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DÉJEUNER1, verbe intrans.

DÉJEUNER1, verbe intrans.
A.− Vx, région. Prendre le repas du matin :
1. Alors que, les premiers mois, j'avais gardé mes heures de prière, de repos, de repas, que je m'étais crue obligée chaque jour de déjeuner, de dîner, de souper (...) Maintenant je vivais de bananes ou de mangues heure par heure. Giraudoux, Suzanne et le Pacifique,1921, p. 72.
Rem. P. réf. au subst. petit déjeuner, on trouve parfois le verbe qui en dérive, employé p. plaisant. Avez-vous bien dîné? demanda-t-il [André à Julietta]. Oui, très bien dîné, et bien petit-déjeuné aussi (L. de Vilmorin, Julietta, 1951, p. 173).
Déjeuner à la fourchette. Prendre un petit déjeuner copieux fait souvent de viandes accompagnées de vin. Mais en fait d'anges je n'estime que ceux qui déjeunent vigoureusement à la fourchette et qui ont du marbre plein leur corset (Barb. d'Aurev., 2eMemor.,1839, p. 345).
B.− Usuel. Prendre le repas de midi. J'ai eu ce jour la société du journal à déjeuner (Maine de Biran, Journal,1817, p. 57).Mais d'abord on déjeuna, sur le pouce (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 156):
2. Une servante vint annoncer que le déjeuner était servi. − Oh! Papa, implora Renée, si nous déjeunions ici, puisque nous y sommes? Il fait si bon. Mais M. Henriot, d'un ton ferme : − Pas de ça, ma petite! Chaque chose à sa place : c'est ainsi qu'on fait les bonnes maisons. Nous déjeunerons dans la salle à manger, comme d'habitude. Arland, L'Ordre,1929, p. 38.
Déjeuner + prép.
1. [Introduit par de, le compl. circ. de moyen désigne les mets consommés au déjeuner] Je déjeunai fort bien d'une omelette aux fines herbes, d'une aile de poulet au gros sel et d'un morceau de fromage (A. France, Pt Pierre,1918, p. 243).Pierrot déjeuna debout : d'un sandwich (Queneau, Pierrot,1942, p. 147).
2. [Introduit par avec, le compl. circ. d'accompagnement désigne la ou les personnes avec qui l'on déjeune] Venez donc me voir et déjeuner avec moi demain matin si vous pouvez (Hugo, Corresp.,1832, p. 518).
3. [Toutefois, la préposition avec tend à être employée dans les 2 cas cités supra] :
3. Je m'en vais déjeûner, si grondante de colère rentrée que papa lui-même s'en aperçoit et me demande si j'ai la fièvre (...) Puis je reviens très tôt, à midi un quart et je m'énerve, parmi les rares élèves qui sont là, des gamines de la campagne déjeûnant dans l'école avec des œufs durs, du lard, de la mélasse sur du pain, des fruits. Colette, Claudine à l'école,1900, p. 50.
Rem. On rencontre chez P. Valéry le néol. déjeunatoire, adj. sur le modèle de dînatoire*. Qui est relatif au déjeuner. Charles [Auzillon], de Bordeaux et du Sud-Ouest m'écrit pour des projets déjeunatoires (Valéry, Corresp. [avec G. Fourment], 1914, p. 180).
Prononc. et Orth. : [deʒ œne], (je) déjeune [deʒ œn]. [ø] fermé long d'apr. jeûne ds Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787 et comme 1revar., à côté de [œ] ds Passy 1914. Dans jeûne, l'accent circonflexe marquant la durée s'explique étymologiquement (contraction de 2 syll.) et la durée se justifie, encore, parce que la voyelle se trouve en position tonique. En harm. avec la prononc. [ø] on rencontre la graph. déjeûner ds Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787 Gattel 1841 comme ds Ac. 1740 et 1762, les éd. de 1694 et 1718 écrivant desjeuner, les éd. de 1798-1932 enregistrant la forme mod. La disparition de l'accent circonflexe, le changement de timbre s'expliquent par le fait que le verbe n'est plus très senti comme un dér. de jeûne. Il a le sens de prendre un repas plutôt que celui de rompre le jeûne. Au contraire jeûner, jeûneur ont conservé leur accent, mais à jeun n'en porte pas (une nasale en finale absolue étant brève, l'accent circonflexe, signe graphique d'une durée serait malvenu). Buben 1935, § 33 signale que sous l'influence de déjeuner on peut rencontrer la prononc. [ʒ œn] pour jeûne (prononc. admise comme var. ds Passy 1914, jugée tout à fait incorrecte par Mart. Comment prononce 1913, p. 92). Mais cette prononc. a peu de chance de s'étendre parce que [ø:] et l'accent circonflexe jouent un rôle distinctif p. rapp. à l'adj. jeune. Buben 1935, § 33 note, également, la prononc. [deʒne] dans laquelle [ø] s'est affaibli en [ə] et disparaît complètement. Étymol. et Hist. Ca 1155 sei desgeüner « prendre le repas du matin » (Wace, Rou, 1, 197 ds T.-L.), dep. le xixes. sert aussi à désigner l'action de prendre le repas de midi, évinçant dans ce sens dîner*, l'heure des différents repas s'étant déplacée dans la journée (cf. Dauzat ds Mél. Huguet, pp. 59-66). Prob. du b. lat. disjejunare attesté seulement au xies. (Vita S. Walburgis d'apr. E. Benveniste ds Rom. Philol., t. 10, 1956, p. 145), disjunare, littéralement « rompre le jeûne ».
