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ÉTOFFE, subst. fém.

ÉTOFFE, subst. fém.
A.− Matière textile servant à l'habillement, à l'ameublement. Synon. tissu.Étoffe de coton; étoffe imprimée; coupon d'étoffe. Les mouflons du corral avaient été dépouillés de leur laine, et cette précieuse matière textile, il ne s'agissait donc plus que de la transformer en étoffe (Verne, Île myst.,1874, p. 311).À travers la souple et floconneuse étoffe de son complet, il respirait le bien-être par tous ses pores (Gide, Caves,1914, p. 822):
1. Des satins clairs et des soies tendres jaillissaient d'abord (...). Puis, venaient des tissus plus forts, les satins merveilleux, les soies duchesse, teintes chaudes, roulant à flots grossis. Et, en bas, ainsi que dans une vasque, dormaient les étoffes lourdes, les armures façonnées, les damas, les brocarts, les soies perlées et lamées, au milieu d'un lit profond de velours... Zola, Bonh. dames,1883, p. 487.
2. Pierre, qui d'ordinaire ne s'occupait guère de ces détails, tâtait les étoffes, les froissait dans ses mains d'un air soupçonneux, ne trouvant rien d'assez beau pour sa promise. On fit choix d'une étoffe de soie, couleur gorge de pigeon, à reflets mauves et bleus, qui bruissait doucement et coulait dans leurs doigts, comme une eau changeante. Moselly, Terres lorr.,1907, p. 201.
SYNT. Étoffe de fil, de laine, de soie; étoffe fine, légère, transparente; étoffe épaisse, lourde; étoffe grossière, précieuse; étoffe brochée, brodée, satinée, unie; étoffe chatoyante, moelleuse; étoffe irrétrécissable, lavable; lisière d'une étoffe; métrage, pièce, rouleau d'étoffe; acheter, lever des étoffes; marchand d'étoffes.
1. [P. anal. d'aspect] De vieux troncs d'arbres (...) apparaissaient vêtus d'un incomparable velours vert, étoffe superbement feutrée de fines mousses moelleuses au tact (Michelet, Insecte,1857, p. xvii).Devant lui une terre vêtue de soleil, l'étoffe claire des prés, la laine des bois, le voile froncé de la mer (Saint-Exup., Courr. Sud,1928, p. 14).
Spéc., B.-A. ,,Draperies des figures peintes ou sculptées`` (Adeline, Lex. termes art, 1884). La plus surprenante de ces statues (...) était celle de Moïse. Enveloppé d'un manteau dont l'étoffe aussi flexible qu'un véritable tissu, ondoyait en de souples plis (Huysmans, Oblat,t. 2, 1903, p. 120).
2. P. métaph. Il n'est aucune forme d'art où n'apparaisse (...) ce souci de doubler la soie brillante de l'imagination avec l'étoffe solide de la science (Bourget, Essais psychol.,1883, p. 181).Les anciennes idées qui faisaient bon usage, qui étaient taillées dans des étoffes comme on n'en fait plus (Nizan, Chiens garde,1932, p. 206):
3. ... notre destin est un destin spatial et temporel. Il n'est pas un de nos actes qui ne soit taillé dans cette étoffe étendue et durable dont la réflexion moderne tend à penser qu'elle n'est qu'un même tissu sous deux éclairages. Mounier, Traité caract.,1946, p. 299.
Rem. On rencontre ds Teilhard de Chardin l'expr. étoffe de l'univers qui sert à désigner la matière dont l'univers est constitué. Historiquement, l'étoffe de l'univers va se concentrant en formes toujours plus organisées de matière (Phénom. hum., 1955, p. 44).
Loc. et expr. fig.
Ne pas épargner, ne pas plaindre l'étoffe. User largement de la matière, des moyens dont on dispose. Celle-ci (...) avait donné (...) des témoignages d'une admiration frénétique. Elle excellait en ce genre, et comme on le pense, elle n'y épargna pas l'étoffe cette fois (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 80).
Tailler en pleine étoffe. Se servir sans contrainte (de quelque chose), avoir toute liberté pour agir. Le Cid, pour les Espagnols, était, depuis des siècles, un personnage épique : aussi le poëte dramatique, Guilhem de Castro, se sent à l'aise avec lui et y taille en pleine étoffe (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 7, 1863-69, p. 266).
B.− TECHNOL. Matière servant à la fabrication de différents objets.
