1. Soumettre une (ou la) qualité d'une personne ou d'une chose à une expérience susceptible d'établir la valeur positive de cette qualité. a) [Le compl. d'obj. exprimant la qualité est un subst. abstr. suivi d'un compl. prép. introd. par de] − [La qualité est celle d'une chose concr. ou abstr.] Éprouver la robustesse d'un appareil, l'efficacité d'une arme à feu; éprouver la valeur d'une théorie. Toutes ces formules et ces pratiques avaient été léguées par les ancêtres qui en avaient éprouvé l'efficacité (Fustel de Coul., Cité antique,1864, p. 213).J'allai à la fenêtre, (...) et éprouvai la solidité des barreaux auxquels on n'avait pas touché (G. Leroux, Parfum,1908, p. 103).
− [La qualité est celle d'une pers.] Éprouver la fidélité d'un ami, les capacités d'un ouvrier, l'amour d'une femme. Vous n'avez donc jamais éprouvé l'obéissance des nouveaux serviteurs? (Vogüé, Morts,1899, p. 221).Il conduisit son examen, moins pour éprouver la force du candidat qu'afin de cribler de sarcasmes son gros confrère (France, Vie fleur,1922, p. 434).
b) [P. méton. du compl. d'obj.; le compl. d'obj. désigne directement la chose ou l'être dont on examine la qualité] La machine à éprouver les cordages (Michelet, Journal,1835, p. 172).Il n'employait à ses besognes (...) que des gens qu'il avait tâtés, éprouvés, flairés (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 125).−
En partic. [L'épreuve porte sur la valeur religieuse d'une pers.] Écoute : Dieu parfois veut éprouver nos cœurs; Et, lorsque de l'épreuve ils sont sortis vainqueurs, Sa colère fait place à la miséricorde (Dumas père, Charles VII,1831, IV, 6, p. 295):1. Mais alors Dieu les éprouva, comme disent les chroniqueurs arabes chaque fois que se produit en Islam un fâcheux retour de la fortune. La peste se mit parmi eux.
Tharaud, Mille et un jours,II, 1938, p. 8.
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[Avec expression d'une circonstance particulière de l'épreuve] :
2. [Jacques]. Ma conscience ne me reprocherait rien, monsieur le marquis, si je rapportais à des gens éprouvés au feu, comme monseigneur Rodriguez et vous, la dépêche au cardinal Cordova.
Fabre, Roi Ramire,1884, p. 169.
− Emploi pronom. réciproque ou réfl. Leur amour allait croissant parce qu'il était vrai. Ils [Luigi et Ginevra] s'étaient éprouvés en peu de jours (Balzac, Vendetta,1830, p. 208).La sœur [Philomène] regarda [le mort] : elle resta, pour s'éprouver, longtemps à regarder (Goncourt, Sœur Philom.,1861, p. 121).
2. Faire subir à quelqu'un une expérience pénible. a) [Le suj. agent désigne un être puissamment agissant ou des accidents à forte charge affective] Le malheur nous éprouve (Ac.1932).Ne reprochez pas à la destinée de vous avoir éprouvés trop rudement (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 178).Mais pourquoi Malherbe traite-t-il d'injurieux ami ce pauvre monsieur Duperrier déjà si éprouvé par la perte de sa fille? (France, Bonnard,1881, p. 239).Vous qui avez souffert, résistez [.] Populations civiles éprouvées par les expéditions terroristes des Boches (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 410).
b) [Le suj. désigne un phénomène naturel, en particulier une force de la nature] En arrivant à Paris, il y a un mois, le changement de climat l'avait un peu éprouvé [le Nabab] (A. Daudet, Nabab,1877, p. 8).D'autre part, les surfaces éprouvées par un mauvais écoulement des eaux réclamaient de coûteux travaux de desséchement (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 84).− Julie va bien? − Elle sera contente de vous voir. La chaleur l'éprouve, dit Paul d'un ton résolu (Chardonne, Dest. sent.II, 1934, p. 236).