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CRIBLE1, subst. masc.

CRIBLE1, subst. masc.
[P. réf. à cribler1*]
A.− Instrument constitué essentiellement d'une surface plane percée de nombreux petits trous et servant à séparer des solides de différentes grosseurs. Synon. passoire, tamis, tarare.Et le grain pleut sur les cribles, y saute, s'y trie, s'y vanne sous les pelles qui l'éventent (Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 60):
1. C'était une boîte longue de cinq à six pieds, une sorte de bière ouverte et divisée en deux compartiments. Le premier était muni d'un crible grossier, superposé à d'autres cribles à mailles plus serrées; le second était rétréci à sa partie inférieure. On mettait le sable sur le crible à une extrémité, on y versait de l'eau, et de la main on agitait, ou plutôt on berçait l'instrument. Les pierres restaient dans le premier crible, le minerai et le sable fin dans les autres, suivant leur grosseur, et la terre délayée s'en allait avec l'eau par l'extrémité inférieure. Voilà quelle était la machine généralement usitée. Verne, Les Enfants du Capitaine Grant,t. 2, 1868, p. 155.
P. compar. Un cœur d'homme tout seul ne vaut rien pour y puiser la science. Trop de dards bien aiguisés l'ont percé et troué comme un crible. La vérité y passe, elle ne s'y arrête pas (Quinet, Ahasvérus,1833, 4ejournée, p. 328):
2. J'ai peu rencontré de méchants sur ma route, j'ai vécu dans une atmosphère de bonté, de génie, de générosité, d'amour et de vertu, je ne me souviens que des bons. J'oublie sans effort les autres. Mon âme est comme ces cribles où les laveurs d'or du Mexique recueillent les paillettes du pur métal dans les torrents des Cordillières. Le sable en retombe, l'or y reste. À quoi bon charger sa mémoire de ce qui ne sert pas à nourrir, à charmer ou à consoler le cœur? ... Lamartine, Les Confidences,1849, p. 13.
Loc. Passer qqc. au crible. Trier quelque chose au moyen d'un crible. Creusez la terre. Passez au crible l'humus recueilli entre les radicelles où grouillent les insectes souterrains (Faure, Esprit formes,1927, p. 195).
Au fig. Soumettre quelque chose à une sélection, une critique impitoyable. C'est surtout Feuquières qui est le grand critique de cette époque, et qui passe au crible les opérations de tous les généraux de son temps, sans faire grâce à aucun (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 13, 1863-69, p. 63).Les éléments que je pouvais retenir de Mallarmé ont tous été passés au crible racinien (Du Bos, Journal,1923, p. 228).Je fournissais, dans le train, des sujets de conversation, que ma fille passait au crible, acceptait ou rejetait, à sa manière calme et un peu distante (Colette, Fanal bleu,1949, p. 216).
B.− [P. anal. de forme] Objet percé de nombreux petits trous.
1. ART MILIT. (au Moy. Âge). Partie du casque des chevaliers, mobile et percée de trous qui se rabattait à volonté sur le visage :
3. ... elle aperçut deux figures armées de pied en cap, qui se tenaient immobiles (...) les gantelets croisés sur la garde de grandes épées ayant la pointe fichée en terre : les cribles de leurs casques représentaient des faces d'oiseaux hideux, dont les trous simulaient les prunelles, et le nasal le bec... Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 377.
2. BOT. Paroi poreuse d'un tissu végétal. Les tubes criblés sont des vaisseaux à membrane cellulosique dont les cellules communiquent entre elles par orifices étroits pratiqués dans les cloisons transversales ou obliques et simulant une sorte de crible (...) En automne et en hiver, pendant la période de vie ralentie, les cribles se ferment par suite d'un gonflement de la membrane qui borde les orifices et forme une sorte de bouchon appelé cal (L. Mangin, Anat. et physiol. végétales,1895, Paris, Hachette, p. 40).
Rem. Attesté aussi ds Lar. 20e, Lar. encyclop., Quillet 1965.
C.− Au fig.
1. [Avec idée de sélection] Moyen d'épuration, de tri, de sélection. Il [le soldat] est sûr d'échapper au triage terrible Que fait subir aux noms ce redoutable crible Qu'on nomme postérité (Pommier, Océan.,1839, p. 206):
4. Qui m'empêchera de porter jusqu'au tombeau l'idée consolante que le Seigneur m'a donnée de lui? Hélas! l'âme de l'homme est un crible qui devoit empêcher le mal de passer avec le bien : elle a corrompu ses voies, elle n'a servi que de crible au mal, et elle a empêché le bien de passer. Il faudra de nouveau qu'elle serve de crible au mal, pour que le bien puisse passer pur. Saint-Martin, L'Homme de désir,1790, p. 62.
Spéc., MATH. Crible d'Ératosthène. Méthode de sélection des nombres premiers, par exclusion progressive de tous les nombres divisibles par 2, 3, 5, 7, 11, etc.
2. [Avec idée de déperdition, d'appauvrissement] Comment se défendra ce roi qu'un peuple assiège? (...) Sa main tremble, et sa tête est un crible inutile (...) Qui laisse tout passer, hors les mauvais conseils (Hugo, Chants crépusc.,1835, p. 94):
5. La lecture est peu de chose et le travail productif à zéro. Depuis une quinzaine, je n'ai guère étudié que la littérature Louis XIII, et encore j'ai le sentiment de devoir oublier bientôt tout cela. J'émiette et je disperse. Plenus Rimarum, je ne suis qu'un crible tournant qui laisse déperdre tout ce qu'il a reçu. C'est insupportable... Amiel, Journal intime,1866, p. 494.
Rem. Dans la littérature religieuse, le crible représente soit le symbole de la séparation du bien et du mal, soit celui de l'épreuve, de la persécution, du châtiment (d'apr. Symboles 1969).
Prononc. et Orth. : [kʀibl̥]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. xiiies. [ms.] (De L'oustillement au Villain, éd. Montaiglon et Raynaud, II, 154, leçon du ms. B). B. Fin xiiies. [ms.] au fig. (Rutebeuf, éd. E. Faral et J. Bastin, II, 250, 136, leçon du ms. C). Du b. lat. criblum (ves., TLL s.v., 1189, 51) issu par dissimilation du lat. class. cribrum « tamis ». Fréq. abs. littér. : 104.

