeuner, qu'on s'est aperçu que les petites manquaient. Je les avais faites belles pour la messe de huit heures (A. Daudet, Sapho,1884, p. 120).
b) [L'attribut est un adj. poss.] Faire sien qqc. S'approprier, se rendre maître de; adopter (un jugement, un point de vue, une attitude). Un étude à laquelle a procédé le général de Larminat et dont je fais miennes toutes les conclusions (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 448).Je déterrai cette religion féroce et je la fis mienne pour dorer ma terne vocation (Sartre, Mots,1964, p. 148).
En emploi abs. Consentir c'est prendre sur soi, assumer, faire sien (Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 322).
c) Représenter, donner comme. Ne le faites pas plus méchant qu'il n'est :
32. Mais l'autre quart chez Montaigne a donné l'éveil; en mettant expressément à part la religion, en la faisant si grande et si haute, et la voulant si fort révérer, qu'il lui coupe toute communication avec le reste de l'homme, il s'est trahi... Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 413.
3. Faire qqc. (à) + compl. de prix.Je vous fais cet article (à) 50 F. Synon. évaluer à, fixer à.
Faire un prix* (d'ami). Fixer un prix. Si le commerce était mieux fait, c'est le client qui devrait faire son prix (Aymé, Cléramb.,1950, I, 7, p. 52).
4. Faire qqc. + adj. (attribut de l'obj.) à qqn.Rendre. Je lui faisais la vie impossible (Laforgue, Moral. légend.,1887, p. 240).Et je ne veux point vous faire le cœur dur à la mort (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 791).
5. Faire + adj. substantivé.Causer, entraîner. Faire des jaloux, des mécontents. Ainsi elle traversait sa jeunesse, l'esprit flottant à tous les vents de l'imprévu, faisant beaucoup d'heureux (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 236).
D.− Faire qqn/qqc. de (qqn/qqc.).Changer, transformer en passant d'un état à un autre.
1. [L'obj. désigne une pers.] Faire d'un capitaine un commandant; nous en ferons un médecin; vous en avez fait un monstre, un enfant gâté. Mais que je prenne en main cette petite aristocrate (...), et je vous en ferai une vraie Carmélite, aussi bonne à la chapelle qu'au lavoir (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 3, p. 1618).La famille de Gouvon qu'il servait avait reconnu sa valeur. Elle voulait en faire un secrétaire, lui faire apprendre l'italien, le latin (Guéhenno, Jean-Jacques,1948, p. 51):
33. Quand un homme choisit une jeune fille pour en faire sa femme, c'est qu'il a été sensible à certaines séductions qui ne sont pas toutes du cœur ni de l'esprit. Aymé, Cléramb.,1950, II, 8, p. 116.
2. [L'obj. désigne une chose]
a) Faire d'un métal une médaille; faire qqc. de rien :
34. Mais un vent sort des cieux sans bornes, Grondant comme les grandes eaux, Et souffle sur ces pierres mornes, Et de ces pierres fait des os... Hugo, Contempl.,t. 3, p. 407.
Faire un drame, une histoire, une maladie, une montagne (de qqc.). Dramatiser la situation, s'affliger ou s'affoler démesurément de quelque chose. Il fait un monde de rien et soupçonne un cancer dans chaque cor au pied (Camus, Cas intéress.,1955, 1ertemps, 2etabl., p. 627).
Loc. fig. et/ou proverbes. Faire d'une pierre deux coups*; faire feu*; faire flèche* de tout bois; faire ses choux* gras de; faites en des choux* et des raves*; en faire sa chose*; faire des gorges* chaudes de; ne faire qu'une bouchée* de. On ne saurait faire d'une buse un épervier. On ne peut faire d'un sot un homme habile (Ac.). Faire d'une mouche, d'une puce un éléphant. Grossir exagérément la portée d'une affaire, dramatiser une situation. Faire de nécessité* vertu.
b) Utiliser comme, aménager en. Faire un salon d'une salle à manger; faire un hôpital d'un bâtiment privé; faire un parc public d'un jardin privé. De la source, sa cuvette, La fleur, faisant son miroir, Dit : « Bonjour », à la fauvette (Hugo, Contempl.,t. 1, 1856, p. 107).« Des assiettes! » dit-il en désignant une pile d'assiettes ébréchées au fond noirci. « Qu'est-ce que vous voulez en faire? Les manger? » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 223).
Emploi pronom. Se servir de quelque chose comme de. Des écureuils circulaient sur les branches (...) en se faisant un pavillon de leur queue (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 68).J'ai aperçu le traître Eusévio dans les fourrés de la montagne. C'est en vain qu'il se fait un rempart de ces rochers (Camus, Dév. croix,1953, p. 579).
3. [Dans un cont. interr.]
a) [L'obj. indir. désigne une pers.] Qu'avez-vous fait de lui? Sobres et vertueux, − de vrais sauvages... − Que faire d'eux? soupirait ma mère. Ils étaient si doux que nul ne les pouvait atteindre ni diviser (Colette, Sido,1929, p. 130):
35. Que dois-je faire des coupables, Herr Sonderführer? − Mais... les laisser continuer, puisqu'ils n'ont commis ni contravention à l'ordre de l'OKW relatif aux rapports des prisonniers avec les femmes allemandes, ni manquement au travail, ni attentat public à la pudeur! Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 212.
b) [L'obj. indir. désigne un inanimé] Qu'est-ce que j'ai fait de mes lunettes? Où les ai-je mises?
E.− Représenter, tenir la place de.
1. [Le suj. désigne une pers.]
a) Domaine des loisirs.Représenter (un personnage), tenir le rôle de.
α) Domaine du spectacle.Faire Esther, les soubrettes. Je changeai vite de costume, et, faisant l'apothicaire, je commençai l'intermède, en brandissant l'instrument classique au-dessus de ma tête (Sand, Hist. vie,t. 3, 1855, p. 240).Je connais la pièce par cœur. Je l'ai jouée autrefois avec Monsieur de Molière : c'est moi qui faisais don Diègue (Claudel, Raviss. Scapin,1952, p. 1317):
36. Ces scènes de la vie de couvent [dans le film de Bresson « Les Anges du Péché »] les ont transportées et non contentes de nous les décrire, elles se sont mises en tête d'en jouer une devant nous. Louise faisait la mère supérieure... Green, Journal,1946, p. 20.
β) Domaine des jeux d'enfants.Faire le chat, le gendarme, le loup, les voleurs.
γ) Domaine des jeux de société.Faire le mort*. Me rendre utile et agréable aux maîtresses de maisons en faisant le quatrième de quelque table boiteuse de joueuses et de joueurs dépareillés (Lamart., Confid.,1851, p. 80).
b) Exercer les fonctions, la responsabilité de.
α) [L'activité est permanente, régulière] C'est que jamais un militaire, poursuivit-il, n'a été fichu de faire un bon ministre de la guerre (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 139).Il se mariera un jour, par coup de tête; et peut-être il fera un bon père de famille (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 293):
37. Mon fils, il fait le couillon. Il fait le berger. C'est comme ça. Dans ce village, et dans les autres, il y a des enfants d'épiciers ou de simples charcutiers qui passent le bachot pour être colonels. Moi, le mien, il fait le berger. Je n'en rougis pas. Audiberti, Femmes Bœuf,1948, p. 118.
Pop. Faire + subst. non déterminé.Faire professeur. Y veut faire soldat dedans l'aussiliaire (Musette, Cagayous poilu,1919, p. 2).
β) [L'activité est occasionnelle] Faire le domestique. Je faisais le nègre à la Mazarine, copiant à la main (...) les épais romans de chevalerie (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 380).Tu trouveras aussi des verres. Tu nous sers; tu fais la jeune fille de la maison (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 126).
c) Imiter intentionnellement, chercher à passer pour. Synon. contrefaire, imiter, simuler.
α) Faire le + subst. ou adj. subst.Faire le difficile, le dégoûté, l'idiot, l'innocent, le pitre, le malade. Tous les anges du Bon Dieu viendront et ils me diront : « Allons, viens, Alonso, viens, ne fais pas le méchant ». Et moi, je dirai « non » (Camus, Révolte Asturies,1936, II, 3, p. 418).Cela se raidit, cela fait la fière, cela veut se conduire comme une vraie dame (Anouilh, Répét.,1950, IV, p. 110).Que vous ne travailliez pas et fassiez le pantin devant la glace, c'est votre affaire! (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 119):
38. ... jamais Charles ne lui paraissait aussi désagréable (...). Alors, tout en faisant l'épouse et la vertueuse, elle s'enflammait à l'idée de cette tête dont les cheveux noirs se tournaient en une bouche vers le front hâlé... Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 26.
Faire le jeune homme. Être galant, se donner un air jeune. Alors il va faire le jeune homme dans les bals costumés? (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Masque, 1889, p. 1163).
Faire la princesse. Prendre de grands airs. Notre Mélancolie est petite-maîtresse, Elle prend des grands airs, elle fait la princesse (Gautier, Poésies,1872, p. 214).
[Loc. verb. au fig., où le compl. désigne un animal symbolique] Faire le singe, le zèbre. C'est étonnant comme il fait le paon, papa, avec cet hôtel (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 33).Lâche-moi, nom de Dieu, ou je fais la vache (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 114).Doña Inès. − Ne m'a-t-il pas écrit? Tello. − Quel âne je fais! voici la lettre, Madame (Camus, Chev. Olmedo,1957, 2ejournée, 10, p. 772).
Proverbe. Qui veut faire l'ange* fait la bête.
Rem. Lorsque le suj. est fém., faire peut être suivi néanmoins de le. Elle fait le/la bravache.
β) Faire son/sa + subst.Faire sa mijaurée, son petit malin. Le baron préférait faire son lézard au soleil sur le galet (Maupass., Une Vie,1883, p. 36).
d) Loc. verb. Faire semblant* (de), mine* (de).
Faire celui qui, comme si. Jouer à celui qui, simuler. La consigne universelle, la ridicule fiction est de faire comme si on ne savait rien, quoique tout le monde sache très bien à quoi s'en tenir; chacun joue la comédie, chacun affecte de croire le vieillard immortel, le malade guérissable (Jankél., Je-ne-sais-quoi,1957, p. 172).
En emploi abs. Partout, l'on triche. Partout, l'on fait comme si... C'est insupportable. C'est horrible (Audiberti, Mal court,1947, III, p. 185).
2. [Le suj. désigne un inanimé] Tenir lieu de, faire aussi office de. Salle à manger qui fait salon, cuisine qui fait salle de séjour. Au fond, dans le logis « faisant hôtel », une « comtesse » (Proust, Guermantes 1,1920, p. 16).
F.− Paraître, sembler.
