CHAPELET, subst. masc.

CHAPELET, subst. masc.
I.− Vx. Couronne, chapeau de fleurs. J'ai tressé de mes mains, d'amarante azurée Et de pavots, un chapelet (Moréas, Les Stances,1901, p. 137):
1. Sous des chapelets de violettes, les danseurs ondulaient, les bouffons tendaient leur échine, ... Maurras, Le Chemin de Paradis,1894, p. 183.
En chapelet. La plus jeune tressait des fleurs en chapelet (Régnier, Premiers poèmes,Épisodes, 1888, p. 192).
II.− [P. anal. de forme]
A.− Objet de dévotion.
1. RELIG. CATH.
a) Objet de piété mariale, en forme de collier, composé de cinq dizaines de grains enfilés sur une chaînette ou un cordon, utilisé pour compter les prières à réciter (cf. rosaire) :
2. Personne, comme elle, ne connaissait tous les chapelets et les indulgences qu'ils procurent, l'effet des reliques, les privilèges des eaux saintes. Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 2, 1880, p. 138.
3. ... elle avait pris son chapelet sous son oreiller et de suite s'était mise à répéter la prière très vite, revenant des derniers mots aux premiers sans aucun arrêt et comptant à mesure sur les grains du chapelet. Hémon, Maria Chapdelaine,1916, p. 122.
b) P. méton.
Prière répétée que l'on récite en faisant glisser entre les doigts les grains du chapelet. Dire, égrener, réciter son chapelet. Le père Decurvil récita les dizaines de chapelet coutumières (Estaunié, L'Empreinte,1896, p. 70).
Récitation de cette prière :
4. ... je suis sûr que vous m'avez donné dix grains de chapelet à débiter, pendant un mois, chaque jour, et, depuis ce matin, je me dispute, contre toute évidence, contre tout bon sens pour me convaincre que c'est de dix chapelets quotidiens que se compose ma pénitence. Huysmans, En route,t. 2, 1895, p. 118.
P. transpos., iron. Personne très pieuse :
5. Depuis notre installation nouvelle, nous usons d'un gros épicier, fournisseur attitré des prêtres et des religieuses, probité garantie par les plus fins chapelets de la paroisse. Bloy, Journal,1901, p. 62.
c) P. métaph. Égrener le chapelet des regrets, des souvenirs. Débiter, défiler, dévider son chapelet. Raconter à la suite et sans interruption tout ce qu'on a à dire (infra II B 2) :
6. Ils sont seuls [Caroline et Adolphe], ils peuvent se dire leurs petits mots d'amitié, défiler le chapelet, de leurs mignardises secrètes. Balzac, Petites misères de la vie conjugale,1846, p. 71.
[En parlant d'une famille dont plusieurs membres disparaissent l'un après l'autre]
Vx. Le chapelet se défile.
Rem. Semble être un sens de dict. (dep. Fur. 1690).
Arg. Chaîne qui relie les deux menottes du prisonnier (cf. Esn. 1966) :
7. Ils [des policiers] voulaient que je parle. Fumiers! ils le voulurent... Ah! les trois − si je n'avais pas eu les mains dans le chapelet − tous les trois, avec mes dents, ma gueule, mes pognes et les pieds. F. Carco, L'Équipe,1919, p. 57.
2. [Dans certaines relig. orientales] Chapelet mahométan, musulman. Composé de quatre-vingt-dix-neuf grains. Chapelet brahmanique. Pour réciter les litanies des noms des divinités. Chapelet bouddhique. Chapelet dont les grains ont une signification symbolique (cf. Symboles 1969).
B.− [Souvent suivi d'un compl. prép. de] Emplois fig. ou p. anal. Série, suite d'éléments semblables.
1. [Pour désigner des obj. concr.]
a) [Les choses sont attachées les unes aux autres] Un chapelet d'oignons, de piments, de saucisses.
Spécialement
ARCHIT. Baguette ornementale sculptée d'une suite de grains ronds, d'olives.
MAN. Couple d'étrivières garnies de leur étrier, qui s'attachent au pommeau de la selle.
Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixes. et Quillet 1965.
MAR. Assemblage de barriques flottantes, réunies par des amarres, qui peut servir à supporter ou soulever un bâtiment.
