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DÉPENSE, subst. fém.

DÉPENSE, subst. fém.
A.− Action de dépenser.
1. Action de donner de l'argent pour acquérir ou payer quelque chose. Faire une folle dépense; engager une grande (grosse) dépense; se lancer dans les dépenses; faire de la dépense (vx). L'achat des bijoux ne devait pas être considéré tant comme une dépense que comme « un placement » (Gide, École femmes,1929, p. 1265):
1. L'ennui, pour Gilbert, était que ses compagnons possédaient presque tous quelque fortune personnelle et regardaient peu à la dépense. Arland, L'Ordre,1929, p. 422.
Se mettre en dépense. ,,Faire une dépense qui n'est pas ordinaire`` (Ac. 1835-1932).
Rem. Il n'y a pas ds la docum. d'ex. de cette loc. en ce sens, attesté cependant ds la plupart des dict. généraux.
Au fig. Prodiguer ses efforts :
2. Il haussait les épaules : elle l'assommait avec ses paradoxes. Ce n'est pas malin d'avoir de l'esprit : on n'a qu'à prendre en tout le contre-pied de ce qui est raisonnable. Mais elle avait tort, ajoutait-il, de se mettre en dépense avec lui : mieux valait se réserver pour son entrevue avec le fils Azévédo. Mauriac, Thérèse Desqueyroux,1927, p. 216.
La dépense de qqc. La dépense pour acquérir quelque chose :
3. ... bien qu'on ne puisse « se présenter partout en casquette », ils [Bouvard et Pécuchet] reculèrent devant la dépense « d'un de ces chapeaux qui se plient, et qui portent le nom du chapelier Gibus, leur inventeur ». Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 1, 1880, p. 88.
2. P. méton.
a) Somme d'argent dépensée. Réduire ses dépenses; être surchargé de dépenses. La mère, pleine d'ordre, tenait les livres, une comptabilité sévère des recettes et des dépenses (Zola, Nana,1880, p. 1176):
4. Je mène une vie de religieux. J'ai un lit grand comme la main. Deux chaises de paille. Une chambre sans feu. Ma dépense en bloc est de 3 francs cinq sous par jour, tout compris. Hugo, Corresp.,1851, p. 31.
5. ... elle [Christine] rognerait encore sur les dépenses, enfin elle préférait tout à cette folie, qui les jetterait ensuite au pavé, sans pain. Zola, L'Œuvre,1886, p. 230.
Spéc., COMPTAB. Comptes de dépenses; pièce de dépense. FIN. Dépense(s) publique(s); dépenses accidentelles; dépenses d'équipement, d'exploitation, de fonctionnement :
6. − Maintenant que nous tenons registre de tous les habitants, il convient, mon fils Bulloch, de lever un impôt équitable, afin de subvenir aux dépenses publiques et à l'entretien de l'abbaye. A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 81.
La dépense de qqc. La somme d'argent dépensée pour acquérir ou entretenir quelque chose. Le consul se reposait sur elle [Divonne] de toute la dépense de la maison, très lourde avec ses charges accrues (A. Daudet, Sapho,1884, p. 98):
7. Il [Norbert] évaluait la dépense de chaque chose, et, à mesure qu'il arrivait à un total élevé, Julien remarqua qu'il s'en montrait presque jaloux et prenait de l'humeur. Stendhal, Le Rouge et le Noir,1830, p. 282.
b) Compte où sont inscrites les sommes d'argent dépensées ou à dépenser. Porter une somme en dépense; inscrire dans la rubrique (au chapitre) des dépenses :
8. ... le gouvernement ne fait plus face à ses dépenses. Demain, les fonctionnaires ne seront plus payés, ni l'armée. Et pour l'argent emprunté, il n'y en a plus. Claudel, La Ville,1901, I, p. 442.
3. Au fig. [Avec un compl. déterminatif ou un adj. précisant ce qui est employé] Action d'employer quelque chose. Dépense d'énergie, d'esprit, d'imagination; une dépense inutile de muscles; dépense cérébrale, musculaire, nerveuse :
9. ... soit par instinct, soit par goût, il [Louis] se montrait sobre de tout mouvement qui voulait une dépense de force; ses gestes étaient rares et simples... Balzac, Louis Lambert,1832, p. 111.