1. Faire + adj. ou subst. non déterminé (gén. inv.)Avoir l'air de, donner l'impression de. Elle fait vieux/ vieille pour son âge; faire jeune, grand; faire très vieille France; faire très femme; faire sérieux, vrai. Ricarda, lui, faisait très « fils de bourgeois » (Abellio, Pacifiques,1946, p. 29).Il faisait très orphelin dans son complet de flanelle dont le revers était barré d'un crêpe noir (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 294):
39. Ils choisissent de préférence des sujets tirés de l'histoire sainte ou de l'histoire ancienne, et ils parlent constamment de faire distingué, comme si la distinction ne venait point de la manière dont on traite un sujet et non du sujet lui-même. Tenez que la plupart n'ont reçu aucune éducation, qu'ils n'ont rien vu et rien lu, que « faire distingué », pour eux, c'est tout bonnement ne pas faire vivant et ne pas faire vrai. Huysmans, Art mod.,1883, p. 8.
Ne pas faire son âge. Paraître très jeune, plus jeune que son âge réel.
2. Faire + adv. de manière (fam.).Produire tel effet, avoir telle allure. Faire bien (dans le décor, le tableau), sur une photo, dans un film. Les serviteurs à tête blanche font bien dans une grande maison (Augier, Pierre de Touche,1854, III, p. 80).Tes vieux messieurs à col dur? Ils feraient très bien dans les vitrines du Musée de l'Homme (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 91):
40. Lequel fait mieux, des fleurs ou bien des plumes blanches? Quelle parure sied? − quelle couleur va bien? Gautier, Albertus,1833, p. 138.
IV.− Emplois partic.
A.− Emplois pronom. spécifiques. V. faire2(se).
B.− Emplois impers.
1. [Suivi d'un adj. ou d'un subst. gén. non déterminé; pour indiquer ou suggérer des conditions météor., climatiques ou un moment de la journée ou de la nuit]
a) Faire + adj.Il fait chaud, clair, doux; il fait noir comme dans un four. Mets ton collet, il fait plus frais (Mauriac, Myst. Frontenac,1933, p. 90).L'homme est arrivé à créer, parmi les grandes eaux froides et noires, une zone habitable où il fait à peu près clair et chaud (Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 172).
Au fig. littér. Je savais pourtant combien il peut faire noir dans un cœur (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 248):
41. Il fait bleu il fait bon Il fait aujourd'hui Il fait bon il fait bleu Et je suis née juste aujourd'hui Si vous voulez savoir mon nom Mon nom est Iris bleu! Claudel, Poés. div.,1952, p. 743.
b) Faire + subst.Il fait presque jour; il fait nuit (noire); il fait (du) soleil, du brouillard, une chaleur torride, un beau soleil; quel temps fait-il? Il ne faisait pas de lune ni d'étoiles. Mais une sorte de lumière diffuse et l'air était si épais qu'on l'aurait coupé au couteau (Barrès, Cahiers,t. 7, 1908, p. 71).A cinq heures (...) quelque temps qu'il fasse, MmeLouise descend au village avec la bonne (Bernanos, Mauv. rêve,1948, p. 1004).
P. anal., fam. Il fait faim, soif. J'ai/nous avons faim, soif. Il fait soif à bord (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 232):
42. ... quand, à la maison, il faisait faim, c'est toi qui chantais encore (...) et nous donnais le courage de chanter, nous aussi! E. de Goncourt, Faustin,1882, p. 33.
2. Il fait bon/mauvais (à/de) + inf. Il est agréable/ désagréable, dangereux de; cela fait du bien/ne fait pas de bien de. Auprès de ma blonde, qu'il fait bon dormir (vieille chanson française). Que la forêt était belle sous le soleil d'avril! Qu'il faisait bon à respirer, loin des baraques fétides et des sueurs recuites! (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 367).Il [le loriot] dit qu'il fait bon labourer (Claudel, Annonce,1948, I, 3, p. 160):
43. Le remblai, jusqu'au bout cette fois, y compris la maison du docteur Bellamy qui était le type même de ces demeures que les passants regardent avec envie en pensant : − Qu'il doit donc faire bon y vivre... Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 25.
3. Il ferait beau* voir.
C.− Emplois factitifs. V. faire3.
D.− Emplois passifs
1. Locutions
Ce qui est fait. Il n'y a plus à y revenir, n'en parlons plus (en parlant généralement d'une action regrettable). « ... un ennemi de notre religion? Mais c'est abominable! Élevé comme tu l'as été! » Jean (répondant à Cécile seule, sur un ton angoissé et sombre). − Ce qui est fait est fait. Tu souffres? Moi aussi... (Martin du G., Barois,1913, p. 299).Eh bien oui (...) tu aurais dû rester à Paris (...) − Enfin! ce qui est fait est fait (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 161).
Voilà qui est fait. C'est terminé (en parlant d'une action délicate ou importante). (Il ouvre la porte, la mère le suit avec hésitation jusque sur le seuil.) Voilà qui est fait (Camus, Cas intéress.,1955, 1ertemps, 3etabl., p. 635).
Croire que tout est fait. Croire que tout est joué. Une fois qu'il a parlé, il croit que tout est fait (Mounier, Traité caract.,1946, p. 400).
2. Être fait pour + subst. ou inf. Être destiné à.
a) [Le suj. désigne une pers.] . Être prédisposé à, avoir des talents pour. Elisabeth et Paul, faits pour l'enfance, continuaient à vivre comme s'ils eussent occupé deux berceaux jumeaux (Cocteau, Enf. terr.,1929, p. 96):
44. (Thierry, mécontent, regagne son bureau et s'assied.) Ta loi morale, mon vieux, faut jamais oublier ça : c'est nous qui l'avons faite, pour nous, pour notre utilité sociale! Ce n'est pas nous qui avons été faits pour elle! Alors, le jour où ça ne colle plus bien... Martin du G., Taciturne,1932, I, 10, p. 1264.
b) [Le suj. désigne une chose] Avoir tel usage, être créé en vue d'un but précis. L'antiquité a peut-être été faite pour être le pain des professeurs (Goncourt, Journal,1894, p. 499).Mais il [le système électoral] semblait fait tout exprès pour décourager des débuts irréguliers comme ceux de Benjamin Disraëli (Maurois, Disraëli,1927, p. 59).
P. iron., péj. C'est bien fait pour lui/pour elle, Il/elle l'a bien mérité. S'il finit sa vie en taule, c'est bien fait pour lui, ajoutai-je avec rage (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 200).
P. plaisant. Et ces sales fleurs qui ne vivent ni ne se fanent jamais Tu les as appelées immortelles... C'était bien fait pour elles... (Prévert, Paroles,1946, p. 76).
Fam. C'est fait pour (avec ellipse du complément de destination). C'est adéquat, c'est exactement la forme, l'usage qui convient.
3. Être fait à. Être habitué à. J'étais fait à mon visage, comme certains se font à leur misère ou à leur crasse (Mounier, Traité caract.,1946, p. 502).
4. Littér. C'en est fait (de). C'en est fini (de). C'en est fait de lui; c'en est fait de la vie de château. C'en était fait, la séparation était sans recours (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 57).Je me sentais déjà tout investi par l'accablant souci de nouveaux devoirs. C'en serait fait des rêveries, des promenades contemplatives (Gide, Feuillets d'automne,1949, p. 1088):
45. Je porte aux études latines un amour désespéré. Je crois fermement que, sans elles, c'en est fait de la beauté du génie français. France, Vie littér.,1888, p. 287.
Rem. Certains emplois passifs de faire n'ont pas de forme active correspondante. Invitation lui a été faite de se présenter au plus tôt.
E.− Emplois substitutifs. V. faire4.
Prononc. et Orth. : [fε:ʀ], (je) fais [fε]. En syll. non finale, radicaux [f(ə)-] : je ferai, etc., et [f(ə)z-] : nous faisons, etc.; v. aussi bienfaisant, faiseur, etc. dans lesquels il y a cependant flottement [(ə)]/voyelle antérieure. Unanimité en revanche en faveur de la voyelle ant. dans malfaiteur, bienfaiteur. Dans le cas de l'absence de [ə], assimilation de sonorité entre [f] et le contexte : assimilation progressive dans (je) ferai [fʀ ̭e], régressive dans le cas de (nous) faisons [f̬zɔ ̃]. En ce qui concerne le timbre de la voyelle en finale absolue (je fais, etc.), Rouss.-Lacl. 1927 notent, p. 135 : ,,Beaucoup de personnes, surt. parmi les plus jeunes, ont un e moyen``. Enq. : /fe, D/ (c'est) fait; /fet, (D)/ (vous) faites. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Faire employé comme substitut d'un autre verbe 1. 842 suppléant d'un verbe d'action déjà exprimé (Serments de Strasbourg ds Bartsch Chrestomathie 2, 10); ca 1100 le verbe est précisé par le pronom neutre le (Roland, éd. J. Bédier, 2617-18); 2. 1225-30 suppléant d'un 1erverbe exprimé dans une comparaison (Guillaume de Lorris, Le Roman de la Rose, éd. F. Lecoy, 639). B. Faire suivi d'un verbe à l'inf. ca 880 (Ste Eulalie, 4 ds Bartsch Chrestomathie : voldrent la faire diaule servir); 2emoitié xes. (St Léger, éd. J. Linskill 186 : Poble ben fist credrë in Deu); mil xies. (St Alexis, éd. C. Storey, 112 : Par multes terres fait querre sun amfant). C. « Être le sujet d'une activité, la cause de quelque chose » 1. 2emoitié du xes. « exercer une activité » (St Léger, éd. J. Linskill, 81); 2. 2emoitié du xes. « accomplir une action » (ibid., 40), d'où mil. xies. tant faire que (St Alexis, éd. C. Storey, 464); ca 1100 faire que + subj. (Roland, éd. J. Bédier, 596); ca 1190 ne faire que + inf. (Renart, éd. M. Roques, 13015); 3. mil. xies. faire + adv. (St Alexis, éd. C. Storey, 47 : Quant vint al fare, dunc le funt gentement); 4. ca 1170 « exprimer par la parole, dire » (Livre des Rois, éd. E. R. Curtius, p. 31). D. « Déterminer quelqu'un ou quelque chose dans sa manière d'être » 1. 2emoitié du xes. « donner une qualité à quelqu'un » (St Léger, éd. J. Linskill, 48); 2. ca 1100 « donner une qualité à quelque chose, rendre » (Roland, éd. J. Bédier, 950 : Nus les [espees] feruns vermeilles de chald sanc); 3. 1172-74 « imiter, chercher à passer pour » (G. de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg [1936], 4824). E. 1. Ca 1100 « créer, réaliser une chose » (Roland, 457); 2. id. « constituer » (ibid., 3052); 3. ca 1164 n'avoir que faire de (Chr. de Troyes, Erec et Enide, éd. M. Roques, 2717); 4. 1216 « constituer quant à la quantité » (R. de Clari, La Conquête de Constantinople, éd. Ph. Lauer, § 34, p. 36); 5. 1372 « produire, engendrer, enfanter » (Propriétés des choses, I, 30 ds T.-L.). F. Faire avec un suj. impers. 1. 1119 pour exprimer les conditions atmosphériques (Ph. de Thaon, Comput, 2636 ds T.-L.); 2. 1160 faire + adj. + inf. (Enéas, 7088 ds T.-L.). Issu du lat. class. facere « réaliser quelque chose; créer, commettre » et servant de substitut à un verbe précédemment exprimé.

