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DÉFILÉ, subst. masc.

DÉFILÉ, subst. masc.
[Correspond à défiler2]
A.− Passage naturel, étroit et encaissé, qu'on ne peut traverser qu'en file. Défilé de montagne; l'entrée du défilé; connaître, s'engager dans le défilé. Un défilé étroit et profond entre deux rocs à pic (Michelet, Hist. romaine,t. 1, 1831, p. 153).Des défilés en pente et des gorges funèbres (Heredia, Trophées,1893, p. 200):
1. Il faut passer par les bas-fonds, suivre des lits de torrents enchevêtrés de viornes et de ronces, tourner autour des collines dans des défilés sauvages où les pierres ont des visages comme des hommes mal finis. Giono, Colline,1929, p. 48.
P. métaph. Toute permission est un défilé entre des murailles d'interdictions (Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 53):
2. Tu es forte, Élisabeth. Tu traverses un défilé; tu en es au plus noir, à cette minute, au plus étouffant... mais tu en sortiras, nous en sortirons. Mauriac, Les Mal Aimés,1945, p. 203.
P. ext. Passage étroit et resserré. Passage à travers les défilés de l'atelier (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 11).
B.− Mouvement de formations militaires qui défilent en ordre. Le défilé du 14 juillet. Le prestige qu'on donne aux défilés de troupes, aux parades militaires (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 483):
3. Le piétinement des chevaux, contenus à grand'peine, le tonnerre des roues garnies de bronze, le frisson métallique des armes donnaient à ce défilé quelque chose d'imposant et de formidable, fait pour jeter la terreur dans les âmes les plus intrépides. Gautier, Le Roman de la momie,1858, p. 223.
4. Elle [Rose-Anna] était de celles qui n'ont rien d'autre à défendre que leurs hommes et leurs fils. De celles qui n'ont jamais chanté aux départs. De celles qui ont regardé les défilés avec des yeux secs et, dans leur cœur, ont maudit la guerre. Roy, Bonheur d'occasion,1945, p. 283.
P. métaph. Le défilé de ces strophes [du Vexilla regis] charriant d'impétueux trophées (Huysmans, Oblat, t. 1, 1903, p. 45):
5. Imaginez le fameux Mangin, (...) regardant défiler ses divisions qui reviennent du feu. Il ressemble à sa statue; rien ne bouge sur ce visage; les bras sont croisés. Cette image est entrée dans la légende. Mais il faut savoir aussi que ce long défilé de soldats armés était un défilé d'injures et de menaces. Alain, Propos,1932, p. 1094.
P. ext. Déplacement, succession à la file de personnes ou de véhicules :
6. Le soir, quand vous êtes assis à une table de café, le défilé sur le boulevard, le défilé incessant et continu, au bout de quelque temps d'attention, n'a plus l'air d'un défilé de vivants, ça ressemble au passage mécanique des personnages d'un écran, au passage de silhouettes découpées qui n'ont pas d'épaisseur. Goncourt, Journal,1890, p. 1222.
7. À l'enterrement de Coppée, (...) quand vint le moment du défilé, des condoléances et des poignées de main, je vis défiler tout Paris. Puis sur la fin, apparut un étrange spectacle (...) C'était le défilé des vaincus, la clientèle de Coppée, les vieux camarades, tous ceux qui n'ont pas eu de chance et qui, disparus au regard de tous, avaient pourtant gardé le contact avec lui. Barrès, Mes Cahiers,t. 6, 1907-08, p. 310.
SYNT. Défilé ininterrompu, interminable; lent, long défilé; le défilé commence, continue.
Rem. En arg. des bagnes et milit., vieilli, on rencontre le synon. défilée, subst. fém. Les forçats, à l'heure de la défilée (A. Humbert, Mon bagne, 1880, feuilleton 48). Les bleus s'alignaient au coude à coude : une interminable défilée (Courteline, Gaîtés esc., 1886, p. 134).
Prononc. et Orth. : [defile]. Ds Ac. 1694, s.v. déffilé (cf. dé-), puis ds Ac. 1718-1932. Homon. défiler. Étymol. et Hist. 1. [1643 subst. « passage étroit où l'on ne peut passer qu'en file » (Rotrou, Bélis. III, 1 ds Littré : Et lorsque l'ennemi, s'avançant au trépas, Dans ses longs défilés aura porté ses pas...)]; 1648 (Abl[ancourt], Ret[raite], 1. 4 c. 5 ds Rich.); 1721 fig. (Montesq., Lett. pers., 98 ds Littré : On les fait passer par un défilé, bien étroit, je veux dire entre la vie et leur argent); 2. a) 1669 « action de marcher un à un dans un passage estroit » (J.-H. Widerhold, Nouv. Dict. fr.-all. et all.-fr., Bâle, d'apr. FEW t. 3, p. 536b) − 1675 ibid.; b) 1827 « manœuvre militaire par laquelle les hommes marchent en colonne » (Delécluze, Journal, p. 448 : Le défilé des troupes); 3. 1830 arg. des bagnes, subst. fém. défilée « départ pour le travail » (Alhoy, Bagnes, Rochefort, p. 245); 4. 1842 fig. « succession de choses dans le temps » (Balzac, Autre ét. femme, p. 362 : Le raout, cette froide revue du luxe, ce défilé d'amours-propres en grand costume). Part. passé subst. de défiler2*. Fréq. abs. littér. : 798. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 468, b) 1 603; xxes. : a) 1 788, b) 1 059.