10. Marthe, plus mince, les joues rosées, les yeux superbes, ardents et noirs, eut alors pendant quelques mois une beauté singulière. La face rayonnait; une dépense extraordinaire de vie sortait de tout son être, l'enveloppait d'une vibration chaude. Zola, La Conquête de Plassans,1874, p. 1102.
P. ext. Quantité de matière ou d'énergie consommée. Dépense de calories, de chaleur, en combustible :
11. ... lorsque la poudre sera employée dans les travaux des mines, il faudra dépenser une certaine quantité de force pour pratiquer des cavités, y introduire et y tasser la poudre, en approcher la mèche enflammée; mais il n'y aura d'ailleurs aucun rapport entre la dépense de force appliquée à ce travail et les effets mécaniques que la détonation produira... Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 531.
B.− Endroit où l'on conserve les provisions (dans un établissement public, une communauté, une maison particulière) :
12. Devenue la femme de confiance d'Eugénie, Madame Cornoiller eut désormais un bonheur égal pour elle à celui de posséder un mari. Elle avait enfin une dépense à ouvrir, à fermer, des provisions à donner le matin, comme faisait son défunt maître. Balzac, Eugénie Grandet,1834, p. 226.
Rem. On rencontre ds la docum. un emploi de dépensif, utilisé comme anton. de accumulatif (cf. ce mot, ex.). Cet emploi est à distinguer de l'adj. dépensif « coûteux » attesté avec un ex. du xvies. ds Littré, Guérin 1892, puis Nouv. Lar. ill. et Lar. 20e.
Prononc. et Orth. : [depɑ ̃:s]. Ds Ac. 1694 et 1718, s.v. despense; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. A. 1. 1176 « action de dépenser de l'argent; somme dépensée, frais » a grant despance (Chr. de Troyes, Cliges, éd. A. Micha, 4533); 2. 1693 « emploi, utilisation d'une chose quelconque » ici en parlant du temps (La Bruy., Disc. sur Theophr. ds Littré); 3. 1851 « quantité de matière utilisée » (Cournot, Fondem. connaiss., p. 531 : Le rapport qui subsiste entre la dépense de la machine et son effet utile). B. Ca 1180 « lieu où l'on conserve les provisions » despenses... celiers (M. de France, Fables, 9, 21 ds T.-L.); fin xiies.-début xiiies. « nourriture » (Jourdain de Blaye, éd. P.-F. Dembowski, 2363). Du lat. dispensa part. passé fém. subst. de dispendere, v. dépens. B lat. médiév. « ce qui est nécessaire à l'entretien, provisions » (819 ds Nierm.), d'où « garde-manger » (ibid.). Fréq. abs. littér. : 2 141. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 310, b) 2 984; xxes. : a) 2 417, b) 2 373. Bbg. Straka (G.). En relisant Menaud, maître-draveur. In : [Mél. Imbs (P.)]. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1973, t. 11, no1, p. 291.

DÉPENSER, verbe trans.

DÉPENSER, verbe trans.
A.− Employer une certaine somme d'argent. Dépenser ses revenus. Il [M. de Trailles] dépense toujours environ cent mille francs par an sans qu'on lui connaisse une seule propriété (Balzac, Gobseck,1830, p. 406):
1. Le docteur avait jadis gagné beaucoup d'argent, et le dépensait en libéralités toujours très originales, un peu folles, qui ne restaient pas toujours secrètes et l'avaient fait soupçonner d'ambitions politiques. Bernanos, Journal d'un curé de campagne,1936, p. 1119.
Emploi pronom. passif. Cependant, l'argent se dépensait, et Angélique dit à La Corbinière : « Mais, que ferons-nous? Il n'y a tantôt plus d'argent! » (Nerval, Filles feu,Angélique, 1854, p. 550).
P. méton. [L'obj. désigne ce qu'on peut acheter contre une certaine somme d'argent] Il [Denoisel] allait se mettre au vert dans une auberge, à la campagne, à trois francs par jour, auprès d'une rivière, et ne dépensait que son tabac (Goncourt, R. Mauperin,1864, p. 217):
2. ... Carthage commençait une guerre comme une spéculation mercantile. Elle entreprenait des conquêtes, soit dans l'espoir de trouver de nouvelles mines à exploiter, soit pour ouvrir des débouchés à ses marchandises. Elle pouvait dépenser cinquante mille mercenaires dans telle entreprise, davantage dans telle autre. Si les rentrées étaient bonnes, on ne regrettait point la mise de fonds; on rachetait des hommes, et tout allait bien. Michelet, Hist. romaine,t. 1, 1831, p. 189.