FAIRE2(SE), verbe pronom.

FAIRE2(SE), verbe pronom.
[Emplois pronom. spécifiques de faire; pour les emplois cour. cf. faire1et faire3]
I.− Emploi réfl. indir. [Le suj. désigne une pers.]
A.− [L'obj. dir. désigne gén. un inanimé abstr.] Se former (à son avantage ou à son détriment).
1. Se faire un(e)/du/de la + subst.Se faire une idée*, des idées*, des illusions*.
Se faire du souci, du mauvais sang, de la bile, du mouron (fam.), du tintoin (pop.), etc. Se tracasser, s'inquiéter vivement. Tu les as guettés, tu t'es fait de la bile. Il ne répondait pas, il avait l'air d'une bête abattue (Zola, Nana,1880, p. 1284).C'était plus fort qu'elle, elle se faisait des cheveux sans raison (Sartre, Âge de raison,1945, p. 29).
2. Se faire un(e) + subst. + de.Se faire une idée* de, un devoir* de, un plaisir* de. Elle devait se faire une idée assez savoureuse de notre situation (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 115):
1. sœur constance. − Pourquoi pas? Que voulez-vous, Sœur Blanche, chacun se fait de Dieu l'image qu'il peut, à quoi bon discuter là-dessus? Il y a même des gens qui ont le malheur de ne pas croire en Lui, je les plains de tout mon cœur, mais... J'ose à peine vous dire... Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 1, p. 1612.
3. Loc. verb. Se faire fort de, illusion sur, ne pas se faire faute de, etc. Dans la vue de lui aplanir cette étude réputée si ardue, et se faisant fort de la lui apprendre en quatre ou cinq jours (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 420).Se faisant illusion sur lui-même, comme tous les phthisiques (Sand, Hist. vie,t. 4, 1855, p. 219).
B.− [L'obj. dir. désigne une pers. ou un inanimé]
1. Se ménager, se créer. Se faire des amis, des relations; se faire un nom, une situation. Il faut, en outre, se faire un nom dans le monde, se créer une position (Zola, Contes à Ninon,1864, p. 195).Il avait eu une jeunesse difficile et avait dû traîner ses grolles un peu partout pour apprendre son métier et se faire une situation (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 276).
2. Spéc., vulg. Posséder sexuellement. Se faire un homme, une femme; se la faire. Synon. s'envoyer, se payer, se taper.Est-ce que, du moment où deux femmes se trouvaient ensemble avec leurs amants, la première idée n'était pas de se les faire? (Zola, Nana,1880, p. 1186).
C.− Loc. verb. spéc. au fig.
1. Se faire + subst. désignant une partie du corps.
Se faire la main. S'exercer, s'entraîner.
Se faire les poings, les griffes, les ongles. Elle est (...) orgueil et force, avec (...) quelque chose de public qui la jette parmi la foule pour se faire les poings (H. Bazin, Vipère,1948, p. 275).
Se faire les yeux (à/sur). Les accommoder* :
2. Des observations qui précèdent il résulte immédiatement que, pour bien apercevoir l'Arbre de la Vie, il faut commencer « par se faire les yeux » sur cette portion de sa ramure où ne se soit exercée que modérément l'action corrosive du Temps. Teilhard de Ch., Phénom. hum.,1955, p. 132.
2. Fam. (Il) faut se le/la faire! Il faut supporter cette personne! Synon. pop. se le/la farcir.
3. Ne pas s'en faire
Ne pas s'inquiéter, être sans crainte. Ne vous en faites pas. T'en fais pas pour si peu (fam.). Tu n'as pas besoin de t'en faire : nous, nous allons à gauche, toujours à gauche : sur Bar-Le-Duc et Châlons (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 281).Faut pas s'en faire pourvu qu'on ait la santé, le boire et le manger (Sartre, Mort ds âme,1949p. 69).Ne t'en fais donc pas pour Nadine (...) en tout cas, elle se consolera vite (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 65).
P. ext. Se montrer sans-gêne ou insouciant, négligent. Il ne s'en fait pas, celui-là! Vous n'avez pas l'air de vous en faire, madame, lui dis-je un jour. Que lisez-vous là? (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 388).On ne s'en fait pas! (p. iron.). Il ne faut pas vous gêner! Eh bien mon vieux! on ne s'en fait pas (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 99).
II.− Emploi à sens passif. [Emploi abs.; le suj. désigne une chose]
A.− [En parlant d'une réalisation unique] Être produit ou accompli.
1. [En parlant d'une réalisation hum.] C'est ce qui s'est fait de mieux jusqu'ici. C'est une vieille Marseillaise. Ici, vieille signifie expérimentée. Elle a vu se faire Marseille pour une bonne part (Giono, Chron.,Noé, 1947, p. 170).Ton gosse ne s'est pas fait par l'opération du Saint-Esprit, hein? (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 140):
3. Il [Alfred] la connaissait trop bien, cette chambre; il l'avait vue se faire année par année, et les meubles s'ajouter aux meubles. Bourget, Crime am.,1886, p. 167.
Loc. proverbiale. Paris ne s'est pas fait en un jour. Certaines œuvres demandent beaucoup de temps et de patience pour être réalisées.
2. [En parlant d'un événement; en constr. impers. ou à suj. neutre] Arriver, avoir lieu, se produire. Il pourrait bien se faire que; comment se fait-il que...? Je crois même que s'ils avaient tiré un peu mieux, il aurait pu se faire que tu m'attendes ici très longtemps (Gracq, Syrtes,1951, p. 263):
4. Il me regarda : « Vous croyez que ça ne peut pas se faire? » − Je n'ai pas d'idée, dis-je. − En tout cas on essaiera, dit-il avec décision. Il faut essayer de faire des choses! C'est pas une raison parce qu'on est un intellectuel pour vivre en pantoufles. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 215.
En partic., en constr. attributive avec un subst. désignant le suj. réel. Il se fait, il se fit. Il y a, il y eut. Il se fit un grand silence. Un jour, il se fit un déclic dans ma tête (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 24).
B.− [En parlant d'un fait répété, d'un comportement habituel]
1. Être couramment pratiqué, être en usage. Cela se faisait au Moyen Âge; cela se fait souvent ici; ce sont des choses qui se font. Synon. se pratiquer.À parler franchement, je ne suis pas folle de ces exhibitions. De mon temps, cela ne se faisait pas (Feuillet, Mar. monde,1875, pp. 121-122).Elle affectait d'être préoccupée, distraite; cela ne se fait point en province, je m'en inquiétai (Giraudoux, Simon,1926, p. 69):
5. mme ratinois. − (...) j'ai dîné dernièrement dans une maison où l'on changeait de couteau et de fourchette à chaque plat. le maître d'hôtel. − Cela se fait partout, maintenant. Labiche, Poudre aux yeux,1861, II, 8, p. 376.
En partic. Être à la mode. Les ponchos se font beaucoup cette année.
2. [Surtout à la forme négative, avec une idée de convenance mor. ou soc., de politesse, d'usages] Convenir, être séant, convenable, raisonnable. Cela ne se fait pas. Cela n'est pas correct, de bon ton. Je vous choque, parce que je me promène l'âme toute nue, dans cette maison, et que cela ne se fait pas (Cocteau, Monstres sacrés,1940, II, 2, p. 51):
6. Sa conduite était uniquement guidée par l'intérêt et le respect des convenances. « Oh! Monsieur, ça ne se fait pas », me disait-il lorsque je voulais faire monter, dans la carriole (...) un estropié cheminant péniblement sur la route... Gide, Feuillets d'automne,1949, p. 1088.
III.− Emploi à valeur subjective ou réfl. dir.
A.− Se transformer, changer d'état. Anton. se défaire.
1. Emploi abs. à valeur subjective
a) [En parlant d'une pers.] Se transformer naturellement ou volontairement dans le sens de l'accomplissement de son être (au physique ou au moral). Il se fera; il s'est fait tout seul; une jeune fille qui se fait. (Quasi-) synon. se former, évoluer, s'épanouir.Il faut que l'enfant se fasse lui-même, il faut le laisser se faire au milieu du vaste monde, si l'on veut qu'il soit plus tard un homme, une énergie agissante (Zola, Travail,t. 1, 1901, p. 227).Mais si l'homme en train de se faire, de devenir, ne pouvait être sans mensonge immobilisé dans son grouillement? C'est toute la question (Mauriac, Mém. intér.,1959, p. 217):
7. Jusqu'à un certain point le fidèle qui, ayant compris le sens chrétien du développement, aura travaillé à se faire et à faire le Monde pour Dieu, n'aura presque pas besoin d'entendre ce deuxième commandement pour commencer à lui obéir. Ne s'est-il pas déjà quitté, en même temps qu'il prenait possession de lui-même...? Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 109.
b) [En parlant du vin, du fromage ou plus rarement d'un fruit] Arriver, avec le temps, à un degré de qualité, de maturité propre à la consommation. Vin, fromage qui se fait. (Quasi-)synon. s'améliorer, se bonifier, mûrir.Vous pensez qu'un tremblement de terre en Nouvelle-Guinée n'empêche pas (...) les fromages de se faire et la terre de tourner (Prévert, Paroles,1946, p. 16):
8. Les fromages demi-gras sont plus longs à se faire que les fromages gras et leur affinage complet exige au moins deux mois. Pouriau, Laiterie,1895, p. 625.
2. Emploi réfl.
a) Se faire à.S'habituer, s'adapter à (quelqu'un ou quelque chose). Se faire à une idée; je ne peux pas m'y faire; je ne m'y ferai jamais; on se fait à tout. On se fait à ce pays, et puis on finit par l'aimer (Maupass., Contes et nouv.t. 1, Allouma, 1889, p. 35):
9. blanche. − Ce qui vous paraît contrainte n'est que manque d'habitude et maladresse. Je n'ai pu encore me faire au bonheur de vivre heureuse et délivrée. Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 8, p. 1629.
b) Se faire + adj. attribut.Commencer à être et paraître. Se faire vieux; produit qui se fait rare. Synon. devenir.Le baron retrouva quelque force et sortit de son apathie; il devint jeune quand son fils se faisait vieux (Balzac, Béatrix,1839-45, p. 245).Ces tourterelles dont le roucoulement amoureux se fait parfois si âpre (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 367).
3. Emploi impers. Il se fait tard. L'heure commence à être tardive ou la nuit commence à tomber, le jour décline. Il commence à se faire tard; on va l'embarquer dans l'auto (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 562).
B.− Emploi attributif. Devenir volontairement. Synon. se rendre, devenir.
1. [L'attribut est un adj. qualificatif] Se faire doux, petit. Elle est arrivée piteuse, les mains vides, n'ayant rien à donner, tout à recevoir, se faisant pauvrette (Chateaubr., Mém.,t. 4, 1848, p. 39).La fable de « La Grenouille voulant se faire aussi grosse que le Bœuf » (Gide, Journal,1943, p. 243):
10. ... elle [Lise] se rappela soudain que deux de ces barreaux étaient plus espacés à l'extrémité de la grille et que dans son enfance elle parvenait à se glisser par là. Elle se fit menue, toute menue, rentrant ses omoplates l'une après l'autre... Lacretelle, Hts ponts,t. 4, 1935, p. 250.
