1. [Chez des mammifères terrestres] Appendice plus ou moins développé et flexible, généralement poilu et dont l'axe squelettique est un prolongement de la colonne vertébrale. Si le petit chien a la queue courte, tu pourras l'appeler Bobtail, qui veut dire écourté; s'il l'a en gimblette, ce serait Trundletail, qui signifie queue arrondie (M. de Guérin, Corresp., 1833, p. 93).Mes rayures brunes deviennent noires, ma palatine blanche s'enfle en jabot éclatant, et le poil de mon ventre passe en beauté tout ce qui s'est vu jamais. Que dire de ma queue, évasée en massue, alternativement annelée de fauve, noir, fauve, noir, fauve, noir? (...) Quelle chatte me résisterait? (Colette, Dialog. bêtes, 1905, p. 103):1. La queue des mammifères est susceptible de trois sortes de mouvemens: l'un par lequel elle se redresse ou s'élève; un autre par lequel elle se fléchit ou s'abaisse; et un troisième par lequel elle se porte sur les côtés.
Cuvier, Anat. comp., t. 1, 1805, p. 186.
SYNT. Artère, muscle, nerf, os, veine de la queue; base, bout, extrémité, insertion, naissance, origine, pointe, racine de la queue; poil de la queue; battement, coup de queue; battre, frétiller de la queue; remuer la queue; queue en l'air, en panache, en tire-bouchon, en trompe, en trompette; queue préhensile, prenante (de certaines espèces de singes); queue d'âne, de bœuf, de brebis, de chat, de cheval, de cochon, de lapin, de mouton, de rat, de souris, de vache.
♦ Chat à neuf queues. V. chat1.
− P. anal. (de couleur). Queue de vache, loc. adj. inv. [En parlant des cheveux, du système pileux] D'un jaune, d'un roux passé, pisseux. Moustaches queue de vache. Elle trouvait la femme très vieille pour ses trente ans, l'air revêche, malpropre avec ses cheveux queue de vache, roulés sur sa camisole défaite (Zola, Assommoir, 1877, p. 425).M. Colombin était tout ce qu'on peut imaginer de plus jovial, de plus pivoine, avec des taches de rousseur et un poil queue de vache tout à fait envahissant (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 233).
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Spécialement ♦ HIPPOL. Queue à l'anglaise. Queue dont les muscles abaisseurs ont été sectionnés transversalement de manière qu'elle reste constamment relevée. (Dict. xixeet xxes.). Queue en catogan. Queue dont les crins ont été coupés très courts, près de la racine (Dict. xixeet xxes.). Queue à tous crins. Queue non taillée (Tondra Cheval 1979). Queue en balai. Queue dont les crins ont été coupés net assez longs (Tondra Cheval 1979). Queue de rat. Queue peu fournie en crins. Le cheval blanc allait toujours, allongeant la tête, et la queue droite, une petite queue de rat sans poil dont il se battait les fesses de temps en temps (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Mais. Tellier, 1881, p. 1188).
♦ FOURR. Fourrure de la queue de certains animaux. Collet, robe garni(e) de queues de martres. Ces Alsaciens avaient encore, l'un son large tricorne et ses grosses bottes à clous luisants, l'autre son petit gilet rouge, sa veste courte, son bonnet à queue de renard et ses hautes guêtres de toile à boutons d'os (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 509).Elle mit sa cape avec un col de fourrure, (...) mit un chapeau fait d'une queue de renard argenté enroulée, qui lui descendait jusqu'aux sourcils noirs et luisants (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 142).
♦ ART CULIN. Morceau de boucherie correspondant à la queue de certains animaux d'élevage. Queue d'agneau, de mouton, de porc; queue de bœuf braisée, à la dijonnaise; queue de cochon farcie. Le ménage avait le goût des curiosités gastronomiques, venues des quatre coins du monde. Cette fois, on se décida pour un potage queue de bœuf, des rougets de roches grillés, un filet aux cèpes, des raviolis à l'italienne, des gelinottes de Russie (Zola, L'Œuvre, 1886, p. 353).
− HIST. Pacha à une, deux, trois queues. Pacha qui a le droit de faire porter devant lui, comme marque de sa dignité, une, deux ou trois queues de cheval. Le comte de Bonneval, brillant à la guerre, versatile en amitiés (...) terrible aux Turcs sous le prince Eugène, puis Turc lui-même et pacha à plusieurs queues (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 5, 1852, p. 499).