MÉD. Chapelet costal ou rachidien. Rangée de nodosités qui apparaissent, à l'union des côtes et des cartilages costaux, chez les rachitiques.
Rem. Attesté ds Lar. 20e, Rob., Lar. encyclop. et Quillet 1965.
THÉÂTRE. Décor constitué d'une série de châssis sur lesquels sont peints des images.
Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixes. et Lar. 20e.
b) [Les choses sont placées les unes à la suite des autres] Un chapelet de lacs, d'îles, d'îlots.
En chapelet. En série :
8. Les bombes lancées en chapelet avaient touché aussi les casernes, toutes proches de l'usine. Malraux, L'Espoir,1937, p. 618.
Spécialement
ART CULIN. Cercle de petites bulles d'air qui se forme à la surface d'une eau de vie de bonne qualité lorsqu'on la verse.
Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixes. et Lar. 20e, Lar. encyclop., Quillet 1965.
PÊCHE. Suite de balles de plomb dont on garnit le bord inférieur des filets.
Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixes., Lar. encyclop., Quillet 1965.
TECHNOL. Chapelet hydraulique. Machine servant à élever l'eau, composée d'une chaîne sans fin, garnie de disques ou de godets circulant dans un tuyau.
MÉD. VÉTÉR. Appareil formé d'une série de bâtons reliés par des cordes empêchant le cheval de déranger le pansement qu'on lui a fait.
Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixes. et Lar. 20e.
2. [Pour désigner une succession ininterrompue d'événements, de sensations, de sentiments, etc.] :
9. ... le docteur me regarde d'un air stupéfait. Je ne lui laisse pas le temps d'ouvrir la bouche, et je lui débite avec une prodigieuse volubilité un chapelet de jérémiades sur ma triste position. Huysmans, Les Soirées de Médan,Sac au dos, 1880, p. 138.
10. Parfois, il s'oubliait ainsi, [la nuit]... n'entendant plus au dehors, le chapelet des heures, des quarts et des demies, s'égrener lentement, sonores, dans le grand silence de la rue. Courteline, Femmes d'amis,1888, p. 164.
Prononc. et Orth. : [ʃaplε]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. Ca 1200 « couronne (de fleurs) » (J. Renart, Escoufle, éd. P. Meyer, 4333). B. 1. Relig. cathol. 1390 (Rég. du Châtelet ds Gdf. Compl.); 2. p. ext. 1597 dire son chapelet (Larivey, Vefve, II, 7 − V, 148 − ds IGLF); av. 1655 débiter son chapelet (Cyrano de Bergerac, Lettres satiriques, 119, ibid.); 3. p. anal. a) 2emoitié xvies. méd. (A. Paré, XVI, 4 ds Littré : un chapelet autour du front, cheute de poil); b) 1675 « suite de certains objets attachés ensemble » chapelet d'oignons, de marrons (Widerhold, Nouv. fr. all. et all. fr. d'apr. FEW, t. 2, p. 289b); c) 1676 archit. (Félibien Dict., p. 518); d) 1680 man. (Rich.); e) 1685 hydraulique (Mém. de la Sté de l'hist. de Paris et de l'Ile-de-France, 1895, p. 213). Dimin. (avec suff. -et*) de l'a. fr. chapel, chapeau*; B p. anal. entre la couronne de roses dont on ornait la tête de la Vierge et le collier de grains enfilés constituant une sorte de couronne, chaque grain étant comparé à une fleur; cf. rosaire et l'ital. corona (xvies. DEI); a remplacé l'a. fr. patenostres (patenôtre). Fréq. abs. littér. : 803. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 583, b) 1 468; xxes. : a) 1 632, b) 1 148. Bbg. Darm. Vie 1932, p. 42. − Gottsch. Redens. 1930, p. 350. − Lundquist (E. R.). La Mode et son vocab. Lund, 1950, pp. 105-115. − Mélon (N.), Herbillon (J.), Lechanteur (J.). Textes d'archives. Batellerie liégeoise. Dial. belgo-rom. 1969, t. 23, p. 138. − Rog. 1965, p. 101. − Termes techn. fr. Paris, 1972, p. 152.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·