Spéc. Se faire beau, belle. Se parer, s'apprêter (se maquiller). Violaine. − Ai-je eu tort de me faire belle pour une pauvre petite heure? (Claudel, Annonce,1948, II, 3, p. 169):
11. Elle est très heureuse, sauf que sa maman ne la mène jamais à la promenade. Enfin, elle a une joie : sa maman se lève, se fait belle, va sortir. Étonnement de la poupée qu'on ne la prépare pas, elle aussi. Renard, Journal,1900, p. 608.
2. [L'attribut est un subst. non déterminé désignant un état de vie, une condition, une profession] Se faire avocat, moine, prêtre; cf. le Verbe s'est fait chair*. Les saints ont grand'peine, même en se faisant ermites, à ne pas emporter au fond leur petit démon secret (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 258).Contrairement aux habitudes de ma famille, son frère avait préféré l'épée à la robe, il s'était fait militaire (Kock, Compagn. Truffe,1861, p. 14):
12. On a remarqué que la déficience de l'aptitude est parfois un stimulant de l'intérêt dans le choix du métier : le bègue se fait orateur (Démosthène), l'émotif, médecin. Mounier, Traité caract.,1946, p. 425.
3. [Le suj. désigne une femme] Se faire une beauté. Se parer, s'apprêter, se maquiller. Ma chère! que je me cache pour me faire une beauté, quand j'aurai trente-cinq ou quarante ans, je ne dis pas (Colette, Entrave,1913, p. 59):
13. Croire que l'on convaincra quelqu'un qu'une pièce est bonne, en l'obligeant à y venir en frac, ressortit à ces mêmes ficelles grossières que c'est, pour une femme, de « se faire une beauté » en public : on truque, et on dévoile le truc. Montherl., Notes théâtre,1954, p. 1073.
Prononc. et Orth. Cf. faire1. Étymol. et Hist. V. faire1.

FAIRE3, verbe auxil.

FAIRE3, verbe auxil.
[Toujours suivi d'un inf.]
I.− [Auxil. à valeur factitive]
A.− Être cause que, obtenir que, aboutir à ce que.
1. [Le suj. désigne une pers.] Faire tomber un verre; faire rire qqn aux larmes; faire taire qqn; faire marcher*; faire suer* qqn. C'est lui qui fait vaincre son club (Montherl., Olymp.,1924, p. 253).Elle sortit de son cabas un tricot grenat et se mit à faire cliqueter ses aiguilles (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 84):
1. − Il y a quelques mois, notre Comité ne se voyait pas obligé de me déléguer pour connaître vos opinions : vous les lui faisiez connaître vous-même... Malraux, Conquér.,1928, p. 77.
2. [Le suj. désigne une chose] L'émotion la fit crier, la peur le fit trembler; c'est ce qui fait vivre; qu'est-ce qui te fait dire, penser cela? La forte odeur de bois vert me donnait une espèce de rhume des foins qui me faisait éternuer, larmoyer (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 189).C'est mon désordre qui vous fait faire cette tête-là? (Green, Moïra,1950, p. 158).
3. À faire + inf. Cf. l'article à I F 4 b.
B.− En partic. Charger (quelqu'un) de, inviter à. Faire prévenir un ami, réparer des chaussures, envoyer un télégramme, lire des livres, acheter un produit. Fils unique! je ne peux pas imaginer ce que ça représente, moi qui ai toujours eu une petite sœur à garder, à faire jouer (Duhamel, Jardin bêtes sauv.,1934, p. 32).Cinq seulement ont fait dire qu'ils viendraient. La neige arrête bien des gens (Montherl., Maître Sant.,1947, I, 1, p. 597).Quant à Dacha, elle est dans sa chambre. Voulez-vous que je la fasse demander? (Camus, Possédés,1959, 1repart., 4etabl., p. 971):
2. − Mais, Jacques, vous avez oublié de les faire tondre. Ces enfants ne sont pas présentables. − Maman, répondis-je aussitôt, papa estime que nous sommes désormais trop grands pour être tondus. H. Bazin, Vipère,1948, p. 107.
Rem. Ell. du part. passé dans une énumération. Il avait fait creuser des trous dans les plaines, coucher tous les jeunes arbres des forêts voisines (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Boule de suif, 1880, p. 122).
C.− Affirmer, prétendre, attribuer.
1. Faire dire qqc. à qqn. Attribuer des propos à quelqu'un.
Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Ne m'attribuez pas ces paroles. Ce n'est pas drôle d'être prisonnier, dit Odette sans lever les yeux. Il la considéra gravement : − Ne me fais pas dire ce que je n'ai pas dit! (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 158).
2. Littér. Faire mourir un personnage à telle époque, à telle date. Il va jusqu'à tripler hiéroglyphiquement le septenaire, faisant ainsi vivre Lamech 777 ans (Leroux, Humanité,t. 2, 1840, p. 606).
Emploi pronom. Il signait « Pommereux », se faisant descendre de la famille Pommereux des lettres de Madame de Sévigné (Chateaubr., Mém.,t. 1, 1848, p. 153).C'est génial (...) de vous être arrangée pour vous faire prendre par tout le monde pour un petit cafard insignifiant (Anouilh, Répét.,1950, IV, p. 96).
D.− Constr. gramm. (pour les sens précédents).
1. Faire + inf. sans compl. d'obj.
a) [Le suj. de l'inf. est exprimé] Faire manger un malade; faire sortir qqn; faites-le obéir. On les a fait entrer dans la cuisine (Giono, Regain,1930, 2epart., 3, p. 225).Il a dit comme ça que d'insulter les revenants c'était le moyen de les faire partir (Cocteau, Machine infern.,1934, I, p. 36):
3. ... il ouvrait la bouche et la fermait tour à tour en faisant claquer ses dents (...). Quand la voiture du roi passa devant lui, il fit bondir son cheval, et certainement il eut la tentation de se précipiter sur le roi. Chateaubr., Mém.,t. 2, 1848, p. 532.
b) [Le suj. de l'inf. n'est pas exprimé] L'opium fait dormir; cela fait sourire.
2. Faire + inf. avec un compl. d'obj. indir.
a) [Le suj. de l'inf. est introduit sans prép.] Faire obéir un enfant à ses parents; faites-le obéir à ses maîtres. L'encombrement des guichets le fit renoncer à rien demander de ce côté-là (Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 233).
Littér. Cela le faisait penser à qqn/qqc.
b) [Le suj. de l'inf. est introduit par la prép. à ou se présente éventuellement à la forme indir., dans le cas d'un pron. pers.] Cela lui fit penser à; faites-moi penser à; faire changer d'avis, d'idée à qqn. Elle lui fit promettre d'écrire souvent et de venir la voir (Maurois, Disraëli,1927, p. 321).La matière de vingt livres... on ne me fera tout de même pas croire... Voyons, Lipotte! ... (BernanosMauv. rêve,1948, p. 939).
3. Faire + inf. avec compl. d'obj. dir.
a) [Le suj. de l'inf. n'est pas exprimé] Faire lire un livre; faites-le prévenir.
b) [Le suj. de l'inf. est un subst. introduit par la prép. à ou par] Faire construire une maison à/par un architecte.
[Prép. à] Il y a un arrêté du préfet (...) qui défend de faire porter aux enfants des charges excessives (Gyp, Souv. pte fille,1927, p. 77).Beaucoup de fermiers, ne vendant plus leur blé, font moudre leur farine aux petits moulins à vent (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 16).
[Prép. par] Ulianow me l'a fait répéter par sa femme : c'est un héros (Bourget, Actes suivent,1926, p. 99):
4. Si je fais trahir je ferai trahir par des traîtres. Si je fais bâtir je ferai bâtir par des maçons. Si je fais la paix je la ferai signer par des lâches. Si je fais mourir je ferai déclarer la guerre par des héros. Saint-Exup., Citad.,1944, p. 785.
Rem. L'emploi de la prép. de est également attesté par Dupré 1972. Cela me fera détester de tout le monde.
c) [Le suj. de l'inf. est un pron. à la forme dir. ou indir. ou introduit par par] Faites-le écrire la lettre; faites-lui écrire la lettre; faites-la lui écrire; faites écrire la lettre par lui. Je lui ai fait faire le tour du propriétaire (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 122).Dubreuilh t'a rendu un service il y a dix ans; il ne va pas te le faire payer toute ta vie (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 114):
5. Il est seulement recommandé de lui faire toucher du doigt, positivement, certaines absurdités de fait, lui laissant tirer les conclusions... Mounier, Traité caract.,1946, p. 556.
Rem. 1. Le part. passé de faire devant un inf. reste invar. Copeau, Jammes, Claudel, Ghéon (je ne cite que ceux qui se sont fait connaître) (Gide, Ainsi soit-il, 1951, p. 1183). 2. Faire, verbe factitif, peut être employé comme auxil. de faire1, faire2. Faire faire une robe. M. le baron de Château-Renaud savait d'avance tout le plaisir qu'il me procurait en me faisant faire votre connaissance (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 574).
4. Emplois pronom.
a) réfl. dir. Se faire maigrir, bronzer, vomir.
b) réfl. indir.
Entreprendre une action dont on est le bénéficiaire. Se faire couler un bain.
Agir de telle façon qu'une autre personne entreprenne une action dont on est le bénéficiaire. Se faire couper les cheveux. Maintenant que les Chinois se font couper la natte et se modernisent (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 315).Cf. Faire1III A 2.
c) à valeur passive
[Le procès s'inscrit dans la durée] Se faire aimer, obéir. Un soldat distingué, lequel a pillé l'Espagne en se faisant battre (Chateaubr.Mém.,t. 3, 1848, p. 104).
[Le procès est ponctuel] Se faire attaquer, renverser par une voiture. Je (...) courus jusqu'à un taxi, me fis conduire rue Vauquelin (Gide, Journal,1939, p. 13).C'est Bichat qui va se faire sonner les cloches (Abellio, Pacifiques,1946, p. 244).On lui donnera un livre d'images, et il se fera gronder par sa bonne, sinon fesser pour en avoir déchiré les pages (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 190).
Fam. Aller se faire pendre* ailleurs, se faire fiche*, foutre* (vulg.). Aller se faire cuire un œuf.
Rem. L'omission du pron. réfl. devant l'inf. est cour. Faire asseoir qqn; tu me fais marrer (pop.). Ferai-je pâmer les renchéris? (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 158). Cependant le pron. est parfois maintenu lorsqu'il s'agit de verbes essentiellement pronom. ou pour lever une ambiguïté. Une rafale de mistral (...) faisait s'envoler les feuilles mortes (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 353).
II.− [Auxil. d'aspect et de temps]
A.− Ne faire que + inf.
1. [Indique la répétition d'une action, la continuité] Ne pas cesser de. Il ne fait que jouer; ne faire que pleuvoir.
