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ROUE, subst. fém.

ROUE, subst. fém.
A. − Organe de forme circulaire, tournant autour d'un axe passant par son centre, qui a de multiples utilisations. L'Amérique est le pays de la ligne droite. Jusqu'à l'arrivée des Européens, la roue, le tour lui étaient inconnus (Morand, Air indien,1932, p. 22):
Il n'y a guère à hésiter pour qualifier la roue de « plus grande invention de tous les temps ». C'est elle, en effet, qui constitue la partie essentielle de la plupart de nos machines, le volant de nos moteurs, la turbine de nos centrales, l'engrenage, la roue dentée, la poulie, le pignon ou le boulon. P. Rousseau, Hist. transp.,1961, p. 15.
1. Organe de forme circulaire sur lequel repose un véhicule, et qui, en tournant, permet le déplacement de celui-ci. Nous voilà (...) lancés à une allure folle sur le pavé raboteux des petites rues. La jante ferrée des roues y fait un fracas de marteau et d'enclume (Farrère,Homme qui assass.,1907, p. 157).Au bout de quelques tours de roue, l'omnibus s'arrêta (Gyp,Souv. pte fille,1928, p. 89).
SYNT. Roue d'une brouette; roues d'une bicyclette, d'un tricycle, d'une charrette, d'un camion, d'une voiture; roue en acier, en bois; roue arrière; roue avant; roue ferrée; roue à rayons, pleine; roue porteuse, motrice, directrice; roue voilée; canon, grue, brancard sur roues; véhicule haut sur roues; véhicule à deux roues, à quatre roues; camion à roues jumelées; bandage, corps, cercle, chapeau, enjoliveur, jante, moyeu, pneu, tambour d'une roue; train de roues; braquage, blocage, patinage des roues; bruit, fracas, grincement des roues.
Roue folle. Roue indépendante de l'essieu sur lequel elle tourne librement. Pour le matériel des mines, une solution radicale (...) que l'on ne saurait employer sur les chemins de fer de grande vitesse (...) c'est l'indépendance des roues, rendues folles sur l'essieu (Haton de La Goupillière,Exploitation mines,1905, p. 721).P. compar. Il mania les chardonnerets [blessés] les uns après les autres, et tous le troublèrent par leur effarement menu. Ses impressions tournèrent comme des roues folles (Renard,Lanterne sourde,1893, p. 62).
Roue libre. Dispositif d'une bicyclette qui rend le pédalier indépendant du mouvement de la roue. Descendre une côte en roue libre. Tribout (...) décrivait ainsi son invention, la roue libre: « Les pédales impriment le mouvement, mais ce mouvement ne les entraîne pas, et elles se transforment en étriers immobiles jusqu'à ce que le cavalier veuille presser ou reprendre le mouvement » (Jeux et sports,1967, p. 1482).Au fig. En roue libre. ,,Sur la lancée, sans forcer`` (Petiot 1982). Il éprouvait une impression curieuse; il était débrayé, en roue libre, et descendait sans effort, comme en rêve, dans une sorte de bien-être inconnu (Morand,Homme pressé,1941, p. 76).
Roue de secours. [Dans un véhicule automob.] Roue supplémentaire destinée à remplacer celle dont le pneu est crevé. Il disait [Pagnol]: « La roue de secours est la réhabilitation de la cinquième roue du carrosse » (R. Castans, Marcel Pagnol m'a raconté,1975, p. 176 ds Rey-Chantr. Expr. 1979).
En compos. Roue-cage. Roue métallique associée à une roue motrice munie d'un pneumatique, permettant d'augmenter la surface portante d'un tracteur dans une terre détrempée dont l'adhérence est faible (d'apr. Lar. agric. 1981). Roue-squelette. ,,Roue métallique très large montée à la place d'une roue à pneumatique, motrice ou directrice, de tracteur ou de machine automotrice`` (Lar. agric. 1981).
P. méton., subst. masc. comp. Deux(-)roues. Véhicule à deux roues (bicyclette, vélomoteur, motocycle). V. deux I A 3 f.Voie réservée aux deux roues.
Expr. fam.
Pousser à la roue. V. pousser I A 1.
Sur les chapeaux de roues. Á toute allure. Démarrer sur les chapeaux de roues; prendre un virage sur les chapeaux de roues.
Mettre des bâtons dans les roues. Susciter des difficultés à quelqu'un, faire obstacle à quelque chose. V. bâton ex. 10.
La cinquième roue du carrosse*.
Pop., vieilli. [P. réf. aux roues de voiture plus grandes à l'arrière qu'à l'avant] Roue de derrière, ou plus rarement, roue de charrette. Pièce de cinq francs en argent. (Ds Esn. 1966). Il avait étouffé deux roues de derrière, deux belles pièces de cent sous neuves, une dans chaque soulier (Zola,Assommoir,1877, p. 761).Tu te mets à passer en revue les faits et gestes de ton père (...), tu lui reproches les misérables roues de charrette qu'il offre à quelques amis crève-la-faim (Miomandre,Écrit sur eau,1908, p. 187).
Vieilli. Roue de carrosse. Large plaque de fard sur les joues. Fardée en roue de carrosse. Madame Soudry se permettait un soupçon de rouge (...) mais cette légère teinte avait changé, par la force de l'habitude, en plaques de vermillon si pittoresquement appelées des roues de carrosses par nos ancêtres (Balzac,Paysans,1850, p. 270).