CRIBLE2, subst. masc.

CRIBLE2, subst. masc.
[P. réf. à cribler2*] Avoir son crible. Avoir assez de. Synon. avoir marre de.On commenc' par avoir son crible Des loufoqu'ries de nos Aïeux (Rictus, Soliloques,1897, p. 61).
Prononc. : [kʀibl̥]. Étymol. et Hist. 1897 (Rictus, loc. cit.). Prob. emploi p. ext. de crible1*. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, p. 266. − Rog. 1965, p. 86.

CRIBLER1, verbe trans.

CRIBLER1, verbe trans.
A.− Passer quelque chose dans un crible. Voici les gerbes!... Elles nous ont coûté de la peine, c'est vrai mais nous allons les battre, les vanner, les cribler; nous aurons du pain (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 1, 1870, p. 137).Pour certains emplois : enduits, rejointements, on est amené à cribler le sable pour ne conserver que les éléments fins inférieurs à 1 millimètre (Cléret de Langavant, Ciments et bétons,1953, p. 150).
P. métaph. Passer au crible. Elle [la mort] trie, elle crible, c'est-à-dire qu'elle écarte le mal, dégage le bien pour qu'il subsiste (Michelet, Journal,1842, p. 385).Un tel, prêtre simoniaque, Crible vos actions dans son hideux tamis, Se signe, et dit : allez, vos torts vous sont remis (Hugo, Légende,1883, p. 113).
Spéc., INFORMAT. ,,Faire un tri préliminaire de données ou de documents, de façon à réduire le nombre de ces données ou de ces documents utilisés par la suite`` (Lar. encyclop. Suppl. 1968).
B.− Rendre semblable à un crible.
1. Percer une personne ou une chose en plusieurs endroits. Le canon du gaillard d'avant partit, criblant les flots tranquilles d'une volée de mitraille (Verne, Enf. Cap. Grant,t. 3, 1868, p. 197).Une briqueterie était là, offrant un refuge. De l'autre côté, une pluie de balles en criblait les murs (Zola, Débâcle,1892, p. 220).Les escadrons musulmans tourbillonnaient autour du roi, le criblaient de flèches et de carreaux d'arbalète (Grousset, Croisades,1939, p. 358).
Cribler de coups. Koupriane ne se tenait plus de rage. Il criblait le malheureux de coups (...) et pendant qu'il procédait à cette correction... (G. Leroux, Roul. tsar,1912, p. 78).
P. métaph. Cribler qqn (d'épigrammes, de plaisanteries, de brocards, etc.). Accabler quelqu'un de traits piquants. Denise avait un manœuvre pour amant, et cachait un enfant dans le quartier. On la cribla d'allusions méchantes (Zola, Bonh. dames,1883, p. 537).Le Français crible d'épigrammes surtout ce qu'il voudrait être : le député, et ce qu'il voudrait avoir : le ruban rouge (Renard, Journal,1894, p. 227).La vie qui lui échut le cribla de désillusions (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 35).
2. Tacheter en beaucoup d'endroits. Mais le soleil, criblant de confettis les vieilles dalles, déclinerait, puis s'ouvrirait le règne de la nuit révélatrice (Mauriac, Baiser Lépreux,1922, p. 170).C'est surtout les femmes qui s'en occupent, ça [les autres animaux] leur crible les cuisses de points rouges parce qu'elles doivent les nourrir vous comprenez (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 69).
Rem. 1. L'emploi pronom. est signalé ds Besch. 1845, Lar. 19e20e, Littré. 2. On rencontre except. le part. passé employé comme adj. verbal. Qui crible quelque chose. Hier allés, par une pluie criblante, aux courses du vélodrome (Renard, Journal, 1892, p. 141).
Prononc. et Orth. : [kʀible], (je) crible [kʀibl̥]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1. Dernier quart xiiies. [ms.], crieuler, au propre (Gloss. Douai, 556, éd. M. Roques, Lexiques, I, p. 16); 2. 1552 cribler les opinions (Pontus de Tyard, Solitaire premier, Lyon, p. 52). B. 1erquart xiiies. fig. criblé « transpercé [comme un crible], accablé d'une quantité de maux » (Florence de Rome, 5730 ds T.-L. : [Dame] Qui de mal et d'angoisse a si la char criblee [lecture possible triblee]); av. 1643 criblé de cavernes (Duvergier de Hauranne ds Guérin). Du b. lat. criblare (ves. ds TLL, s.v., 1189, 42) issu par dissimilation du lat. impérial cribare « passer au crible ». Fréq. abs. littér. : 156. Bbg. Gohin 1903, p. 375.