2. [Indique une limitation, une restriction]
a) Faire uniquement, exclusivement (une chose et non une autre) :
6. Au fait, en période normale, qu'est-ce qu'il racontait à sa femme quand il était avec elle? Il lui arrivait aujourd'hui de se le demander. Rien en somme. Alors, pourquoi, toute la journée, lui manquait-elle tellement? Ici, il ne faisait qu'attendre; attendre la fin de la demi-heure. Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 11.
b) N'avoir d'autre effet que. Ne faire qu'empirer. La résistance ne faisant qu'accroître les désirs de l'ami du bibliophile (Nerval, Filles feu,Angélique, 1854, p. 582).L'inquiétude où son état le jetait ne faisait qu'aggraver son mal (Guéhenno, Jean-Jacques,t. 2, 1950, p. 44).
c) Se contenter de, faire à peine (temps bref). Ne faire qu'entrer et sortir; nous ne ferons qu'évoquer. J'en recueillerai quelques exemples en ne choisissant même pas et en ne faisant que me baisser pour les prendre (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 58).Si la pluie était intermittente ou s'il ne faisait que bruiner (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 65):
7. Ibrahim et Bichos ne firent que passer. Le premier ne parlait qu'arabe ou latin; le second torturait l'anglais. Tous deux fort grands seigneurs et petits savants, ils déçurent beaucoup notre père. Bazin, Vipère,1948, p. 121.
B.− Ne faire que de + inf.[Pour indiquer le passé immédiat] Venir à peine de. Ne faire que d'arriver, de sortir.
Rem. Dans la lang. cour., on rencontre l'emploi de ne faire que de au lieu de ne faire que. Je ne fais que d'aller et venir (cf. Dupré 1972). Inversement, ne faire que est employé pour ne faire que de. La séance ne fait que commencer. Dans quinze ans, la vie ne fera encore que commencer (Radiguet ds Colin 1971).
Prononc. et Orth. Cf. faire1. Étymol. et Hist. V. faire1.

FAIRE4, verbe substitut.

FAIRE4, verbe substitut.
Faire remplace un verbe qu'il faudrait répéter.
A.− [En prop. compar.]
1. Rare, très recherché. [Le verbe remplacé est trans.] Après m'avoir engraissé comme on fait les oies (Mérimée, Lettres Panizzi,t. 2, 1870, p. 127).
Rem. Dans l'usage cour., ou bien on répète le 1erverbe, ou bien on le supprime dans le second terme de la compar., ou plus rarement, on emploie faire suivi des prép. de ou pour ou avec. Sa perfidie (...) empoisonnait sans laisser trace, présentée le sourire aux lèvres, ainsi qu'il eût fait d'une fleur (Courteline, Ronds-de-cuir, 1893, 2etabl., 2, p. 74).
2. Moins rare. [Le verbe remplacé est intrans. ou trans. indir.]
a) Faire. Un peu avant midi, nous sommes entrés dans la salle, rapidement comme nous faisons toujours (Martin du G., Thib.,Cah. gr., 1922, p. 584).Élena et moi aurions bien voulu (...) jouer à la poupée, et au papa et à la maman comme tous les enfants font (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 240).
Rem. Il existe des loc. verb. de compar. faire comme, en faire autant (= imiter). J'emmène ma femme, dit l'un. − J'en fais autant. − Et moi aussi (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Boule de Suif, 1880, p. 118). Le maître d'hôtel se saoule avec la cuisinière à l'office et j'ai envoyé le parachutiste en faire autant au village voisin (Anouilh, Répét., 1950, IV, p. 108).
b) Le faire. Et si vous me parlez à nouveau comme vous venez de le faire, je vous ferai goûter de ma canne (Camus, Possédés,1959, 2epart., 5etabl., p. 989).
Rem. Faire peut remplacer une loc. verb. factitive. − Arrêtez (...) cria Trésor des Fèves en faisant claquer le pouce de sa main droite contre le doigt du milieu, comme il l'avoit vu faire à Fleur des Pois (Nodier, Trésor Fèves, 1833, p. 49).
B.− [En dehors de la prop. compar.] Raoul (...) conseilla à Michel d'attendre encore, ce qu'il fit (Abellio, Pacifiques,1946, p. 403).Occupée à laver la vaisselle, elle protestait à son tour qu'elle ne le faisait qu'accidentellement (Gide, Et nunc manet,1951, p. 1137).Je ne l'ai pas encore remboursé. Mais je le ferai (Camus, Possédés,1959, 1repart., 3etabl., p. 960):
Je me demande, d'ailleurs, sous quelle forme j'aurais pu préciser ma règle personnelle de vie, si j'avais eu à le faire, − ce dont je n'avais ni le loisir ni l'idée... Martin du G., Thib.,Épil., 1940, p. 959.
Prononc. et Orth. Cf. faire1. Étymol. et Hist. V. faire1.
STAT. − Faire1, 2, 3 et 4. Fréq. abs. littér. : 295 648. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 419 908, b) 450 868; xxes. : a) 411 344, b) 410 087. Faisant. Fréq. abs. littér. : 8 764. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 13 126, b) 16 178; xxes. : a) 12 545, b) 9 857.
BBG. − Faire1, 2, 3 et 4. Gaatone (D.). Les Pron. conjoints ds la constr. factitive. R. Ling. rom. 1976, t. 40, pp. 165-182. − Giry-Schneider (J.). Les Nominalisations en fr. L'opérateur faire ds le lex. Genève, 1978. − Graur (A.). Fréq. et évolution. R. roum. de ling. 1971, t. 16, pp. 7-8. − Hœybye (P.). Faire faire quelque chose à quelqu'un. Fr. mod. 1939, t. 7, p. 51. − Johansson (A.). Ét. synt. sur le verbe faire en fr. mod. In : [Mél. Wahlund (K.)]. Mâcon, 1896, pp. 95-107. − Kayne (R. S.). Synt. du fr. Paris, 1977, pp. 196-314, 376-412. − Klein (J.-R.). Le Vocab. des mœurs de la Vie Parisienne sous le Second Empire. Louvain, 1976, pp. 221-223. − Lancaster (H. C.). The Object of faire with a reflexive infinitive. Mod. Lang. J. 1943, t. 27, pp. 513-514. − Langacker (R. W.). Les Verbes faire, laisser, voir. Langages. Paris. 1966, t. 3, pp. 72-89. − Margerie (C. de), Moirand (S.), Porquier (R.). Les Constr. verbales avec faire, laisser, voir. Fr. Monde. 1973, no98, pp. 33-41. − Moignet (G.). La Suppléance du verbe en fr. Fr. mod. 1960, t. 28, p. 21. − Orr (J.). Vous avez beau faire. R. Ling. rom. 1957, t. 21, pp. 197-208. − Pinchon (J.). Les pron. adverbiaux en et y. Genève, 1972, pp. 169-188. − Quem. DDL t. 15. − Rees (G. O.). Faire as substitute in comparative clauses. Mod. Lang. R. 1960, t. 55, pp. 504-508. − Spitzer (L.). Faire une scarlatine. Rom. R. 1938, t. 29, pp. 170-172; Ça fait distingué... Rom. R. 1940, t. 31, pp. 44-51. − Väänänen (V.). Faire le malin et tours congénères. In : [Mél. Orr (J.)]. R. Ling. rom. 1967, t. 31, pp. 341-364.

FAIT, FAITE, part. passé et adj.

FAIT, FAITE, part. passé et adj.
I.− Part. passé de faire*. Cf. notamment faire1III D.
II.− Emploi adj.
A.− [Correspond à faire1I et II]
1. Fabriqué, confectionné, construit, réalisé.
a) Expr. Ce n'est ni fait ni à faire. C'est du travail bâclé (cf. Martin du G., Gonfle, 1928, II, 5, p. 1203). Tout compte* fait. C'est un grand pas de fait. Un grand progrès est accompli. Marché fait (vx). Marché conclu. Marché fait qu'à votre retour nous ne parlerons point politique! (Mmede Chateaubr., Mém. et lettres,1847, p. 237).
b) [Avec un adv. ou une loc. adv. de manière, ou un compl. de comparaison] Du travail bien fait, une besogne mal faite.
Vite fait, bien fait (pour indiquer une exécution rapide).
(Aus)sitôt dit, (aus)sitôt fait. L'exécution suit immédiatement le projet, la parole, la promesse, l'ordre exprimé.
C'est très bien fait à vous de + inf. (vx). C'est très-bien fait à vous de faire des excursions sur des terres étrangères (J. de Maistre, Soirées St-Pétersbourg,t. 1, 1821, p. 21).
Fait à plaisir. Inventé de toutes pièces. Conte fait à plaisir.
c) Loc. adj. Tout fait
α) Tout prêt, préparé d'avance. Travail tout fait. La métaphysique ou la critique que le philosophe se réserve de faire, il va les recevoir toutes faites de la science positive, déjà contenues dans les descriptions et les analyses dont il a abandonné au savant tout le souci (Bergson, Évol. créatr.,1907, p. 196):
1. Ses enfants, bien entendu, il vaut mieux se les faire soi-même; mais quand on attrape la cinquantaine, qu'on n'est pas bien sûr de réussir, et qu'on en trouve un tout fait, eh bien, on se le prend sans avertir les populations. Pagnol, Fanny,1932, II, 6, p. 138.
Spéc., domaine de l'habillement.Costume tout fait. Anton. sur mesure(s); synon. prêt à porter.En veston et en pantalon de fantaisie, achetés tout faits chez Lambourdieur (Zola, Terre,1887, p. 299).Enfin, Joseph consentit à essayer un costume tout fait, pourvu qu'il fût noir (Green, Moïra,1950, p. 71).
β) Au fig. Adopté sans examen; banal, sans originalité. Idée toute faite. Idée reçue, lieu commun. Elle laisse ses amis penser pour elle; elle reçoit leurs idées toutes faites (France, Vie littér.,1888, p. 342).Expression, locution, formule toute faite. Expression figée de la langue, consacrée par l'usage et devenue banale. Phrase toute faite. Formule de politesse conventionnelle et froide. Synon. cliché.N'en pas parler du tout plutôt que d'en parler avec des phrases toutes faites (Montherl., Pitié femmes,1936, p. 1119).
2. [En parlant d'une pers.; gén. modifié par un adv. de manière ou un compl. de comparaison]
a) [En parlant du physique] Conformé, constitué.
Bien fait. Beau, de bel aspect. Bien fait de sa personne; femme bien faite. Jeune homme on ne peut pas mieux fait et on ne peut pas plus agréable (Stendhal, H. Brulard,t. 1, 1836, p. 50).Je n'étais pas mal fait de ma personne, je me montrais à la fois danseur infatigable et discret érudit (Camus, Chute,1956, p. 1487).Fait au moule, à ravir. C'est un joli garçon, bien tourné, fait à peindre, bel homme en uniforme (Courier, Pamphlets pol.,Lettres partic. 2, 1820, p. 69).Des Cupidons, fraîche couvée, Me montraient son pied fait au tour (Hugo, Chans. rues et bois,1865, p. 109).Jambe bien faite; taille bien faite. Belle bouche, un nez très bien fait (Guéhenno, Jean-Jacques,Roman et vérité, 1950, p. 69).