[Sur le modèle d'autres expr.] Faire feu des quatre roues. V. feu1I A 2 a loc.Á toutes roues. Très vite. V. à toutes jambes (v. jambe A 1 c loc.).Il se souvenait d'avoir été frôlé par un fiacre fuyant à toutes roues, comme il traversait le pont Louis-Philippe (Zola,L'Œuvre,1886, p. 23).
Surtout dans le lang. sportif, en partic. cycl.
Roue à roue, roue dans roue. En peloton, en étant très près. V. allure ex. 9.
Sur la roue, dans la roue (de qqn). Immédiatement derrière. Finir dans la roue de qqn. Toujours Aïcha marchait sur ses talons. Et elle prenait le trot dans sa roue, sans un ordre, si Raboliot sautait en selle à la vue d'un képi bleu (Genevoix,Raboliot,1925, p. 160).Soudain X (...) secoue la meute et déclenche les hostilités (...). Y, flanqué de trois autres fuyards saute sur sa roue. Les cinq fugitifs creusent l'écart (Comment parlent les sportifsds Vie Lang.1952, p. 176).
Prendre la roue (de qqn). Suivre. Vieux Jean, si tu veux arriver second, tu n'as qu'à prendre ma roue (L'Auto,14 juill. 1933, p. 1 ds Grubb Sports 1937, p. 64).P. anal. V. bolide A rem. ex. de Fallet.
Sucer la roue (de qqn). ,,« Coller » obstinément à la roue arrière d'un adversaire en refusant de le relayer`` (Petiot 1982).
Montrer sa roue arrière. Battre un adversaire au sprint (d'apr. Petiot 1982).
P. méton. Distance égale au diamètre d'une roue, utilisée pour évaluer l'écart qui sépare les concurrents. Gagner d'une roue, d'une demi-roue. À la hauteur de son pédalier, il sent qu'un nouveau rival regagne inexorablement du terrain. « D'où sort-il, celui-là? Il va me sauter? Non. Non. Je garde une roue d'av... [d'avance] » (Jeux et sports,1967, p. 1530).
TENNIS. Roue de bicyclette. ,,Manche gagnée sans que l'adversaire ait pu gagner un jeu`` (Petiot 1982). Victoire par deux roues de bicyclette 6-0, 6-0. Camille Benjamin (...) fut exécutée en l'heure de midi par Chris Evert-Lloyd qui lui infligea sans pitié une double « roue de bicyclette » (Le Monde,9 juin 1984, p. 13).
2. Disque, cyclindre plat, entrant dans la construction d'un mécanisme, d'une machine, d'un outil, qui reçoit ou transmet un mouvement.
a) Disque, cylindre dont la circonférence est dentée ou présente une gorge, qui est entraîné par une autre roue dentée, une vis sans fin, une chaîne, une courroie, un arbre ou entraîne l'un d'eux. Roue du rouet; roue d'engrenage; roue d'horloge; roue d'échappement; roues dentées cylindriques, coniques; roues à denture droite, à denture hélicoïdale; roue folle; roue à gorge. L'axe moteur [de la bicyclette] porte (...) entre le moyeu et la manivelle, la roue dentée ou grand pignon (Baudry de Saunier,Cycl.,1892, p. 203).Dans un engrenage, on appelle roue motrice la roue qui transmet le mouvement et roue menée celle qui le reçoit. Par ailleurs lorsque la différence entre les diamètres des deux roues est grande, on appelle pignon la plus petite et roue, l'autre (Encyclop. Sc. Techn.t. 51971, p. 211).
Roue d'angle. Roue dont les dents sont obliques et qui engrène avec une roue semblable dont l'axe fait un angle avec celui de la première. L'axe de rotation du moteur [électrique] est parallèle à la voie, et il attaque l'essieu [de la locomotive] par l'intermédiaire d'une roue d'angle (Haton de La Goupillière,Exploitation mines,1905, p. 774).
Roue de friction. Roue transmettant le mouvement par frottement. La transmission par roulement pur, caractéristique des roues de friction (qui nécessitent toutefois des dispositifs particuliers pour éviter le glissement) (Encyclop. Sc. Techn.t. 51971, p. 211).
Roue à rochet. Roue qui porte à sa circonférence des dents inclinées entre lesquelles peut pénétrer un cliquet ou rochet mobile, ne permettant le mouvement de rotation que dans un sens. Le balancier n'est amorti par aucun organe inutile, tel que les roues à rochet et les aiguilles; il ne porte que l'échappement et un contact électrique (Decaux,Mesure temps,1959, p. 82).
MÉD. [P. anal. avec la libération successive des crans d'une roue dentée] Phénomène, signe de la roue dentée. ,,Série de saccades successives perçues lors de la mobilisation passive d'une articulation`` (Méd. Flamm. 1975). À l'examen, on constate une résistance à l'allongement d'une articulation en flexion; lorsque l'on force, l'articulation se relâche par saccades; ce phénomène est connu sous le nom de signe de la roue dentée (Quillet Méd.1965, p. 347).