DÉFILER1, verbe trans.

DÉFILER1, verbe trans.
A.− Rare. Défaire un tissu fil à fil. Synon. usuel effiler.
Emploi pronom. La passementerie éraillée des brandebourgs se défilait par endroits (Gautier, Fracasse,1863, p. 26).
En partic. Effilocher des chiffons destinés à la fabrication de la pâte à papier. Les chiffons sont défilés mécaniquement dans des broyeuses (É. Leclerc, Nouv. manuel typogr.,1932, p. 547).
B.− Détacher du fil qui les relie des objets enfilés. Synon. désenfiler; anton. enfiler.Défiler les perles d'un collier, les grains d'un chapelet (Ac.1932) :
1. J'y ai trouvé [dans une cassette] des fils de perles, une jolie montre en émail vert... On ne porte plus de tout cela. Et pendant longtemps je défilais les perles et les donnais aux petites filles des voisins, pour qu'elles me fabriquassent des poupées de chiffons. Barrès, L'Ennemi des Lois,1893, p. 147.
P. ext. Dérouler comme un fil. Quasi-synon. débobiner, dévider.
Emploi abs. Pistes parallèles défilant à des vitesses encore élevées (Matras, Radiodiff. et télév.,1958, p. 97).
Emploi pronom. Tapisserie historique que l'humanité tisse et laisse se défiler derrière elle (Renan, Avenir sc.,1890, p. 80).
Au fig. Raconter à la suite, énumérer. Défiler son chapelet*. Il [M. de Girardin] enfile et défile ses preuves d'un bout à l'autre (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 7, 1863-69, p. 552).
Rem. À l'image du fil s'ajoute, dans ces derniers emplois, l'idée d'une succession ininterrompue. V. défiler2B.
C.− ART MILIT.
1. [L'obj. désigne une troupe, un ouvrage de défense] Disposer de manière à éviter l'enfilade du feu ennemi. Défiler un ouvrage (Ac.1835-1932).
2. P. ext. [Le suj. désigne une troupe] Éviter, par sa position abritée, d'être pris en enfilade sous le feu :
2. Des hommes abrités dans des tranchées, chaque jour plus profondes, pouvaient défiler les effets de notre artillerie de campagne. Foch, Mémoires,t. 1, 1929, p. 152.
Emploi pronom. :
3. Pour traverser la place il faut raser les murs, se défiler derrière les piles de rondins, utiliser le terrain. Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 115.
Fam., emploi abs. Se faufiler, filer. Je défile jusqu'à un bistrot (Giono, Gds chemins,1951, p. 217).
Emploi pronom. S'esquiver au moment critique :
4. C'est moi qui propose, c'est moi qui paye, question de tenter de me rapprocher une fois de plus de Madelon. Mais elle se défile constamment, elle m'évite... Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 591.
Rem. On rencontre également défiler en emploi abs. fam. [Le suj. désigne l'argent] Disparaître, être dépensé. Synon. fam. filer. Tout l'argent défile en deux ans (Goncourt, Journal, 1878, p. 1222).
Prononc. et Orth. : [defile], (je) défile [defil]. Ds Ac. 1694, s.v. de ffiler (cf. dé-), puis ds Ac. 1718-1932. Homon. défilé. Étymol. et Hist. Cf. défiler2.
DÉR.
Défilage, subst. masc.Opération qui consiste à mettre en charpie des chiffons destinés à la fabrication de la pâte à papier. Synon. effilochage.On procède au défilage ayant pour but d'effilocher le tissu (Wurtz, Dict. chim. pure et appl.,t. 2, 1ervol., 1873, p. 753).Le défilage de la charpie (Ac.1932). [defila:ʒ]. Ds Ac. 1878 et 1932. 1resattest. a) 1772 « allées et venues incessantes » (MmeDu Deffand, Corresp., let. à la duchesse de Choiseul, 13 mars in Bennett, 120 ds Quem. Fichier), attest. isolée; b) [1784 « opération par laquelle on effile des chiffons » d'apr. FEW t. 3, p. 528 b]; 1838 (Ac. Compl. 1842); de défiler, suff. -age*.
BBG. − Gottsch. Redens. 1930, p. 311, 350. − Quem. 2es. t. 3 1972 (s.v. défilage).