Absol. Faire une dépense. La fonction de dépenser sans gagner est pis qu'immorale; elle est absurde. L'argent y perd toute signification (Alain, Propos,1930, p. 963):
3. Elles [les femmes] trouvent légitime que nous dépensions sans compter pour d'absurdes fantaisies. Les plus exigeantes sont toujours celles qui avant le mariage crevaient de faim. Mauriac, Génitrix,1923, p. 362.
B.− Au fig.
1. Employer avec prodigalité.
a) [L'obj. est un inanimé concr.] Dépenser les munitions.
Fam. Dépenser sa salive. Parler d'abondance.
b) [L'obj. est un inanimé abstr.] Dépenser ses jeunes années. Je continuais à dépenser mon bonheur avec prodigalité et je ne voyais pas le fond de ma bourse (Duhamel, Confess. min.,1920, p. 61):
4. Elle [MmeCornu] n'aimait que les humbles et se plaisait à protéger les canailles. Aimable personne du reste, mais qui a gaspillé sa vie sottement dans un tas de tripotages et dépensé en pure perte des qualités intellectuelles précieuses. Flaubert, Corresp.,1875, p. 254.
5. Il [Christophe] n'y tint plus, il eut un besoin furieux de sortir, de marcher, de dépenser sa force, de s'exténuer de fatigue, afin de ne plus penser. Rolland, Jean-Christophe,La Révolte, 1907, p. 607.
Emploi pronom. à sens passif :
6. ... le feu, c'est-à-dire la chaleur solaire, principe de l'énergie qui se dépensera en transformations de toutes sortes. Lapparent, Abr. de géol.,1886, p. 12.
c) Usuel, emploi pronom. réfl. Déployer une grande activité. Mais c'est la gloire de l'homme que de pouvoir se dépenser dans le vide (Valéry, Variété I,1924, p. 137):
7. Cependant, autour de la nappe, Marie-Ange se dépensait, se distribuait les rôles, faisait le suisse, faisait le prêtre, faisait la veuve, faisait tout. Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 94.
2. P. ext. [Le suj. désigne un appareil, une machine; l'obj. désigne une matière, une quantité d'énergie] Consommer. Un radiateur dépense de l'électricité.
P. méton. :
8. David avait adossé au mur mitoyen de cette espèce de cuisine un fourneau à bassine en cuivre, sous prétexte de dépenser moins de charbon pour refondre ses rouleaux... Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 553.
Rem. On rencontre ds la docum. le part. prés. adj. dépensant, ante. Qui dépense. Les Saint-Chouette et les Trucmuche du Machin sont gens vivants et dépensants, mais ils sont d'un Paris aussi factice que les images cinématographiques (Fargue, Piéton Paris, 1939, p. 175). P. plaisant. [P. réf. à la formule de Pascal roseau pensant servant à définir l'homme] La femme est un roseau dépensant (Renard, Journal, 1904, p. 943).
Prononc. et Orth. : [depɑ ̃se], (je) dépense [depɑ ̃:s]. Ds Ac. 1694 et 1718, s.v. despenser; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. 1. 1erquart xiiies. « utiliser, user de » ici de biens (Reclus de Molliens, Miserere, 55, 2 ds T.-L.); en partic. 1611 « utiliser de l'argent pour avoir quelque chose » (Cotgr.); 2. av. 1613 fig. « employer avec prodigalité » ici du temps (Régnier, Stances relig. ds Littré); en partic. 1832, 25 nov. pronom. « déployer une grande activité » (Balzac, Œuvres div., t. 2, [1850], p. 569); 1836 trans. dépenser de l'énergie (Gozlan, Notaire, p. 195); 3. 1907 « utiliser pour son fonctionnement une certaine quantité d'énergie » (ici en parlant de l'organisme) (Bergson, Évol. créatr., p. 117). Dér. de dépense*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : Dépenser : 1 380. Dépensé : 554. Dépensant : 66. Fréq. rel. littér. : Dépenser : xixes. : a) 1 913, b) 2 222; xxes. : a) 2 318, b) 1 650. Dépensé : xixes. : a) 892, b) 857; xxes. : a) 932, b) 574. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, p. 321. − Lindström (A.). Dispensare-distornare. In : [Mél. Wahlund (K.)]. Mâcon, 1896, pp. 282-286. − Quem. 2es. t. 1 1970.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·