Expr. pop., vieilli. Se graisser les roues. Boire. Sans doute que j'ai bu un coup! Quand l'ouvrage donne, faut bien se graisser les roues (Zola,Assommoir,1877, p. 462).
b) [Dans une calculatrice] L'un des disques portant dix dents correspondant aux dix chiffres, chaque disque commandant la rotation du suivant lorsqu'il a fait un tour complet. Les roues de la machine de Pascal portaient donc des séries de dix dents sur lesquelles étaient écrits les chiffres 0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Chaque roue était affectée à un ordre décimal particulier: ordre 0 ou unités, ordre 1 ou dizaines, ordre 2 ou centaines, etc... (Couffignal,Mach. penser,1964, p. 13).
c) [Dans un mécanisme d'impression] Roue d'impression, roue des types. Disque dont le pourtour porte en relief un jeu de caractères alphanumériques. L'axe du récepteur [du télégraphe imprimeur Hughes] est horizontal et porte une roue en acier sur laquelle sont gravées les lettres de l'alphabet, on l'appelle roue des types (...). Un électro est disposé près de cette roue de telle sorte que si un courant le traverse, il fasse appuyer au moyen de son armature, la bande de papier contre la roue des types (A. Leclerc, Télégr. et téléph.,1924, p. 138).
d) MAR. ,,Volant à rayons et à poignées remplaçant la barre pour manœuvrer à distance un gouvernail`` (Merrien 1958). L'homme de la barre n'aurait qu'à donner un tour de roue, et le yacht le Duncan voguerait aussi facilement vers Calcutta que vers Concepcion (Verne,Enf. cap. Grant, t. 1, 1868, p. 58).
Rem. ,,Ce mot ne désigne que l'objet lui-même et non l'usage qu'on en fait, pour lequel on dit toujours barre: tenir la barre, l'homme de barre, donner de la barre`` (Merrien 1958).
e) Roue de cordier. Synon. de rouet.Là, le long d'une coquette muraille (...) se trouvaient le poteau pourri, la vieille roue et les piquets à râteaux qui constituent la fabrique d'un cordier de village (Balzac,Paysans,1844, p. 41).
f) Roue de potier. Plateau circulaire tournant sur lequel on place la matière à façonner. Synon. tour2.Wooley découvrit en 1930 à Ur, dans une couche archéologique de la période dite d'Uruk (vers -3250), des fragments d'une roue de potier (P. Rousseau, Hist. transp.,1961, p. 18).
g) Cylindre plat, massif dont le mouvement est utilisé pour broyer ou polir. Synon. meule.Roue du rémouleur, du lapidaire. Les objets [à polir] en acier sont adoucis au moyen de roues en émeri d'abord (H. Fontaine, Électrolyse,1885, p. 72).On casse les noix au maillet de bois pour en retirer les « tuches », qu'écrasera la roue de pierre dans l'auge pour en tirer l'huile (Menon, Lecotté,Vill. Fr., 2, 1954, p. 88).
h) Roue de poulie. Petit cylindre plat creusé d'une gorge à sa circonférence, qui fait partie d'une poulie et tourne dans la chape. Synon. réa, rouet.Si fracassé qu'eût été l'avant de la Durande, Gilliatt était parvenu à sauver les deux bossoirs avec leurs trois roues de poulies (Hugo,Travaill. mer,1866, p. 270).
3. Grand cylindre dont la circonférence est garnie d'éléments utiles.
a) Grand cylindre plat dont la circonférence est garnie de palettes, d'augets, placé dans un cours d'eau dont il transforme l'énergie cinétique en énergie mécanique. Roue hydraulique, à eau; roue à palettes planes, à palettes courbes; roue à godets; roue à aubes. Un petit ruisseau, qui s'échappe sous la roue du moulin qu'il fait mouvoir, va ensuite arroser des prairies (Bern. de St-P.,Harm. nat.,1814, p. 365).V. meule1A 1 ex. de Brunerie.
Roue en dessus/en dessous/de côté. Roue qui reçoit l'eau à sa partie supérieure/à sa partie inférieure/à la hauteur de son axe. Pour l'utilisation de la force hydraulique, on ne connaissait aux époques reculées que la roue en dessus (Haton de la Goupillière,Exploitation mines,1905, p. 487).
b) Roue (élévatoire). Roue à eau utilisée pour élever l'eau jusqu'à un réservoir ou à un canal d'irrigation. Les roues élévatoires sont des engins (...) qu'on peut utiliser (...) pour des élévations ne dépassant pas quelques mètres. On emploie la roue à palettes, la roue à godets, ou la roue à tympans (Haton de la Goupillière,Exploitation mines,1905p. 649).La grande nappe de l'Oronte où tournent en bourdonnant et en ruisselant d'eau les grandes roues qui montent l'eau jusqu'à des aqueducs pour la dispenser dans les champs (Barrès,Cahiers, t. 10, 1914, p. 362).
c) MAR. L'une des deux roues à aubes fixées de chaque côté d'un bateau. Vapeur à roues. Le bateau à roues, avec sa machine de Watt, commençait à donner satisfaction; comment eût-on osé substituer une hélice à cette mécanique qui marchait si bien? (P. Rousseau, Hist. techn. et invent.,1967, p. 248).
d) Roue pelleteuse ou roue-pelle. ,,Machine destinée aux parcs de minerai et de charbon dont l'organe de travail est constitué d'une roue à godets`` (Termes nouv. Sc. Techn. 1983).
4. Disque, cylindre tournant sur son axe.
a) Roue du pilori. V. pilori ex. de Hugo.
b) Cylindre placé dans une cage et qu'un animal peut faire tourner par le mouvement de ses pattes, sans avancer. Synon. rouet.Tout en s'agitant dans sa solitude comme un écureuil dans sa roue, il bâillait d'ennui et de langueur (Theuriet,Mariage Gérard,1875, p. 5).V. cage ex. 5.
