FRIRE, verbe.

A.− Emploi trans.

1. Dans le domaine de la cuis.Faire cuire en plongeant dans un bain de matière grasse bouillante. Il ne faut pas plus de temps pour frire une carpe de quatre livres que pour cuire un œuf à la coque (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 125).

− Absol. Pâte à frire. Dans la cheminée étaient accrochés un sabot plein de sel, une poêle à frire, un chaudron (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 9).

2. Arg. ou pop., vieilli

♦ Avoir de quoi frire. Avoir de quoi manger et boire. Mon aïeul Marot, Qui dans son temps n'eut jamais de quoi frire (Banville, Cariat.,1842, p. 179).

♦ Frire des œufs à qqn. ,,S'apprêter à jouer un mauvais tour à quelqu'un`` (Delvau 1883). Ris-t'en, Jean, on te frit des œufs, comme disait ma grand-mère (Arnoux, Zulma,1960, p. 112).

Rem. Les dict. gén. attestent l'expr. Il n'y a rien à frire ici. Il n'y a rien à gagner, aucun profit à tirer. Y a pus rien à frire dans la partie; j'en veux pas! (Méténier, Lutte pour amour, 1891, p. 155).

B.− Emploi intrans. Cuire dans un bain de graisse bouillante. Faire frire. Les fumées odorantes de tout ce qui frit dans la rue (Goncourt, Journal,1880, p. 93).Zidore fit roussir du saindoux. Il mit la viande à frire, la mangea (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 188):

On peut aussi les [boyaux] faire frire. Pour y parvenir, on leur donne un doigt de longueur, on les ficelle, et on les fait cuire de même : ensuite on les laisse refroidir : on les trempe dans une pâte à bière; on les fait frire de belle couleur, et on les sert garnis de persil frit, et avec l'expression d'un jus de citron. Gdes heures cuis. fr., Grimod de la Reynière, 1838, pp. 156-157.

Rem. Frire n'est attesté ds la docum. qu'à l'inf., au part. passé, et à la 3^epers. du sing.

REM.

Friller, verbe intrans.,région. Émettre un bruit de pétillement lors de la cuisson ou de l'ébullition. Sur la servante de fer, quelque bout saigneux frillait dans la poêle (Pourrat, Gaspard,1925, p. 176).La cuve [remplie d'un liquide en fusion] frille (D'Esparbès, Folie épée,1927, p. 261).

Prononc. et Orth. : [fʀi:ʀ], (il) frit [fʀi]; part. passé [fʀi, -t]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1180 (Proverbe au vilain, 228c ds T.-L.); 2. ca 1460 estre frit « être perdu » (Cent nouvelles nouvelles, éd. F. P. Sweetser, 33, 334). Du lat. class. frigere « faire griller, rôtir; frire ». Fréq. abs. littér. : 60.

FRIT, FRITE, part. passé et adj.

I.− Part. passé de frire*.

II.− Adjectif

A.− Dans le domaine de la cuis.Cuit dans un corps gras bouillant. L'odeur des poissons frits et des viandes chaudes me chatouille le nez (France, Bonnard,1881, p. 302).Il [le cèpe] est bon frais, conservé, frit, grillé, en salmis (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 167).

− Pommes de terres frites, pommes frites (v. frite, subst.). Nos ancêtres les Croisés préparaient déjà le biftèque pommes frites avant même que Parmentier ait découvert la pomme de terre (Queneau, Zazie,1959, p. 176).

B.− Au fig., arg. et pop. Être frit. Être pris. (Quasi-) synon. cuit (arg. et pop.) :

... Juliette courut, allait s'agripper au marchepied, quand une main l'en arracha... − Et surtout pas de scandale... − dit l'homme au pardessus clair. − On ne vous veut pas de mal. Il parlait très bien le français, avec un rien d'accent. Ils l'encadrèrent (...). « Je suis frite, se dit Juliette. Qu'est-ce que j'ai sur moi... Rien de compromettant, non, rien... J'ai ma fausse carte d'identité, je m'appelle Rose Toussaint... Je crois du moins... (...) » Triolet, Prem. accroc,1945, p. 83.

− Être perdu. Il [le mourant] cria fortement encore : « Vive le Roi! » − Oui, oui, sournois, dit La-clef-des-cœurs (...). Ne vient-il pas nous crier au nez vive le tyran, quand on le croit frit! (Balzac, Chouans,1829, p. 45).

Fréq. abs. littér. : 72. Bbg. Chautard (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 518. − Quem. DDL t. 15. − Sain. Arg. 1972 [1907], p. 72, 264.

FRITE, subst. fém.

A.− Dans le domaine de la cuis.Petit morceau de pomme de terre frit, généralement de forme allongée, que l'on mange chaud. Un cornet de frites. Ils commandèrent d'abord des glaces, et des sardines, et puis des steaks, des frites, des huîtres et encore des glaces (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 29).

♦ Bifteck-frites. L'image d'Épinal du Français moyen, consommateur de vin rouge et de bifteck-frites, rouspéteur, pseudo-viril et pseudo-cultivé (Le Nouvel Observateur, 17 au 21 juill. 1978, p. 47).

Rem. 1. La docum. atteste une constr. frite de + subst. Petit morceau de qqc., frit à la manière des frites. On se payait un régal : des frites de betteraves. C'était sucré, fade et gras (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 333). 2. Le mot est gén. employé au plur. On rencontre ds la docum. un emploi du sing. avec une valeur générique. Je nous ai fait bouffer pas mal... et pas de la cropinette au sel! ... de la vraie barbaque première! ... de la frite à discrétion... (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 466).

B.− Au figuré

1. Arg., pop. Visage. Par l'implacable volonté qu'elle exprimait, la frite du Stéphanois n'incitait pas aux bavardages (Le Breton, Rififi,1953, p. 112).

2. Expr. familières

♦ En être, en rester comme deux ronds de frites. Être, rester stupéfait. (Quasi-)synon. en être, en rester comme deux ronds de flan.[Antoine à Courteline]. − Mon prochain spectacle passe dans une quinzaine; (...) ça va être une révélation : Rochard en sera comme deux ronds de frites! (Courteline, Conv. Alceste,Joy. commères, 1892, p. 98).

♦ Avoir la frite. Être en forme. Pierre Pallardy part du principe que l'on ne peut exercer d'importantes responsabilités que si l'on a la forme. La frite en d'autres termes (Est Républicain, Suppl., 26 août 1979, p. 5).

Prononc. et Orth. : [fʀit]. Homon. fritte. Étymol. et Hist. 1858 (Larchey, Revue anecdotique, 7, 523 ds Quem. DDL t. 1). Part. passé substantivé au fém. de frire*, p. ell. de pommes de terre dans le syntagme pommes de terre frites. Fréq. abs. littér. : 123. Bbg. Legros (É.). Pour l'hist. des frites en Wallonie. Vie wallonne. 1962, n^o297, p. 61; n^o298, p. 137.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire :

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·