DÉFILÉ, ÉE, part. passé et adj.

DÉFILÉ, ÉE, part. passé et adj.
I.− Part. passé de défiler1* et défiler2*.
II.− Adj. [Correspond à défiler1]
A.− [En parlant d'un tissu] Qui est défilé. Quelques broderies de jayet, à moitié défilées (Gautier, Fracasse,1863, p. 316).
Emploi subst., PAPET. Pâte de chiffons effilochés destinée à la fabrication du papier. Le blanchiment (...) se fait aussi au chlore gazeux, qui agit sur le défilé (É. Leclerc, Nouv. manuel typogr.,1932, p. 547).
B.− [En parlant d'un objet qui a été enfilé ou enroulé]
1. Qui n'est plus enfilé. Comme des perles défilées (Joubert, Pensées,t. 2, 1824, p. 112).
2. Qui se déroule comme un fil. Au fig. Cette génération linéaire [du Christ] (...) comme déroulée, comme défilée (Péguy, V.-M., comte Hugo,1910, p. 736).
C.− [En parlant d'une pers. ou d'un animé concr., notamment un objectif milit.] Qui est caché aux yeux par un défilement. Les angles morts et les objectifs fortement défilés (Joffre, Mémoires, t. 1, 1931, p. 69).La paroi nord (...) défilée derrière l'arête (Peyré, Matterhorn,1939, p. 268).

DÉFILER2, verbe intrans.