P. anal. Grande roue en bois, mue par un animal ou un homme, qui entraîne un treuil. Elle aime à voir, à la cuisine, tourner la broche des rôtis par un marmiton aux mains sales ou par un chien qui court sans avancer jamais, dans une grande roue (Boylesve,Leçon d'amour,1902, p. 40).V. cage ex. 6.
c) MUS. Roue(-archet). Disque frotté de colophane, actionné par une manivelle, qui tient lieu d'archet dans certains instruments. Vielle à roue. [L'organistrum] ayant la forme d'une grande guitare (...) monté de trois cordes passant sur un chevalet et mises en vibration par le frottement d'une roue que l'on faisait tourner à l'aide d'une manivelle (Grillet, Ancêtres violon, t. 1, 1901, p. xix).
d) Grande roue. Manège formé de nacelles disposées sur une roue dressée. On est passé devant la grande Roue... Mais on a préféré encore les bords de la Seine (Céline,Mort à crédit,1936, p. 95).
e) Roue de loterie, ou vieilli, roue de fortune. Tambour contenant les numéros qu'on tire au sort; disque vertical, marqué de numéros sur son pourtour, le numéro gagnant étant désigné par une languette qui, lorsque la roue s'arrête, reste engagée entre les clous qui séparent les numéros. Un champ de foire convenablement fourni de chevaux de bois, de roues de fortune et de saltimbanques (Gautier,Italia,1852, p. 7).La roue des loteries grinçait comme des étoffes qu'on déchire (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Père Amable, 1886, p. 230).
f) Partie mobile de la roulette. Il tire à lui les trois mille six cents francs et, toujours sans rien savoir du jeu, les place sur la rouge (...). La roue tourne. Il gagne encore (Balzac,Goriot,1835, p. 163).
B. − (Supplice de) la roue. Supplice qui consistait à étendre le condamné sur une croix de Saint-André, à lui rompre les membres et la poitrine avec une barre de fer et à l'exposer sur une roue de carrosse placée à l'extrémité supérieure d'un poteau. La décapitation est réservée aux gentilshommes. Le billot est un de leurs privilèges. Parmi les supplices roturiers, la roue me paraît l'emporter sur la vulgaire pendaison (Gautier,Fracasse,1863, p. 470).
C. − P. anal. (de forme)
1. Objet de forme circulaire. À Yap, une île de la Micronésie, nous observons un phénomène également bizarre. Là les indigènes ont des coquillages-monnaies, mais prisent davantage des roues en calcaire dont le diamètre mesure de 60 centimètres à 1 m 90 (Lowie,Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 172).
En partic.
Synon. moins usité de rouelle.Une figure représentant des juifs mutilant un enfant, et ils y sont reconnaissables à la roue ou rouelle de drap qu'ils portent sur leurs vêtements (A. France,Rôtisserie,1893, p. 187).
Meule de fromage. Une roue de gruyère. Voir Luq.-Boud. Lait. 1981.
BROD. Motif ajouré, rond. V. poinçon I A ex. de Colette.
2. Locutions
a) En roue. En forme de roue. Étaler sa queue en roue. Des cheveux roux en roues sur les oreilles (Colette,Cl. ménage,1902, p. 237).
b) Faire la roue
α) [À propos de certains oiseaux] Déployer les plumes de la queue en éventail. La roue. La queue ainsi étalée. Les dindons se rengorgeaient, gloussaient en faisant la roue (Cladel,Ompdrailles,1879, p. 135).Un paon de métal émaillé, dont il venait de donner la commande au maître ciseleur et dont il venait d'assortir lui-même toute la roue en pierreries (Lorrain,Phocas,1901, p. 5).Un porche de ferme s'ouvrit. Seul, sous la voûte, un paon apparut, en pleine roue (Giono,Eau vive,1943, p. 240).
Au fig. Se pavaner, parader, chercher à se mettre en valeur. Faire de l'embarras, du genre, du fla fla! Aujourd'hui, c'est la mode. On se jette de la poudre aux yeux, on fait la roue... on se gonfle... comme des ballons (Labiche,Poudre aux yeux,1861, ii, 13, p. 395).Visite d'un jeune écrivain (...) qui, visiblement, se propose de m'éblouir, et rien ne me paraît plus ennuyeux que cette façon de faire intellectuellement la roue, car il n'y a guère que le parfait naturel qui m'éblouisse (Green,Journal,1943, p. 21).
β) GYMN. Tourner latéralement sur soi-même en s'appuyant alternativement sur les mains et sur les pieds. Il entrait ordinairement dans les coulisses où ses camarades étaient réunis, en faisant la roue sur les pieds et sur les mains, ou quelque autre tour gentil (Stendhal,Chartreuse,1839, p. 142).
D. − [La roue en tant que symb.]
1. [Symb. solaire en raison de sa disposition rayonnante et de son mouvement] Jésus, à une certaine époque, a été identifié avec le soleil. Il s'inscrit au milieu de la roue à rayons. Son monogramme, dans le disque dérivé de la roue solaire, conserve un sens lumineux. Et l'antique roue solaire persiste dans maints types iconographiques du Moyen Âge (Montherl.,Bestiaires,1926, p. 516).
2. [Symb. des cycles, des recommencements, des révolutions, en raison de son mouvement]
La roue de la Fortune. [Attribut de la Fortune, divinité du Hasard, symbole des vicissitudes de la destinée hum.] La Fortune à sa roue Attache mille ambitieux, Les précipite dans la boue Ou les élève jusqu'aux cieux (Béranger,Chans., t. 3, 1829, p. 62).Dans le grand nombre d'idées et de projets d'amélioration qu'il [le marquis d'Argenson] a agités, le temps a fait son triage, et il en est vraiment qui, par un singulier tour de roue de la Fortune, semblent devenus des à-propos (Sainte-Beuve,Caus. lundi, t. 14, 1859, p. 259).
