Dans cette page, retrouvez les définitions de:

LA, subst. masc.

LA, subst. masc.
MUSIQUE
A. − Sixième note de la gamme en do majeur. Les six syllabes ut, ré, mi, fa, sol, la sont tirées des paroles d'une hymne à l'honneur de saint Jean Baptiste (Savard, Mus. et méth. transpos.,1886, p. 185).Le diapason normal, dit G. Chouquet, institué en France par un arrêté ministériel du 16 février 1859, donne le la de 870 vibrations simples à la température de 15o(Grillet, Ancêtres violon, t. 2, 1901, p. 99).
Expr. Donner le la. Donner le ton, avant l'exécution d'un morceau, en jouant la note la sur un instrument, en la chantant ou en faisant vibrer le diapason afin d'accorder les instruments ou les voix. Je vas vous donner une idée du chant national (...). (Au Tambour) Voyons, donne ton la, toi! (Dumas père, Napoléon,1831, III, tabl. 6, 3, p. 61).
Au fig. Donner le ton, l'exemple. − Mais à quoi donc veux-tu que j'arrive?... − À être la femme qui « donne le la... » (Gyp, Leurs âmes,1895, p. 73).
B. − Ton correspondant à cette note. Concerto en la majeur. Toujours à la même heure, une musicienne Mystérieuse, et qui sans doute habitait là, Jouait l'adagio de la sonate en la (Coppée, Poés., Adagio, 1865, p. 12).
C. − Signe représentant cette note sur une partition. (Dict. xixeet xxes.).
Rem. La syll. la remplace les paroles lorsqu'on chante certains airs. Marollier, (...) chantant et dansant en agitant des voiles imaginaires, sur l'air de « loin du bal ». Tralalala, la la la, la la la la, la la tralalala, la la la, la la la la, la laire tralalala tralalala... (Feydeau, Dame Maxim's, 1914, I, 22, p. 25).
Prononc. et Orth. : [lɑ], [la]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. Ca 1223 (Gautier de Coinci, Miracles Vierge, éd. V. F. Koenig, 1 Mir 11, 750 : Tex ne conoist le la dou sol, Tex ne conoist le fa dou mi); spéc. 1831 donner le la au propre (Dumas père, loc. cit.); 1866 id. au fig. (Delvau : Donner le la. Indiquer par son exemple, par sa conduite ce que les autres doivent faire, dire, écrire). Première syllabe du mot lat. labii, au 3evers de l'hymne de St Jean Baptiste de Paul Diacre, choisie arbitrairement par Gui d'Arezzo [995-1050] pour désigner la 6enote de la gamme (cf. fa; v. FEW t. 5, p. 103b).

LÀ, adv., particule et interj.

LÀ, adv., particule et interj.
I. − Adv. Adverbe de lieu (plus rarement de temps) marquant le lieu où se trouve le locuteur ou un lieu plus ou moins éloigné de lui.
A. − Emploi réflexif, dans la lang. usuelle. [se réfère au dire en tant que tel et désigne le lieu où se passe l'acte d'énonciation, où se trouve le locuteur] À l'endroit (point ou espace circonscrit dont l'étendue peut être variable) où se trouve le locuteur.
1. [Sans mouvement] Attendez-moi là; être, se trouver bien là. Impossible de s'en aller; ils me feront rester là jusqu'au soir (Scribe, Varner, Mariage raison,1826, II, 8, p. 403).Le ciel est doux, la terre sourit, le passant dit : « J'aimerais à vivre là! » (Lamart., Tailleur pierre,1851, p. 388):
1. Soudain le timbre électrique vibra longuement dans l'office. − Restez ! fit Madame Degouy, retenant ses enfants qui voulaient la suivre. Chardonne, Épithal.,1921, p. 23.
Être là.Être physiquement ou spirituellement présent.
a) [Le suj. désigne une pers.] Qui est là? Vous êtes encore là? Être là les bras croisés, les bras ballants; être là devant qqn, près de qqn; (à la porte ou au téléphone) : Madame est-elle là? − Non, Madame est sortie. Monsieur, je suis là depuis une heure, dit le poète d'un air assez fâché (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 258).Son père semblait enfin s'apercevoir qu'elle était là (Mauriac, Th. Desqueyroux,1927, p. 175):
2. À peine placé, je reçus un coup électrique dans le cœur. Une voix me dit : « Elle est ! » Je me retourne, j'aperçois la comtesse au fond de sa loge, cachée dans l'ombre, au rez-de-chaussée. Balzac, Peau chagr.,1831, p. 124.
3. ... l'enfant dont nous entourions la dépouille, comme s'il était , aussi vivant qu'aucun de nous. (...) Nicolas était au milieu de nous, ou plutôt (car les adverbes « ici » et « » se réfèrent à l'espace et il ne saurait s'agir d'espace) sa présence réelle rejoignait celle du Christ. Mauriac, Nouv. Bloc-notes,1968, p. 231.
N'être plus là. N'être plus au pouvoir, au gouvernement, aux affaires; être mort. Quand cet homme [de Gaulle] ne sera plus là (Mauriac, Nouv. Bloc-notes,1968p. 218).
Être là à + inf.Des jeunes gens qui les connaissaient étaient là à les attendre (Proust, Guermantes 1, 1920, p. 175).Depuis une heure, tu es là à t'agiter, à regarder la pendule (Pagnol, Fanny,1932, I, 1ertabl., 9, p. 28).
Être là qui + sub. rel.Un homme, un pèlerin, un mendiant, n'importe, est là qui vous demande asile (Hugo, Hernani,1830, III, 1, p. 59).Je vis (...) qu'un peuple à remplir Thèbes, Palmyre et Rome, Était là qui dormait (Gautier, Comédie mort,1838, p. 41).
[En phrase ell., pouvant à lui seul constituer une phrase, interrog. ou exclam.] Déjà là! Encore là? Toujours là? Sully! vous là!... ciel! (Legouvé, Mort Henri IV,1806, V, 7, p. 433).
Fam. Être un peu là. Tenir sa place, jouer un rôle important. Cf. être12esection I B ex. 41.Emploi adj. Quelque chose d'original, d'un peu là [un sketch] (Carco, Montmartre,1938, p. 227).
Pop. Gros. Elle [Marie] dit tout par un coup : « (...). J'ai rapporté des Halles un rôti un peu là. » C'est que la Marie n'est pas une miteuse (M. Stéphane, Ceux du trimard,1928, p. 188).
b) [Le suj. désigne une chose] Les faits sont là. Mais il est parti (...) La voiture n'est plus là (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 175).Tous vos bagages sont là, mon cher confrère? (Romains, Knock,1923, I, p. 2).
2. [Avec des verbes de mouvement] Venez là; qui va là? Qui descend là? (Giraudoux, Siegfried,1928, I, 7, p. 50).
Halte* là!
Rem. En loc. verb., v. les verbes laisser* là, planter* là.
B. − Emploi référentiel
1. [Employé seul]
a) [Accompagné d'un geste ou déterminé précédemment dans le discours] Dans tel lieu (autre que celui où se trouve le locuteur, désigné par lui et plus ou moins éloigné de lui). Tout le pain qu'on y mange [au village] se cuit là en bas, dans la cuisine (Flaub., Champs et grèves,1848, p. 229).Asseyez-vous, tenez, mettez-vous là, disait-elle à ma grand'mère en lui prenant la main (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 725).
[Le lieu est désigné d'un geste] Hélas! continua-t-elle en lui montrant le cimetière qu'elle alloit traverser, l'amour finit là, et avec lui toutes les félicités de la terre (Cottin, Mathilde, t. 2, 1805, p. 244).Williams étendit la main vers une table. − Asseyez-vous là, dit-il, et écrivez (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 204):
4. « Un lion, un lion! » Je bondis à l'avant, mais ne vois rien. « , tout près de nous. Couché dans les herbes. Il dort ». Et son doigt désigne, à une vingtaine de mètres, ce qu'il s'impatiente que je ne parvienne pas à distinguer. Gide, Retour Tchad,1928, p. 903.
[En emploi ell.] Le duc : (...) où est-elle, notre belle affligée? Lorenzino, montrant l'oratoire : Chut!... Là. Le duc : Pourquoi là, et pas ici? (Dumas père, Lorenzino,1842, V, 6, p. 277).
[Le lieu est déterminé précédemment, ayant valeur de représentant] Je suis arrivé à une espèce de grenier. Là, j'ai vu, couché sur un grabat, un vieillard à cheveux blancs (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1661).J'avais faim, j'entrai dans un café. Mon cœur était rempli de répugnance pour un lieu si profane; mais je pensai que mon déjeuner me coûterait moins cher là qu'à l'auberge (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 183):
5. On n'a jamais pu me mettre en pension (...). Il a fallu me remettre en liberté, et je n'ai pu « durer » que dans cette invraisemblable école de Montigny, parce que là, au moins, je ne me sentais pas « prise » et je couchais dans mon lit, chez nous. Colette, Cl. école,1900, p. 184.
[En corrélation avec ici] Nous l'avons trouvée [la fatalité] dans le monde de la tribu et dans celui de la cité, dans l'Allemagne et dans l'Italie. Là comme ici, la liberté morale est prévenue, opprimée par les influences locales de races et de climats (Michelet, Introd. hist. univ.,1831, p. 444).Là sont les chefs-d'œuvre! dit, en montrant le salon, Magus, (...) mais ici sont les richesses! (Balzac, Cous. Pons,1847, p. 231).
[Précédé de ici et le renforçant, et suivi d'un lieu précisé] Ami, arrêtez! arrêtez! nous allons passer la maison : c'est ici, là, à cette porte (Borel, Champavert,1833, p. 173).J'ai entendu remuer mon verre, tenez, tenez, celui-là même qui est ici, là, sur la table (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 169).
Rem. 1. En corrélation avec ici pour marquer une opposition entre deux lieux différents, sans idée de proximité ou d'éloignement (v. ici B 3). 2. Ici et là (v. ici B 3 et ex. 16); çà et là (v. çà B).
[Répété souvent en tête de phrase, pour marquer une opposition entre plusieurs lieux, plusieurs situations différentes] Là, sont des tombeaux où étoient des palais; là, des palais où étoient des tombeaux (Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 228).Je visitai encore l'Autriche, la Russie, l'Angleterre, servi par le hasard. Là je vis une émeute, là une guerre, là une paix magnifique et pesante (Giraudoux, Simon,1926, p. 46).
Dans tel lieu plus ou moins éloigné (et désigné de façon plus ou moins précise). Où allez-vous? − Là. − Où là? Songez que l'orage a grossi les torrens... Vous ne pourrez pas passer-là (Guilbert de Pixér., Coelina,1801, III, 3, p. 46).Il y avait là plusieurs libéraux riches, mais heureux pères d'enfants susceptibles d'obtenir des bourses (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 141).
[En parlant d'une partie du corps, désignée d'un geste] Synon. de ici (v. ce mot B 1 a, en partic.).J'ai mal là, j'ai une douleur là. Il ressentait un petit pincement au côté droit, là, sous les côtes; il n'y couperait pas : c'était la crise de foie (Gide, Faux-monn.,1925, p. 944).− « Et là, ça te fait mal? » Il palpe l'avant-bras gonflé, puis le bras jusqu'aux ganglions enflammés de l'aisselle (Martin du G., Thib., Consult., 1928, p. 1053).
Rem. Employé dans des loc. verb. où désigne la main : Topez là! Touchez là! V. ces verbes.
b) Au fig. Dans telle situation (précisée ou non), dans des circonstances données; dans ce fait (correspond à l'adv. y). Synon. en cela.Ne voyez là aucun reproche; là n'est pas la question; là est la difficulté. Tout ce qui m'arrivera ne peut porter atteinte à la certitude d'être aimée de vous : là est mon refuge contre tous les orages de la vie (Staël, Lettres div.,1794, p. 632).Il ne plaisait pas, le sentait, voyait là la preuve d'un antisémitisme contre lequel il faisait front (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 739).
Tout est là. C'est la chose importante. La santé, tout est là! C'est un professeur de premier ordre, qui comprend l'importance capitale de l'entraînement. − L'entraînement, tout est là (France, Bergeret,1901, p. 338).Savoir voir, tout est là. Mais nous vivons sans regarder (Gide, Nouv. Nourr.,1935, p. 264).
c) [Avec une valeur simplement expressive, sert de particule explétive de renforcement, pour renvoyer à une phrase, à une circonstance désignée par le contexte]
[En phrase interr.] Qu'est-ce que vous dites là? Qu'est-ce que vous me chantez là? Est-ce là votre avis? Qu'avez-vous fait là? Que diable faites-vous là? Qu'est-ce que tu lis là? me dit-il. Incapable de parler, je lui tendis mon livre (Gide, Si le grain,1924, p. 503).Moins de raideur, Suzanne, plus de souplesse... Est-ce donc là votre première leçon de tendresse? (Giraudoux, Judith,1931, I, 8, p. 94).
