ACCOMMODEMENT, subst. masc.

ACCOMMODEMENT, subst. masc.
Action, résultat de l'action d'accommoder (ou de s'accommoder); moyen employé en vue de cette action.
A.− (Avec une idée d'adaptation)
1. Vx. [En parlant d'une chose, notamment d'une demeure, obj. d'une meilleure appropriation] Arrangement, amélioration du confort :
1. Il faudra bien des accommodements dans cette maison. Ac.1798-1878.
Rem. Cet emploi est signalé comme vieilli dès Ac. 1798; Ac. 1878 indique qu'il se rencontre qqf.;Ac. 1932 le supprime.
Spéc., PEINT. ,,Manière dont les draperies et les ajustements sont choisis, assortis et disposés.`` (Ac. Compl. 1842).
2. [En parlant de pers. ou de leur caractère] Action de s'accommoder, de s'adapter avec facilité à une situation, de se prêter à des concessions :
2. C'est un homme d'accommodement, de facile accommodement. Ac.1798-1932.
3. L'homme Beethoven ne nous apparaît plus d'une seule coulée, comme un héros imaginaire d'un caractère inflexible, forgé d'un métal incorruptible. Il est, comme tous ceux qui vivent, même en héros, l'interminable suite des jours quotidiens, un champ de bataille entre plusieurs hommes de valeur inégale et, l'on pourrait dire, d'espèces différentes. Ce ne serait rien encore, s'il n'était aussi, comme nous tous, aux heures de fatigue et de trahison, un accommodement, un compromis entre ces hommes. Puisqu'il leur faut vivre ensemble, il leur faut bien trouver un modus vivendi! Il leur faut compter avec la vie, qui leur dit : − « Adapte-toi, ou meurs! »... Adapte-toi, même toi qui te révoltes! Adapte-toi aux autres et à toi, aux nécessités de l'existence, de l'heure du monde où tu es né, de la société où tu n'as pas demandé à entrer, et aux fatalités de ta propre nature, dont tu n'as pas choisi la lourde et chaotique hérédité! R. Rolland, Beethoven, Les Grandes époques créatrices, t. 1, 1903, p. 34.
4. Le traditionalisme suppose la foi en l'efficacité des accommodements et adaptations des individus et des groupes à l'ensemble des choses, réalisés à force de tâtonnements. Ces accommodements ne sauraient se faire par la raison individuelle, mais par la raison collective. M. Barrès, Mes cahiers,t. 9, août-déc. 1912, p. 357.
Rem. C'est un homme d'accommodement est attesté dès Ac. 1694. Le sens de l'accept. A 2 est très voisin du sens B; accommodement y est facilement péj. :
5. C'est une chose, je crois, toute particulière à la bourgeoisie que la lâcheté dans les relations sociales. J'entends par lâcheté le talent de ménagement et d'accommodement bas, qui empêche les gens qui se détestent de se fâcher. (...). Les plus hauts ménagent les plus petits, parce que celui-ci peut servir de parrain dans une circonstance, celui-là peut dire du mal de vous pour un mariage. Je crois que ces abaissements hypocrites n'étaient pas jadis dans la noblesse. E. et J. de Goncourt, Journal,déc. 1860, p. 851.
6. Il dépense une imagination débordante à inventer de nouvelles adaptations, qui ne sont pas précisément des inventions, mais des accommodements à une vie moins risquée ou au rendement maximum... E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 325.
P. ext. [En parlant des idées] :
7. Ils ne veulent qu'en rêve rendre les hommes heureux, par une ou deux idées fixes qui ne souffrent pas d'accommodement : car ils sont aussi les fanatiques de l'antithèse stérile qui oppose, après les avoir tranchés à vif dans la richesse continue de l'univers, le tout et le rien; utopistes ou nihilistes, tout l'entre-deux humain leur est étranger. E. Mounier, Traité du caractère,1946p. 365.
B.− (Avec une idée d'accord par compromis) [En parlant de pers.] Action de (se) mettre ou fait d'être en accord avec quelqu'un; règlement à l'amiable, transaction.
1. En gén. :
8. ... un accommodement est une moyenne entre les extrêmes... P.-A. Beaumarchais, Mémoires,t. 2, 1799, p. 291.
2. Dans le domaine de la pol., de la just., des relations soc. :
9. ... le roi résolut de faire cesser la cruelle guerre que se faisaient le duc et le sire de Clisson, et qui désolait toute la province. Il envoya trois hommes de son conseil pour essayer de conclure un accommodement. Vers le mois de mai, il y eut encore quelques conférences à Lelinghen entre les princes; mais ils ne conclurent rien de plus; tout se borna à signer une trève de quatre années. P. de Barante, Hist. des ducs de Bourgogne,t. 2, 1821-1824, p. 116.
10. ... Briand en était venu à des concessions de plus en plus grandes au point de vue des Anglais. À la conférence de Cannes, Lloyd George avait été sur le point d'obtenir ce qu'il cherchait, c'est-à-dire une sorte d'accommodement entre les vainqueurs et les vaincus, avec la participation de l'Allemagne elle-même. J. Bainville, Histoire de France,t. 2, 1924, p. 279.
11. ... il m'arrive souvent, ce qui m'était impossible au milieu même du combat, de repenser à nos luttes de la dernière année, à la victoire du front populaire. Mais peut-on encore parler de victoire? Il y a beau temps que ce pays a recommencé de vivre à la petite semaine, d'arrangements, d'accommodements et de combinaisons. J. Guéhenno, Journal d'une« révolution », été 1937, p. 37.