La roue tourne. Les choses changent, évoluent. C'était encore un de ceux qui étaient toujours avec les vainqueurs, (...) il sentait bien que la roue tournait et prenait ses précautions: planquer quelqu'un comme elle, n'était pas une mauvaise garantie (Triolet,Prem. accroc,1945, p. 231).
Vieilli. Être en haut/en bas de la roue. Être dans la prospérité/dans l'infortune. Frappé des merveilles réalisées par l'architecte Grindot, au moment où la fortune avait mis son patron en haut de la roue, Crevel, comme il le disait dans son langage, n'en avait fait ni eune ni deusse, quand il s'était agi de décorer son appartement (Balzac,Cous. Bette,1846, p. 107).
Roue de fortune. Dixième lame du tarot qui symbolise le changement (d'apr. Riffard Ésotérisme 1983).
Littér. La roue du temps. Le passage inexorable du temps auquel on ne peut échapper. Si les ministres passent, les bureaux restent, et (...) ils sont les vrais ministres. Oui, sans doute, mais c'est précisément là qu'est le danger, car ceux qui les occupent, ne sont que trop enclins à ralentir la roue du temps, je veux dire, à perpétuer les routines pour se donner le moins de tracas possible (Michelet,Chemins Europe,1874, p. 131).
[Dans le bouddhisme, p. réf. aux transmigrations] Mais cet enfer n'est point éternel (...) dès qu'elle y a subi sa peine, l'âme, mise dans la roue des métempsycoses, y prend la forme sous laquelle elle doit renaître sur la terre (A. France,Vie littér,1891, p. 83).Ses yeux et sa bouche sont clos, ses pieds retirés sous lui et sa main qui pend dans le « geste du témoignage » indique la terre. Tel, sous l'arbre sacré, se conçut le parfait Bouddha: échappé à la roue de la vie, il participe à sa propre immobilité (Claudel,Connaiss. Est,1907, p. 28).
ASTROL. La roue des animaux, des signes. Le zodiaque. Le génie mystagogique a varié les emblêmes par lesquels on a désigné le monde et le zodiaque; cette grande roue est le zodiaque appelé par les Hébreux la roue des signes (Dupuis,Orig. cultes,1796, p. 587).Cette partie du ciel a été nommée par les Grecs zodiaque au sens de roue des animaux ou mieux roue de la vie (Divin.1964, p. 185).
3. Roue d'Ixion. [P. réf. à Ixion qui pour avoir trompé Zeus fut lié à une roue enflammée tournant éternellement dans le Tartare] Ce Tantale, toujours prêt à boire cette eau, à saisir ces fruits qui le fuient toujours; cette pierre de Sysiphe, toujours remontée ou poursuivie; ce cercle, symbole éternel de l'éternité, écrit sur la roue d'Ixion, sont autant d'hiéroglyphes parlans (J. de Maistre,Soirées St-Pétersb., t. 1,1821,p. 410).
4. Roue de flamme, roue enflammée. [P. réf. aux visions d'Ézéchiel (Éz, I, 15-21; X, 6, 19; XI, 22)] [Massillon] met sa gerbe en ordre et l'asseoit en quelque sorte sur les roues du char sacré (...) la parole de Bossuet se confond le plus souvent avec le char lui-même, avec la roue enflammée qui emporte le Prophète (Sainte-Beuve,Caus. lundi, t. 9, 1853, p. 36).J'adore encore le Maître (...) et je pleure les jours où, me couvrant de mes ailes, je formais avec la multitude des enfants de la lumière, une roue de flamme autour de son trône glorieux (A. France,Révolte anges,1914, p. 115).
Prononc. et Orth.: [ʀu]. Homon. roux et formes de rouer. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin xies. rode « pièce de forme circulaire qui, en tournant sur un essieu, communique un mouvement » (Raschi, Gl., éd. A. Darmesteter et D. S. Blondheim, t. 1, p. 125); ca 1180 ruee dou char (Proverbe au Vilain, 33 ds T.-L.); d'où loc. a) xves. [éd. 1531] etre la quinte roue « être inutile » (Perceforest, t. 1, fol. 122 ds Littré); 1700 être la cinquième roue du chariot (Saint-Simon, éd. A. De Boislisle, VII, 142); b) 1559 poulser a la roue « aider à la réussite d'une affaire » (Amyot, Pélop., 53 ds Littré); 2. a) ca 1155 röe « disque tournant » ici fig. (Wace, Brut, 1920 ds T.-L.: Fortune ad sa röe tornee); 1384 roue de la fortune « décoration représentant la roue de la Fortune » (Arch. du Pas-de-Calais A 541ads Gay); d'où 1609 sur le haut de la roue « dans une grande prospérité » (Régnier, Sat., XIV, 48, éd. G. Roubaud); 1666 au plus haut de la roue (Boileau, Sats., V, 66, éd. A. Cahen); b) 1690 rouë de Fortune « tambour où l'on enferme les numéros pour les tirer au sort » (Fur.); 3. a) déb. xiies. roe « au purgatoire, grande roue à laquelle sont accrochés des gens qui tournent à toute vitesse » (Benoit, Voyage de St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1360); b) 1534 « roue où l'on attachait les condamnés » (Edit, janvier ds Isambert, Rec. gén., t. 12, p. 400 [sens att. indirectement par