[En phrase affirmative] Ce que vous me dites là, ce que vous me racontez là... C'est bien indiscret ce que je vais vous demander là. − Dites toujours (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 253).
[En phrase exclam.] C'est bien, c'est beau ce que vous faites là! Devez-vous être malheureux toute votre vie, parce que vos parens sont ingrats et dénaturés? Voilà de belles raisons que vous me donnez-là! (Guilbert de Pixér., Victor,1798, I, 4, p. 11).Ah! que vous dites là une chose importante, mon cher ami! (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t. 2, 1821, p. 8).
[Particule de renforcement d'un dém., avec le gallicisme de présentation, de mise en relief c'est, ce sont] Ce sont là des erreurs impardonnables; c'est là le fond du problème, la difficulté. J'ai toujours aimé la bonne chère (c'est là mon moindre défaut) (Mérimée, Colomba,1840, p. 116).L'acte de naissance de Bonaparte, enlevé par l'aide de camp en 1810, a disparu; toutes les recherches pour le découvrir ont été infructueuses. Ce sont là des faits irréfragables (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 298):
6. ... je parlais de diminution de la mémoire : « La mémoire ne diminue pas, s'est-il aussitôt écrié. Aucune faculté ne diminue chez l'homme avec l'âge. C'est une grossière erreur. Toutes les facultés de l'homme se développent d'une manière continue depuis la naissance jusqu'à la mort ». Claudel, Corresp. [avec Gide], 1905, p. 57.
d) P. anal., avec valeur temporelle
α) À ce moment-là. Synon. alors.Notre premier théâtre à la fois permanent et régulier ne s'ouvrit à Paris qu'en 1402; là seulement commence l'histoire de l'art (Sainte-Beuve, Tabl. poés. fr.,1828, p. 175).Puis il a été reçu docteur. Là, le comique du sérieux a commencé, pour faire suite au sérieux du comique qui avait précédé (Flaub., Corresp.,1850, p. 270).En un éclair il fut debout et se mit à bondir. Là, je le crus fou, tant il mettait d'action dans son rôle (Fromentin, Été Sahara,1857, p. 174).
β) À l'endroit du récit ou du discours où le locuteur en est arrivé. Synon. alors.Là il cessa de parler; là il arriva que... Et quand commencera le supplice? Là, Montriveau tira froidement sa montre et vérifia l'heure avec une conviction réellement effrayante (Balzac, Langeais,1834, p. 294):
7. Quelles paroles prononcées? plus que des espérances? un début d'engagement? Il l'aurait dit sans aucun doute. − Mais , elle se reprit et rectifia : « Il l'aurait dit pourvu qu'il en eût trouvé l'occasion, dans ces épouvantables jours ». Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 389.
Rem. 1. Dans des loc. adv. ou conj. temporelles : dès(-)là, (v. dès I B 1); dès là que (v. dès II C 3 a); d'ici là (v. ici A 5 b et de1ex. 34); jusque-là (v. infra 4). 2. Dans des loc. verb. Brisons là. Je suis trop agité de ces souvenirs pour continuer, brisons là. Je reprendrai ce soir (Hugo, Lettres fiancée, 1821, p. 44).
2. [Dans des loc. verb. avec en, signifie « à ce point, à ce degré »] En demeurer, en arriver là. Ce qui était bon à douze ans ne l'était plus à vingt; et il espérait bien n'en pas rester là, changer encore, changer toujours (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 410).Naturellement. Il ne pouvait plus être question de la rendre à sa famille. (...) enfin ils se sont mariés. Il fallait bien en venir là (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 45).L'argent! Ah! Seigneur! je pourrais tant vous en conter que je préfère m'en tenir là (Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 15).
En être là (de...). Être parvenu à un certain point, à un certain résultat. Nous n'en sommes pas là; nous en sommes tous là; vous n'en êtes encore que là? J'en étais là de mes réflexions lorsque... Vous n'aurez pas plutôt rêvé seule quelques jours que vous reviendrez croyante, et quand vous en serez là, je réponds de vous (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 312).J'en étais là, mon père, de mon roman, quand vous êtes entré (Salacrou, Terre ronde,1938, I, 4, p. 167):
8. knock : Oui, mais en connaissez-vous qui feraient rôtir la plante des pieds de leurs père et mère en faveur du scrutin de liste ou de l'impôt sur le revenu? le docteur : Dieu merci, ils n'en sont pas ! Romains, Knock,1923, I, p. 6.
3. [Suivi d'une prop. sub. rel.]
a) C'est là que
α) C'est en ce lieu que, c'est l'endroit où. C'est là que nous allons; c'est là qu'il est né, qu'il fut tué. Tout ce qu'ils peignent appartient à la nature. C'est là que le poëte doit toujours puiser ses couleurs (Laya, Ami loix,1793, p. 11).Elle avoit voulu que je fusse toujours servie dans mon appartement, et c'étoit là qu'elle aimoit à se trouver, c'étoit là que nous faisions nos lectures (Fiévée, Dot Suzette,1798, p. 148).La place convenable pour les princes, c'est la Chambre des pairs; c'est là qu'ils devaient prêter serment à la charte constitutionnelle (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 213).
Expr. fig. C'est là que le bât* le blesse. C'est là que gît le lièvre*.
β) [Valeur temporelle] C'est alors que, c'est à ce moment-là que, c'est le moment où. C'est là qu'il sent la partie perdue; c'est là que je fus interrompu. Il nous ramènera le choléra! C'est seulement là que tu seras contente! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 385):
9. Madame de Terville : Pour tenir une maison honorable, pour recevoir du monde, donner des fêtes, une femme n'a besoin de personne; un mari même la gêne souvent; il y en a de si ridicules! Mais quand les affaires s'en mêlent, quand l'argent manque, c'est vraiment qu'on sent le désagrément d'être veuve. Leclercq, Proverbes, Espr. désordre, 1835, 13, p. 275.
γ) Au fig. Il veut (...) exposer ce qui se passe entre la cessation de nos manifestations par la mort et le retour de manifestations nouvelles par la naissance. C'est là que Platon se trompe (P. Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 320).Tout Joubert (...) reste toujours en deçà de l'absolue lucidité en matière de sentiment. (C'est là que Constant le survole tellement) (Du Bos, Journal,1924, p. 157).
Rem. 1. Le tour arch. (ou relâché de la lang. pop.) c'est là où pour c'est là que (au sens locatif). V. aussi où. Sur les bords de la Seine, aux environs de Rouen, dans une superbe campagne, au milieu d'une société nombreuse. Ce n'est pas là où je pouvois travailler, je le savois (Cottin, C. d'Albe, 1799, p. 83). 2. Au fig., le tour est usuel (pour indiquer une situation ou une fin, un but). La tragédie, les tragédies de la haine familiale, c'est peut-être Corneille qui les a écrites. Et c'est là où nous sommes bien obligés de contredire Péguy, qui veut que tous les personnages de Corneille se battent « honorablement » (Brasillach, Corneille, 1938, p. 280).
b) Là où
α) [Pour indiquer un lieu] À l'endroit où. Je compris que là où j'étais, l'air ne se renouvelait point et que j'allais mourir (Balzac, Chabert,1832, p. 38).Les ballets russes nous ont appris que de simples jeux de lumières prodiguent, dirigés là où il faut, des joyaux aussi somptueux et plus variés (Proust, Prisonn.,1922, p. 10):
10. Si je revoyais aujourd'hui les États-Unis, je ne les reconnaîtrais plus : j'ai laissé des forêts, je trouverais des champs cultivés; je me suis frayé un sentier à travers les halliers, je voyagerais sur de grandes routes... Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 342.
Où ..., là ... En général, par-tout où il se trouvoit un monastère, là se formoit un village (Chateaubr., Génie, t. 2, 1803, p. 545).Où est Dieu, là nous serons avec Lui! Avec Dieu, et non pas ailleurs, dans la vive lumière de Dieu (Claudel, Nuit Noël,1915, 2, p. 570).
Où est..., là est ... Où est l'esprit de Dieu, là est la liberté (Amiel, Journal,1866, p. 462).Proverbe. Où on est bien, là est la patrie.
Là où ..., là est ... Quand tout est semblable, il n'y a pas de discordance; là où il n'y a pas de discordance, là est la perfection (Senancour, Obermann, t. 2, 1840, p. 9).Là où la volonté de Dieu est faite, là est le ciel (Green, Journal,1943, p. 10).
β) Au fig.
Dans le cas où, lorsque. Là où il y a de la gêne, il n'y a pas de plaisir. La sainte créature, elle ignorait que là où l'ambition commence, les naïfs sentiments cessent (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 55).La bonne humeur et verve comique du Pédant, qui trouvait à rire là où d'autres eussent gémi comme veaux et pleuré comme vaches (Gautier, Fracasse,1863, p. 157):
11. En littérature comme en histoire, presque rien n'arrive de ce qu'on pouvait légitimement prévoir; mais lorsque c'est arrivé on trouve toujours de bonnes raisons pour que cela soit arrivé : l'esprit faiseur d'ordre triomphe l'esprit faiseur de prédictions avait échoué. Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 184.
Alors que, tandis que (pour marquer une opposition). Là où il faudrait..., là où il eût fallu..., là où il ne s'agit que de... C'est la première chose de savoir faire les nœuds, dans la vie... Si vous faites une boucle là où il faut faire un nœud, et l'inverse, vous êtes perdu (Giraudoux, Électre,1937, I, 3, p. 52).
4. [Dans des loc. adv., prép. et conj.]
a) + adv. ou en composition avec un adv.
Là-bas*, v. ce mot.
loc. adv. Là-haut.
Dans cet endroit situé au-dessus; à un étage supérieur. Si vous en avez des morceaux de l'ancienne [dentelle], cela me fera des modèles. − Eh bien! Va voir là-haut, dit la tante, il y en a peut-être dans ma commode (Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p. 605).Elles se tenaient sans doute là-haut, au second étage, dans leurs chambres; entre elles et moi, il y avait les escaliers obscurs (Loti, Rom. enf.,1890, p. 7).
Rare. En direction du nord, au nord. Prendre une berline de poste qui retourne à Paris et qui relaie là-haut (Soulié, Mém. diable, t. 2, 1837, p. 173).Je crois que nous allons tous partir pour Paris à petites journées (...). Ma famille passera un mois là-haut, je pense (Valéry, Corresp. [avec Gide], 1942, p. 275).
Dans un endroit élevé, sur un sommet. Tout là-haut; là-haut sur la montagne. Le sol sous les pieds glisse et crie, Là-haut de grands nuages tors S'échevèlent avec furie (Verlaine, Poèm. saturn.,1866, p. 79).Léopold gravit la colline de Sion. Là-haut, son couvent l'appelle (Barrès, Colline insp.,1913, p. 255).
Au fig. Au ciel, au paradis, auprès de Dieu. Anton. ici-bas.La clémence est une vertu de race royale, et Dieu fera grâce là haut [sic] à qui aura fait grâce ici-bas (Hugo, L. Borgia,1833, II, 1repart., 5, p. 108).Elle ne veut pas rester au-dessous de sa sœur. Pour sûr que les anges applaudissent là-haut! (Gide, Porte étr.,1909, p. 539):
12. panisse : Je louerai des autos pour tous les invités (...). Il n'y manquera qu'une seule personne, mais elle y manquera bien, allez! Ma pauvre Félicité, peuchère, elle qui aimait tant les fêtes! Mais quoi, le bon Dieu ne l'a pas voulu! Que faire? Elle nous verra de -haut, où elle est sûrement plus heureuse que nous. Pagnol, Marius,1931, I, 4, p. 42.
Loc. adv. Là(-)contre.
Rare. Contre cela, à proximité immédiate de cela. Vous auriez dû la tirer par ici, tout près, camarade, à portée de mes deux mains pourries, là contre, et plus près encore, le plus près possible, car je n'y vois guère (Bernanos, Nuit,1928, p. 24).
Au fig. [Avec valeur d'opposition, d'objection] Contre ce fait, contre cela. Il n'y a rien à dire là contre; se dresser, s'insurger, protester, se raidir, se révolter, se soulever là contre. Ces nécessités de l'organisme sont tellement puissantes, que les vertus ou les vices de l'éternelle blessée dépendent, dans la plupart des cas, de simples désordres physiques. Que faire là contre? (Bourget, Nouv. essais psychol.,1885, p. 52).Le long de cette vallée de la Moselle, visiblement nous sommes entamés, et même par cette voie des fusées du mal allemand pénètrent bien avant dans notre nation. Le boulangisme doit être une réaction là-contre (Barrès, Appel soldat,1900, p. 392).