1. IMPR. Les étoffes. Matériel nécessaire à l'impression. Cf. Carabelli, [Lang. impr.].
P. ext. Somme demandée par l'imprimeur en plus des frais d'impression pour couvrir ses frais généraux de matériel et de fonctionnement et réaliser un bénéfice. Les privilèges d'imprimerie (...) prélèvent sur notre profession une sorte d'impôt représenté par ce qu'on appelle « les étoffes », c'est-à-dire le tiers du prix de main d'œuvre (Nerval, L. Burckart,1839, p. 308).Les bénéfices que doit faire un imprimeur, ce monde de choses exprimées en langage d'imprimerie par le mot « étoffes » (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 556).
2. MÉTALLURGIE
a) Alliage de fer et d'acier utilisé par les serruriers, taillandiers, couteliers pour la fabrication des gros instruments tranchants.
b) Alliage dont se servent les potiers d'étain.
Ces sens sont attestés ds Ac. Compl. 1842, Besch. 1845, Lar. 19e-Lar. encyclop., Littré, Guérin 1892, DG, Rob.
c) Alliage d'étain et de plomb qu'utilisent les fabricants de tuyaux d'orgue. Ceux [les tuyaux d'orgue] qu'on ne voit pas sont en étoffe, alliage de plomb et d'étain (Bouasse, Instrum. à vent,1930, p. 277).
d) Alliage de fer et d'acier utilisé pour la fabrication des canons. Mes canons y furent célèbres [à Aranjuez] dont j'avais de toutes les couleurs et de toutes étoffes, jusque-là que le comte-duc en fut jaloux (Toulet, Mar. Don Quichotte,1902, p. 96).
3. TANN. Solution de sel marin et d'alun dans laquelle on fait tremper les peaux. Attesté ds Ac. Compl. 1842, Besch. 1845, Lar. 19e-20e, Littré, Guérin 1892.
C.− Au fig. Ce qui constitue la personnalité d'un être humain ou la caractéristique d'une chose, produit de l'esprit humain. Être de la même/d'une autre étoffe que.
1. [En parlant d'une pers.] Ce qui constitue la personnalité, ce qui définit les qualités ou les tares intellectuelles, morales de quelqu'un. Paresseux et gourmand, voilà dans quelle étoffe le gaillard est taillé! (Banville, Odes funamb.,1859, p. 146).Vraiment, c'est une chose absurde et injuste qu'on n'ait pas donné à notre corps l'étoffe de notre caractère (Goncourt, Journal,1865, p. 208).Cent fois vous serez touché des larmes de théâtre, et des morts de théâtre, enfin de toutes choses qui sont votre étoffe, mais que vous détachez de vous comme un vêtement, que vous suspendez sur l'acteur, qui court au malheur à votre place (Alain, Propos,1935, p. 1284):
4. ... tout cela ramenait la pensée de celui qui la regardait vers la lignée qui lui avait légué cette insuffisance de sympathie humaine, des lacunes de sensibilité, un manque d'ampleur dans l'étoffe qui à tout moment faisait faute. Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 688.
Loc. et expr.
Être de basse, de mince étoffe (vx). Être de naissance, de condition modeste(s). Il pourrait se faire, grâce à la conscription, que cet homme [un prisonnier français] fût d'une étoffe plus ou moins distinguée (J. de Maistre, Corresp.,1811-14, p. 295).Pour fuir la cour du roi Pétaud, Ou les croquants de mince étoffe, On emportait dans son château Son singe − avec son philosophe (Bouilhet, Dern. chans.,1869, p. 84).
Avoir l'étoffe de. Avoir l'aptitude, les qualités (bonnes ou mauvaises) nécessaires pour accomplir certains actes, remplir certaines fonctions. Il y avait dans ce marin l'étoffe d'un diplomate. Il y a dans chaque Grec l'étoffe d'un marin (About, Grèce,1854, p. 169).Le bon juge avait suffisamment l'étoffe d'un avocat pour que des électeurs aient pu y tailler un député (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 59):
5. C'étaient de ces natures naines qui, si quelque feu sombre les chauffe par hasard, deviennent facilement monstrueuses. Il y avait dans la femme le fond d'une brute et dans l'homme l'étoffe d'un gueux. Tous deux étaient au plus haut degré susceptibles de l'espèce de hideux progrès qui se fait dans le sens du mal. Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 194.