le dér. enrouer « soumettre au supplice de la roue », déb. xiiies. Jean Bodel, Jeu de St Nicolas, éd. A. Henry, 537]); 4. a) 1174-76 « objet de forme circulaire qui entre dans la constitution d'une machine comme organe de transmission » (Guernes de Pont-Sainte-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 223); b) 1757 roue de gouvernail « roue munie de poignées qui sert à manœuvrer le gouvernail » (Encyclop. t. 7, p. 782); 5. p. anal. a) 1269-78 faire la roe (d'un paon) et p. ext. « déployer en rond le bas d'un vêtement » (Jean de Meung, Roman de la Rose, éd. F. Lecoy, 13538: et li souviegne de la roe Que li paons fet de sa queue: face ausinc du mantel la seue); d'où fin xives. « se pavaner » (Eustache Deschamps, Balades, éd. De Queux de Saint-Hilaire, t. 4, 318); b) 1734 faire la roue « tourner sur soi-même » (Crebillon Fils, L'Ecumoire, p. 232); 1870 gymn. (Littré); 6. 1725 roue de devant « pièce de deux francs » roue de derrière « pièce de cinq francs » (Le Vice puni ou Cartouche ds Sain. Sources arg. t. 1, p. 336); 7. 1932 les deux-roues « terme générique désignant tout véhicule à deux roues » (L'Auto, 17 janv. ds Petiot). Du lat. rota « roue, rouleau ». La forme roue, dont la forme anc. et rég. ruee, et reue qui existe encore dans les pat. du Nord, de l'Est et de l'Ouest, est due à une réfection sur le verbe rouer* (du lat. rotare) et le dimin. rouelle* (du lat. rotella). Voir FEW t. 10, p. 496a, note 36. Fréq. abs. littér.: 2 071. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 038, b) 4 024; xxes.: a) 3 830, b) 2 607. Bbg. Chautard Vie étrange Argot 1931, p. 666. − Quem. DDL t. 5, 9, 14, 16, 18.

ROUÉ, -ÉE, adj.

ROUÉ, -ÉE, adj.
En forme de roue.
A. − VÉN. Tête rouée. ,,Tête de cerf, daim ou chevreuil dont les merrains sont courbés en dedans`` (Baudr. Chasses 1834).
B. − MAN. Encolure rouée. Encolure qui présente dans sa partie supérieure une courbure prononcée, fréquente chez le cheval arabe (d'apr. Lar. encyclop.).
Prononc. et Orth.: [ʀwe]. Att. ds Ac. 1762. Étymol. et Hist. 1. 1100 « orné de dessins en forme de roue » (Roland éd. Bédier, 3569); 2. 1561 vén. teste rouee « tête de cerf dont les perches sont serrées, près l'une de l'autre et peu ouvertes » (J. Du Fouilloux, La Venerie, 21, 11, éd. G. Tilander, p. 52); 1834 tête rouée (Baudr. Chasses); 3. 1864 encolure rouée (Littré, s.v. encolure). Dér. de roue, suff. *.

ROUER1, verbe

ROUER1, verbe
A. − Empl. trans.
1. MAR. Enrouler un cordage. Synon. lover.Rouer un cordage. Rouer une manœuvre à contre, c'est la plier de droite à gauche (Will.1831).
2. MAN. Rouer l'encolure. [En parlant d'un cheval, d'une mule] Courber l'encolure. Tic avec appui. − (...) le cheval prend un point d'appui en saisissant entre ses dents le bord de sa mangeoire (...). Il roue alors son encolure, contracte sa gorge et suce de l'air en faisant entendre un bruit creux caractéristique (Garcin,Guide vétér.,1944, p. 134).V. harper ex. de Morand.
B. − Empl. intrans. [Le suj. désigne un oiseau] Faire la roue. Entre les jets d'eau teints de lumière, des paons blancs rouaient avec magnificence, pour humilier les fleurs (Toulet,Comme une fantaisie,1918, p. 298).P. métaph. Tout un ostensoir de rayons de soleil se mit à rouer à la pointe extrême des nuées (Giono,Hussard,1951, p. 220).
Littér., empl. trans. Des paons veilleurs rouant des gloires de saphyr (Régnier,Poèmes, Poèmes anc., 1890, p. 58).
Au fig. [Le suj. désigne une pers.] Parader. Mirez-le donc, il se rengorge à présent et roue, ce paon-là (Cladel,Ompdrailles,1879, p. 195).Quant à Lirmelar, il court des bruits fâcheux sur ses mœurs. Il roue volontiers près du sexe, mais sans autre plaisir que de parade et de vanité (Arnoux,Crimes innoc.,1952, p. 135).
REM.
Rouement, subst. masc.État de ce qui est disposé en rond. Tout tournait autour de cette maison. Tout le rouement des champs, l'orient des labours, des lavandes, des vergers, l'enlacement des chemins, des sentiers et des pistes (Giono,Chron., Noé, 1947, p. 92).
Prononc. et Orth.: [ʀwe], (il) roue [ru]. Homon. roux. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. Ca 1180 « tourner, aller en rond, tournoyer » (Marie de France, Fables, 3, 73 ds T.-L.); 2. a) fin xiiie-déb. xives. verbe trans. « lancer, envoyer au loin quelque chose » (Un art d'aimer anglo-normand, éd. O. Södergard, 872 ds Romania t. 77, p. 316); b) 1691 mar. « rouler un cordage en cercle » (Ozanam); c) ca 1330 « faire la roue en parlant d'un oiseau » (Guillaume de Digulleville, Pelerinage de Vie Humaine, 7771 ds T.-L.). Du lat. rotare (dér. de rota « roue ») « faire tourner », « tournoyer ».