Homme mal fait. Mal bâti, disgracieux.
b) Vx. [En parlant de l'allure, de l'habillement] Habillé, accoutré, arrangé (d'une manière étrange). Dans des expr. : comme le voilà fait! Il est fait d'étrange manière. Madame Lerat (...) l'aperçut [Nana] à cette heure, faite comme une souillon (Zola, Nana,1880, p. 1321).
c) Au fig. [En parlant du jugement, du caractère] Avoir l'esprit bien fait. Avoir l'esprit juste, qui raisonne bien. [P. allus. littér. à Montaigne, Essais I 25] Tête bien faite vaut mieux que tête bien pleine. Mieux vaut un esprit juste qu'un esprit pédant, bourré de connaissances livresques non assimilées. Être ainsi fait. Avoir tel caractère, tel comportement. Synon. mod. être ainsi, être comme cela (sans y pouvoir changer).Et le monde est ainsi fait que l'on oubliera Falleix (Balzac, Splend. et mis.,1844, p. 337).Mon esprit fut toujours ainsi fait que je ne mettais pas ma perspective devant moi, mais derrière (Barrès, Cahiers,t. 2, 1899-1901, p. 217):
2. Ce Demangeat ne me plaisait guère. Je lui trouvais la voix pâteuse et le débit monotone; j'avais raison, mais, avec un esprit mieux fait, j'aurais compris que les étudiants appréciaient justement l'ordre et la clarté de ses exposés. France, Vie fleur,1922, p. 433.
3. Fait pour + subst. déterminé ou inf.; fait pour que + subordonnée au subj.
a) [En parlant d'une pers.] Particulièrement apte à, prédisposé à. L'homme n'est pas fait pour vivre seul. Il faut du merveilleux, un avenir, des espérances à l'homme, parce qu'il se sent fait pour vivre au-delà de notre univers (Chateaubr., Génie,t. 2, 1803, p. 170).Mal fait pour l'action, plus à l'aise dans l'éternité que dans le temps, son bonheur était de se perdre à loisir dans ses rêves (Guéhenno, Jean-Jacques,Roman et vérité, 1950p. 22).
b) [En parlant d'une chose] Destiné à, qui convient à. Non, non, Victor, cesse de t'abuser; ce bonheur n'est pas fait pour toi (Guilbert de Pixér., Victor,1798, I, 1, p. 4).Le rêve conté hier est bien fait pour tuer à jamais le sommeil (Michelet, Journal,1848, p. 617).Un piano est fait pour qu'on y joue de la musique (Alain, Propos,1913, p. 171):
3. ... la poursuite inlassable dont il n'avait cessé de fatiguer MlleStangerson, (...) la vie désordonnée qu'il menait sous prétexte de « noyer ses chagrins », tout cela n'était point fait pour rendre Arthur Rance sympathique à Rouletabille, et ainsi s'explique la froideur avec laquelle il l'accueillit dans la salle des témoins. G. Leroux, Myst. ch. jaune,1907, p. 154.
P. iron. (pour recommander l'usage d'une chose). Le savon est fait pour qu'on s'en serve. Je passais mon chemin, un chemin est fait pour qu'on y passe (Stendhal, Lamiel,1842, p. 48).
Fam. Cela n'est pas fait pour les chiens*.
Très fam., p. ell. C'est fait pour! C'est destiné à, prévu pour un usage précis.
B.− [Correspond à faire1III A] Domaine des soins de beauté.Yeux faits. Yeux maquillés, fardés. Ongles faits. Ongles limés (et vernis).
C.− [Correspond à se faire2III A]
1. Qui a atteint son complet développement, qui est parvenu à maturité.
a) [En parlant d'une pers., de son corps, de son esprit] Arrivé à l'état pleinement adulte, qui a atteint la maturité d'âge, d'esprit ou de corps.
Homme fait. Homme pleinement adulte, d'âge mûr. C'est vrai, disait un jeune à un homme fait. Tu es père de famille (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 427).Je vis que le burnous n'était plus un burnous d'enfant, mais un ample et solide vêtement d'homme fait (Duhamel, Suzanne,1941, p. 177):
4. Mais maintenant, il lui fallait s'avouer qu'il était un homme fait : les jeunes gens le traitaient en aîné, les adultes comme un des leurs, et certains lui témoignaient même de la considération. Fait, limité, fini, lui et pas un autre. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 137.
Femme faite. Femme pleinement formée, développée. Ces deux bambines qui avaient des gaietés et des regards étranges de femmes faites (Zola, Contes Ninon,1874, p. 95).
b) Parvenu à un certain degré de maturation. Vin fait. Viande faite. Viande mûrie. Fromage fait. Fromage (à pâte molle) qui a atteint un degré de maturation où le cœur est amolli. Fromage pas trop fait, fait à cœur. Pour finir la fête, une armée entière De fruits, de parfaits, de fromages faits (Monselet, Poés.,1880, p. 225).Fromage trop fait. Qui n'est plus propre à la consommation. Un autobus (...) où grouillaient les clients comme asticots dans un fromage trop fait (Queneau, Exerc. style,1947, p. 172).
2. Fait à + subst. déterminé ou inf.Accoutumé, entraîné, exercé à. Fait au climat, aux habitudes, à un genre de vie. Son grand esprit positif et rigoureux, si peu fait à se payer d'abstractions (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 3, 1848, p. 313).Donnez-moi qui vous voudrez, Monsieur le Directeur, mais un homme fait à ce travail et qu'il ne me soit pas nécessaire de reprendre à l'A.B.C. (Duhamel, Combat ombres,1939, p. 18).
D.− Loc. adv.
1. Tout à fait
a) Entièrement, complètement. Oublier tout à fait. Isabelle, tout à fait remise de son évanouissement, se tenait debout (Gautier, Fracasse,1863, p. 425).Je sais bien que ce sont des idées folles, que je ne puis même pas prendre tout à fait au sérieux, des rêves... (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1032).
[Suivi d'un adj.] Synon. de très.« Vous allez être tout à fait chou, vous allez dédicacer quelques livres... » (Beauvoir, Mandarins,1954p. 266).
b) Exactement. Ce n'est pas tout à fait ça. Non, il n'y a pas moyen de s'y tromper et c'est bien tout à fait comme nous quand nous avons tant de chagrin (Claudel, Visages radieux,1947, p. 789):
5. Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend. Verlaine, Poèmes saturn.,1866, p. 63.
2. Rare, littér. Si fait! [Loc. interjective, servant à renforcer une réponse ou tenant lieu de réponse à une phrase négative ou interrogative] Mais si! Bien sûr que si!
Prononc. et Orth. : [fε], fém. [fεt]. Grammont Prononc. 1958, p. 38 admet que dans faite l'[ε] ,,peut être long, mais un peu moins [que la durée dite longue]``. Ds Ac. dep. 1694 (écarté de Ac. 1932 par une décision de caractère général affectant les part. passés). Fréq. abs. littér. : 94 120. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 142 160, b) 135 828; xxes. : a) 131 967, b) 126 830. Bbg. Henry (A.). À propos de fait, adj. en anc. fr. Romania. 1953, t. 74, pp. 376-378; 1957, t. 78, p. 97. − Quem. DDL t. 9, 10.

FAIT, subst. masc.

FAIT, subst. masc.
A.− Réalisation d'une chose; manière de faire, façon d'agir.
1. Mod. (dans des expr. ou loc.). Action.
a) Spéc., au plur., avec une nuance fam., parfois iron. ou péj. Les faits et gestes de qqn. Tout ce que fait quelqu'un, le détail de ses activités (actes, déplacements, rencontres...) observé par une ou plusieurs personnes. Paris (...) ne présente par lui-même à peu près rien de saillant à l'annotateur de ses faits et gestes (Mallarmé, Dern. mode,1874, p. 785).Notre onirisme animalisé (...) n'a pas enregistré les faits et gestes des animaux minuscules (Bachelard, Poét. espace,1957, p. 153).
b) Au sing., expr. et loc.
Être coutumier du fait (cf. coutumier B 1).
Par son fait. Par son action; par sa faute. Sur la 2e, relative aux exempl(aires) de Leber que la maison Baudouin frères garde en ses magasins, elle se trouve résolue par mon fait en sa faveur (Balzac, Corresp.,1826, p. 292).
Prendre qqn sur le fait. Le surprendre en train de faire une (mauvaise) action. Synon. prendre qqn en flagrant délit.
Le fait de + inf. L'action de, l'acte ou le phénomène qui consiste à; p. méton. l'état qui en résulte. Le fait de parler, de vivre, de savoir, etc. Définir le vrai par le fait d'être vérifiable (Marcel, Journal,1914, p. 28).L'idée est l'essentiel, non le fait de jouer physiquement cette idée (Ruyer, Esq. philos. struct.,1930, p. 251).Le seul fait de prendre contact avec ces fractions multiples et dispersées comportait, pour moi, de grandes difficultés (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 74).
2. En partic. (vieilli en emploi abs., mod. dans certains syntagmes; souvent au plur.). Action remarquable (à la guerre). Faits d'armes*. Ensuite un peu de patriotisme, le drapeau de l'Empire, de beaux faits dans la garde nationale (Flaub., Corresp.,1852, p. 424).
a) Fait de guerre. Action militaire remarquable et méritoire. Le duc de Berri rappela inutilement la valeur qu'ils avaient montrée dans les derniers troubles, et leurs beaux faits de guerre (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 64).
b) Haut(s)(-)fait(s). Exploit(s) glorieux, prouesse(s) à la guerre. Une teinte kaki était répandue sur les nouvelles de la guerre et (...) on nous laissait ignorer les hauts faits (Barrès, Cahiers,t. 11, 1914-18, p. 130).
Au fig., fam. Action mémorable, méritoire, prouesse (sans contexte guerrier, dans la vie). On avait pourtant commencé par une belle manœuvre qui reste un des hauts faits de notre Sorbonne (Bremond, Hist. sent. relig.,t. 4, 1920, p. 424).
Par iron. Mauvaise action notoire, acte blâmable. Des photographies de « héros », des découpures de journaux relatant les hauts faits du fascisme (Gide, Journal,1934, p. 1194):
1. Les juges refusèrent de l'écouter, et je fus remis en liberté sans qu'on eût pris connaissance des explications que j'aurais pu avoir à donner ni des révélations que j'aurais pu être disposé à faire. C'est là ce qu'un ministre a appelé « faire sentir l'action gouvernementale ». Tels sont les hauts faits de nos magistrats. Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 267.
3. DROIT
a) Tout acte matériel d'une personne, tout événement extérieur pouvant avoir un effet juridique. Fait juridique; fait qualifié crime par la loi. J'ai parcouru tout le canton pour recueillir un seul fait qui pût parler en sa faveur (La Martelière, Robert,1793, IV, 1, p. 42).Grouper les faits et les témoignages de manière à porter (...) le doute et l'hésitation dans la conscience des jurés (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 426).