Loc. adv. Là-devant. Devant cela, devant cet endroit. Des murs immenses, recouverts de cartonniers (...). Là-devant, circulent, sur des galeries aériennes, deux ou trois garçons (Duhamel, Confess. min.,1920, p. 11).Chaque fois que le facteur passe là-devant sans s'arrêter, c'est une scène de tragédie (Pagnol, Fanny,1932, I, 1ertabl., 2, p. 12).
Loc. adv. (rare) Là(-)derrière. Derrière ce lieu. Quel abri dans les lunettes, quel lieu d'attente et d'embuscade! La pensée se forme, se rassemble et se mûrit là derrière (Alain, Propos,1923, p. 521).
Autres loc. adv. Là auprès (ds Littré sous ); ,,fort peu usité``, Grevisse, 1969, § 866, Rem.).Là autour. Tous les arbres du jardin se tenaient là autour (Marie Noël, Petit-jour,p. 112 ds Grevisse, loc. cit.).Là-dedans (v. dedans I A 1 c).Là-dessous (v. dessous1B 1 f).Là-dessus (v. dessus1C 5).
b) Prép. + ou en compos. avec
Loc. adv. De là.
De cet endroit (indique un point de départ). Sortez de là! Venir de là; ôte-toi de là! Tirez-vous de là! J'ai traversé les Tuileries, puis le Luxembourg; de là, je suis allée à Sainte-Geneviève (Delécluze, Journal,1827, p. 435).Maintenant, retire-toi de là, je vais sauter sur le bord (Duhamel, Terre promise,1934, p. 30).
[Pour indiquer la provenance] On lui apporte un paquet (...) il l'ouvre, et de là sortent, une étoffe des Indes (...) et une autre, d'une couleur un peu rembrunie (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1554).
En étant placé à cet endroit (suivi d'un verbe de perception; pour indiquer un point de vue). Je n'ai fréquenté dans Delhi que les faubourgs. De là je voyais les étoiles éclairer les habitations des hommes (Bern. de St-P., Chaum. ind.,1791, p. 124).Deux hommes pourroient se cacher et entendre de là tout ce qui se diroit dans le cabinet (Genlis, Chev. cygne, t. 3, 1795, p. 162).
Au fig.
α) D'après cela; de cette cause. On peut conclure de là que..., il s'ensuit de là que... J'ai toujours supposé que j'écrivais assis dans mon cercueil. L'ouvrage a pris de là un certain caractère religieux que je ne lui pourrais ôter sans préjudice (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 6).La saison n'est pas bonne pour toi, mon garçon, fit-elle. Tu as les oreilles rouges, le sang à la tête. Tout le mal vient de là (Bernanos, Joie,1929, p. 538):
13. ... chacun de vous, atrocement isolé des autres, arrive d'instinct aux mêmes conclusions, qui sont l'amour de la paix, du bien-être, et d'une éternité mitigée. De vient que toutes les familles étrangères adorent avoir, comme un pot de fleurs à leur fenêtre, un ami français, plus sûr qu'un géranium. Giraudoux, Siegfried et Lim.,1922, p. 38.
β) En conséquence. Synon. d'où.Sans avoir peut-être tout le nécessaire, au moins est-il sûr que nous avons beaucoup de superflu. De là la nécessité de choisir; de là l'utilité d'un guide (Laclos, Éduc. femmes,1803, p. 473).Chez eux, c'est la tête et non le bras qui agit. De là le décousu de leurs mœurs, et de là le blâme dont les accablent les esprits inférieurs (Balzac, Splend. et mis.,1844, p. 13).
De là à/au... (pour indiquer une distance). De ce lieu à (un autre). Synon. d'ici à.Elle [l'eau des pluies] tombe sur le rocher, qui l'attire en vapeurs comme la feuille. De là elle passe successivement à la fontaine, au ruisseau, à la rivière, au fleuve et à la mer (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 181).Une vie de retraite (...) à Chevreuse même, près des ruines labourées du monastère, ne venant de là à la grande ville qu'une fois tous les quinze jours (Sainte-Beuve, Volupté, t. 2, 1834, p. 189).
De là jusqu'à. Depuis cet endroit jusqu'à (tel autre). La rivière qui, de là jusqu'à l'endroit où se construisait la poudrerie, forme une longue nappe où le soleil couchant jetait alors une joyeuse traînée de lumière (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 109).
Au fig. De là à. De ce point, de ce fait à. Je m'en tiendrais d'abord à la peinture de quelques harmonies végétales, et je passerais de là à la description de quelque paysage (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 125).
Au fig. De là à + inf., il y a loin, il y a de la marge/il n'y a qu'un pas. Il s'en faut de beaucoup/de peu. Mais de là à nous tirer maintenant dans le coffret, sans même venir nous parler d'abord et en plein milieu de la route, il y avait de la marge et même un abîme. Trop de différence (Céline, Voyage,1932, p. 16).L'espionnage allemand, qui avait eu connaissance de l'entreprise, n'en avait jamais compris le but exact; de là à conclure que ce fût the best kept secret in the world, il n'y avait qu'un pas (Goldschmidt, Avent. atom.,1962, p. 63).
À ... de là
[Pour indiquer une distance] À quelques pas de là. Elle sortit (...) et à vingt pas de là s'arrêtant encore vis-à-vis le cabinet de police (Janin, Âne mort,1829, p. 48).Je reconnus pourtant, à deux kilomètres de là, sur la gauche, un petit lac mystérieux où jeune homme j'avais été quelquefois patiner (Gide, Symph. pastor.,1919, p. 877).
[Pour indiquer un laps de temps] À quelque temps de là, à dater de là. À deux siècles de là, un conseiller au parlement se rendait au palais sur une mule (Jouy, Hermite, t. 1, 1811, p. 74).À un mois de là, il mourut (France, Génie lat.,1909, p. 18).
De-ci de-là (v. ci1B 2).De-çà(,) de-là (v. çà1B).
Loc. adv. où est précédé d'une prép. (Non) loin de là. J'étais au pied des minarets d'une mosquée. Près de là étaient les factoreries des Européens (Bern. de St-P., Chaum. ind.,1791, p. 117).Deux jeunes ruisseaux (...) traversaient distinctement le beau lac (...) et hors de là ils débordaient en fontaines (Sainte-Beuve, Volupté, t. 1, 1834, p. 158).
Au fig.
Hors de là. En dehors de cela. Le théâtre moderne s'est proposé une autre fin, celle d'intimider les passions actives (...) en nous faisant compâtir aux tourments qu'elles font souffrir. C'est à quoi se réduit toute la théorie de l'imitation pathétique; et hors de là, non-seulement l'effet en serait inutile, mais le plus souvent dangereux (Marmontel, Essai sur rom.,1799, p. 320).
Loin de là. Bien au contraire (avec valeur d'opposition). Ce n'était pas un Don Juan, bien loin de là (Stendhal, L. Leuwen, t. 2, 1835, p. 11).Nous n'avons pas le cœur de dédaigner ce qu'ils ont cru avec tant de ferveur, aimé avec tant de constance. Loin de là, nous confesserons hautement que nous y avons mainte fois trouvé secours et consolation (Montalembert, Ste Élisabeth,1836, p. xcvi).
Loc. adv. Jusque-là.
Jusqu'à ce lieu, jusqu'à cette distance. V. jusque(s) I A 1 d.
Jusqu'à ce moment-là (valeur temporelle). Synon. de jusqu'ici (en discours indirect ou indirect libre).V. jusque(s) I A 2 c.
Au fig. Jusqu'à ce point, jusqu'à cette limite (et pas au-delà). V. jusque(s) I C 3.
Loc. verb. fig., fam. En avoir jusque-là. Synon. en avoir assez, en avoir plein les bottes, plein les pattes, plein le dos, par-dessus la tête, ras-le-bol (fam.)V. jusque(s) I A 1 d.
Jusque-là que. V. jusque(s) II B.
Loc. adv. Par là.
Par ce lieu, par cet endroit. Passez par là. À gauche, il y a une route qui longe le bois d'Hallate. C'est par là qu'un soir le frère de Sylvie m'a conduit dans sa carriole à une solennité du pays (Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p. 607).La cheminée de cette chambre avait, elle ne savait pourquoi, une sorte de hotte. C'était par là que le bruit sans doute lui parvenait (Daniel-Rops, Mort,1934, p. 203).
[En corrélation avec par ici, pour distinguer deux lieux de passage différents] Venez avec moi par ici. Lui par là (Hugo, M. Tudor,1833, 3ejournée, 1repart., 8, p. 172).
Dans cette direction. Quand on eut passé le pont, comme Arnoux tournait à gauche : − « Mais non! Tu te trompes! Par là, à droite! » (Flaub., Éduc. sent., t. 1, 1869, p. 109).
Aux environs. J'ai laissé quelque part par là mes chevaux et mes écuyers (Musset, Quenouille Barb.,1840, II, 1, p. 305).La fabrique de boulons et de rivets devait se trouver par là, dans ce bout de la rue Marcadet, elle ne savait pas bien où (Zola, Assommoir,1877, p. 526).
Au fig. Par ce moyen, de cette façon. Faites-vous rare, on vous aimera : c'est un proverbe des Turcs. Par là, vous gagnerez un grand avantage : à force de passer partout en silence et d'un air dégagé, on vous regardera quand vous passerez (Musset, Quenouille Barb.,18401, 2, p. 287).Si je ne pouvais plus les voir, il serait agréable de continuer à écrire, pour avoir encore par là accès auprès d'eux, pour leur parler entre les lignes (Proust, Fugit.,1922, p. 571).
En partic. Par ces mots. Que voulez-vous dire par là? L'Allemagne (et j'entends par-là la foule, non quelques hommes rares et supérieurs) ne comprend encore que la France du dix-huitième siècle (Quinet, All. Ital.,1836, p. 94).J'ai dit que je ne l'aimais point, du moins n'éprouvais-je pour elle rien de ce qu'on appelle amour, mais je l'aimais, si l'on veut entendre par là de la tendresse, une sorte de pitié, enfin une estime assez grande (Gide, Immor.,1902, p. 373).
(En) passer par là. Ne pouvoir faire autrement, passer par cette épreuve, par cette nécessité. Puis, grand'chose après tout que des chagrins d'amour! Nous passons tous par là. C'est l'affaire d'un jour (Hugo, Ruy Blas,1838, III, 5, p. 407).Une sueur froide mouillait les tempes de Félicité. La Simonne l'épongeait avec un linge, en se disant qu'un jour il lui faudrait passer par là (Flaub., Cœur simple,1877, p. 70).
Par-ci par-là (cf. ci1B 2).
II. − Particule renforçative d'un dém.
A. −
1. [Renforçant un pron. dém., p. oppos. à -ci (v. ci1III)] . V. celui-là, celle-là, ceux-là, celles-là.V. les formes des pron. dém.
2. [Renforçant le gallicisme présentatif c'est, ce sont] V. supra B 1 c et B 3 a.
B. − [Renforçant un adj. dém.] V. ce2, cet, cette, ces.
III. − Là! / là la! / là, là !, interj.
A. − [Souvent redoublé]
1. Vieilli. [S'emploie dans un dialogue, à l'adresse d'une pers., pour la calmer, l'apaiser, la rassurer ou l'exhorter] Là! reposez-vous; là! calmez-vous; là, là, restez tranquille; là, là, ne vous fâchez pas! Elle se recoucha et caressa la main du malheureux. − Là, là... disait-elle. En voilà un idiot. On lui annonce qu'il n'ira plus en classe et il pleure (Cocteau, Enf. terr.,1929, 1repart., p. 45).Charlot se jeta entre eux : − Là! là! dit-il. Vous n'allez pas vous disputer? (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 49):
14. Le bébé criait sur son panier à pesée, qui lui redressait la tête, tandis que sa maman manipulait sur l'autre plateau les poids de cuivre. − , , c'est fini. C'est fini. C'est très bien. Vous avez pris 150 grammes. Oh! non, ce n'est pas si triste. N'ayez pas ces sanglots excessifs. Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 22.
[Parfois triplé] Je m'attendais à cette crise de nerfs. Je la trouve plus sympathique. Allons... Allons... ne pleurons plus... Calmons-nous... là, là, là... (Cocteau, Machine infern.,1934, I, p. 28).