ROUER2, verbe trans.

ROUER2, verbe trans.
A. −
1. Soumettre quelqu'un au supplice de la roue. Être roué vif. La Régence s'annonce, et le tableau change; le désordre, la licence et la folie s'emparent de la scène; la débauche se montre avec impudence; c'est peu d'être libertin, le bon ton est d'être ou de mériter d'être roué (Jouy,Hermite, t. 5, 1814, p. 143).Le lendemain, il eut le courage d'assister, de sa fenêtre, à l'exécution des fauteurs de la rébellion qu'on avait condamnés à être roués ou pendus, en gens de peu d'importance (Balzac,Martyr calv.,1841, p. 172).
2. P. ext.
Rouer de coups. Battre violemment, avec acharnement. Synon. fam. tabasser.Chiquet, exaspéré, se précipitant sur le maraudeur, le roua de coups, tapant comme un forcené, comme tape un paysan volé, avec le poing et avec le genou par tout le corps de l'infirme (Maupass.,Contes et nouv., t. 2, Gueux, 1884, p. 443).
Au part. passé. Elle bondit hors du lit, soulevée par l'obéissance, par sa passive obéissance de femme rouée de coups (Maupass.,Contes et nouv., Noyé, 1888, p. 1156).P. métaph. Je visitais mal la Ville Éternelle, et plus mal ses musées d'où je sortais écrasée et timide, rouée de chefs-d'œuvre (Colette,Gigi,1944, p. 217).
Empl. pronom. réciproque. V. indiqué ex. 1.
Rouer de coups de + subst. Rouer de coups de pied, de poing. Pour qu'il gardât la chose en mémoire, comme ils dirent, ils le rouèrent de coups de plat de sabre (Pourrat,Gaspard,1922, p. 238).
Rouer à coups de + subst. Est-ce qu'il ne s'avisa pas de rouer à coups de canne le cocher qui le ramenait? (Stendhal,Lamiel,1842, p. 174).
3. P. anal. ou au fig. Blesser, briser. Lorsque vous aurez une vengeance à exercer contre quelqu'un, vous pourrez rouer votre ami ou votre ennemi par une phrase insérée tous les matins à notre journal en me disant: Lousteau, tuons cet homme-là! Vous réassassinerez votre victime par un grand article dans le journal hebdomadaire (Balzac,Illus. perdues,1839, p. 329).En prison, ces hommes singuliers sont hommes par la dissimulation et par leur discrétion, qui ne cède qu'au dernier moment, alors qu'on les a brisés, roués, par la durée de la détention (Balzac,Splend. et mis.,1847, p. 550).
B. − Vx. [P. réf. aux roues d'un véhicule] Écraser sous les roues. J'avais pourtant promis à mon cocher vingt-cinq louis, s'il était assez adroit pour accrocher ce damné Sigognac et le rouer contre une borne comme par accident (Gautier,Fracasse,1863, p. 299).
C. − Vieilli. [Corresp. à roué (sous-vedette infra) II B et à rouerie] Tromper, abuser quelqu'un, en particulier une femme. Pourquoi cet homme est-il dans un hôtel et moi dans un garni..., se disait Contenson. Il a trois fois roué ses créanciers, il a volé, moi je n'ai jamais pris un denier (Balzac,Splend. et mis.,1844, p. 129):
Il y a au fond de moi, enfouie, toute prête, (...) l'ambition de prendre une femme qui en mérite la peine, de lui être impénétrable en paraissant m'abandonner à elle, de la rouer [it. ds le texte], comme disait le xviiiesiècle. Non que j'aime le mal et la souffrance, mais cela me paraît une supériorité flatteuse, de garder son masque dans l'amour, de ne paraître à la femme qu'un enfant et d'être son maître. Goncourt,Journal,1862, p. 1096.
Prononc. et Orth.: [ʀwe], (il) roue [ʀu]. Homon. roux. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol et Hist. A. 1. a) 1remoit. xives. part. passé « meurtri comme si le supplice de la roue avait été subi » (Dial. S. Grégoire, ms. Evreux, f o79c ds Gdf. Compl.: Qui les reins avoit desnouez Et si rompus et si rouez Que desuz ester ne peust); b) mil. xves. « subir le supplice de la roue » (Monstrelet, Chron., II, 253 ds Gdf. Compl.); c) 1648 rouer de coups (Scarron, Virgile Travesti, II, 106b ds Richardson, p. 246); 2. 1643 « écraser sous les roues d'une voiture » (Id., Recueil de quelques vers burlesques, 40, ibid.). B. 1829 « tromper » (Balzac, Chouans, p. 359: je suis trahie, trompée, abusée, jouée, rouée, perdue). A dér. de roue*, dés. -er; B prob. dér. de roué (sous-vedette infra) sens 3. Bbg. Landin (E.). Ét. sur les constr. de certains verbes exprimant la prière, la hâte et la nécessité en fr. Thèse, Uppsala, 1938, pp. 105-113.
STAT. Rouer1 et 2. Fréq. abs. littér.: 95.

ROUÉ, -ÉE, part. passé, subst. et adj.

ROUÉ, -ÉE, part. passé, subst. et adj.