Avoir de l'étoffe. Faire preuve de grandes qualités intellectuelles et morales, d'une personnalité affirmée. Anton. manquer d'étoffe, être de mince étoffe.La reine de Naples s'était beaucoup formée dans les événements, disait l'empereur. Il y avait chez elle de l'étoffe, beaucoup de caractère et une ambition désordonnée (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 635).Je préfère cent fois un révolutionnaire convaincu (...) à un libéral. Il y a de l'étoffe dans le premier. Il n'y en a pas dans le second (L. Daudet, Temps Judas,1920, p. 81).
2. [En parlant d'une manifestation de l'esprit hum., sentiment, pensée, etc.] Ce qui constitue le fond, la matière d'une chose. Les paroles du comte (...) répondaient aux sentiments de chasteté, de délicatesse qui sont pour ainsi dire l'étoffe des premières amours (Balzac, Lys,1836, p. 141).On ne voit pas de quoi serait faite l'étoffe des rêves de Beethoven, si elle ne l'était de l'étoffe même de cet univers, avec lequel nous faisons corps (Rolland, Beeth.,t. 1, 1937, p. 21):
6. Tandis que le philosophe (...) se fonde (...) sur ce fait que la religion catholique, comme toute autre forme religieuse, est fausse et constitue une superstition, l'esprit clairvoyant du politique sachant que la superstition, le préjugé, la croyance sont l'étoffe et l'unique tissu du réel, se préoccupe uniquement de rechercher quelle forme du préjugé est utile à la réalité française... Gaultier, Bovarysme,1902, p. 300.
Spéc. [En parlant d'un ouvrage de l'esprit] Ce qui en constitue le sujet, la matière. Retourné au journal, où l'on m'a communiqué des notes manuscrites sur la Russie. Bonne étoffe d'article! (Barb. d'Aurev., Memor. 2,1839, p. 279).Beaucoup de destinées qui sont dramatiques ne fournissent pas l'étoffe d'un roman, parce qu'elles manquent de péripéties (Mauriac, Plongées,1938, p. 10):
7. De là est venu ce défaut (...) dans les tragédies françaises : cette parcimonie de scènes et de développements, ces faux retardements, et puis tout à coup cette hâte d'en finir, mêlée à cette crainte que l'on sent presque partout de manquer d'étoffe pour remplir le cadre de cinq actes. Vigny, Lettre Lord...,1829, p. 269.
Rem. On rencontre dans Huysmans étoffiste, subst. masc. Peintre habile dans l'art de bien représenter les étoffes. La patte même de l'ancien étoffiste n'y est plus. Les robes qu'il brossait dextrement jadis sont en bois tubulé et en fer (Art mod., 1883, p. 159).
Prononc. et Orth. : [etɔf]. Enq. : /etof/. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1241 estophe « matière (désigne toutes sortes de matériaux) » (Test. de Marie de Chimay, A. Ardennes ds Gdf. Compl.); 2. fin du xives. estoffe « ce qui constitue ou définit une personne ou une chose » (Froissart, Chroniques, éd. S. Luce, t. 1, p. 178); 3. 1599 « tissu de laine, de fil, de coton, etc., dont on fait des habits, des garnitures d'ameublement » (Sully, Mémoires, t. 3, p. 423 ds Havard). Déverbal de étoffer*. Fréq. abs. littér. : 2 340. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 272, b) 4 231; xxes. : a) 3 802, b) 3 463. Bbg. Höfler (M.). Untersuchungen zur Tuch- und Stoffbenennung in der französischen Urkundensprache. Tübingen, 1967. − Rog. 1965, p. 34, 74.

ÉTOFFER, verbe trans.

ÉTOFFER, verbe trans.
A.− Emploi trans.
1. Confectionner, garnir (quelque chose) en employant toute l'étoffe nécessaire. La couturière n'a pas bien étoffé cette robe (Ac.1878-1932).
2. P. ext. Rendre (quelque chose) plus volumineux, plus important en nombre ou en proportions. Embarquer ces volontaires sur des bateaux, (...) puis (...) les diriger vers le front, où ils étofferaient nos unités (Joffre, Mém., t. 2, 1931, p. 449).Chez l'un d'eux, Thomas Moore, j'ai fait l'apprentissage de mon premier métier; il avait alors des favoris gris qui étoffaient un visage maigre et grave (Chardonne, Ciel,1959, p. 37).
Spécialement
B.-A. Étoffer une statue. Lui donner plus d'ampleur, en l'agrémentant de draperies flottantes. Attesté ds Littré, Guérin 1892, Lar. encyclop.-Lar. Lang. fr.
ART CULIN. Étoffer un poisson, une volaille. Les garnir de farce. L'oiseau ainsi préparé, il s'agit de l'étoffer (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 346).