Proverbe. ,,Un méchant (ou mauvais) accommodement vaut mieux que le meilleur procès.`` (Ac. 1798-1932) : ,,Il en coûte moins cher de s'accommoder avec sa partie, à quelque prix que ce soit, que de plaider contre elle la meilleure cause.`` (Ac. Compl. 1842).
3. Dans le domaine relig. ou moral :
12. Les Jésuites n'attestent pas moins par leur méthode d'éducation qu'ils sont semi-pélagiens tendant au pélagianisme pur, que par leur doctrine directe. Leur système d'éducation a été une transaction, une tentative continuelle d'accommodement avec le siècle. − Saint-Cyran et Port-Royal, au contraire, restèrent exactement conséquents à leurs doctrines, dans leurs écoles. Ch.-A. Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 3, 1848, p. 411.
13. On lui dit qu'elle a assez du lait. Aussitôt il cite Tartuffe : Il est avec le ciel des accommodements. Donnez-lui toujours du lait, mais déguisé. Moins de fadeurs. Du fromage même. J. Renard, Journal,1901, p. 636.
14. Quant à la loi religieuse, il est avec le pape, comme dit Rouletabille, des accommodements, et ils trouveront tous deux à Rome les moyens de régulariser leur situation s'il est prouvé qu'elle en a besoin et d'apaiser les scrupules de leur conscience. G. Leroux, Le Parfum de la dame en noir,1908, p. 159.
15. ... il [l'esprit] finira toujours par triompher. Mais, tandis que la force brutale l'exalte en s'efforçant de le mater, le mensonge et l'accommodement, en l'inclinant, lui font un tort beaucoup plus grave. Le sens de la vérité va se perdant... ou n'est-ce pas simplement que je deviens toujours plus sensible aux gauchissements que lui font subir les compromissions de l'opportunisme? A. Gide, Journal,1938, p. 1326.
Rem. 1. De tous les emplois, c'est l'emploi B 2 qui est le mieux attesté; il est nettement plus fréq. au xixes. qu'au xxes.; sa valeur péj. s'affirme vers le mil. du xixes. 2. Il se groupe en syntagme : a) avec des subst., soit comme 1erterme (accommodement de conscience, d'esprit), soit comme 2eterme (efficacité des accommodements; morale, paroles, projet, tentative d'-); b) avec des verbes (conclure un -, entrer en - avec, inventer un -, ménager des accommodements, souffrir des accommodements, témoigner d'-). 3. Il est en assoc. (paradigm.) avec des termes appartenant de plus ou moins près au même champ sém. que lui : abaissement, abdication, accord, adaptation, adoucissement, aisance, ajustement, appropriation, arrangement, bassesse, biais, capitulation, casuisme, changement, collusion, combinaison, composition, compromis, compromission, concession, conciliation, conclusion, consentement, démarche, disposition, duplicité, embellissement, entre-deux, excuses, expédient, facilité, fléchissement, fortune, gauchissement, harmonie, intrigue, lâcheté, ménagement, mensonge, mise au point, mitigation, modus vivendi, négociation, opportunisme, ouverture, pacte, paix, prostitution d'esprit, réconciliation, relâchement, remords, restauration, rétractation, ruse, scrupules, soumission, trahison, traité, transaction, transformation, trève.
Prononc. : [akɔmɔdmɑ ̃]. Enq. : /akomodmã/.
Étymol. ET HIST. I.− 1. 1585 « moyen pour satisfaire qqn, commodité pour qqn » (Jean Bure, Mém., 88 (Chassaing) ds Quem. t. 1 1959 : Ne demeurant que la porte des Farges ouvertes (...) pour le service et accommodement du peuple et habitants de la ville); 2. 1660 « disposition, arrangement (d'un inanimé) » (Corn., Discours des trois unités, ibid. : Il nous faut chercher quelque autre accommodement pour l'unité de lieu); 1671 (Pomey, Dict. royal augm., 2eéd. : accommodement, ajustement de quelque chose. Rei alicujus compositio. Haec accommodatio, concinnatio, -onis). − 1762, Ac.; 1684 « ajustement, disposition » (Du Fresnoy, Sentim. p. 269-70 ds Brunot t. 6, p. 724-725 : ... n'ayant rien de barbare dans son choix d'attitudes et dans les accommodemens de ses Figures), d'où divers emplois : 1660 litt. « beauté, agrément » (Corn., Disc. du poëme dram. ds Marty-Laveaux, Lex. de la lang. de Corneille, p. 23 : Une fiction poétique qui fait un grand accommodement de théâtre); 1713 peint. accommodement de draperie, cf. sém. A (Fén., Exist. de Dieu, I, 1 ds DG : Ces accommodements de draperie); 3. 1668 « fait d'être mis à l'aise, enrichi » (Corn., Illus. com., v. 8, ibid. : Notre fils rencontre... Plus d'accommodement qu'il n'eût trouvé chez vous). Vieilli. II.− 1. 1636 « accord terminant une querelle, réconciliation » (Corn., le Cid, v. 495, éd. Bordas : Mais si jusques au jour de l'accommodement Je fais mon prisonnier de ce parfait amant); d'où, sens affaibli 1636 ds Monet, Inventaire des deus lang. françoises et lat., s.v. : accommodement, complaisance, condesçandance à la volonté d'autrui : accommodatio alicujus ad alienam voluntatem; 2. 1664 « moyen, expédients pour concilier » (Molière, Tart., IV, 5 ds DG : Le Ciel défend, de vrai, certains contentements; Mais on trouve avec lui des accommodements). Dér. de accommoder*; suff. -ment*.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 149.
BBG. − Bar. 1960. − Bénac 1956.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·