1. JEUX, SP. Grosse balle en caoutchouc ou constituée d'une vessie de caoutchouc gonflée d'air que protège une gaine de cuir, et utilisée dans divers jeux ou sports d'équipe (football, basket-ball, rugby, etc.). Jouer au ballon : 1. ... les séminaristes faisaient une partie de ballon. (...), M. l'Abbé Perruque, se mêlait aux jeux et lançait en athlète, du bout de son soulier à boucle, l'énorme ballon, revêtu de quartiers de peau.
A. France, L'Orme du mail,1897, p. 18.
2. Dans le fait, on devrait voir que l'homme aime communément plutôt l'action que le plaisir, comme les jeux de la jeunesse le montrent bien. Car, qu'est-ce qu'une partie de ballon, sinon des bousculades, des coups de poing et des coups de pied, et enfin des marques noires et des compresses?
Alain, Propos,1913, p. 146.
3. « ... À ce moment, le demi centre (de son équipe) passe le ballon à l'extrême droit qui se sauve sur sa ligne de touche, et sur un centre du capitaine le ballon est repris par l'avant centre qui le rentre au but, ... »
Montherlant, Les Olympiques,1924, p. 252.
4. Joseph était allé voir les jeunes gens du pays jouer une partie de ballon au pied, ce qui était une coutume anglaise alors dans sa fleur chez nous.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Vue de la Terre promise, 1934, p. 107.
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P. compar. : 5. Nous avons des couronnes de papier peint, des sabres de bois, du clinquant sur nos habits; si notre cœur tout vide bondit comme un ballon gonflé, c'est qu'il se soulève aux moindres brises, n'ayant rien qui le ramène à terre.
Flaubert, La Tentation de st Antoine,1849, p. 384.
6. Il y a d'affreux enfants soufflés et gonflés comme des ballons.
E. et J. de Goncourt, Charles Demailly,1876, p. 316.
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P. méton. Le ballon. Le jeu même. Spéc. Le ballon rond. Le football. Le ballon ovale. Le rugby : 7. ... le comte Arnulphe répondait à M. de Charlus avec une précision complaisante et naïve : « Oh! Moi, c'est plutôt le golf, le tennis, le ballon, la course à pied, surtout le polo. »
Proust, Sodome et Gomorrhe,1922, p. 704.
8. Le sport multiforme, aux innombrables tentacules, c'est la grande chance de la société bourgeoise. Aucune Bastille n'eût été prise si la boxe et si le catch, si le ballon rond ou ovale, si la bicyclette avaient existé. Les jeux de ce temps-là étaient aussi des privilèges.
Mauriac, Le Nouveau Bloc-notes,1961, p. 320.
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En partic. Sphère qui sert de jouet aux jeunes enfants, faite d'une pellicule de caoutchouc très mince, qui, gonflée d'un gaz léger, tend à s'élever dans les airs : 9. Un trait de génie que cette prime des ballons, distribuée à chaque acheteuse, des ballons rouges, à la fine peau de caoutchouc, portant en grosses lettres le nom du magasin, et qui, tenus au bout d'un fil voyageant en l'air, promenaient par les rues une réclame vivante!
Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 612.
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Spéc., CYCLE. En appos. pneu ballon. Gros pneu de bicyclette : 10. Il [Renaud] posa même aux chars mortuaires de parade des jantes creuses et des pneus ballon.
P. Morand, Bouddha vivant,1927, p. 36.
2. Emplois métaph. ou fig. a) [La fig. est fondée sur une anal. de forme] En ballon : 11. ... Hier soir je suis entrée dans sa chambre [de Marguerite] : la petite dormait, les poings fermés, la bouche en ballon.
Renard, L'Écornifleur,1892, p. 234.
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P. métaph. : 12. Une fois franchie l'ultime corbeille de roses, se proposèrent comme nouvelle protection, des massifs de rhododendrons tassés contre le sol, ballons défleuris où persistaient les mille traits des pistils.
Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 62.
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Spéc., MODE, vieilli. ,,Postiche en crinoline qui avantage les femmes par derrière`` (L. Rigaud, Dict. du jargon parisien, L'Arg. anc. et mod., 1878, p. 24); ,,l'ensemble des jupes de gaze bouffantes d'une danseuse de théâtre`` (DG). Se donner, se pousser du ballon. ,,Porter une crinoline d'envergure exagérée, faire ballonner sa jupe`` (Larch. 1872, p. 40). COUT. En appos. manche ballon. ,,Manche froncée à l'endroit de l'emmanchure et à mi-coude, formant un renflement plus ou moins important suivant la mode; elle s'inspire de l'époque Louis XIII`` (Leloir 1961) : 13. ... la capote à rubans, la robe à collerette, les manches ballon, accusaient une mode très ancienne.