CRIBLÉ, ÉE, part. passé et adj.

CRIBLÉ, ÉE, part. passé et adj.
I.− Part. passé de cribler1*.
II.− Adjectif
A.− Qui a été passé dans un crible. Elle le flatta de la main, le caressa, l'embrassa, et lui dit : « toi, ton orge est préparée, elle est vannée, criblée, et l'avoine aussi » (Balzac, Annette,t. 3, 1824, p. 75).
B.− P. anal. Percé, troué en beaucoup d'endroits. La plante aspire et expire l'air principalement par ses feuilles, criblées à cet effet d'une infinité de pores ou de petits trous (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 144).Je suis venue au monde avec un rhume des foins, avec des mèches de travers et des peignoirs criblés de trous de cigarettes (Cocteau, Par. terr.,1938, p. 195):
... chacun de ces messieurs prend sa casquette, la jette en l'air de toutes ses forces, et la tire au vol avec du 5, du 6 ou du 2, selon les conventions. Celui qui met le plus souvent dans sa casquette est proclamé roi de la chasse, et rentre le soir en triomphateur à Tarascon, la casquette criblée au bout du fusil, au milieu des aboiements et des fanfares. A. Daudet, Tartarin de Tarascon,1872, p. 7.
Spécialement
1. BOT. Tubes criblés (cf. crible1B 2, énoncé réduit de L. Mangin).
Rem. Attesté aussi ds Lar. encyclop. et Quillet 1965.
2. ANAT. Lame criblée. Lame horizontale de l'os ethmoïde, perforée de nombreux trous livrant passage aux filets du nerf olfactif. Enfin les trous nombreux de la lame criblée de l'ethmoïde (il y en a environ 40) occupent le fond de la fosse antérieure, et donnent issue au nerf olfactif pour se rendre dans le nez (Cuvier, Anat. comp.,t. 2, 1805, p. 47).
C.− P. métaph.
1. Percé, accablé de.
a) [Le compl. désigne un phénomène physique] Un malheureux criblé de coups et horriblement mutilé (Guilbert de Pixer., Cœlina,1801, II, 9, p. 38).Son oreille était criblée de détonations et de cris, mais il les entendait à peine (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 187).
b) [Le compl. désigne une chose abstr.] Madame, je suis criblé de dettes; mes créanciers ont obtenu un arrêt contre moi; à l'heure où je vous parle, mes meubles sont vendus (Musset, Fantasio,1834, p. 234).
2. Parsemé, tacheté de. Une nuit superbe, pure et d'un bleu pâle criblé d'étoiles d'argent (Barb. d'Aurev., Memor. 1, 1838, p. 233).Son large visage, criblé de taches de rousseur, avait l'aspect d'une écumoire (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 456).Des éditions criblées de fautes, mutilées ou pleines de grossières interpolations (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 81).
Fréq. abs. littér. : 321. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 418, b) 563; xxes. : a) 579, b) 357.

CRIBLER2, verbe intrans.

CRIBLER2, verbe intrans.
Arg., vx. Crier, aboyer. Mais si elle crible [crie] répond le second Venternier, (...) si elle crible [,] dit encore l'Écrevisse, on lui fauchera le colas [on lui coupera le col] (Vidocq, Voleurs,1836, p. 200).
Rem. Attesté aussi ds Lar. 19e-20eet Guérin 1892.
Prononc. : [kʀible], (je) crible [kʀibl̥]. Étymol. et Hist. 1790 (Rat du Châtelet ds Esn.). Prob. altération de crier*, d'apr. cribler1(FEW t. 2, p. 1489b, note 3). Bbg. Sain. Arg. 1972 [1907], p. 58.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·