2. Mod. [En combinaison avec une autre interj. pour la renforcer] Hé là! doucement; oh là! Hep là! Ouh là! Eh là! eh là! Est-ce qu'il est fou, ce gaillard-là de courir comme un dératé! (Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., p. 21).Hop là! En avant les bras! Une carpe encore, et pas la plus mince! (Genevoix, Raboliot,1925, p. 29).
Oh là là! Ah! là! là! Ah! là! là! se faire du chagrin pour les femmes! Une de perdue, dix de retrouvées... Comme on dit (Achard, J. de la lune,1929, III, 2, p. 26).Le moribond claquait des dents. Il bégaya : − « Oh là là... Oh là là... J'ai peur... » (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1255).
Rem. Ces loc. s'écrivent parfois sans accent grave. Oh la la! c'te gueule, c'te binette! (Courteline, Article 330, 1900, p. 271).
B. − [Sert à renforcer ce qui vient d'être dit] Fam.
1. [En début ou en fin de phrase, pour ponctuer une assertion; sert de simple appui au discours] Synon. fam. na!Là, c'est bien; là, c'est fini; vous n'avez qu'à faire attention, là! Là, c'est bien fait! L'Innocent, se levant : Là! j'ai fini; je n'ai plus faim (A. Daudet, Arlésienne,1872, II, 2etableau, 5, p. 396).Là! ça y est; ça devait arriver! Lettre de la petite Luce que je trouve en rentrant à la maison, dans une poche de ma serviette (Colette, Cl. école,1900, p. 173):
15. Qu'est-ce qu'il faut vous dire encore? J'étais si contente que vous soyez réconcilié avec moi! Je dis : « moi », , et je ne parle plus des autres. Arland, Ordre,1929, p. 228.
2. [Sert à reprendre ou à préciser un terme que l'on vient d'exprimer] Alors là..., mais là, là, ce qui s'appelle...; là vraiment, là franchement. Adèle... c'est une femme... oh! mais, là... une femme... on ne saura jamais à quel point j'aime Adèle (Meilhac, Halévy, Cigale,1877, II, 2, p. 61).Nous allons vous tourner un article, mais là, un article à succès (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 45).Il n'y a à la banque Herrer que deux personnes exactes, mais là... ce qui peut s'appeler exactes (Flers, Caillavet, M. Brotonneau,1923, I, 1, p. 3).
Prononc. et Orth. : [la]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Adv. dém. I. du lieu où l'on est et du lieu où l'on va, situés en dehors de l'espace du locuteur. A. 1. a) 2emoitié xes. lieu où l'on n'est pas, opposé à ci; lai (St Léger, éd. J. Linskill, 96 : Pos ci non posc, lai vol ester); 1172-75 ça et la, v. ça; ca 1260 lai... lai... lai valeur distributive (Robert de Blois, Beaudous, 1432 ds T.-L.); av. 1538 par ci, par la, v. ci; b) antécédent de l'adv. ou, ca 1100 [sans idée d'oppos. spatiale] (Roland, éd. J. Bédier, 2046); 1545 fig. marquant une oppos. « tandis que » (Le Maçon, trad. de Boccace, Décaméron, I, Préamb. ds Hug.); 1671 (Pomey : il rit là où il devroit pleurer); c) 1611 fig. en être là « avoir cette disposition d'esprit, en être à ce point, ce parti » (Cotgr.); 2. du lieu où l'on va; verbe de mouvement a) 2emoitié xes. lai (St Léger, 232 : Lai s'aprosmat que lui firid); b) fin xes. lai...o désigne un point dans le cours d'un récit (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 278 : lai dei venir o eu laisai); mil. xies. la...o (St Alexis, éd. Chr. Storey, 80 : la pristrent terre o Deus les volt mener); c) ca 1280 fig. désigne l'aboutissement d'un processus, d'une pensée (Girart d'Amiens, Escanor, 25030 ds T.-L.). B. en compos. 1. suivi d'un autre adv. a) 2emoitié xes. la jus [lat. class. deorsum, vulg. josum, avec infl. de su(r)sum, v. sus] avec mouvement (St Léger, 176); mil. xies. sans mouvement (St Alexis, 486); ca 1165 id. laïs (Benoît de Sainte-Maure, Troie, 29368 ds T.-L.); b) ca 1100 la sus amunt avec mouvement (Roland, 2634); ca 1180 (Hist. Joseph, 1610 ds T.-L. : là sus ou ciel monta), v. aussi E. Lommatzsch, Kleinere Schriften zur rom. Philol., 1954, pp. 10-11; c) ca 1140 laenz, v. léans; d) ca 1160 la dedanz (Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 464 : ... la dedanz an la cité); e) 1160-74 la hors (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 2115); ca 1200 par la defors (Beuve de Hantone, I, 5460 ds T.-L., s.v. defors); f) 1174-87 la desoz, v. dessous; g) ca 1180 là val (Fierabras, éd. A. Kroeber et G. Servois, 386); h) 1456-57 la hault « dans le ciel » celuy qui est la hault « Dieu » (Cent nouvelles nouvelles, éd. F. P. Sweetser, p. 245), v. aussi haut; i) xvies. la bas, v. ce mot; 2. précédé d'un prép. a) ca 1100 de la (Roland, 289), v. aussi delà; b) ca 1208 par la ou (Villehardouin, Constantinople, éd. E. Faral, § 230 : ... par la ou il devoient passer); 1240-80 par là fig. « par ce moyen, grâce à quoi » (Baudouin de Condé, Dits et contes, 39, 206 ds T.-L.); 1611 passer par là id. « accepter telles conditions » (Cotgr.); c) 1240-80 dès là « par conséquent, donc » (Baudouin de Condé, op. cit., 156, 11 ds T.-L.). C. renforçant la valeur dém. et spatiale des dém. 1. renforçant un pron. dém. a) ca 1160 celui la, v. celui (Étymol. B 4); 1310-40 chieus la cas suj. masc. sing. (Jean de Condé, Dits et contes, éd. A. Scheler, t. 3, p. 200, 110); ca 1330 cil la (Guillaume de Digulleville, Pèlerinage Vie, 2142 ds T.-L.); b) xves. cestui la, v. ce adj. (Étymol. Pron. A 3 b); c) xiiies. avec ce neutre, çoula compl. d'obj., v. cela; 2. renforçant un art. dém. a) ca 1225 avec cas régime masc. sing., v. ce adj. (Étymol. Adj. A 2 b); b) mil. xiiies. avec cil cas suj. masc. (Du prestre qui ot mere a force, éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, Rec. gén., t. 5, p. 146, 101). II. P. anal. du temps que l'on indique (p. oppos., à l'origine à celui où l'on est) ca 1135 « à tel moment, alors » (Couronnement de Louis, 742 ds T.-L. : [as blanches pasques] vos plot il, verais Deus, a aler En Jerusalem); xiiies. en réf. à un passé éloigné (Parise la duchesse, 77 ibid.); ca 1245 là sus « après cela, ensuite, là dessus » (Ph. Mousket, 29578, ibid.); 1580 la dessus « ensuite, ceci dit » (Montaigne, Essais, I, XX, éd. A. Thibaudet et M. Rat, p. 85). III. Interj. là; lalà employé à l'adresse d'une personne que l'on veut encourager, exhorter (Cotgr.). Du lat. illāc adv. « par là » (la forme illa étant relevée dans la lang. vulg. dès Plaute, TLL, s.v.); les formes lai de St Léger et de la Passion, supra, sont prov. (cf. a. prov. lai, 2emoitié xiies. B. de Ventadour éd. C. Appel, passim; v. aussi Rayn. et Levy Prov.); la fréquence d'emploi de illa(c) en position proclitique dans des combinaisons avec *dyūsu [deorsum], intus, altu, bassu, v. supra, a prob. empêché la diphtongaison de a dans illa(c) employé séparément (Fouché, p. 650; v. aussi F. de La Chaussée, loc. cit.). Cf. l'a. fr. ila « là » (ca 1120-50 ila sus Grant mal fist Adam, I, 12 ds T.-L.), avec i- issu de hic adverbe. Fréq. abs. littér. : 103 179. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 11 560, b) 164 319; xxes. : a) 159 708, b) 152 696. Bbg. Foulet (L.). L'Effacement des adv. de lieu. Romania. 1954, t. 75, pp. 433-456. - Schifko (P.). Aspekte einer strukturalen Lexicologie. Bern, 1977, pp. 207-212. - Spitzer (L.). Über frz. là. Z. fr. Spr. Lit. 1912, t. 38, pp. 276-278.

LE1, LA1, LES1, art. déf.

LE1, LA1, LES1, art. déf.
[S'emploie devant un subst. (ou transforme ce qui suit en subst.) en indiquant qu'il est masc. sing., fém. sing. ou plur.]
I. − Emplois spécifiques. [Le locuteur présume que le contenu du subst. suffit à l'interlocuteur pour identifier ce dont il s'agit; le subst. qui suit a un référent repérable par rapport à un savoir donné, par rapport à l'espace construit par le discours ou par rapport à la situation énonciative]
A. − [Le référent du subst. est unique ou présenté comme tel]
1. [Dans la réalité ou dans le système de croyances ou le savoir commun] Mais je ne vais pas jusqu'à croire que ce que contient l'évangile soit sorti tout armé du cerveau du Christ (Gobineau, Corresp. [avec Tocqueville], 1843, p. 64).Le pharaon se leva (...) éclairé bizarrement, moitié par la lune qui se levait, moitié par la lueur des lampes (Gautier, Rom. momie,1858, p. 227).Annie a toujours vécu chez son Papa, sa Maman, je suis sûr qu'elle croit au Bon Dieu, à la Sainte Famille... (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 224).
[Le subst. désigne une doctrine, une philos.] L'existence, l'Islam. Le christianisme mènera l'homme plus loin; l'homme peut s'en soutenir plus encore (Gide, Journal,1896, p. 95).
2. En partic. [Le subst. est un nom propre ou a cette valeur] Le Soudan, l'Angleterre, le Rhône. Rien de plus uniforme que cette riche plaine de la Beauce (Michelet, Journal,1831, p. 102):
1. Faire reporter ces ossements dans le cimetière, c'eût été ébruiter un fait que tout le monde n'eût pas compris, et qui, sous la Restauration, eût pu être exploité contre ma famille par les prêtres. Sand, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 228.
Au plur.
[S'emploie pour désigner les individus d'une même famille, d'une même dynastie] Les Médicis, les Bourbons, les Valois; les Goncourt, les Corneille étaient frères.
[Avec valeur emphatique] Les Corneille, les Racine sont la gloire du théâtre français (Ac.1935).
Pop. [S'emploie devant un prénom] La Louise, le Marcel.
Vx ou HIST. [S'emploie devant les noms d'actrices ou de femmes célèbres] La Champmeslé, la Brinvilliers. La Malibran, la Patti (Ac. 1935). Outre que la présence de la Duvernoy était nécessaire pour tranquilliser le vieux duc, Prudence était une de ces femmes qui semblent faites exprès pour ces parties de campagne (Dumas fils, Dame Camélias,1848, p. 177).
Rem. S'emploie encore devant les noms de stars ou de cantatrices italiennes : la Callas, la Magnani.
Au masc. sing., p. ell. [S'emploie devant les noms de navire] Le Normandie, le De Grasse, le Redoutable, le Ville d'Oran, le Liberté.
Rem. Lorsque le nom est féminin ou est un nom de femme on utilise parfois la : la Liberté, la Marion-Dufresne.
B. − [La spécification du référent se fait par le contenu du syntagme nom.]
1. [Le subst. a un compl. de nom] LaJeune Fille : Étranger, salue la forte muraille d'Athènes. L'Étranger : Le tremblement de terre de la nuit dernière ne l'a-t-il pas ébranlée? (Claudel, Rempart Ath.,1927, p. 1125).La bourgeoisie des camps s'est installée dans une quiétude médiocre au prix de concessions dont l'ensemble émascule et déshonore (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 185):
2. J'avais eu un juste pressentiment quand, deux jours après le départ d'Albertine, j'avais été épouvanté d'avoir pu vivre quarante-huit heures sans elle. Proust, Fugit.,1922, p. 643.
[Le compl. de nom est un nom propre] Le principe d'Archimède; la maladie de Parkinson.
En partic. [Le subst. est un nom propre] V. infra B 2.Le Paris de ma jeunesse. Maintenant je suis sûr de ta guérison. Tu redeviendras le Feydeau d'autrefois. Mais il faudra te ménager un peu plus, mon bonhomme (Flaub., Corresp.,1869, p. 50).