R. Martin du Gard, Les Thibault,La Mort du père, 1929, p. 1333.
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Pop. ou arg. Ventre. Avoir du ballon, se remplir le ballon. P. B. aurait plus d'obésité, de ballon, moins d'allant (A. Arnoux, Rhône, mon fleuve,1944, p. 342).♦ [En parlant d'une femme enceinte] Avoir, attraper le ballon. Faire dégonfler son ballon. Accoucher.
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Derrière. Enlever le ballon à qqn. Le battre, lui donner des coups de pied au derrière : 14. ... lorsque Coupeau arrivait droit sur elle, sans lui laisser le temps de se sauver, elle s'accroupissait, elle murmurait : − Cachez-moi donc, vous autres! ... Il me cherche, il a promis de m'enlever le ballon, s'il me pinçait encore à traîner ma peau.
Zola, L'Assommoir,1877, p. 713.
b) [P. réf. au gonflement du ballon] Vanité, orgueil. − P. compar., loc. Être enflé, gonflé comme un ballon. ,,Être bouffi d'orgueil`` (Littré).
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P. métaph. : 15. ... ce n'était pas précisément d'esprit ni de trait que manquait M. de Noyon mais son trait d'esprit partait encore de sa vanité, de sa plénitude. On frappait sur le ballon gonflé, et il y avait du ressort.
Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 11, 1851-62, p. 346.
c) [P. réf. à l'air dont est gonflé le ballon et à sa fragilité, la notion de ballon est utilisée pour signifier ce qui est − ou paraît − vide, fragile, illusoire ou trompeur] .
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P. compar. : 16. ... il [l'auteur] répudie tous ces termes de convention que les partis littéraires se rejettent réciproquement comme des ballons vides, signes sans signification, expressions sans expression...
Hugo, Odes et ballades,1828, préf., p. 11.
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P. métaph. : 17. Si on lui dit : « Mais, l'amour, c'est bien mieux! C'est quelque chose d'extraordinaire », il ne veut rien savoir : il se défie des mots, des gestes, des regards qu'il faut pour prononcer ce mot gonflé de tous les vagues : c'est le ballon universel.
Renard, Journal,1901, p. 649.
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Loc., fam. Crever un ballon. Dénoncer des propos exagérés, trompeurs. Dégonfler un ballon : 18. Ennemi de l'enflure et des grands airs, il [Saint-Marc Girardin] a aidé à désabuser de bien des déclamations en vogue; il a crevé à coups d'épingle bien des ballons.
Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 1, 1851-62, p. 18.
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Pop. ou arg. [P. réf. au vide intérieur du ballon] ♦ Faire ballon (de, pour qqc.).Avoir faim, être privé de nourriture. Faire ballon de tutu. ,,Être « retranché » [privé] de vin`` (Esn. 1966). P. ext. ,,Être lésé. En général, être déçu dans une espérance`` (Le Breton 1960).
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Bluff, blague : 19. L'oncle Édouard, c'est pas du ballon, il l'aimait réellement sa sœur, ça lui faisait un chagrin extrême de la voir comme ça souffrir, dépérir, et pâlir de plus en plus à force de travail et de peines...
Céline, Mort à crédit,1936, p. 348.
d) [La fig. est fondée sur une anal. de mouvement] CHORÉGR. Légèreté et grâce de l'envol du danseur dans les bonds. Avoir du ballon, manquer de ballon : 20. Maintenant, elles [les danseuses] sautent et on entend crisser sur le parquet les semelles enduites de résine.
− Allons, Mesdemoiselles, du ballon! du ballon!
P. Morand, Rococo,1933, p. 8.
e) [P. réf. à l'enfant jouant avec son ballon] −
[P. réf. à sa joie de le gonfler] :
21. ... vous retrouver inchangé, avec seulement cette année en plus (...) J'en suis lasse d'avance. J'ai usé dans cette affaire beaucoup trop de courage et de confiance en moi. Vous revoir serait l'aplatissement du ballon prodigieux que j'ai gonflé durant votre absence.
Montherlant, Les Lépreuses,1939, p. 1524.
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[P. réf. à sa déception lorsqu'il éclate] :
22. Je fus donc à cette corrida de Saint-Vincent-de-Tyrosse. Il m'a fallu, ce jour-là, crever un de mes derniers ballons, renoncer à l'un de mes derniers plaisirs. Non! Plus jamais je n'assisterai à une course de taureaux.
Mauriac, Journal 3,1940, p. 220.