3. Au fig. Rendre (quelque chose) plus important, lui donner plus de matière, de force, d'intensité. Rien ne me gêne autant que la renommée d'un paysage (pour l'œuvre d'art, il n'en va pas de même : l'admiration l'étoffe et l'épaissit...) (Gide, Journal,1946, p. 288).Les parfums remplissent l'air immobile et semblent étoffer le silence (T'Serstevens, Itinér. esp.,1963, p. 184).
Spécialement
[En parlant d'un son, en partic. du timbre de la voix] Lui donner plus de puissance. L'exercice commençait (...). Tout cela eût été bien ridicule, sans cette basse profonde du canon, cet accompagnement continuel qui donnait de l'aisance et de l'ampleur à nos manœuvres, étoffait les commandements trop grêles (A. Daudet, Contes lundi,1873, p. 162).Les fraîches voix de ces choristes invisibles, qu'à certaines représentations de gala on fait soutenir et étoffer la voix fatiguée d'un vieux ténor (Proust, Chron.,1922, p. 92).
[En parlant d'une œuvre littér. ou musicale] La rendre plus dense, plus riche; lui donner plus d'ampleur. Je devrais étoffer certaines répliques du « Cousin », un peu trop rapides (Renard, Journal,1908, p. 1209).Dans l'instrumentation du quatuor, Génin affectionne l'usage de pédales graves dont il étoffe la partie du deuxième violon (La Laurencie, Éc. violon,1923, p. 418):
... les chroniqueurs, par contre, désireux de dépasser le journalisme, donneraient volontiers deux litres de leur sang pour être, de leur vivant, élevés à la dignité d'historiens. C'est pourquoi ils étoffent et étayent les faits quotidiens de considérations générales. Morand, Chroniques homme maigre,1941, p. 150.
Étoffer un personnage. Lui conférer plus de caractère, plus d'importance. Je ne parle jamais d'Évariste, je ne le dilapide, je ne l'éparpille pas; je l'étoffe depuis près d'un demi-siècle; il a acquis une densité prodigieuse (Arnoux, Algorithme,1948, p. 305).
B.− Emploi pronom.
1. [En parlant du corps] Devenir plus gros, plus important dans ses proportions. Achetés petits, d'une apparence de sangliers presque, ils [les porcs] ne tardent pas en s'étoffant à se charger de viande (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 218).Je grandis, je grossis, je m'étoffais à tel point que Marcelline me retrouve (L. de Vilmorin, Lettre ds taxi,1958, p. 87).
2. [En parlant d'un ensemble de pers. ou de choses] Devenir plus fourni. Voici l'assiégeant, un petit groupe qui s'étoffe vite (Arnoux, Algorithme,1948p. 214).
Au fig. Il [Gilles de Rais] fut despotique et violent, faible pourtant lorsque les louanges de ses parasites s'étoffèrent (Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 96).
Prononc. et Orth. : [etɔfe], (j')étoffe [etɔf]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1223 estoffer « fournir de ce qui est nécessaire, équiper » (G. de Coinci, II Dout. 34, 1061 ds Miracles de Nostre-Dame, éd. V. F. Koenig, t. 4, p. 481); 2. 1352 « garnir de tout ce qui est nécessaire pour donner de l'ampleur; augmenter la commodité, l'ornement » (Comptes de l'argenterie des rois de France, éd. L.-Cl. Douët d'Arcq, p. 158); 3. 1755 étoffé « qui a des formes amples (d'un animal) » (Buffon, Hist. nat., t. 5, p. 205). Du frq. *stopfôn « mettre, fourrer, enfoncer dans » cf. l'a. h. all. stopfôn « id. » (Graff t. 6, col. 658); de ce sens est issu celui de « fournir de, équiper ». Fréq. abs. littér. : 30.
DÉR.
Étoffement, subst. masc.a) Assemblage d'étoffes. De vieilles petites créatures, sèches et ratatinées, emballées dans un étoffement carré de grosses étoffes de laine (Goncourt, Journal,1856, p. 258).b) B.-A. Action d'étoffer, de donner de l'ampleur aux draperies. Le peintre de très charmants tableaux, le dessinateur de modes [Watteau le fils], qui, dans une toilette de femme, a apporté une espèce de style grandiose, et qui (...) étonne par l'ampleur de ses étoffements superbes (E. de Goncourt, Mais. artiste,1881, p. 176). [etɔfmɑ ̃]. 1reattest. 1856 (Goncourt, loc. cit.); du rad. de étoffer, suff. -ment1*. Fréq. abs. littér. : 2.