2. [Le subst. est l'antécédent d'une relative] Mais j'ai éprouvé quelque émotion en voyant pour la première fois celui sans l'intervention duquel nous serions en ce moment dans les larmes et dans le deuil (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 610).Tu n'as pas réfléchi que pendant les quelques semaines qu'elle passera là-bas, Lucienne sera livrée à elle-même (Aymé, Jument,1933, p. 125):
3. Il y a peu de mouvements sociaux plus singuliers que le destin de quelques grandes maisons de Nantes dans les années qui suivirent la guerre... Nizan, Conspir.,1938, p. 75.
En partic. [Le subst. est un nom propre] Le Paris qu'il imaginait n'existe plus.
3. [Le subst. est qualifié par un adj.] Le garçon qui servait à table nous avait dit avec raison que le paquebot anglais partait le premier (Michelet, Journal,1834, p. 122).M. Ritz, lorsqu'il lança son établissement, révolutionna l'industrie hôtelière européenne (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 209).
En partic., p. ell. du subst. Ce repas, pour l'un de nous deux, sera le dernier, sera le viatique, dit alors Passereau (Borel, Champavert,1833, p. 214).Avant de partir, j'écrivis sous trois plis distincts au cardinal secrétaire d'État. Dans le premier, (...) je demandais à être reçu par lui (Billy, Introïbo,1939, p. 193).
4. [Le subst. est spécifié par d'autres procédés] À sept heures, le lundi 21 février, le commandant Gastaldi sortit de son P.C., accompagné du sous-lieutenant Mazel (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 5):
4. C'est bien ce que je craignais, cher ami, le culte du matin, l'arbre de Noël le soir, et, dans les heures entre le matin et le soir, les faridondaines qu'on suspend, les petites bougies qu'on allume pour l'ornement des branches. Gide, Corresp. [avec Valéry], 1890, p. 40.
5. En partic., p. ell.
À la + adj. fém.À la manière, à la mode. Jardins à la française; œufs à la russe.
À la + nom propre.À la façon de. Veau à la Marengo. À côté de lui deux fragments presque finis d'Hérodiade, le dernier travail. On m'a permis, malgré la défense de les lire. L'un est en strophes à la Banville (8, 8, 8, 4) (Valéry, Corresp. [avec Gide], 1898, p. 335):
5. ... et vraiment, l'après-midi d'hier, dans sa pose à la Praxitèle (...) il avait l'air d'un faune attardé. Gide, Journal,1902, p. 119.
C. − [La spécification du référent se fait par une relation d'anaphore]
1. [L'anaphore est réalisée par le même subst.] Au sortir de Plassans, les insurgés avaient pris la route d'Orchères (...). La route remonte le cours de la Viorne, en suivant à mi-côte les détours des collines (Zola, Fortune Rougon,1871, p. 162).Silence de commencement du monde. Mer vide, sans une voile. Les voiles s'en vont plus au nord, vers l'Amérique française ou anglaise, plus au sud, vers l'Amérique suédoise ou espagnole (Morand, New-York,1930, p. 6):
6. − « Qu'est-ce que tu fais? » − « Regarde... Tu ne vois pas? Je fais un petit bateau. Je fais un petit bateau pour toi. Quand ta maman te donnera ton bain, tu mettras le bateau dans la baignoire, et il restera sur l'eau, sans tomber au fond. » Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 867.
2. [L'anaphore est réalisée par deux subst. différents] M. le baron, au moment où il venait de racheter son château (...) était mort sans avoir eu le temps de faire exécuter les réparations et embellissements qui devaient mettre le manoir en état de recevoir convenablement madame la baronne et son fils (Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 36):
7. Mais Virginie lui répondait qu[e] (...) si Lantier s'avisait de la suivre, elle appellerait un agent et le ferait coffrer. Depuis un mois que son mari avait obtenu sa place de sergent de ville, la grande brune prenait des allures cavalières et parlait d'arrêter tout le monde. Zola, Assommoir,1877, p. 560.
3. [Le subst. décrit ou résume en des termes différents une réalité, un état de fait déjà mentionné] Voici trois cents pistoles, rends-moi mon enfant. Mais le chef, sans prendre l'argent, lui fit signe de le suivre (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 442).Il s'approcha de la sainte table et se signa comme un prêtre. Tous se signaient à leur tour. « Mes chers frères », leur dit-il, et il entama un discours véhément contre les mauvais chrétiens. La paroisse l'écoutait sans surprise, avec une attention fidèle (Queffélec, Recteur,1944, p. 26):
8. Voyons, disait le juge, comment expliquez-vous que votre femme se soit blessée au point qu'on l'ait trouvée partagée en huit morceaux, sans que vous, qui étiez à côté, ayez pu faire un geste pour l'en empêcher, sans même vous en être aperçu. Voilà le mystère. Toute l'affaire est là-dedans. Michaux, Plume,1930, p. 138.
D. − [La spécification du référent résulte d'un lien de contiguïté avec un objet déjà mentionné ou fourni par la situation énonciative]
1. [Le subst. désigne un élément constitutif d'un tout ou d'un ensemble explicitement mentionné auparavant]
a) [Le référent est de nature spatiale] L'Anglais prit familièrement par le bras son ancien capitaine et le conduisit à son canot, dans lequel il le fit entrer. Quatre matelots étaient courbés sur les avirons et n'attendaient qu'un signal (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 506).La pluie (...) avait pénétré dans sa cagna et, comme celle-ci était creusée en pente, cela faisait vers l'entrée une petite mare (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 257):
9. Les gens battaient la semelle et regardaient au loin, espérant le train. Enfin, on le vit arriver, effrayant de rapidité, de puissance (...). C'était plein... plein... plein... plein... Voici une place! Juliette s'introduit dans le compartiment. Triolet, Prem. accroc,1945, p. 31.
En partic. [Le subst. désigne une partie du corps]
[La partie désignée est celle du référent du suj. de la prop. ou de la pers. dont on parle] Il a mal à la gorge. Quel coup il a dû recevoir dans le cœur lorsqu'il ne m'a plus trouvée en rentrant, hein? (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 253).Angélina, le cœur encore serré, s'achemina vers sa voiture, n'osant parler à qui que ce soit, sur le perron de l'église, ni lever la vue sur personne (Guèvremont, Survenant,1945, p. 180).V. appelant ex. 2 :
10. ... c'était un homme qui paraissait avoir trente ans au plus. Le front découvert, effleuré déjà par des rides précoces, les joues amaigries, l' œil enfoncé dans son orbite, la bouche mince et pâle (...) il avait une de ces figures qui passent pour laides aux yeux du monde... Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 119.
[La partie désignée est celle du référent du pron. datif contenu dans la prop.] Enfin! s'écria Marguerite en reparaissant, le voilà parti; ce garçon-là me porte horriblement sur les nerfs (Dumas fils, Dame Camélias,1848, p. 87).Comme tu es pessimiste, disait-elle en lui caressant les cheveux (Nizan, Conspir.,1938, p. 166).
b) [Le référent est de nature temporelle] Samedi en huit, continua Angélina, après le marché, je pourrai aller avec toi à l'« Ami du Navigateur », pour pas que le Syrien te passe n'importe quoi (Guèvremont, Survenant,1945, p. 170).
2. [Le subst. désigne un élément ayant avec une réalité déjà mentionnée (une institution, une activité, un système, une pratique, un rituel social) un lien autre que celui de la partie au tout] Le soir, pris le thé à Holyhead et embarqué à onze heures pour Dublin. Dormi dans le paquebot (Michelet, Journal,1834, p. 135).Et il se laissa conduire, en face de l'Hôtel de Ville, dans un petit restaurant où l'on serait bien. Bouvard commanda le menu (Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 4):
11. Figurez-vous un homme qui voyage par une nuit de décembre sans lune et doublée de brouillards, et dites-moi un peu l'agrément qu'il aurait à regarder par la portière les effets du paysage. Tocqueville, Corresp. [avec Gobineau], 1850, p. 101.
E. − [La spécification du référent résulte de la situation énonciative]
1. [Le subst. désigne un élément faisant partie d'un cadre fourni par la situation décrite ou par la situation de discours] Ce matin j'ai été réveillée par un grand bruit. Julie, qui dormait dans ma chambre, s'est précipitée dans la salle à manger (Dumas fils, Dame Camélias,1848, p. 286).Deux phares pointèrent vers le trottoir, m'aveuglèrent une fraction de seconde, puis, virant court, s'estompèrent dans un froissement de lumière sur le pavé gras (Abellio, Pacifiques,1946, p. 9):
12. Hier à huit heures Madame Bérenge, la concierge, est morte. Une grande tempête s'élève de la nuit. Tout en haut, où nous sommes, la maison tremble. Céline, Mort à crédit,1936, p. 11.
2. [Le référent du subst. est la pers. à laquelle s'adresse l'énonciation] Le bel enfant! (Ac.1935).V. eh1I A Camus, Révolte Asturies, 1936, I, 2, p. 404; Billy, Introïbo, 1939, p. 48; Zola, Pot Bouille, 1882, p. 99.
P. ell. du subst. « Aussitôt arrivés, l'hôtesse la regarde » : Entrez, entrez la belle; Entrez sans plus de bruit, Avec trois capitaines Vous passerez la nuit! (Nerval, Filles feu, Angélique, 1854, p. 543).
II. − Emplois génériques
A. − Au sing. [L'art. précède un subst. qui n'a pas de référent spécifique; la réalité qu'il dénote est considérée dans le discours en question en tant qu'elle représente un genre, un type, une espèce, etc. (le signifie « quel qu'il soit »)]
1. [Le subst. dénote une réalité dénombrable] Tous les animaux sont pourvus d'organes plutôt singuliers que spéciaux, dans lesquels se montrent davantage la finesse et l'activité du toucher, comme les mains de l'homme, la trompe de l'éléphant, les moustaches du chat, les tentacules de l'insecte (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 161).Je tâche de te faire saisir les sentiments − légitimes ou absurdes − qui aident le poilu à supporter sa condition (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 215):
13. « Nous sommes libéraux de père en fils », disaient-ils, voulant exprimer par là qu'ils restaient des négociants irréprochables... car le doctrinaire en révolte, dont le temps s'amuse avec une profonde ironie, ne fait souche que de gens paisibles. Bernanos, Soleil Satan,1926, p. 60.
2. [Le subst. dénote une réalité non dénombrable en raison de son caractère massif ou de son unicité]
a) [Le subst. dénote qqc. en tant que substance] Ce qui toutefois domine et a imprimé sa physionomie indélébile au paysage méditerranéen c'est la pierre calcaire, que bien rarement la végétation couvre d'un tapis assez épais pour l'empêcher de paraître à nu (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 156):
14. Si l'on construit des thermomètres avec des liquides divers tels que l'eau, l'alcool, le mercure, on trouvera que ces instruments (...) ne marchent point dans un parfait accord... Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 141.
b) [Le subst. dénote qqc. en tant que phénomène] Nous étions d'accord (avec toi) pour guérir le mal par l'exercice du mal (Jouve, Scène capit.,1935, p. 129).Il n'existe rien de plus honteux que la mort et les hommes sont sages de se la cacher (Nizan, Conspir.,1938, p. 219).
c) [Le subst. dénote qqc. en tant que domaine de connaissance ou d'activité] Il n'y a pas de hasard dans l'art, non plus qu'en mécanique (Baudel., Salons,1846, p. 117).Non seulement la science ne peut nous faire connaître la nature des choses : mais rien n'est capable de nous la faire connaître (H. Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 266).
d) [Le subst. dénote qqc. en tant que type d'action] Et ce qu'on faisait sans le voir, ce qu'on a fait sans le vouloir, on finit par le vouloir comme on le fait. Dans la conscience, dans la décision et dans l'exécution même, combien vite nous prenons le change (Blondel, Action,1893, p. 178).
e) [Le subst. dénote qqc. en tant que capacité (à faire ou à éprouver qqc.)] Il a gardé de l'enfance le pouvoir de diriger ses rêves (...) il ignore (...) le remords (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 125):
15. Mais dans la mesure où l'on envisage dans l'entendement l'homme lui-même, je veux dire une exploration du possible de l'être, la tache absorbe l'attention : ce n'est plus la tache qui se perd dans la connaissance, mais la connaissance en elle. G. Bataille, Exp. int.,1943, p. 171.