Expressions
Par le fait de (qqn) (rare), du fait de (qqn, qqc.) (usuel). Par l'action de. Responsabilité du fait de l'homme, du fait des choses. Tout tort causé par le fait de l'homme, donne lieu à des dommages-intérêts ou à une action en réparation du tort causé (Boyard, Bourse et spécul.,1853, p. 181).
Voie(s) de fait (souvent au plur.). Actes de violences, sévices corporels (contre quelqu'un). Si les actes prévus dans l'article précédent ont été accompagnés de violence, voies de fait, attroupements, les auteurs et complices seront punis des peines portées au code de police correctionnelle ou au code pénal (Doc. hist. contemp.,1803, p. 115).Le fonctionnaire qui se livre à des voies de fait sur un usager du service est coupable d'une faute personnelle qui entraîne la compétence de la juridiction civile (Encyclop. éduc.,1960, p. 289).
b) Spéc. Infraction, délit, crime résultant d'un acte effectif positif (p. oppos. à ce qui résulte d'une omission ou d'une abstention). L'appréciation de la probabilité du fait, affirmé par l'accusation, nié par la défense (Cournot, Fond. connaiss.,1851p. 423).Cela, c'est un fait de police de la rue qui me regarde, et je retiens la femme Fantine (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 244).
Fait de charge. Action ou omission commise par le titulaire d'une charge dans l'exercice de ses fonctions et pouvant causer du tort à quelqu'un. Je n'ai pas de quittance, il y a des faits de charge qui vont absorber charge et cautionnement (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 232).
c) Cour., loc. verbale. Prendre fait et cause pour qqn (cf. cause1II B locutions).
4. Être le fait de (qqn)
a) Constituer la manière d'agir, la conduite de (quelqu'un) (habituelle ou dans une circonstance donnée). Synon. être le propre de.À cette époque elle [l'activité missionnaire] aussi se trouve être le fait de l'homme blanc (Philos., Relig., 1957, p. 4602).Les performances de valeur internationale sont le fait de nageurs qui s'entraînent jusqu'à cinq et six heures par jour (Jeux et sp.,1968, p. 1572).Le fait du prince. Cf. prince.
b) Vx ou littér., surtout à la forme négative. Convenir à (quelqu'un), faire l'affaire de (quelqu'un). Plutôt que de se battre sur un sujet qui n'était point son fait et divisait ses militants (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 269):
2. ... une diffusion plus large assurée, d'emblée, à des entreprises coûteuses et dont l'État, en France, n'a jamais songé à assumer la charge : Diderot, par avance lui avait annoncé que ce n'était point son fait... Civilis. écr.,1939, p. 2408.
5. Loc. Dire son fait à qqn. Dire franchement et sans ménagement à quelqu'un ce qu'on pense de lui, de sa conduite (répréhensible). Synon. dire ses quatre vérités à qqn.
B.− Ce qui est arrivé, ce qui existe.
1. Ce qui est effectivement arrivé, ce qui existe réellement, événement ou état de choses. La civilisation est un fait qui peut être décrit, raconté, qui a son histoire (Guizot, Hist. civilisation,Leçon 1, 1828, p. 8).Pour ceux-là, la venue du Messie était un fait d'une nouveauté et d'une originalité absolue (P. Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 783).Or, ces faits se sont passés en 1902 (Martin du G., Notes Gide,1951, p. 1396):
3. Les autres avaient beau lui crier qu'il était ridicule avec leurs porte-voix et leurs drapeaux blancs, la reddition de la France était un fait qui ne le concernait en rien. Anouilh, Répét.,1950, I, p. 21.
SYNT. a) [Souvent au plur.] Exposer, raconter clairement les faits, tels qu'ils se sont passés; succession, déroulement, résumé des faits; faits économiques, historiques. b) [Au sing.] Fait banal, biologique, quotidien, isolé, rare, singulier, unique, courant, constaté, certain; fait divers*, fait exprès*.
Locutions
a) Loc. verb. Mettre, placer qqn devant le fait accompli. Obliger quelqu'un à accepter une chose sans que celui-ci puisse s'y opposer, le placer dans une situation irrévocable, irréversible. Le minoritaire Monmousseau impose la bataille pour la nationalisation contre le secrétaire général des cheminots, Bidegaray. La CGT, mise devant le fait accompli, n'engage les autres corporations que « par paliers » (Reynaud, Syndic. Fr.,1963, p. 70).Une intervention extérieure importante ne doit pas résulter d'un coup de tête d'un gouvernement qui place le pays devant le fait accompli (Service milit. et réf. armée,1963, p. 72).
b) Loc. adv. Par le fait (même), de ce fait, du fait. À cause de cela, en conséquence. La classe des « mammifères » une fois constituée, ne peut plus donner naissance, (...) à la classe « oiseaux », et marque de ce fait un pouvoir d'évolution inférieur à celui du « poisson » (Gaultier, Bovarysme,1902, p. 235).Méga-synthèse dans le tangentiel. Et donc, par le fait même, bond en avant des énergies radiales (Teilhard de Ch., Phénom. hum.,1955, p. 271).
c) Loc. prép.
Du (seul) fait de + subst. En raison de, à cause de. La meilleure Gilberte ne pouvant alors, du fait de son absence momentanée, constater cette déchéance (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 566).
Par le fait de + subst. Par suite de, pour la raison de. Dans cette petite ville, ils étaient (...) toujours, − par le fait de la différence de leur race, (...) les esprits les plus avancés, les plus sensibles au ridicule des institutions vermoulues et des pensées décrépites (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 417).
d) Loc. conj.
Le (seul) fait que + ind. (pour insister sur la réalité du fait) ou + subj. Le fait consistant en ce que. Il n'en parle jamais, tant le seul fait qu'on y fasse allusion lui cause de malaise (Du Bos, Journal,1928, p. 176).La mise au point d'un tel système en pleine guerre et le fait qu'il faudrait l'organiser sous toutes les latitudes entraîneraient d'inextricables difficultés (de Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 316):
4. ... il se peut que sur l'affaire Dreyfus nous soyons irrémédiablement divisés, mais tous nous nous accordons à sentir quelque chose ce profondément offensant dans le fait que l'on fera défiler l'armée devant le cercueil de Zola. Barrès, Cahiers,t. 6, 1908, p. 284.
Ce fait que. Et nous voici tous d'accord sur ce fait que rien ne peut nous empêcher d'appliquer librement et justement la loi française dans toute l'étendue de la République (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 458):
5. La Provence n'a pas de musique (si j'en juge par ce fait qu'on a dû mettre les paroles de la Coupo Santo sur l'air d'une romance parisienne)... Montherl., Pte Inf. Castille,1929, p. 608.
Du (seul) fait que, du fait même que + ind. Pour la (seule) raison que, puisque. Tout cela, brusquement, ne compterait plus pour rien, du seul fait que l'éclairage aurait été modifié par le grand prêtre... (Martin du G., Notes Gide,1951, p. 1365).Le monde objectif tout entier (...) tel justement qu'il existe pour moi, c'est-à-dire vaut pour moi, du fait même que j'en fais l'expérience (J. Vuillemin, Être et trav.,1949, p. 9).
Par le (seul) fait que, par le fait même que + ind. Parce que précisément. C'est tout de même curieux, cet éreintement de tout ce que j'écris, (...) et cela par ce seul fait que je mets de la vérité dans ce que j'écris (Goncourt, Journal,1894, p. 607).Les articles qui, souvent par le fait même qu'ils faisaient d'importantes réserves sur telle ou telle de mes intentions, m'ont aidé à mieux saisir (...) ce que j'avais voulu faire (Béguin, Âme romant.,1939, p. vi).
2. Ce qui existe réellement, la chose réelle (p. oppos. à la fiction, au rêve, à l'idée, au principe, au souhait, etc.; souvent au plur.); tout ce qui peut être constaté de façon certaine. C'est un fait acquis.
a) En emploi abs. Le domaine des faits; s'incliner devant les faits; les faits parleront d'eux-mêmes; juger sur/d'après les faits; (au sing.) fait dûment constaté, vérifié. Tout cela est beau et grand dans la pensée; mais dans le fait il faut en rabattre presque tout le grandiose (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 343).Il n'aimait guère donner, le fait paraissait malheureusement certain (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 119):
6. M. Godeau se trouvait seul devant son foyer sans feu. L'idée de suicide s'était présentée à lui. Il avait suffi qu'il l'admît comme possible. Il avait presque atteint cette extrémité. L'intervalle qui séparait la possibilité du fait et le fait accompli, l'intervalle qui était réservé aux moyens ne comptait pas : M. Godeau s'était tué. Jouhandeau, M. Godeau,1926, pp. 89-90.
b) [En compl. déterminatif, dans des expr.] Constatation de fait; question de fait. Car c'est d'une impossibilité de fait qu'il faudrait se prévaloir, pour nier la simple possibilité logique du surnaturel (Blondel, Action,1893, p. 391):
7. Pour n'avoir pas voulu intervenir, dès le début, dans les questions de fait, il se trouve réduit, dans les questions de principe, à formuler purement et simplement en termes plus précis la métaphysique et la critique inconscientes... Bergson, Évol. créatr.,1907, p. 196.
Erreur, assertion de fait. Erreur matérielle qui porte sur un fait (p. oppos. à erreur de jugement). Selon lui, une assertion de fait pourrait être fausse, en tant qu'historique et vraie en tant que théologique (Malègue, Augustin, t. 1, 1933, p. 335).
c) [Dans des loc.]
Un fait est un fait. La chose est indiscutable. Un fait est un fait. Les dogmes sont vrais, ou bien ils ne sont rien (Martin du G., J. Barois,1913, p. 242).Je sais que j'ai un tempérament d'interprétante. Mais un fait est un fait (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 414).
C'est un fait. C'est une chose réelle, certaine, incontestable. Cela est certainement fâcheux, mais c'est un fait qu'il faut bien reconnaître (Delécluze, Journal,1826, p. 309).
Il est de fait que..., c'est un fait que..., le fait est que... + ind. Il est vrai, indéniable que, il faut admettre que. Je suis belle, j'ai cet avantage pour lequel Mmede Staël eût tout sacrifié, et pourtant il est de fait que je meurs d'ennui (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 289).Le fait est qu'elle s'y prenait mal : elle mouillait trop le papier, elle ne le comprimait pas assez (Beauvoir, Mandarins,1954p. 58):
8. La théorie aristotélicienne du choix, conçu comme une décision du vouloir consécutive à une délibération rationnelle, était remarquablement élaborée, mais c'est un fait qu'Aristote n'y parle ni de liberté, ni de libre arbitre. Gilson, Espr. philos. médiév.,1932, p. 102.
Rem. Le fait est que peut avoir une nuance oppositive = en réalité (p. oppos. à l'apparence). Synon. de en fait. Jean Valjean, dans la nuée épaisse du combat, n'avait pas l'air de voir Marius; le fait est qu'il ne le quittait pas des yeux (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 502). Je suis devenu un ami avéré du peuple. C'est un axiome. Le fait est que je méprise souverainement la politique (Gobineau, Pléiades, 1874, p. 107).