BBG. − Quem. DDL t. 3 (s.v. étoffement).Rog. 1965, p. 34, 74.

ÉTOFFÉ, ÉE, part. passé et adj.

ÉTOFFÉ, ÉE, part. passé et adj.
I.− Part. passé de étoffer*.
II.− Emploi adj.
A.− [En parlant d'un vêtement] Ample, qui nécessite beaucoup d'étoffe. Elle passait un peignoir de piqué blanc, empesé, étoffé, et se cassant à grands plis (Goncourt, R. Mauperin,1864, p. 314).Longue jupe étoffée, taille serrée, sous la gorge, bonnet et châle croisé (Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 95).
P. métaph. Onze heures? Minuit? Deux robes identiques dans la garde-robe des heures. La deuxième un peu plus étoffée, mieux doublée de sonneries, taillée dans un morceau plus épais de la nuit (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 334).
Rem. On rencontre dans Hugo étoffement, adv. En employant beaucoup d'étoffe. Le sire de Coucy, [avec une oriflamme] à bannière, et plus étoffément que nul des autres (N.-D. Paris, 1832, p. 392).
B.− P. ext.
1. [Appliqué à l'ensemble ou à une partie du corps de l'homme ou des animaux] Qui présente une forte corpulence, des proportions importantes. Cheval étoffé. Un front étoffé, et dont on sentait la voûte largement développée sous les deux bords des deux bonnets, couronnait bien ce visage (Barb. d'Aurev., Memor. 4,1858, p. 109).Le gros notaire, dont l'aspect étoffé, surnourri, de sexagénaire solidement établi, faisait un contraste extraordinaire avec l'agonisant (Bourget, Sens mort,1915, p. 242).
Spéc., B.-A. [En parlant d'une statue] À laquelle on a donné de l'ampleur en l'agrémentant d'une draperie. À quelque distance, une grande statue de Louis XIV, largement étoffée, et d'un assez bon style (...) semble regarder cette pompe [les funérailles de Napoléon] avec stupeur (Hugo, Choses vues,1885, p. 16).
2. [Appliqué à un groupe de pers.] Qui est constitué par un grand nombre de participants. Tout cela forme un public autrement étoffé, solide, substantiel que les numéros de vestiaire d'une salle de première en 1922 (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 166).J'étais d'avis que la prochaine campagne d'Europe exigerait, effectivement, des services très étoffés (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 247).
C.− Au fig.
1. [Appliqué à la voix hum.] Qui a des qualités d'ampleur, de puissance. Quand elle [la chanteuse] parut (...) et que le son plein, riche, étoffé, s'échappa dès les premières notes, abondant et pur comme l'eau d'une source vive, il y eut dans la salle un charme d'étonnement (A. Daudet, Femmes d'artistes,1874, p. 84).Point d'esprit, une certaine rapidité de compréhension, un vocabulaire très suffisant que rehausse une belle voix étoffée (...) voilà mon amoureux (Colette, Vagab.,1910, p. 105).
2. [Appliqué à une œuvre littér. ou musicale] Qui possède un contenu riche et varié. Maintenant, l'œuvre est bien plus complète, plus étoffée, mieux écrite; puissé-je en faire un jour un monument de gloire! (Balzac, Corresp.,1833, p. 234).Il me demande de lui présenter un thème de quelques notes, sur lequel il improvise aussitôt de brillantes fioritures, assez étoffées ma foi (Gide, Journal,1930, p. 999).
Rem. On rencontre a) Ds la docum. la constr. étoffé de, étoffé en suivi d'un compl., au sens de « qui est riche de, qui possède beaucoup de ». Je ne les crois pas assez étoffés en courage et en audace spontanée pour jouer ce jeu-là (Gobineau, Corresp. [avec Tocqueville], 1850, p. 136). La vie enfin doit presque être un conte de fée. Je la veux de chansons et de joie étoffée (Hugo, Quatre vents esprit, 1881, p. 317). b) Ds Sainte-Beuve le part. passé employé comme subst. au sens de « aspect imposant, caractère de grandeur ». La richesse, la chaleur des tons, le magnifique et l'étoffé de l'ensemble [de la « Procession »], tout ce lustre de premier aspect, ont paru trop forts pour les modestes Le Nain (Nouv. lundis, t. 4, 1863-69, p. 123).
Fréq. abs. littér. : 62. Bbg. Gohin 1903, p. 372. − Mat. Louis-Philippe 1951, p. 265.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·