3. En partic.
a) [Le s'emploie pour transformer un adj. ou un part. passé en subst. à sens générique] Le beau, le laid; tenter l'impossible. On nous a reproché d'autre part, de souligner l'ignominie humaine, de montrer partout le sordide, le louche, le visqueux, et de négliger un certain nombre de beautés riantes (Sartre, Existent.,1946, p. 10).
b) [L'art. déf. s'emploie pour transformer n'importe quelle partie ou séquence de discours en subst.] Le moi; l'en soi; le qu'en dira-t-on; le boire et le manger. Il faudrait savoir le moment et le pourquoi des choses qui tombent dans le domaine borné de son intelligence (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 18).Ici, très loin dans l'autrefois, un ermite avait eu son sanctuaire (Queffélec, Recteur,1944, p. 31):
16. Cependant l'analyse de la perception d'autrui rencontre la difficulté de principe que soulève le monde culturel, puisqu'elle doit résoudre le paradoxe d'une conscience vue par le dehors... Merleau-Ponty, Phénoménol. perception,1945, p. 401.
4. [Devant un nom de période temporelle ou un subst. dénotant une période temporelle]
a) Au sing. ou au plur., le + nom de jour. Synon. de tous les.Fermé le mardi; visite les lundis et les vendredis. Il était centre gauche, n'allait à la messe que les dimanches, et s'entendait à merveille avec les commerçants libéraux (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 567):
17. ... à Marseille et à Limoges le vendredi-saint et la saint-Martial, le jour des garçons bouchers qui font alors la bombe et célèbrent ripailles... Cendrars, Bourlinguer,1848, p. 247.
b) Au sing., Numéro + fois + le + subst. Synon. chaque.Trois fois le mois; s'en aller une fois l'an.
c) Sur*/vers* les deux heures, les trois heures.
5. [Devant un nom dénotant une unité de mesure, dans un énoncé exprimant un prix] Pour chaque. Deux francs le litre; six francs le kilo; douze livres la pièce.
Rem. Il peut arriver que la validité de l'emploi générique, repérable par « quel qu'il soit », se trouve contextuellement restreinte à un univers très limité. Quel problème que celui du déjeuner! Ils quittèrent le café au lait, sur sa détestable réputation, et ensuite le chocolat; − car c'est « un amas de substances indigestes » (Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 76). Le seul son d'un instrument à cordes, ou d'une flûte, ou d'une voix, suffisait à soumettre aussitôt ma pensée. De même un geste, un rayon sur le sol (Gide, Feuillet, 1896, p. 102).
B. − Au plur. [S'emploie pour parler de tout l'ensemble des choses, des pers. que dénote le subst.] Je m'adresse au hasard, dit l'ex-gamin de Paris, mais c'est un fier drôle, il n'aime pas les honnêtes gens (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 694).On attribua au libertinage, fréquent chez les vieillards riches, ce rapprochement du vieux duc et de la jeune femme (Dumas fils, Dame Camélias,1848, p. 15).Ce qui lui travaillait le siphon... c'était les trésors sous-marins!... (Céline, Mort à crédit,1936, p. 512).
C. − [Après de partitif] V. de2.
III. − Emplois intensionnels. [Le subst., en position de compl., n'a pas de référent précis et son sens s'ajoute à celui du verbe avec lequel il forme un tout, le apparaît ainsi dans un très grand nombre de loc. ou de tournures (qu'on trouvera traitées aux autres mots qu'elles comportent)] Aller à la pêche; tirer les marrons du feu; battre la mesure; faire la guerre, la paix; fumer la pipe; garder le silence; prendre la fuite. Il laissa, en style de marine, Lucien arriver, et retarda sa marche en ayant l'air de regarder le bas de la côte (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 703).Il répliqua, avec le visible désir d'étonner : − Je leur fais la cour... (Mirbeau, Journal femme,1900, p. 201).
Rem. 1. Dans l'anc. lang. cet emploi de l'art. était beaucoup plus restreint, notamment avec les noms abstr. En fr. mod. l'absence d'art. déf. s'est maintenue. a) Dans des loc., des proverbes, des devises. Noblesse oblige; ventre affamé n'a point d'oreilles; bon chien chasse de race. b) Dans des comparaisons usuelles. Dur comme fer; bête comme chou. c) Dans certains groupes nominaux coordonnés consacrés par l'usage anc. ou formant loc. Les arts et métiers; les us et coutumes; (travailler) jour et nuit; (remuer) ciel et terre. d) Dans des syntagmes prép. ayant valeur d'adv., de compl. de nom ou formant loc. (Peindre) d'après nature; condamné à vie; gagner de vitesse; par monts et par vaux; pot à lait; pince à sucre. e) Dans des loc. verb. où le verbe et le nom forment une seule unité sém. Prendre parti; crier famine; tirer vengeance; rendre justice; faire faillite. f) Devant les noms de jours ou de mois. Il viendra dimanche, lundi; avril a été beau cette année (Ac. 1935). 2. Lorsqu'on veut donner plus de vivacité à une énumération de subst. on peut omettre l'art. déf. Il illustrait volontiers les événements de notre famille et de l'Université par des œuvres de circonstance : vœux de nouvel an, d'anniversaire, compliments aux repas de mariage, discours en vers pour la Saint-Charlemagne, saynètes, charades, bouts-rimés, banalités affables (Sartre, Mots, 1964, p. 115). En partic. [L'art. déf. s'emploie pour former des particules grammaticales ou des mots-outils] Le plus, le moins, le mieux, le meilleur, le pire, le pis; l'un l'autre; le même, la même; tous les deux, trois, etc.; la plupart; le mien, le tien, etc.
Prononc. et Orth. : [lə], [la], [lε] et [le]. Élision de le, la devant voyelle ou h muet : l'ongle, l'amphore, l'habit, l'habitude. Liaison de les devant voyelle ou h muet : les armes [lεzaʀm̥] et [le-]; les honneurs [lεzɔnoe:ʀ] et [le-]. Par contraction, à + le + consonne ou h aspiré > au; de + le + consonne ou h aspiré > du (ex. pendre au tronc, tendre au héros, arracher du toit, s'emparer du héron); mais à ou de + le + voyelle ou h non aspiré > simple élision (ex. pendre à l'arbre, emprunter à l'histoire); à + les dans tous les cas > aux; de + les dans tous les cas > des (ex. pendre aux troncs, pendre aux arbres, croire aux histoires, consacré aux héros, arracher des toits, arracher des arbres, monter des herbes, s'emparer des hérons). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Formes A. 1. masc. a) sing. α) cas suj. − devant consonne ca 881 li (Ste Eulalie, 21, éd. Henry Chrestomathie, p. 3 : li rex pagiens); fin xes. le (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 201 : le matins); mil. xies. le (St Alexis, éd. Chr. Storey, 236 : le pedre); − devant voyelle, forme élidée, fin xes. l' (Passion, 289 : l'altre); β) cas régime − devant consonne ca 881 lo (Ste Eulalie, 10, 14, 15, 22; 24 : Volt lo seule lazsier); 1remoitié xes. le (Jonas, éd. G. de Poerck, 168 : cum dist e le evangelio); fin xes. (Passion, 169, 173 : il querent le forsfait); − devant voyelle 2emoitié xes. l' (St Léger, éd. J. Linskill, 19 : l'ebisque); fin xes. (Passion, 236 : l'emperador); b) plur. α) cas suj. ca 881 li (Ste Eulalie, 3 : li Deo inimi); ca 1100 les (Roland, éd. J. Bédier, 547 : Les .XII. pers); β) cas régime ca 881 les (Ste Eulalie, 5; 16 : les empedementz); 2. fém. a) sing. α) cas suj. − devant consonne ca 881 la (Ste Eulalie, 10; 23 : La domnizelle); − devant voyelle 2emoitié xes. l' (St Léger, 75 : l'ira); β) cas régime − devant consonne ca 881 la (Ste Eulalie, 28 : Post la mort); − devant voyelle 2emoitié xes. l' (St Léger, 237 : l'anima); b) plur. α) cas suj. fin xes. las (Passion, 234 : las voz; cf. id., 397 : les custodes, leçon rejetée, v. note); ca 1100 les (Roland, 91); av. 1123 [ms. L] les (St Alexis, prol. : les quels [cascun memorie spiritel] vivent purement); β) cas régime 2emoitié xes. las (St Léger, 151 : las poenas granz); fin xes. les (Passion, 260 : Ab les femnes); mil. xies. (St Alexis, 366 : les anames baillir). B. Formes contractées par enclise de l'art. déf. avec les trois prép. 1. en a) + art. déf. masc. sing. ca 881 enl (Ste Eulalie, 19 : Enz enl fou); mil. xies. el (St Alexis, 162); b) + art. fém. sing. ca 1200 el (Dialogues Grégoire, 150, 19 ds T.-L.); c) + art. masc., fém. plur. ca 1100 es (Roland, 1684 : es cartres e es brefs); 2. a a) + art. masc. sing. 2emoitié xes. al (St Léger, 14); b) + art. fém. sing. ca 1170 al (Chrétien de Troyes, Erec, éd. W. Foerster, 4263, var. ms. H, Bibl. nat. fr. 1450, xiiies. : al nuit); c) + art. masc., fém. plur. 2emoitié xes. als (St Léger, 206); mil. xies. as (St Alexis, 94); 3. de a) + art. masc. sing. [832-840 topon. Camdonpont (Cartul. abbaye de Redon, éd. A. de Courson, p. 94) transcrit Cansdoupont [= campus de illo ponte] par F. de La Chaussée, Morphol., § 54]; 2emoitié xes. del (St Léger, 235); b) + art. fém., masc. plur. id. dels (id., 7, 9). II. Emplois syntaxiques A. Accompagne un nom commun a) ca 881 le nom est déterminé par une épithète (Ste Eulalie, 5 : les mals conselliers); peut accompagner les adv. plus ou moins signifiant le superl. rel. mil. xies. (St Alexis, 624 : la plus durable glorie); b) 2emoitié xes. le nom est déterminé par une prop. rel. (St Léger, 14 : Al rei lo duistrent soi parent Qui donc regnevet a ciel di); mil. xies. (St Alexis, 77 : la nef est preste ou il deveit entrer). Présentatif de ce qui se réfère à une notion connue (valeur de notoriété), désigne 1. a) ce dont il a déjà été question ca 881 (Ste Eulalie, 23); b) ce qui est unique ou dont la notoriété est universelle id. (id., 28 : la mort); fin xes. (Passion, 311 : la luna; 390 : li soleilz); c) un type général, toute une classe d'individus mil. xies. (St Alexis, 302 : e li rice e li povre); 2. désigne ce dont la présence est impliquée nécessairement par la situation contextuelle a) 2emoitié xes. les parties du corps comme postulées par l'existence même de la personne évoquée (St Léger, 154 : Lis ols del cap li fai crever); fin xes. (Passion, 92 : A.ssos fedels laved lis ped); b) ca 1100 les pièces de l'armement comme constituant nécessairement l'équipement du chevalier que l'on évoque (Roland, 1199 : L'escut li freint e l'osberc li desclot); 3. détermine le numéral désignant une fraction d'un ensemble (les parties étant de même postulées par l'existence du tout) 2emoitié xes. un numéral cardinal (devenu pron.) (St Léger, 223 : Quatr' omnes i tramist armez Que lui alessunt decoller. Li tres vindrent a sanct Lethgier); id. numéral ordinal (id., 227 : Lo quarz, uns fel, nom a Vadart); 4. art. à valeur distributive a) 1176-81 devant un nom d'unité de mesure de longueur (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 2957 : pres iert, qu'il n'i ot pas Plus de demie liue un pas, Des liues qui el païs sont, Car a mesure des noz sont Les deus une, les quatre deus [ici, l'adj. numéral cardinal est devenu pron.]); b) début xiiies. devant un nom d'unité de temps (St Alexis en octosyllabes, 35, éd. G. Paris ds Romania t. 8, p. 170 : Treis feiz le jor); 5. art. à valeur démonstrative mil. xies. (St Alexis, 537 : Unches en Rome nen out si grant ledice Cum out le jurn); 6. devant un nom mis en apostrophe ca 1100 (Roland 1907 : Li nostre deu, vengez nos de Carlun). B. Accompagnant un nom propre 1. fin xes. nom de personne (Passion, 30 : Jesus lo Lazer suscitat; 489 : Lo Satanas); ca 1100 le titre est signalé par l'art. comme estimé présent à la pensée de tous (Roland, 7 : Li reis Marsilie); 2. 1140 un nom géogr. (Charroi de Nîmes, éd. D. McMillan, 209 : el Toivre [le Tibre]). C. Fait fonction de pron. Pron. anaphorique d'un subst. déjà énoncé ou s.