I. − Part. passé de rouer2*.
II. − Subst. et adj.
A. −
1. Personne qui a subi le supplice de la roue. 50 feuilles à revoir, et elles m'arrivent avec la régularité des coups de barre qu'on donnait jadis aux roués (Balzac,Corresp.,1833, p. 436).Tous les suppliciés, foule morne et sanglante, (...) Roués meurtris et bleus, noyés aux chairs marbrées (Gautier,Albertus,1833, p. 179).
2. Adj., p. anal. Brisé de fatigue, de douleur. Longtemps encore il tint ses paupières closes, le corps roué, incapable du moindre mouvement (Genevoix,Avent. en nous,1952, p. 151).
B. −
1.
a) HIST. Les roués. Compagnons de plaisir du régent Philippe d'Orléans; ceux qui eurent la même conduite à cette époque. La débauche alors [sous Mazarin] était tout aussi monstrueuse qu'elle avait été au temps des mignons, ou qu'elle fut plus tard au temps des roués (Sainte-Beuve,Portr. femmes,1844, p. 6).
b) Vieilli. Personne sans principes et sans mœurs, notamment dans les relations amoureuses mais généralement de manières distinguées et spirituelles. La corruption, les mauvaises mœurs, les élégances de roué sont naturelles et ne s'apprennent pas (Chateaubr.,Mém., t. 2, 1848, p. 704).Ayant fait quelque impression sur une ou deux modistes, il se considérait comme un roué (Drieu La Roch.,Rêv. bourg.,1937, p. 226).V. insolence ex. 1.
Empl. adj. Je passe pour un homme (...) fort insensible, roué même, et je vois que j'ai été constamment occupé par des amours malheureuses (Stendhal,H. Brulard, t. 1, 1836, p. 13).
2. P. ext.
a) Personne rusée, sans scrupule, habile à tromper pour trouver son avantage. Ces roués de la Bourse, (...) ces hommes qui, depuis la révolution, ont érigé en principe qu'un vol, fait en grand, n'est plus qu'une noirceur, transportant ainsi, dans les coffres-forts, les maximes effrontées adoptées en amour par le dix-huitième siècle (Balzac,Marana,1833, p. 115).Oui, un petit roué, qui a abusé de votre bonté et comptait faire une excellente affaire en vous épousant (Duranty,Malh. H. Gérard,1860, p. 245).
Empl. adj. Un Luxembourg (...) tournant agréablement ses cupidités en railleries, roué, insolent, inhumain et fanfaron d'inhumanité (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t. 1, 1861, p. 327).Il est partout à la fois, naïf et cependant assez roué pour être toujours où je me trouve... (Miomandre,Écrit sur eau,1908, p. 64).[En parlant d'un animal] Elle lassera ses juges, les surmènera au cours des interminables audiences, les abandonnera recrus, comme une bête rouée promène des chiens novices (Colette,Vagab.,1910, p. 39).
Expr. Roué comme (une) potence. V. potence C arg.
[P. méton.] Leur fille était entre eux un lien, tout en faisant l'objet d'une rivalité sourde (...). L'enfant n'avait pas manqué de le sentir, avec la candeur rouée de ces petits êtres qui n'ont que trop de tendance à croire que l'univers gravite autour d'eux; et elle en tira parti (Rolland,J.-Chr., Amies, 1910, p. 1103).Rarement la parole humaine fut-elle plus éblouissante et plus rouée et sut-elle mieux couvrir et justifier l'insatiable désir (Guéhenno,Jean-Jacques,1950, p. 185).
b) Adj. et subst. (Femme) très expérimentée dans le domaine de l'amour. Elle devint une maîtresse exquise, naturellement spirituelle, et rouée à plaisir. Ç'eût été, à Paris, une courtisane de grand mérite (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Fen., 1883, p. 887). En se refusant, elle avait fouetté son désir, elle le rendait fou, capable de toutes les sottises. Une rouée, une fille de vice savant, n'aurait pas agi d'une autre façon que cette innocente (Zola,Bonh. dames,1883, p. 704).
c) Adj. [En parlant d'un artiste] Qui fait preuve d'une très grande habileté dans son art. Les petits poètes actuels de vingt ans me semblent tellement roués dans leur art qu'ils me semblent noués (Goncourt,Journal,1867, p. 329).Volontiers j'appellerais l'auteur du Reliquaire et des Récits et élégies le plus adroit, le plus roué de nos rimeurs (Lemaitre,Contemp.,1885, p. 84).V. adroit ex. 11.
Prononc. et Orth.: [ʀwe]. Ac. 1694: roué; 1718: roüé; dep. 1740: roué. Étymol. et Hist. 1. 1648 « homme qui a subi le supplice de la roue » (Scarron, Virgile Travesti, I, 68a ds Richardson, p. 246); 2. fig. 1690 « très fatigué » (Fur.); 3. 1remoit. xviiies. « débauché, digne du supplice de la roue, en faisant allusion aux compagnons de débauche du régent Philippe d'Orléans » (Saint-Simon, Mém., éd. Chervel et Regnier, t. 14, p. 209); 4. p. anal. 1780 « personne dont la conduite est désordonnée » (G. Mirabeau, Lettres, t. 4, p. 217); 5. 1833 « personne très rusée et peu scrupuleuse » (Balzac, loc. cit.). Part. passé adj. et subst. de rouer2*. Fréq. abs. littér.: 237. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 358, b) 428; xxes.: a) 353, b) 259.

Quelques définitions tirées au hasard dans le dictionnaire : 

·le trésor de la langue française, un dictionnaire français·