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Loc. fig. ♦ Fam. Avoir la queue basse, la queue entre les jambes. Être confus, honteux. Le lion de pierre qui se tenait à la porte, la tête baissée, la queue entre les jambes (...) dans l'attitude humiliée qui convient à la force devant la justice (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 17).
♦ Fam. Tirer le diable par la queue. V. diable1.
♦ Pop. Pas la queue d'un, d'une. Pas un seul, une seule. C'est du propre que vos livres, me disait-elle; voyez seulement si vous en vendez la queue d'un (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 9).Je ne demandais rien à personne (...). Je faisais tranquillement mon boulot; les Fritz, j'étais pas contre: j'en avais pas vu la queue d'un (Sartre, Mort ds âme, 1949, p. 75).En partic. N'avoir pas la queue d'un. Manquer d'argent. (Dict. xxes.).
− Proverbe. Quand on parle du loup*, on en voit la queue.
− [P. allus. à l'action d'Alcibiade, rapportée par Plutarque (Alcibiade, X), qui coupa la queue d'un chien, disant que tant que les Athéniens seraient occupés à parler de cet acte étrange ils ne diraient pas de mal de lui] Si l'on vous disait, dans vos voyages, que j'ai une canne-fée, qui lance des chevaux, qui fait éclore des palais, crache des diamants, ne vous en étonnez pas et riez avec moi. Jamais la queue du chien d'Alcibiade n'a été si remueuse. J'ai encore trois ou quatre queues comme celle-là à couper pour les Parisiens (Balzac, Lettres Étr., t. 1, 1835, p. 244).
2. [Chez des vertébrés autres que les mammifères terrestres et chez les invertébrés] Partie effilée du corps, opposé à la tête. Queue de crocodile, de crustacé, de dauphin, de dorade, de lézard, de morue, de poisson, de scorpion, de reptile, de ver; queue écailleuse. Toutes les espèces de serpens à sonnettes, répandent au loin la terreur, par le seul frémissement des écailles de leur queue (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 2, 1808, p. 330).Tantôt elle [une carpe] montait vers moi; mais, à peine touchée d'un rayon de lumière épandu sous les eaux, elle donnait un coup de queue et s'enfonçait en ondulant dans les profondeurs (Bosco, Mas Théot., 1945, p. 226).♦ ART CULIN. Partie charnue de l'abdomen de certains animaux. Queue de homard, de langouste, de langoustine, de colin. Est-il rien de plus agréable en ce bas monde que de s'asseoir, avec trois ou quatre vieux camarades, devant une table bien servie (...) et là (...) de plonger la cuiller dans une bonne soupe aux queues d'écrevisses qui embaume (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p. 24).
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Loc. fig. Queue de poisson. V.
poisson1.
♦ Écorcher l'anguille* par la queue.
− Proverbe. [P. réf. à la loc. lat. in cauda venenum] Dans la queue le venin, à la queue gît le venin. Le danger apparaît quand une affaire touche à sa fin; le trait perfide est caché à la fin d'un écrit. Comme nous le disons entre augures, c'est dans la queue qu'est le venin, in cauda venenum! (Feuillet, Rom. j. homme pauvre, 1858, p. 319).
4. Ensemble des plumes du croupion des oiseaux. Queue de canard, de dinde, de faisan, de pie, de coq; queue en panache. Des paons en liberté traînaient les splendeurs de leur queue sur les marches du perron (Sandeau, Sacs, 1851, p. 8).Ces cases [celles des Massa] abritent une faune particulière: des hirondelles à queue semi-blanche ont construit leur nid au sommet de la voûte (Gide, Retour Tchad, 1928, p. 881):2. La nature lui a donné, de plus, pour se gouverner, une queue, formée pour l'ordinaire de plumes longues, droites, et dont les barbes sont égales. La queue de l'oiseau est son gouvernail; car il ne la dirige pas plus tôt d'un côté, que sa tête se porte de l'autre, et il change à son gré la direction de son vol.
Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 153.
− Loc. fam. Mettre un grain de sel sur la queue d'un moineau, d'un oiseau. Réussir quelque chose d'impossible. Les jeunes gens conseillaient en riant à Simon de Nantua de lui mettre, pour l'attraper, un grain de sel sur la queue ou plutôt de lui gratter la tête. Il n'y avait rien (...) qui fût plus agréable aux perroquets (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 171).
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ŒNOL. [À propos d'un vin dont le bouquet s'épanouit dans la bouche] Faire queue de paon dans la bouche. Un dégustateur de Bordeaux qui dit d'un vin qu'il fait la queue de paon dans la bouche s'égale à plus d'un poète (Valéry, Regards sur monde act., 1931, p. 261).