-ent. et recevant la détermination 1. d'un subst. au cas régime a) 2emoitié xes. anaphorique d'un subst. déjà énoncé (St Léger, 118 : Vindrent parent e lor amic, Li sanct Lethgier, li Ewrui); mil. xies. (St Alexis, 7 : Al tens Noë ed al tens Abraham Ed al David...); b) 1176-81 d'un subst. s.-ent. (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, 2576 : Huit jorz aprés la Saint Johan); 2. d'une épithète fin xes. (Passion, 143 : Judas li fel; 161 : Jesus li bons); ca 1100 (Roland, 3033 : Oger li Daneis); de cet emploi est né le pron. poss. à partir de l'adj. poss. : mil. xies. (St Alexis, 372 : Li apostolie tent sa main a la cartre; Sainz Alexis la sue li alascet), v. G. Moignet, Gramm. de l'a. fr., p. 105; v. aussi mien, tien, etc. L'art. déf. est issu du lat. ille, dém. de la 3epers., dont la valeur de notoriété convient à la détermination [ille homo « l'homme que vous connaissez »] : li-lo, le; li-los, les; las, les sont issus, avec aphérèse subie en position proclitique, de illī (altération de ille d'apr. le rel. quī ) -illu; illa; illī-illos; illas, le paradigme lat. étant réduit à 2 genres et 2 cas. En fr., l'art. s'est fixé devant le nom, fait prob. postérieur à la séparation de la Dacie (271), l'art. étant postposé en roumain. Bien que le lat. ne connût pas l'art. déf. à proprement parler (Ern.-Th., § 217), la création d'un déterminant s'annonce dès le lat. par certains emplois affaiblis des dém., dont on peut citer des ex. dans la langue pop. depuis Plaute (v. la recension critique de E. Löfstedt, Syntactica, I, pp. 359-365, ainsi que TLL, s.v. ille, 358-359, § II). En dehors des cas, les plus nombreux, où ille supplante is dans son emploi anaphorique, et de ceux où, au neutre, il sert à détacher du contexte un mot considéré en lui-même (Plaute, Miles, 819), on remarque que les cas les plus probants faisant prévoir l'apparition de l'art. rom. sont ceux où ille est utilisé dans l'expression d'une opposition ou d'une comparaison (ille alius, ille alter; ille major, ille minor; ille prior); de plus dans les textes de l'Itala, il calque souvent l'art. gr. (Ern.-Th., § 216-218; Vään., § 275; Löfstedt, pp. 64-65; B. Löfstedt, Studien über die Sprache der langobardischen Gesetze, pp. 264-268, ainsi que TLL, loc. cit., 357-358, § D); cependant, la création de l'art. déf. proprement dit ne remonte pas au delà de l'époque rom.; cf. ital. il, la, esp. el, port. o, a, en face du sarde su, sa, issu du lat. ipse, ipsa, concurrent de ille en lat. du veau xes. (notamment dans les régions bordant la Méditerranée) et dont les représentants sont aussi conservés dans une partie des parlers gascons et catalans. Formes contractées, au (issu de à* + le), aux (à + les) qui a éliminé une anc. forme es* et des (de + les). Bbg. Ferrari (G.). Ét. syntaxique des déterm. le et un ds la phrase à verbe être. Cah. Inst. Ling. Louvain. 1980, t. 6, no3/4, pp. 69-112. - Guillaume (G.). Particularisation et généralisation dans le syst. des art. fr. Fr. mod. 1944, t. 12, pp. 94-107; Le Prob. de l'art. et sa solution dans la lang. fr. Paris, 1975 [1919], 318 p. - Harris (M.) « Demonstratives », « articles » and « third person pronouns » in French... Z. rom. Philol. 1977, t. 93, no3/4, pp. 249-261. - Heriau (M.). Le Verbe impersonnel en fr. mod. Paris, 1980, pp. 800-821. - Ibrahim (A.H.). Effets argumentatifs de l'oppos. un/le. Semantikos. 1980, t. 4, no2, pp. 1-15. - Kleiber (G.), Martin (R.). La Quantification universelle en gr. Semantikos. 1977, t. 2, no1, pp. 19-36. - Le Flem (D.). Relation entre l'antéposition de l'adj. dans le synt. nom. R. Lang. rom. 1975, t. 81, pp. 467-468; Syst. des degrés de compar. en fr. contemp. et statut du morph. le ds l'expr. du superl. Vox rom. 1975, t. 34, pp. 140-159. − Spence (N.C.W.). A Note on the history of the Fr. definite articles le/la/les. Rom. Philol. 1976, t. 29, pp. 311-318. - Wilmet (M.). Gustave Guillaume et son éc. ling. Paris, 1972, pp. 36-38.

LE2, LA2, LES2, pronom. obj. dir.

LE2, LA2, LES2, pronom. obj. dir.
[Le, la, les renvoient respectivement à un subst. masc., fém. ou plur. déjà mentionné dans le discours ou qui va l'être par la suite (ex. 3, 4, 5, 6); le peut renvoyer aussi à un contenu propositionnel mentionné auparavant dans le discours ou qui va l'être par la suite (sous forme d'une assertion, d'un ordre, d'une question ex. 1, 2, 7)]
I. − [Le est uniquement lié au verbe qu'il précède ou qu'il suit le plus immédiatement]
A. − [Le est compl. d'obj. dir.]
1. [Le précède le verbe]
a) [Le verbe est à un mode personnel autre que l'impér.] On pose la victime sur le matelas gonflé d'air, et on la pousse vers le large (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 269).− Qu'est devenu Armand? − Je l'ignore. Nous l'avons très peu connu (Dumas fils, Dame Cam.,1848, p. 40).La seule différence qui existe entre les diables et les brigands, c'est que les diables sont moins noirs qu'on ne le dit, et les brigands plus crottés qu'on ne le suppose (About, Roi mont.,1857, p. 65).Et je savais qu'il préférait ne pas retourner chez ses parents... Les parents, n'est-ce pas, une fois qu'on les a quittés... (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1193).Chloé me tape sur le plexus solaire; tu piges? − Tu es amoureux... plus que je ne le croyais (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 85).
Rem. Le neutre peut être omis dans les incises, avec pouvoir, vouloir, falloir et avec les verbes exprimant un certain mode de connaissance (savoir, penser, croire, ignorer, dire, etc.). As-tu raison? Je ne sais. Je ne serais pas venu si j'avais su. Vous voudriez, j'imagine, être à ma place (Ac. 1935).
b) [Le verbe est à un mode nominal, inf., part. ou gérondif]
[Inf.] Plus d'une fois, elle avait été obligée de me rappeler pour l'aider à grimper aux rochers, tandis que, sans songer à elle, je m'étais déjà élancé plus haut (Musset, Confess. enf. s.,1836, p. 253).Marthereau, lui, en a [des paires de bas] qui ne sont pas du même ton toutes deux, car il n'a pu trouver pour les débiter en lanières deux bouts de capote aussi usés et aussi sales l'un que l'autre (Barbusse, Feu,1916, p. 19).Papa vient assez rarement à Paris, comme vous pouvez le penser (Duhamel, Suzanne,1941, p. 57):
1. Mon départ, je puis le dire sans me vanter, a désorganisé la justice militaire! Vercel, Cap. Conan,1934, p. 227.
[Part. ou gérondif] − À ce soir, dis-je à Marguerite en la quittant. Elle ne me répondit pas (Dumas fils, Dame Cam.,1848, p. 226).− Allons, Monsieur Bernard, bonsoir et bonne nuit! dit le Marquis en le saluant de la main (Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 162).Pendant longtemps il s'était consacré à promener les Anglais dans Ermenonville, en les conduisant aux lieux de méditation de Rousseau (Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p. 619).
c) [Le verbe est à l'impér. négatif] Ne l'achetez pas; ne le répétez pas. Ne la réveillez pas, dis-je doucement, pour inviter la voisine, tout au moins, à baisser la voix (Gide, Symph. pastor.,1919, p. 878).
2. [Le suit le verbe à l'impér. positif] Avoue-le, ce n'est pas moi que tu aimes, c'est Élisabeth (Mauriac, Mal Aimés,1945, I, 1, p. 158).Soit deux territoires ayant chacun sa firme dominante; au lieu de considérer chaque territoire comme fermé, couplons-les l'un à l'autre (Perroux, Écon. xxes., 1964, p. 183):
2. lia : Peu importe. Va-t'en... jean : Mais dis-le donc qu'il est le plus beau! lia : Il est le plus beau, du monde et de ma vie. Giraudoux, Sodome,1943, II, 8, p. 155.
B. − [Le est attribut du suj.] C'est un vrai paysan du Danube, et ravi de l'être (Bremond, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 495).Martyrisé par les mouches, il se disait que les taureaux l'étaient encore beaucoup plus que lui, ce qui lui permit enfin d'aimer son mal (Montherl., Bestiaires,1926, p. 527).Vanité de ce cri d'homme du désert! Vous êtes tels que si vous l'aperceviez comme moi, vous ne pourriez plus l'être (G. Bataille, Exp. int.,1943, p. 82):
3. Si je ne craignais d'être impoli, je vous dirais tout cru que vous me semblez en démence. − Je le semblerais à beaucoup d'autres, monsieur. Borel, Champavert,1833, p. 191.
C. − Rare. [Le est « sujet logique » (« séquence ») d'un verbe impersonnel] La chose n'était pas si simple qu'elle le paraît à l'écrire. Surtout elle n'était pas seulement, comme il le semble « du côté » de Simone (Paulhan, Œuvres complètes, t. 1, p. 67ds M. Hériau, p. 83, infra bbg).Plus précisément, comme il l'a été écrit dans les colonnes du no7, qui est à l'origine de l'inculpation, ce journal se veut l'annonce d'une nouvelle presse (Beauvoir, Lettre au Monde, 16 oct. 1970, p. 26,ds M. Hériau, p. 84, infra bbg).
II. − [Le se construit avec un groupe de deux verbes dont le premier est laisser, faire ou un verbe de perception]
A. − [Le est compl. d'obj. dir. du premier verbe tout en conservant une fonction logique par rapport au second verbe]
1. [Le est le suj. logique du second verbe]
a) [Le second verbe n'a pas de compl. dir.]
α) [En dehors de l'impér. positif, le précède le premier verbe] Sa révolution sur elle-même, est de vingt-trois de nos heures, suivant Cassini, qui l'observa, en 1700, avec une lunette de seize pieds, qui la lui fit paraître trois fois plus grande que la lune à la simple vue (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 350).La frégate marchait rapidement, toutes voiles dehors, et je ne la sentais pas aller (Vigny, Serv. grand. milit.,1835, p. 173).Un homme était là gisant − quelque escogriffe! Que Trac vous houspillait du croc et de la griffe. J'eus une peine énorme à le faire lâcher (Ponchon, Muse cabaret,1920, p. 269):
4. La peinture est tout autre chose (...). L'esprit seul s'y peut mouvoir, en tous sens, (...) plonger les formes dans l'ombre, les faire saillir dans le jour... Faure, Espr. formes,1927, p. 38.
β) [À l'impér. positif, le suit le premier verbe] Au même moment, Marceau et dix autres officiers supérieurs passaient derrière les rangs, criant : − Laissez-les approcher! Laissez-les approcher! (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 217).− Faites-le décamper tout de suite; qu'il ne reste pas une seconde de plus à la compagnie! Il finirait par passer au conseil (Benjamin, Gaspard,1915, p. 130).Regardez-le, écoutez-le ronfler, il rêve, il rêve qu'il part en voyage, rêve que tout va bien (Prévert, Paroles,1946, p. 15).
b) [Le second verbe a un compl. dir. réfl.] M. Prévère continuait de rester les bras croisés, dans une attitude de réflexion (...) je pris le parti de m'asseoir, dans l'espérance que je le verrais bientôt s'ôter de cette fenêtre où sa présence m'imposait une grande gêne (Toepffer, Nouv. genev.,1839, p. 26).Il aurait dû feindre de ne rien soupçonner, et les laisser se trahir tout doucement (Maupass., Contes et nouv., t. 2, M. Parent, 1886, p. 610).Il put attirer les ennemis en des places où telle pile menaçait de choir, et les faire s'abîmer avec elle (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 125).
[À l'impér. positif] Mes enfants! cria alors M. de Kergaz, s'il m'arrivait malheur... Si cet homme venait à me tuer, laissez-le s'en aller, mais veillez sur la comtesse (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 504).
c) Rare. [Le second verbe a un compl. dir.] :
5. Mon oncle et Alissa devaient aller, en juin, rejoindre, aux environs de Nîmes, Juliette, qui attendait un enfant vers cette époque. Des nouvelles un peu moins bonnes les firent précipiter leur départ. Gide, Porte étr.,1909, p. 552.
Rem. Avec faire, le est normalement remplacé par un datif. V. lui.