DÉR.
Déjeuneur, subst. masc.,vx. Personne qui déjeune. Dans la grande salle de Peters. Pas un déjeuneur (Goncourt, Journal,1871, p. 762). 1reattest. 1825 (Brillat-Sav., Physiol. goût, p. 160); de déjeuner1, suff. -eur2*. Fréq. abs. littér. : 3.
BBG. − Kurylowicz (J.). Extrapolation d'une loi ling. B. Soc. Ling. 1968, t. 63, p. 1. − Pamart (P.). Écriture artiste et créations verb. Vie Lang. 1970, p. 307 (s.v. déjeuneur).Quem. 2es. t. 3 1972 (s.v. déjeunatoire).

DÉJEUNER2, subst. masc.

DÉJEUNER2, subst. masc.
Repas quotidien dont la nature et l'horaire sont variables suivant l'époque, la région ou une culture particulière.
A.− Vx, région.
1. Repas léger que l'on prend le matin au lever. Désormais, madame se leva à neuf heures comme une princesse, et même elle exigea que la bonne lui montât son déjeuner au lit (Aragon, Beaux quart.,1941, p. 15):
1. Si je n'allais pas avec elle [Geneviève], je trouvais cependant mon déjeuner tout prêt, dans la grand'salle : le pain tendre, le sucrier de verre, et les petits toupins du lait et du café, qui cuisaient côte à côte, sur la braise de la cheminée recouverte de cendres tièdes. Bosco, Le Mas Théotime,1945, p. 68.
Rem. Dans ce cas, déjeuner est fréquemment déterminé par un adj. ou un compl. de nom. Faire le premier déjeuner (Zola, Dr Pascal, 1893, p. 31). Prendre le déjeuner du matin (Duhamel, Combat ombres, 1939, p. 168).
En partic., usuel. Petit déjeuner. Sur le devant de son vêtement de nuit s'étalaient avec gloire les taches de chocolat des petits déjeuners (Montherl., Filles,1936, p. 989):
2. Fort malheureusement, il se trouva que la cuisinière jugea son cadeau inférieur aux autres et, le lendemain matin, mon arrière-grand'mère avala plusieurs bouchées d'arsenic avec son petit déjeuner. Green, Journal,1935-39, p. 228.
Déjeuner à la fourchette. Déjeuner où l'on mange souvent de la viande accompagnée de vin :
3. mmesorbet. − Monsieur, je ne tiens pas le déjeuner à la fourchette. florimon. − Alors, madame, faites-moi donner des côtelettes. mmesorbet. − Prenez donc garde, monsieur, que c'est encore du restaurant, et l'on ne trouve ici que ce qui constitue l'ancienne limonaderie. Leclercq, Madame Sorbet,1835, 6, p. 141.
2. Au fig. Le déjeuner désignant familièrement une chose sans importance, p. réf. à la frugalité traditionnelle du premier repas; cf. Lar. 20e.Déjeuner de soleil. Tissu dont la couleur passe au soleil :
4. [Gladys :] − ... Mon Dieu! que j'ai pleuré dans le train, en m'en retournant!... J'en ai gâté ma robe. Elle était si fragile! Un déjeuner de soleil, comme mon beau roman! ... Bourget, Pastel, 1889, p. 51.
P. ext. Projet, sentiment éphémère. Le frais amour de deux corps juvéniles est un matin d'avril. Il passe comme une rosée. La jeunesse du cœur est un déjeuner de soleil (Rolland, J. Chr.,Adolesc., 1905, p. 336).