DÉFILER2, verbe intrans.
A.− Marcher en file :
1. ... ces gens en deuil (...) qui montent à la queue leu leu dans le wagon, et y défilent en serrant des mains, et en marchant sur des pieds, font penser à un enterrement. Montherlant, La Petite Infante de Castille,1929, p. 589.
ART MILIT. [Le suj. désigne une formation de terre, aérienne, navale] Avancer, se déplacer dans une revue en formation de parade, devant des autorités militaires ou civiles, devant des spectateurs :
2. La revue de Spithead? Tous les attachés des armées et des marines d'Europe, solennellement invités à venir voir, pendant six heures d'horloge, défiler sous leur nez des navires de guerre battant pavillon britannique, les uns derrière les autres, aussi rapprochés que possible, comme les processions de chenilles, tu sais, au printemps... Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 238.
3. ... depuis l'Arc de Triomphe sous la voûte duquel flotte un gigantesque drapeau, jusqu'à la place de la République, en suivant les Champs-Élysées, la rue Royale, les grands boulevards, défilent 60 000 hommes et un puissant matériel. De Gaulle, Mémoires de guerre,1959, p. 129.
P. métaph. Le silence défile, musique en tête, dans les rues de Chirico (Cocteau, Crit. indir.,1932, p. 129).
Loc. Défiler (à) la parade. Défiler après la parade. Au fig., pop., vieilli. Disparaître, s'en aller (en parlant de quelqu'un que l'on chasse). Et puis en voilà assez, allez, rompez! Tu peux défiler la parade (Courteline, Train 8 h 47,1888, I, 5, p. 59).Mourir. Tout le monde défile à c'te parade d'où l'on ne revient pas sur ses pieds (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 174).
P. anal. [Le suj. désigne une pers. ou un groupe de pers.] Passer en ordre l'un après l'autre ou les uns après les autres devant des spectateurs. Une couturière en vogue qui fait défiler ses mannequins (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p. 836):
4. Le cinquième jour de la célébration des mystères d'Éleusis était fameux par la superbe procession des flambeaux, où les initiés, tenant chacun une torche à la main, défilaient deux à deux. Dupuis, Abr. de l'orig. de tous les cultes,1796, p. 479.
P. métaph. Les femmes passées défilaient dans leur cerveau (Champfl., Bourgeois Molinch.,1855, p. 72):
5. L'Adour, cortège entre des colonnes de pins, Défilait, adoré par l'herbe des champs. Il défilait en silence dans la fenêtre Dont le cadre encadrait un déploiement de paix. Cocteau, Poèmes,1916-23, p. 270.
B.− P. ext. [Le suj. désigne des pers. ou des inanimés] Passer, se succéder sans interruption. Tout le long du dimanche, des îliens défilèrent chez les Gourvennec (Queffélec, Recteur,1944, p. 36).Les troncs blêmes sous le pinceau des phares défilaient à contre-sens (Gracq, Beau tén.,1945, p. 186).
Emploi factitif :
6. Comme la terre fait défiler les 360 degrés de sa circonférence devant le soleil en vingt-quatre heures, il défile 15 degrés à l'heure. P. Rousseau, Hist. des transp.,1961, p. 141.
SYNT. Laisser, regarder, voir défiler; commencer, se mettre à défiler; défiler devant le cadavre, en chantant, en ordre, en procession, lentement, sur la place; l'armée, les équipages, le régiment, la troupe défile(nt); la caravane, le cortège défile; la côte, le paysage défile.
Rem. Plusieurs dict. considèrent comme un pléonasme le syntagme défiler successivement (cf. Hanse 1949, Thomas 1956, Colin 1971, Dupré 1972). On relève cependant p. ex. : Devant nous défilent successivement des boys-scouts (Gide, Journal, 1914, p. 412).
Prononc. et Orth. Cf. défiler1. Étymol. et Hist. I. 1. 1299 soye deffillee « soie qui n'est pas filée » (Ordonnance sur les métiers ds E. Boileau, Métiers, éd. G.-B. Depping, p. 385) − 1611 Cotgr.; à nouveau 1870 (Lar. 19e); 1408 desfiler « défaire, détordre » (20 mai-20 août, Compte d'ouvrages, 8eSomme de mises, A. Tournai ds Gdf. Compl.); 1549 « défaire un tissu, désagréger » (Est. : Deffiler, Retexere); 1611 (Cotgr. : Se défiler. Il se dit des étofes; mais on dit mieux s'efiler); 2. xives. desfilher « enlever le fil qui réunit » (Jeh. des Preis ds Delb. Rec. d'apr. DG); ca 1560 deffiler (Fouill., Fauconn., fol. 70 ds La Curne); 3. 1829 milit. « disposer des troupes ou des ouvrages de manière à les soustraire à l'enfilade du feu ennemi » (Boiste). II. [1611 deffiler « sortir du rang » (Cotgr.); à nouveau au xviies. (mère Ang. Arnauld d'apr. Sainte-Beuve, P.-R., L. V, ch. III, t. IV, p. 258 ds R. Philol. fr. t. 28, p. 140 : Le chemin étant difficile, il fallut se défiler [rompre la file] et s'arrêter un peu)]; 1826 « se récuser » (Balzac, Physiol. mar., p. 111 : ... pouvoir que vous avez sur elle et contre lequel elle se défilait). III. 1648 « aller à la file » (Abl[ancourt], Ret[raite], 1. 4, c. I ds Rich.); spéc. 1845 (Musset, Il faut qu'une porte, p. 234 : Je ne compte pas sur grand'monde aujourd'hui, vous regarderez défiler ma petite lanterne magique); 1932 (Catal. d'instruments de lab. (Prolabo), p. 46 : Fenêtre-couloir pour bandes minces (...) permettant de faire défiler un film). I dér. de fil*; préf. dé-*; dés. -er, les sens 2 et 3 étant plus spéc. formés comme anton. de enfiler. II dér. de file*; préf. dé(s)-*; dés. -er. III dér. de file*; préf. dé-*, exprimant le renforcement (lat. de); dés. -er.
STAT. − Défiler1 et 2. Fréq. abs. littér. : 1 019. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 627, b) 1 809; xxes. : a) 2 034, b) 1 603.
BBG. − Sain. Lang. par. 1920, p. 144.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·