2. [Le est le compl. logique du second verbe] Le dauphin ne reviendrait qu'avec le duc de Bourgogne, et seulement si le conseil voulait maintenir d'autre sorte la paix et le bon ordre dans le royaume. Alors on résolut de le faire arrêter (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 113).Il a fait lui-même un pamphlet contre M. Mairobert, et il a eu l'étourderie de le faire imprimer là-bas (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1836, p. 41).Faites-le désarmer tout doucement par Slick. Il n'a qu'un revolver. Si on le lui prend, c'est fini (Sartre, Mains sales,1948, 6etabl., 1, p. 224).
B. − [Le est compl. d'obj. dir. du second verbe]
1. [Le précède le second verbe] Paysan, apporte-nous une grande marmite pleine d'eau et laisse-nous la mettre sur ton feu! (Claudel, Soulier,1944, épil., 1, p. 1085):
6. « On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre », répondit-il. Le voyant dans ces dispositions, Thomas le pria de le laisser l'accompagner au presbytère... Queffélec, Recteur,1944, p. 220.
2. [Le précède le premier verbe (le suj. du second verbe prend alors la forme d'un datif)] Ses mains seulement étaient extraordinairement froides et s'engourdissaient. On les lui fit mettre dans de l'eau tiède (Krüdener, Valérie,1803, p. 275).Écoute, dit Petit-Claud, défie-toi du caniche... − Tu ne le connais pas, s'écria David. Kolb, c'est comme moi-même. − Veux-tu me le laisser éprouver?... (Balzac, Splend. et mis.,1847, p. 601):
7. le prince : Chez lui!... (À Éva). Mais alors, il n'était donc pas où vous dites, madame? éva, vivement : Si!... avant! le prince, la regardant fixement : Vous êtes bien pressée de me le faire croire!... Sardou, Rabagas,1872, V, 4, p. 230.
Rem. Le doit toujours précéder faire.
III. − [Le, la, les entrent comme compl. dir., dans un grand nombre de loc. (qu'on trouvera traitées aux autres mots qu'elles comportent)] Se la couler douce, la bailler belle, l'emporter sur qqn, ne pas l'entendre de cette oreille, etc.
Rem. 1. En dehors de l'impér. positif, le pronom datif de 3epers. (non réfl.) (infra a) ainsi que en (infra b) et y (infra c) suivent le; le pronom datif réfl. (infra d), ainsi que le datif de première ou de seconde pers. (infra e) le précédent : a) Il avait oublié l'anneau de mariage pour sa femme, lorsqu'il alla se marier dans le Limousin. Il tira de son doigt l'anneau de Peytel et le lui donna (Goncourt, Journal, 1864, p. 91). Sur ces entrefaites, Susannah quitta le piano. Je cueillis un bouquet sur la table et vins le lui offrir avec des yeux railleurs (Villiers de L'I.-A., Contes cruels, 1883, p. 135). Léo : Georges, je suis restée seule avec cette petite, après votre départ. Nous avons parlé, autant que son état le lui permettait, bien entendu (Cocteau, Par. terr., 1938, III, 1, p. 270). b) Une fois dans la sacristie, il se montra plus traitable encore. Il ne réclamait plus les pièces pour le jour-même. Il implorait qu'un jour ou l'autre, seulement, et quand Thomas l'en jugerait digne, il rentrât en possession de son or (Queffélec, Recteur, 1944, p. 40). Didace était étendu tout rond par terre près du poêle (...). Alors (...) elle alla chercher une courtepointe pour l'en couvrir (Guévremont, Survenant, 1945, p. 161). c) Elle ne veut même pas se demander combien de temps la retiendra, dans cette maison de la colline, le caprice qui l'y a conduite (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 195). Le torrent ne produit de l'électricité que si l'homme l'y contraint (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 171). d) Comme quelqu'un qui sans vouloir se le formuler à lui-même sait au fond qu'il a pris son parti et que ce n'est plus qu'une question de temps (Du Bos, Journal, 1927, p. 242). e) − Oui, vous savez bien, cette belle montre à répétition que vous faisiez sonner dans la bibliothèque (...). Eh bien! elle est retrouvée, on vous la rendra (Mérimée, Carmen, 1847, p. 26). − Tenez, continua Andrea, jurez-moi que ce que je vais vous demander, vous le ferez si je meurs? − Je te le jure (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 403). − Tais-toi, tu vas nous la tuer, répétait la mère Malorthy. Misère de nous! (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 74). Je voudrais pouvoir te la retrouver sa photo de jeunesse! (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 498). Dans la lang. pop. ou relâchée le groupe le lui (ou le leur) se réduit souvent à lui (ou leur). C'est une lettre pour m'ame Matthieu... Faut que je lui remette à elle-même (Sue, Myst. Paris, t. 5, 1843, p. 354). Dis donc, tu ne crois pas qu'elles nous laisseraient dormir dans leur grange? − Je vais leur demander (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 221). 2. À l'impér., le suit immédiatement le verbe et précède le pronom datif. Il demande qu'on lui laisse ce coffret, le docteur assure qu'il n'y a aucun danger. − Le Commandant : Laissez-le lui (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 31). − Haynes. Allez jusqu'au poste de sans-fil. Prenez tous les télégrammes qu'ils ont reçus. Apportez-les moi (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p. 243). Venez demain! Madeleine : Mais... Léo : Il n'y a pas de mais. À cinq heures. C'est un ordre. Jurez-le moi sur Michel (Cocteau, Par. terr., 1936, II, 12, p. 266). Minutello : Mon ami, c'est une bizarre entreprise pour un homme veuf que d'élever deux filles. Bartholomeo : Elles vous donnent du souci? Minutello : Plus que tous les marchands de laine de Florence, de Londres et de Bruges. Silvio : Confiez-les nous (Salacrou, Terre ronde, 1938, I, 1, p. 139). Dans la lang. fam., le datif peut précéder le. Fossoyeur, pourquoi pleures-tu? Pourquoi ces larmes, pareilles à celles d'une femme? Rappelle-toi-le bien; nous sommes sur ce vaisseau démâté pour souffrir (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p. 153). − Mais je n'ai pas au moins Ferdinand! Dis-moi-le tout de suite, baissé tant que ça dans ton estime? Tu me le dirais? (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 450). Mais le petit, qui avait bonne envie de vivre, gigota tellement dans ses langes que Didace le rendit aussitôt à Marie-Amanda : − Ôte-moi-le des mains. J'ai trop peur de l'échapper (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 186). Tenez-le vous pour dit/ Tenez-vous le pour dit : les deux tours s'emploient indifféremment. Il faut que l'eau lui soit ainsi qu'une rosée, tenez-vous-le pour dit (Ponchon, Muse cabaret, 1920, p. 198). Tiens-le-toi pour dit (Martin du Gard, Les Thibault, II, p. 109 ds Grev. 1969, § 482). 3. Vx ou littér. Lorsqu'un inf., dont le est compl. dir., se trouve précédé d'un auxil. de mode (vouloir, pouvoir, devoir), plus rarement aller ou être (au passé composé ou au passé simple), le peut précéder le premier verbe. Le maire lui prit sa fille unique, et au bout de huit jours la lui rendit gâtée. Je le fus voir alors (Courier, Pamphlets pol., Gaz. vill., 1823, p. 187). Cependant lorsque, arrivés déjà à six lieues de Meulan, les gens d'armes demandèrent l'argent qui leur était promis, il ne les voulut point payer (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 397). Votre idéal peut être illimité, indéfini, ou, comme vous préférez dire, infini, mais cela une réalité ne le pourra jamais être, quelle qu'elle soit (Barrès, Cahiers, t. 5, 1907, p. 226). − Puis-je te servir à quelque chose? As-tu besoin de moi? Je me mis à sa disposition. Je lui promis de l'aller voir (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 59).
Prononc. et Orth. : [lə], [la], [lε] et [le]. Le, la + voyelle ou h muet : élision (je l'appelle, je l'habille); le, la + en ou y : élision (je l'en priverai, je l'y laisserai); impér. positif + le, la + voyelle : pas d'élision (faites le entrer, faites la entrer), mais élision devant en ou y (faites l'en revenir, faites l'y mettre). Att. ds Ac. dep. 1694; 1740, 1762 ,,Quand le est après le verbe il ne s'élide point dans l'écriture ni même dans la prononciation, si ce n'est en vers; au-lieu que dans ce même cas, la ne souffre jamais d'élision`` mais 1798, 1835 ,,Quand le est après le verbe, s'il est suivi d'une voyelle, il ne s'élide point en écrivant, mais il s'élide en prononçant : voyez-le à son retour (on prononce voyez-l'à son retour). Dans le même cas, la ne souffre pas d'élision``; 1878, 1935 aucune remarque.
étymol. et Hist. : Pron. pers. de la 3epers., cas régime atone I. Masc. A. Sing. 1. Placé devant le verbe a) α) 842 lo (Serments, éd. Henry Chrestomathie, p. 2, 20 : et Karlus, meos sendra, de suo part non loˑ [sagrament] s tanit); 2emoitié xes. lo (St Léger, éd. J. Linskill, 14 : Al rei lo duistrent soi parent); mil. xies. le (St Alexis, éd. Chr. Storey, 31); β) 842 l' devant voyelle (Serments, p. 2, 21 : si io returnar non l' [Karlo] int pois); 1remoitié xes. (Jonas, éd. G. de Poerck, 187 : tant l'aveient [Deum] [of] fendut); γ) id. enclitique qel = que lo (id., 215); b) 1174-76 terme d'appel déterminé par une prop. rel. (Garnier de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2913 : Deus le het qui sun pere volt metre desuz sei); 2. placé après le verbe a) fin xes. régime d'un inf., lui-même régime d'un autre verbe (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 157 : Sanct Pedre sols venjar lo volt); b) α) mil. xies. forme élidée (St Alexis, 181 : ... fait l'el muster venir); β) ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 3770 : Serveie le par feid e par amur). B. Plur. 1. 1remoitié xes. placé après le verbe (Jonas, 167 : et etiam plora les [Judeos]). 2. 2emoitié xes. placé avant le verbe (St Léger, 214 : Domine Deu il les [les omnes de ciel païs] lucrat); ca 1100 enclitique sis = si les (Roland, 689). II. Fém. A. Sing. 1. Placé devant le verbe a) α) ca 881 la (Ste Eulalie, 3, 4, 9, 19, éd. Henry Chrestomathie, p. 3); β) 2emoitié xes. l' devant voyelle (St Léger, 142 : Defors l'asist [la ciutat]); γ) ca 1200 enclitique sel = se le, forme pic. du fém. (Aiol, 6624 ds T.-L.); b) 1ertiers xiies. ne représente aucun subst. du contexte (Gormont et Isembart, éd. A. Bayot, 250 : Aince[i]s k'augiez guerres de terre Men enscient l'avrez mut pesme); 1178 (Renart, éd. E. Martin, XIV, 136 : bone l'as trovée); c) 1remoitié xiiies. [ms. T] fonction d'attribut représentant un subst. fém. avec lequel il est accordé (Chansons de Conon de Béthune, éd. A. Wallensköld, 15, 3 : Et tel i a qui quide avoir amie Boine et loial ki onques ne la fu [leçon le ms. Bibl. nat. fr. 844, xiiies.]); l'accord du pron. pers. en tel cas est condamné par Vaug. [1647], p. 27-28, jugement confirmé par Th. Corneille (Les Rem. de M. de Vaugelas, 1687, t. 1, p. 44) et par l'Ac. fr. (Vaug., Obs., 1704, p. 47); 2. placé après le verbe ca 1170 régime d'un inf. lui-même régime d'un autre verbe (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 181 : Ferir la volt par mi le vis). B. Plur. fin xes. las (Passion, 414); mil. xies. les (St Alexis, 480). Même orig. que le, la, les, art. défini.
STAT.Fréq. abs. littér. Le1 et 2: 1 474 119. La1 et 2: 1 870 137. L'1 et 2: 1 370 002. Les1 et 2: 1 197 527. Fréq. rel. littér. Le1 et 2: xixes. : a) 2 084 691, b) 2 129 858; xxes. : a) 2 089 228, b) 2 092 731. La1 et 2: xixes. : a) 2 649 391; b) 2 642 306; xxes. : a) 2 684 335, b) 2 662 608. L'1 et 2: xixes. : a) 2 008 156, b) 1 818 866; xxes. : a) 1 855 178, b) 2 022 662. Les1 et 2: xixes. : a) 1 887 145, b) 1 702 535; xxes. : a) 1 662 977, b) 1 570 235.
BBG. Heriau (M.). Le Verbe impers. en fr. mod. Paris, 1980, pp. 83-85, 633-635, 735-736, 871-876, 1002-1008.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·