3. P. méton.
Vx. Service à déjeuner composé généralement d'un plateau, d'un sucrier, d'une tasse et sa soucoupe :
5. − Comment, s'écria Madame Vauquer, le père Goriot aurait fondu son déjeuner de vermeil? − N'y avait-il pas deux tourterelles sur le couvercle? dit Eugène. − C'est bien cela. − Il y tenait donc beaucoup, il a pleuré quand il a eu pétri l'écuelle et le plat. Balzac, Le Père Goriot,1835, p. 60.
Usuel. Ensemble formé par la tasse et la soucoupe assorties. J'ai lavé moi-même mes deux déjeuners en vieux Marseille. J'ai lu deux Harmonies poétiques. Puis j'ai écrit à mon mari que j'avais lavé nos deux déjeuners et lu mes deux Harmonies (Giraudoux, Lucrèce,1944, I, 4, p. 37).
B.− Courant
1. Repas plus copieux du milieu de la journée. Déjeuner d'affaires (Miomandre, Écrit sur eau,1908, p. 90).Déjeuners de chasse (Barrès, Cahiers,t. 5, 1960-1907, p. 9).Les déjeuners sur l'herbe (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Découverte, 1884, p. 958).Un déjeuner littéraire (Green, Journal,1949, p. 328):
6. Car quand nous étions tous dans le petit salon de Gilberte, tout d'un coup regardant l'heure elle disait : − Dites donc, mon déjeuner commence à être loin, je ne dîne qu'à huit heures, j'ai bien envie de manger quelque chose. Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,1918, p. 506.
Rem. 1. Déjeuner est parfois déterminé par des adj. qui l'opposent à petit déjeuner. Le second déjeuner était servi ... Midi sonnait (Balzac, Chanterie, 1850, p. 242). Au grand déjeuner, je force la confiance des enfants (Colette, Mais. Cl., 1922, p. 256). 2. Dans certaines régions ou dans certains milieux, le déjeuner est nommé dîner*. Le dîner des hôtes, car l'on appelait au cloître le déjeuner dîner et le dîner souper, était composé d'un bouillon épaissi par des îles réunies de semoule (Huysmans, Oblat, t. 1, 1903, p. 58).
Déjeuner(-)dîner ou déjeuner dinatoire. Repas servi tard dans la journée et tenant lieu de dîner. Avant de quitter le château, Hautemare descendait à l'office où il trouvait une sorte de déjeuner-dîner pour lui préparé (Stendhal, Lamiel,1842, p. 41).
En composé [Le second terme désignant l'activité pratiquée pendant le déjeuner] Déjeuner-concert (Le Monde,9 janv. 1866).Déjeuner-débat (Le Monde,15 oct. 1965ds Gilb. 1971).Le prochain déjeuner-conférence, organisé par la Société française de Géographie économique et d'Action coloniale (L'Œuvre,13 juin 1941).
2. P. méton. La nourriture, les mets qui composent le repas :
7. ... cette foule d'écoliers externes qui se rendent aux lycées, leurs livres sous le bras et le déjeûner à la main; ... Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 2, 1812, p. 57.
Prononc. et Orth. : [deʒ œne]. Pour [ø:] fermé long à la 2esyll. et pour la graph. déjeûner, cf. déjeuner1. Ac, 1740-1878 admet la var. déjeuné, alors que les éd. de 1694, 1718 et 1932 enregistrent uniquement la graph. en -er. Celle en est donnée, en tant que var., également, ds Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Land. 1834, Gattel 1841, Besch. 1845, Littré, Guérin 1892 et DG, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., Lar. 20e(pour lequel cette var. est rare). Étymol. et Hist. a) Fin xiies. (Naiss. du chev. au cygne, 2261 ds Gdf. Compl. : pense del desjuner); b) 1728 « ensemble de vaisselle servant à ce repas » (Journal de Verdun d'apr. Havard). Substantivation de déjeuner1*.
STAT. − Déjeuner1 et 2. Fréq. abs. littér. : 5 881. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 624, b) 9 524; xxes. : a) 10 798; b) 8 609.
BBG. − Arickx (I.). Les Orthoépistes sur la sellette. Trav. Ling. Gand. 1972, no3, p. 125. − Benveniste (E.). À propos du fr. déjeuner. Rom. Philol. 1956-57, t. 10, p. 145. − Dauzat (A.). Déjeuner, dîner, souper du Moyen-Âge à nos jours. In : [Mél. Huguet (E.)]. Paris, 1940, pp. 59-66; L'Hist. de déjeuner, dîner, souper. Vie Lang. 1952, pp. 3-5. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 12. − Piron (M.). Les Belgicismes lex. In : [Mél. Imbs (P.)]. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1973, t. 11, no1, p. 299. − Quem. 2es. t. 4 1972.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·