Poser en fait que. Admettre comme chose certaine que.
De fait, en fait, par le fait (loc. adv.). En réalité, effectivement, véritablement. Ainsi Ronsard sent que son alexandrin n'a pas encore le juste poids qui le rendrait apte à fournir un ordre consécutif de pages parfaites. Et de fait c'est chez Corneille que paraissent ces premières pages (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 24):
9. ... la décision finale ne pouvait faire aucun doute. De fait, trois jours après l'incident du porte-feuille, notre père, brusquement et, comme toujours, aussitôt après le bénédicité, lisse ses moustaches et déclare : − Mes enfants, je suis obligé de vous mettre au collège. H. Bazin, Vipère,1948, p. 270.
Rem. De fait et par le fait introduisent une explication, une conséquence, en fait introduit parfois une oppos. (en théorieen fait, « dans les faits », dans la réalité). Il n'y a que par l'entrée dans le transcendant, le surnaturel, le spirituel authentique que l'homme devient supérieur au social. Jusque-là, en fait et quoi qu'il fasse, le social est transcendant par rapport à l'homme (S. Weil, Pesanteur, 1943, p. 162).
3. Spéc. Ce qui existe, ce qui constitue la réalité (p. oppos. au droit, à ce qui est voulu ou reconnu par la loi). En fait et non en droit. Cf. droit3IC 2 b et d.
a) [Dans des expr.]
De fait. Sur le plan de la réalité (sans référence à la loi). Anton. de droit.Cf. droit3ex. 9.
Point, question de fait. Discussion pour établir l'existence, la véracité d'un fait. Anton. point de droit.Les questions de fait ne sont pleinement résolues que par l'expérience (Destutt de Tr., Idéol.,1, 1801, p. 309).
Gouvernement, pouvoir, autorité de fait. Autorité, pouvoir, gouvernement qui n'est pas reconnu par la loi. La République a donc été un gouvernement de fait et de droit (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 2, 1823, p. 61).
État, situation de fait
Situation telle qu'elle existe (sans référence juridique, sans fondement légal) :
10. − C'est ainsi, par le détour des idées et dans le tourbillon de leur mouvement, que le désordre et l'état de fait doivent reparaître et renaître aux dépens de l'ordre. Ce retour à l'état de fait peut s'opérer quelquefois par une voie que l'on n'eût point prévue, et l'homme redevenir un barbare de nouvelle espèce par conséquence inattendue de ses plus fortes pensées. Valéry, Variété II,1929, pp. 59-60.
P. ext., cour. État de chose, situation. La ruse des gouvernés : notre situation de citoyen est une situation de fait, que nous n'avons pas choisie (Alain, Propos,1928, p. 797):
11. Tout ce que nous sommes, nous le sommes sur la base d'une situation de fait que nous faisons nôtre et que nous transformons sans cesse par une sorte d'échappement qui n'est jamais une liberté inconditionnée. Merleau-Ponty, Phénoménol. perception,1945, p. 199.
Fait social. Réalité sociale. L'histoire de l'Église, de Constantin à Léon XIII, traversait les programmes d'un grand courant charrieur de faits sociaux et de passions humaines (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 92).Distinguer plus nettement entre l'institution en tant que fait social et l'institution en tant que pratique vécue (Traité sociol.,1968, p. 400).
b) Spéc., DR. Tout événement matériel qui nécessite un jugement. Énonciation, articulation des faits; interrogatoire sur les faits; reconnaître les faits.
Expr. Faits et articles. Faits articulés par le demandeur et sur lesquels la partie adverse est ensuite interrogée. Articuler un fait. Sur-le-champ, il mit Jean-Jacques en demeure d'articuler un seul fait et de lui nommer son accusateur (Guéhenno, Jean-Jacques,1952, p. 208).Fait nouveau. Fait non encore soumis à la procédure; fait découvert après un jugement ou une condamnation. P. métaph. Un fait nouveau incite, sinon à en entreprendre la révision, du moins à en atténuer légèrement la rigueur (Bariéty, Coury, Hist. méd.,1963, p. 596).Faits admissibles. Événements qui peuvent être reconnus comme preuves. Faits pertinents. Événements sur lesquels porte le procès.
4. Spéc. [En parlant d'obj. étudiés par une science] Toute donnée de l'expérience, observée ou observable, directement ou indirectement (p. oppos. aux hypothèses, aux théories) :
12. Ce quelque chose, qui constitue l'essence même de la recherche expérimentale, c'est le fait. Établir une expérience, c'est déterminer un ou plusieurs faits, rien de plus. La science a été sur la voie de sa prospérité du jour où les savants ont eu le culte, la passion exclusive du fait et rien que du fait. Bourget, Essais psychol. contemp.,1883, p. 169.
Fait brut. Fait qui relève de l'observation directe, immédiate. Fait scientifique. Phénomène objectivé (car apparaissant régulièrement dans certaines conditions), interprété par l'esprit et rapporté à une loi générale :
13. Peut-être, dit-il [M. le Roy] (je crois bien que c'était là une concession), n'est-ce pas le savant qui crée le fait brut; c'est du moins lui qui crée le fait scientifique. Cette distinction du fait brut et du fait scientifique ne me paraît pas illégitime par elle-même. Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 221.
C.− Ce dont il est question ou ce dont on parle (chose, sujet, cas, affaire particulière). Se taire sur le fait, ne rien dire du fait. Hermine demeurait convaincre d'un fait qui paraissait dominer tous les autres : Fernand était chez une femme (Ponson du Terr., Rocambole,t. 2, 1859, p. 239).
[Employé surtout dans certaines expr. et loc., (notamment avec au)]
1. (En) venir, revenir, aller au fait. Aborder l'essentiel du sujet, du débat :
14. Après quelques premiers compliments à tour de bras (...) sur le cardinal de Retz, son cousin-germain, le bon archevêque en vint au fait capital, procéda à l'interrogatoire des religieuses... Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 4, 1859, p. 120.
P. ell. Au fait! Allons au fait.
Aller droit au fait(de). Aborder le cœur, le vif du sujet, sans préambule.
2. Mettre qqn au fait. Informer quelqu'un, le mettre au courant (de). Mis au fait de ce qui se passait, il alluma une lanterne, et tous trois se dirigèrent vers la charrette embourbée (Gautier, Fracasse,1863, p. 22).
Être au fait (de la question). Être au courant, informé, renseigné. Il lui échappait (...) quelquefois des mots qui rappelaient ses anciennes amours; mais il fallait être au fait comme moi pour y faire attention (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1787):
15. Il me charge, M. Fauris, de recommander à votre souvenir un sien ouvrage de L'Art de traduire; apparemment vous êtes au fait, et vous saurez ce que cela veut dire. Courier, Lettres Fr. et It.,1812, p. 851.
Au fait de. Au courant de, expert en. Toute personne au fait de l'histoire des cartes géographiques sait (...) que les noms, titres, dates (...) sont plus longs à découvrir sur les cartes anciennes (Jomard, Consid. sur coll. cartes géogr.,1831, p. 58).
3. Être sûr de son fait. Être sûr à l'avance de ce qu'on affirme, être sûr d'avoir raison, ou de réussir dans son entreprise.
4. Au fait (!), loc. adv. ou interj. [En début de phrase, surtout dans la lang. parlée] À propos (de ce qui vient d'être dit), mais j'y pense. Hein! Qu'est-ce que nous allons manger? Qu'est-ce qui va nous rassasier? Les femmes? au fait nous les méprisons; elles nous y ont d'ailleurs joliment aidés (Arland, Ordre,1929, p. 156):
16. « Ton père a une infinité de spéculations, de grands desseins, qu'il ne peut mettre à exécution faute de ressources. Son influence dans le département se trouve brusquement arrêtée dans sa marche... Mais au fait je te parle là de choses qui ne t'intéressent peut-être pas beaucoup. » Duranty, Malh. d'H. Gérard,1860, p. 296.
5. En fait de, loc. prép. En ce qui concerne, en matière de. C'était encore un barbu, mais jeune, (...) tout ce qu'on fait de mieux en fait de col de celluloïd, avec des vêtements miteux et bien tenus (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 326).
Prononc. et Orth. : [fε], [fεt]. Mart. Comment prononce 1913, p. 327, note ,,une tendance très marquée à faire sentir le t du substantif fait, au singulier, surtout quand il est final ou accentué : en fait, au fait, par le fait, voie de fait, voici le fait, il est de fait, (...) je l'ai pris sur le fait, c'est un fait, et même c'est un fait constant, c'est le fait d'un honnête homme, le fait de mentir, le fait du prince; mais on ne doit jamais faire sentir le t au pluriel, ni dans fait divers, singulier identique au pluriel, ni dans en fait de ou tout à fait``. V. aussi Fouché Prononc. 1959, p. 405 : ,,Suivi d'un silence, fait se prononce [fε] dans un fait, c'est un fait, voie de fait, voici le fait, prendre sur le fait, tout à fait, etc. Mais il se prononce [fεt] dans au fait!, en fait, de fait``. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1160 « ce qui est arrivé, action » (Enéas, éd. S. de Grave, 2102); spéc. 1284 sour le fait trouver (G. d'Amiens, Escanor, 23667 ds T.-L.); 2. ca 1170 « action mémorable, exploit, prouesse, » (Benoit, Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 25025); 1306 fait de guerre (G. Guiart, Branche des Royaus Lignages, éd. Wailly et Delisle, 16793); 3. 1ertiers xiiies. « manière d'agir propre à quelqu'un » (Lancelot, éd. H. O. Sommer, II 83 : les oevres de son fait); 4. 1283 terme de dr. (Ph. de Beaumanoir, Coutumes de Beauvaisis, éd. Am. Salmon, VIII, 269). B. 1. Ca 1160 « ce qui existe réellement, réalité » (Enéas, éd. Salverda de Grave, 3984); 2. 1268 « sujet particulier dont il est question, événement » (Brunet Latin, Tresor, éd. F. J. Carmody, III, 15, 3 : Devisemens est lors quant on conte le fait). C. Loc. adv. a) xiies. tot affait (Sermons St Bernard, 34, 1 ds T.-L.); ca 1200 tot a fait (Chevalier au Cygne, 198, ibid.); b) 1268 en fait (Brunet Latin, op. cit., II, 10, 15); c) 1283 de fait (Ph. de Beaumanoir, op. cit., LVI, 1616). Du lat. factum « fait, action » part. passé neutre substantivé de facere « faire ». Fréq. abs. littér. : 22 108. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 32 192, b) 30 722; xxes. : a) 30 731, b) 31 609. Bbg. Allaire (S.). Le Syntagme le fait que. Fr. mod. 1975, t. 43, pp. 308-337. − Ebneter (T.), Gessner (M. P.). La Causalité du fr. parlé. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1974, t. 12, no1, pp. 325-345. − Quem. DDL t. 6.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·